I. Droit commercial en général Algemeen handelsrecht Bruxelles (9me ch.) 24 avril 2014 R.G. : 2013/AR/1671 Mme M.-F. Carlier, M. H. Mackelbert et Mme C. Heilporn, conseillers, M.P. : M. C. Reineson, substitut du Procureur général Plaid. : Mes. D. Hantson loco M.-Ph. Tordoir c. L. Remacle loco E. Thiry et Ch. de la Vallée Poussin Agent immobilier Syndic d'immeuble Commerçant Vastgoedmakelaar Syndicus van een onroerend goed Handelaar La loi du 11 février 2013 organisant la profession d'agent immobilier ne prévoit pas que tout syndic d'immeuble est un agent immobilier ou que tout agent immobilier qui exerce la seule profession de syndic est nécessairement commerçant. L'agent immobilier est un commerçant parce qu'il réalise des opérations de négociations immobilières qui relèvent du courtage, soit des actes de commerce au sens de l'article 2 du Code de commerce. De wet van 11 februari 2013 houdende organisatie van het beroep van vastgoedmakelaar voorziet niet dat elke syndicus van een onroerend goed een vastgoedmakelaar is of dat elke vastgoedmakelaar die enkel het beroep van syndicus uitoefent, noodzakelijk handelaar is. Expert-comptable Déontologie autorisant le comptable d'être syndic de biens immobiliers Accountant Plichtenleer die de accountant toelaat om syndicus van onroerende goederen te zijn L'article 20 du Code de déontologie des expert-comptables autorise explicitement la possibilité pour le comptable d'être syndic de biens immobiliers, celui-ci est, de ce fait, exclu du champ d'application de la loi organisant la profession d'agent immobilier. Des opérations d'entreprise d'agences et bureaux d'affaires sont des actes de commerce au sens de l'article 2, alinéa 6 du Code de commerce. L'entreprise de bureau d'affaires gère les affaires d'autrui moyennant rémunération. La circonstance que la déontologie des comptables interdit toute activité commerciale ne porte pas atteinte au pouvoir des juridictions ordinaires de reconnaître la qualité de commerçant à toute personne qui remplit les conditions prévues pour acquérir ladite qualité fût-elle soumise à une discipline légalement organisée. Art. 20 van de Code van plichtenleer van de accountants laat de accountant expliciet toe om syndicus van onroerende goederen te zijn, waardoor deze uit het toepassingsgebied wordt gesloten van de wet houdende organisatie van het beroep van vastgoedmakelaar. Verrichtingen van ondernemingen van agentschappen en zakenkantoren zijn daden van koophandel in de zin van art. 2, zesde alinea W.Kh. De onderneming van zakenkantoor behartigt andermans zaken tegen vergoeding.
De omstandigheid dat de plichtenleer van de accountants elke handelsactiviteit verbiedt belet de gewone rechtbanken niet om de hoedanigheid van handelaar toe te kennen aan elke persoon die de voorziene vereisten vervult om die hoedanigheid te verwerven, zelfs zo de persoon onderworpen is aan een wettelijk georganiseerde plichtenleer. Expert-comptable Inscription à la Banque-carrefour des entreprises - Présomption de commercialité Gestion des affaires d'autrui - Entreprise d'agences et bureaux d'affaires - Réputée commerciale même lorsqu'elle concerne des opérations de nature civile Accountant Inschrijving in de Kruispuntbank van ondernemingen Vermoeden van commercialiteit Waarnemen van andermans zaken Onderneming van agentschappen en zakenkantoren Wordt als een daad van koophandel aangezien, zelfs indien ze handelingen van burgerlijke aard betreft L inscription à la Banque-carrefour des entreprises constitue une présomption juris tantum de commercialité, qu'il incombe dès lors à la personne inscrite de renverser. Il n'est pas contestable qu'en sa qualité de syndic, l appelante gère les affaires d'autrui. Même si elle le fait en qualité d'organe et de mandataire de l'association des copropriétaires et agit donc, dans ce cadre, au