DEPARTEMENT DES SCIENCES FONCTIONNELLES PHYSIOPATHOLOGIE Rue Tudor Vladimirescu, 14 300173 Timi oara, Tel/Fax: +40 256 493085 Année universitaire 2014-2015 COURS 5 PHYSIOPATHOLOGIE DE LA DOULEUR PLAN DU COURS: I. L apppareil sensoriel de la douleur II. La modulation de la douleur III. La sensibilité douloureuse IV. Types de douleur La douleur est un mécanisme de protection NON-SPECIFIQUE, représentant le symptôme le plus commun des états pathologiques. Elle apparaît chaque fois dans le cas d un tissu lésé, en déterminant le sujet d actionner pour l éloignement du stimulus douloureux. L Association Internationale pour l Étude de la Douleur a définit la douleur (1979) comme une expérience sensorielle et emotionnelle désagréable déterminée par un stimulus nocif ou potentiellement nocif. I. L APAREIL SENSORIEL DE LA DOULEUR A. Les récepteurs pour la douleur (nocicepteurs) Définition: Les nocicepteurs sont des terminaisons nerveuses libres ayant l origine dans les ganglions atachés aux fibres sensitives des nerfs spinaux et crâniens (n.v). Classification: fibres myéliniques minces de type A- : à une distribution exclusivement superficielle (derme, hypoderme) fibres amyéliniques de type C: à une distribution prédominante profonde, tant au niveau des structures somatiques (muscles, tendons, ligaments, artiulations), qu au niveau des viscères Caractéristiques font partie de la catégorie des récepteurs polymodaux, qui répondent aux stimuli mécaniques, thermiques et chimiques sont des récepteurs toniques qui NE s adaptent pas ou s adaptent très peu (déchargent des potentiels de récepteur tant que le stimulus douloureux actionne). Les stimuli douloureux (algogènes): les stimuli capables d induire des lésions tissulaires les stimuli de nature MÉCANIQUE: la pression intense sur le tégument, la contraction violente ou l extension extrème du muscle, les ruptures, les piqûres, la traction, le compression, la distension de la capsule des viscères les stimuli de nature THERMIQUE: les variations extrèmes de température les stimuli de nature CHIMIQUE (les nocicepteurs font partie de la catégorie des chimiorécepteurs) - sont des substances libérées des tissus lésés, ischémiés ou enflammés. De celles-ci, les plus importantes sont: 1
les amines biogènes - bradikinine (BK) les dérivés de l acide arachidonique - PGE 2 produits des lésions cellulaires - K +, H + neuropeptides la substance P (SP) libérée du niveau des fibres C B. Les voies de conduction nociceptives (a) La voie ascendente - extranevraxiale Comprend les dendrites et les axones des protoneurones du ggl.sensitif ataché aux nerfs spinaux, en représentant les fibres de type A- et de type C, qui pénètrent par la racine postérieure des nerfs spinaux et font synapse avec le deutoneurone de la voie nociceptive de la lamine V des cornes postérieures. Les fibres A- des fibres myéliniques minces (diamètre = 6 m) à grande vitesse de conduction (10-30 m/s) se terminent dans la lamine I (lamina marginalis) des cornes postérieures et par des axones courts font synapse avec le deutoneurone de la lamine V conduisent la douleur RAPIDE Les fibres C des fibres amyéliniques (diamètre 2 m) à petite vitesse de conduction (0,5 2,5 m/s) se terminent dans les lamines II i III (la substance gélatineuse) des cornes postérieures et par des axones courts font synapse avec le deutoneurone de la lamine V conduisent la douleur LENTE (b) La voie ascendente - intranevraxiale Comprend les axones des deutoneurones des cornes postérieures, qui s entrecroissent et pénètrent dans les cordons latéraux du côté opposé et puis montent vers le troisième neurone de la voie nociceptive, situé dans le thalamus. Les fibres nociceptives intranevraxiales sont grupées dans le tractus néospinothalamique et paléospinothalamique qui font partie du système ascendent des cordons antéro-latéraux (Fig. 1). L AIRE SOMESTHESIQUE I Complexe ventropostérieur thalamique THALAMUS SYSTÈME LIMBIQUE CORTEX D ASSOCIATION Noyaux thalamiques intralaminaires HYPOTHALAMUS Douleur rapide Douleur lente La formation réticulée LE SYSTÈME DES CORDONS ANTÉRO-LATÉRAUX Figure 1. Les voies nociceptives intranevraxiales (Adaptée après Guyton and Hall, Textbook of Medical Physiology,2006) 2