nom et pour le compte de copropriétés qui ont un objet civil, ceci n'exclut toutefois pas qu'elle ait, pour ce faire, développé une activité commerciale d'agent d'affaires en son propre nom. La qualité de la personne pour qui l'agent d'affaires agit ou la nature des actes qu'il accomplit pour celle-ci ne sont pas pertinentes pour l'appréciation du caractère commercial de son entreprise. Les entreprises d'agence d'affaires sont réputées commerciales même lorsqu'elles concernent des opérations de nature civile. De inschrijving in de kruispuntbank van ondernemingen vormt een vermoeden juris tantum van het handelaarschap, dat de ingeschreven persoon dienvolgens dient te weerleggen. Het staat onbetwistbaar vast dat appellante in haar hoedanigheid van syndicus andermans zaken behartigt. Zelfs zo ze dit doet in de hoedanigheid van orgaan en van lasthebber van de vereniging van mede-eigenaars en dus, in dit kader, handelt in naam en voor rekening van de mede-eigendommen die een burgerlijk karakter hebben, dan sluit dit nochtans niet uit dat ze, om dit te doen, in eigen naam een handelsactiviteit als zakenkantoor heeft opgezet. De hoedanigheid van de persoon voor wie het zakenkantoor optreedt of de aard van de handelingen die het stelt voor deze zijn niet van belang voor het vaststellen van de handelsaard van diens onderneming. De verrichtingen van zakenkantoren worden als daden van koophandel aangezien, zelfs indien ze burgerrechtelijke verrichtingen betreffen. (F M c. état belge, service public fédéral finances et Me. Ch. de la Vallée Poussin q.q.) [ ] III. Les faits et antécédents de la procédure
1. Mme F. exerce les professions de comptable et de syndic d'immeubles sous la dénomination «Eurocompta». Elle est inscrite à l'institut professionnel des Comptables et Fiscalistes agréés depuis le 1er juin 1993 et à la Banque Carrefour des Entreprises. Elle a été identifiée à la TVA pour des activités de comptable jusqu'au 25 novembre 2009 et l'est, depuis cette dernière date, pour des activités de location et exploitation de biens immobiliers résidentiels propres ou loués. 2. Par exploit du 2 avril 2013, l'etat belge fait citer Mme F. en faillite devant le tribunal de commerce de Bruxelles. Il fait état d'une créance TVA de 81.735,39 euro. Mme F. conteste sa qualité de commerçante. Par le jugement entrepris, le tribunal de commerce fait droit à la demande de l'etat belge et désigne Me de la Vallée Poussin en qualité de curateur. Mme F. interjette appel de cette décision et demande à la cour de rapporter la faillite. IV. Discussion 3. L'article 2 de la loi du 8 août 1997 sur les faillites dispose que tout commerçant qui a cessé ses paiements de manière persistante et dont le crédit se trouve ébranlé est en état de faillite (...). En vertu de l'article 1er du Code de commerce, sont commerçants ceux qui exercent des actes qualifiés de commerciaux par la loi et qui en font leur profession habituelle, soit à titre principal, soit à titre d'appoint. Les actes réputés commerciaux sont limitativement énumérés aux articles 2 et 3 du Code de commerce. Pour les personnes physiques, c'est l'activité effectivement exercée qui détermine la commercialité. La notion de commerçant s'apprécie de manière extensive et ce, notamment par une interprétation large des actes de commerce (Verougstraete, Manuel de la continuité des entreprises et de la faillite, éd. 2010, p. 324, n 3.1.2.4). 4. Mme F. exerce la double activité de comptable et de syndic d'immeubles. Il n'y a pas de contestation sur la nature civile des activités de comptable de Mme Fernandes-Da Costa. Celles-ci sont exercées dans le cadre d'une profession libérale exclue de la commercialité (A. Autenne et N. Thirion, «L'agent économique : du commerçant à l'entreprise?» in Chronique d'actualités en droit commercial, CUP 2013, vol.143, p. 19).