1. Le tractus NÉO-SPINOTHALAMIQUE conduit les informations transmises par les fibres A- (douleur rapide) comprend les axones des deutoneurones de la lamina marginalis qui font synapse dans le thalamus latéral (le complexe ventro-postérieur thalamique) les fibres thalamiques se projettent dans l aire somesthésique I pariétale la projection corticale est commune à la voie de la sensibilité tactile fine (les tractus spino-bulbaires qui projettent dans l aire somésthésique I les informations reçues des fibres A- ), transmises des récepteurs tactiles par le système ascendent des cordons dorsaux assure la précision de la localisation et la perception de l intensité et de la qualité de la douleur rapide. Conclusion: La douleur rapide (les fibres A- ) est une douleur bien localisée Les informations transmises par le tractus néo-spinothalamique assurent la perception sensorielle nociceptive 2. Le tractus PALÉO-SPINOTALAMIQUE c est une voie multisynaptique qui conduit les informations transmises par les fibres C (douleur lente). la plupart des fibres finissent dans le thalamus médial (les noyaux intralaminaires) et la formation réticulaire (SRAA et les noyaux végétatifs) a) les axones des neurones des noyaux intralaminaires se projettent dans le cortex d association, le système limbique et dans l hypothalamus. la projection des fibres thalamiques médiales dans le cortex d association est responsable pour l expérience sensorielle nociceptive (la signification de la douleur) la projection dans le système limbique détermine la réaction affectiveémotionnelle associée à la douleur la projection dans l hypothalamus est responsable pour la réaction végétative associée à la douleur b) la projection corticale diffuse des axones des neurones de la formation réticulaire (SRAA) induit l état de réveil et d alerte corticale et détermine l anxiété et l insomnie qui accompagnent la douleur une petite partie des fibres ascendentes du tractus paléo-spinothalamique font synapse dans le complexe ventro-postérieur thalamique et se projettent au niveau de l aire somesthésique I Conclusion: La douleur lente (fibres de type C) est une douleur faiblement localisée les informations transmises par le tractus paléo-spinothalamique assurent l expérience sensorielle nociceptive la perception affective émotionnelle de la douleur II. LA MODULATION DE LA DOULEUR La modulation de la douleur consiste dans la facilitation ou l inhibition de la transmission de l excitation nociceptive par des mécanismes périphériques (modulation périphérique) et/ou centraux (modulation centrale). 3
1. La modulation PÉRIPHÉRIQUE - La sensibilisation périphérique des nocicepteurs Définition: représente un mécanisme de facilitation de la transmission de l excitation nociceptive par la persistence des lésions inflammatoires ou irritatives au niveau d un tissu péripherique. Mécanisme PATHOGÉNIQUE: la baisse du seuil d excitation des nocicepteurs - par la libération prolongée des facteurs algogènes: - la bradykinine (sourse: endothélium) - PGE 2 (source: endothélium et mastocytes) - H + et K + (source: celluled détruites) - substance P (source: les terminaisons nerveuses libres de type C dans l inflammation neurogène) l activation des nocicepteurs silencieux aux stimuli mécaniques inofensifs - les terminaisons nerveuses libres ayant le rôle de mécanorécepteurs deviennent sensibles dans la présence de l inflammation à l activité mécanique normale des viscères. Par ex., les mouvements péristaltiques de l intestin deviennent douloureux (coliques intestinales) dans les maladies inflammatoires intestinales. À retenir! L excitation prolongée des fibres nociceptives C, comme résultat d une lésion tissulaire persistente détermine la libération rétrograde (par réflexe d axone) de la substance P, qui: - détermine la dégranulation des mastocytes et la libération de l histamine - détermine la libération du niveau des cellules endothéliales des médiateurs responsables pour la vasodilatation et