5. Mme F. soutient que ses prestations de syndic de copropriété sont également purement civiles puisqu'elle n'a effectué dans le cadre de celles-ci qu'une activité de «comptable/gestion financière et administrative». Selon l'etat belge, Mme F. est, en tant que syndic d'immeuble, agent immobilier et, à ce seul titre, commerçante. A tout le moins, elle accomplit, en sa qualité de syndic, des opérations d'entreprise d'agences et bureaux d'affaires au sens de l'article 2, alinéa 6 du Code de commerce. 6. La profession de syndic est effectivement réglementée dans le cadre des activités des agents immobiliers (cf. article 3 de la loi du 11 février 2013 organisant la profession d'agent immobilier et ancien article 3 de l'arrêté royal du 6 septembre 1993 protégeant le titre professionnel et la profession d'agent immobilier qui prévoyait qu'exerce l'activité professionnelle d'agent immobilier celui qui, d'une manière habituelle et à titre d'indépendant, réalise pour le compte de tiers la fonction de syndic de biens immobiliers en copropriété). Il s'en déduit uniquement que l'activité de syndic ne peut, en principe, être exercée par un agent immobilier, en qualité d'indépendant, à titre principal ou accessoire, sans être inscrit au tableau des titulaires de la profession ou sur la liste des stagiaires. Ni la loi du 11 février 2013 ni l'arrêté royal du 6 septembre 1993 ne prévoient en revanche que tout syndic d'immeuble est un agent immobilier ni que tout agent immobilier qui exerce la seule profession de syndic est nécessairement commerçant. En effet, il est considéré que l'agent immobilier est un commerçant parce qu'il réalise des opérations de négociations immobilières qui relèvent du courtage, soit des actes de commerce au sens de l'article 2 du Code de commerce. Il est toutefois constant et non contesté qu'en sa qualité de syndic, Mme F. ne pose aucun acte de courtage (cf. à cet égard l'attestation de son comptable - pièce 1 du dossier de Mme F.) mais se limite à des activités de gestion (notamment comptable) et d'administration telles que visées aux articles 577-2 et suivants du Code civil. Il est par ailleurs établi que Mme F.est inscrite au tableau de l'institut professionnel des Comptables et Fiscalistes agréés. Or, l'article 20 du Code de déontologie des expertscomptables autorisant explicitement la possibilité pour le comptable d'être syndic de biens immobiliers, celui-ci est, de ce fait, exclu du champ d'application de la loi organisant la profession d'agent immobilier (voy. article 4, alinéa 1er, 1 de l'arrêté royal du 6 septembre 1993 et article 7 de l'arrêté royal du 30 août 2013 relatif à l'accès à la profession d'agent immobilier). A l'instar de l'avocat qui peut également exercer la profession de syndic (cf. le Règlement de l'obfg du 13 avril 2004 relatif à l'avocat syndic d'une association de copropriétaires et Cass., 24 mars 2005, R.G. C.04.0383.F, J.T. 2005, p. 310), le comptable, qui exerce une telle activité, ne devient pas de ce seul fait commerçant (cf. pour l'avocat : Gand, 28 mars 2007, NjW. 2007, 519). 7. L'Etat belge soutient par ailleurs que Mme F. exercerait en sa qualité de syndic des opérations d'entreprise d'agences et bureaux d'affaires au sens de l'article 2, alinéa 6 du Code de commerce.
L'entreprise de bureau d'affaires gère les affaires d'autrui moyennant rémunération (Van Ryn et Heenen, Principes de droit commercial, T. I, 2ème éd., n 380 ; Traité pratique de droit commercial, T., I, p.69 ; Cass., 12 mars 1981, Pas., I, 759). «L'appel au public, la dépendance à l'égard de la clientèle, le souci de rendement le meilleur caractérisent l'agent d'affaire» (Van Ryn et Heenen, loc.cit.). Cette catégorie recouvre notamment «les activités d'agences matrimoniales, d'agences de recherches généalogiques, d'auto-écoles, de conseillers juridiques, de conseillers fiscaux, de conseillers comptables etc... Cette catégorie est à ce point large qu'elle serait susceptible d'accueillir les activités d'avocats, si ce n'est que...traditionnellement ces dernières activités ne sont pas considérés comme des actes de commerce parce qu'étant le fait d'une profession libérale» (B. Michaux, Les titulaires des professions libérales : ni vendeurs ni commerçants, RDC 1996, p.604 et s., n 6/a). La circonstance que la déontologie des comptables interdit toute activité commerciale ne porte pas atteinte au pouvoir des juridictions ordinaires de reconnaître la qualité de commerçant à toute personne qui remplit les conditions prévues pour acquérir ladite qualité fût-elle soumise à une discipline légalement organisée (Cass., 9 octobre 1975, Pas. 1976, I, 169 rendu à propos d'un architecte dont la qualité de commerçant a été reconnue en se fondant sur des éléments autres que l'activité normale de l'architecte et débordant du cadre de celle-ci). Mme F.est inscrite à la Banque-carrefour des entreprises. Cette inscription constitue une présomption juris tantum de commercialité (article 33, 2 de la loi du 16 janvier 2003 portant création d'une Banque-carrefour des entreprises, et résultant de l'immatriculation au registre du commerce ou à la Banque-carrefour), qu'il incombe dès lors à Mme F. de renverser. Il n'est pas contestable qu'en sa qualité de syndic, Mme F. gère les affaires d'autrui (les copropriétés). Certes, elle le fait en qualité d'organe et de mandataire de l'association des copropriétaires et agit donc, dans ce cadre, au nom et pour le compte de copropriétés qui ont un objet civil. Ceci n'exclut toutefois pas qu'elle ait, pour ce faire, développé une activité commerciale d'agent d'affaires en son propre nom. Au demeurant, la qualité de la personne pour qui l'agent d'affaires agit ou la nature des actes qu'il accomplit pour celle-ci ne sont pas pertinentes pour l'appréciation du caractère commercial de son entreprise. Les entreprises d'agence d'affaires sont réputées commerciales même lorsqu'elles concernent des opérations de nature civile (G. Ballon, Daden van koophandel, in X., Handels- en economisch recht, Deel 1, Kluwer, 2011, p. 180, n 188; L. Fredericq, Traité, 1946, T. 1, p. 94 et plus spécifiquement sur l'activité civile consistant dans la gérance d'immeubles : C. Del Marmol, «Commerce - Commerçant», R.P.D.P. Complément, T. V, Bruylant, 1977, p. 312, n 53). Le but de lucre est par ailleurs clairement présent puisqu'elle facture ses prestations et a fait de ses activités de syndic partiellement sa profession. La circonstance que les honoraires facturés dans le cadre de ses activités de «syndic d'immeubles» ne sont pas soumis à la TVA (pièce 17 de son dossier), contrairement aux prestations comptables (pièce 2 du dossier), est sans pertinence. Dans le cadre de ses prestations de syndic et comme rappelé ci-dessus, Mme F. agit en effet en qualité d'organe de l'association des copropriétaires et n'est dès lors pas, pour ce motif, assujettie à la TVA (cf. la circulaire TVA n 95/013 ; G. Carnoy, L'ACP, le syndic et la TVA, in Carnet de route en droit immobilier, htttp://gillescarnoy.be/2012/11/07/lacp-le-syndic-et-la-tva).
Pour contester l'existence d'une organisation commerciale, Mme F. soutient qu'elle ne dispose pas de bureau ouvert au public et qu'elle n'a pas attiré ce public au moyen de publicité. Il ressort toutefois en l'espèce des éléments soumis à la cour que Mme F. exerce sa profession de syndic pour une clientèle qui ne peut être qualifiée de restreinte puisqu'au cours des années 2012 et 2013 elle a facturé des honoraires de gestion trimestriels à pas moins de 31 copropriétés différentes (cf. pièce 17 de son dossier). Une telle clientèle démontre non seulement un souci de rentabilité mais implique également l'existence d'une organisation commerciale laquelle est d'ailleurs avérée en l'espèce, d'une part, par la présence du mobilier et du matériel informatique qui a été constatée lors d'une saisie pratiquée dans les bureaux de Mme F.(4 bureaux et 5 ordinateurs saisis - cf. pièce 9 de l'etat belge) et, d'autre part, par le recours à des procédés publicitaires puisque Mme F. s'est répertoriée auprès d'infobel sous la rubrique «Offices et gestion d'immeubles» et offre ainsi ses services à qui veut bien les lui confier. C'est sans pertinence qu'elle se réfère à une jurisprudence de la Cour de cassation en matière de précompte immobilier qui est totalement étrangère au cas d'espèce. Il se déduit dès lors des considérations qui précèdent, non pas, comme l'a décidé le premier juge, que toutes prestations de syndic sont «indubitablement des activités commerciales» mais qu'eu égard aux circonstances propres à l'espèce, Mme F. exerce son activité de syndic en qualité d'agent d'affaires et partant de commerçante. [ ] V. Dispositif Pour ces motifs, la cour, Reçoit l'appel mais le dit non fondé ; [ ]