l augmentation de la perméabilité capillaire (NO, bradykinine). Conséquence: une réaction inflammatoire locale appellée inflammation neurogène qui sensibilise les nocicepteurs par un mécanisme périphérique 2. La modulation CENTRALE Définition: C est le mécanisme par lequel est facilitée ou inhibée la transmission de l excitation au niveau des synapses entre le premier et le deuxième neurone de la voie nociceptive. Au niveau de ces synapses, le principal neurotransmetteur est le glutamate (GLU), libéré des vésicules du bouton présynaptique (protoneurone) à cause de l augmentation de la concentration du Ca 2+ cytosolique. Le GLU peut se fixer sur 2 types de récepteurs du niveau de la membrane post-synaptique (deutoneurone)(fig. 2): rec. AMPA ( -Amino-hidroxi-Metil-izoxazol-Propionic Acid) un récepteur-canal ionique de Na + rec. NMDA (N-metil-D-aspartat) un récepteur-canal ionique de Na +, Ca 2+ et Mg 2+ qui nécessite pour activation la dépolarisation prolongée de la membrane post-synaptique. 4
Dépolarisation de courte durée Dépolarisation prolongée Figure 2. Les récepteurs postsynaptiques du glutamate (Modifiée après Robert C. Malenka, et al. Long-Term Potentiation: A Decade of Progress? Science: 1999; 285, 1870) (a) La sensibilisation au niveau spinal Mécanisme PATHOGÉNIQUE Un stimulus douloureux à durée et intensité petite détermine la libération de GLU dans la fente synaptique. Celui-ci actionne sur les réc.ampa et détermine une dépolarisation post-synaptique de courte durée par influx de Na +. Un stimulus douloureux à durée et intensité grande (stimulus généré par un nocicepteur sensibilisé périphérique) suppose la libération dans la fente synaptique de GLU et de substance P. La substance P a le rôle d un cotransmetteur - La SP actionne sur les réc. NK1 (neurokinine 1) du niveau post-synaptique et génère un influx supplémentaire de Na + - Le GLU actionne sur les réc. AMPA et détermine un influx de Na + postsynaptique de courte durée Conséquence: La dépolarisation post-synaptique prolongée par l action simultanée du GLU et de la SP, permet: - l activation des réc. NMDA par GLU - la facilitation de la transmission synaptique à la base d un influx massif de Na +, Ca 2+ et Mg 2+ post-synaptique (b) La théorie de la porte de contrôle Conformément à cette théorie la porte, représentée par la synapse entre le protoneurone et le deutoneurone de la voie nociceptive, a une dynamique contrôlée par les interneurones inhibiteurs opiatergiques nommés cellules G. Ces cellules, situées dans la lamine II et III (substance gélatineuse), ont comme neurotransmetteur des enképhalines qui exercent un effet d inhibition présynaptique de la transmission de l exitation au niveau de la porte de contrôle. Les cellules G reçoivent deux types d afférences du niveau des récepteurs périphériques (Fig. 3): fibres myélinisées de type A- (vitesse augmentée) qui desservent les récepteurs tactiles (Meissner i Merkel) et qui ferment la porte par l augmentation de la fréquence de décharge des cellules G fibres amyéliniques de type C (vitesse baissée) qui conduisent l exitation douloureuse et qui ouvrent la porte par la baisse de la fréquence de décharge des cellules G 5
À retenir! La théorie de la porte de contrôle explique l apparition de l hyperalgésie dans les conditions de la stimulation continue des fibres C et/ou de la perte sélective des fibres A- quand la porte de contrôle est maintenue ouverte les effets bénéfiques du traitement physique de la douleur par massage, acupuncture ou stimulation électrique nerveuse transcutanée quand la porte de contrôle est fermée par la stimulation des fibres A-. LE SYSTEME DES CORDONS ANT.-LAT DEUTONEURONE LE SYSTEME DES CORDONS POST. DEUTONEURONE CELLULE G CELLULE G FIBRES C FIBRES C FIBRES A-beta Noci Réc TRANSMISSION NON-MODULÉE Mécano Réc TRANSMISSION MODULÉE Figure 3. La modulation centrale de la douleur La théorie de la porte de contrôle (Modifiée après http://www.d.umn.edu) (c) L inhibition au niveau spinal Elle est assurée par le SYSTÈME DESCENDANT ANTINOCICEPTIF et médiée par les NEURONES INHIBITEURS INTERCALAIRES OPIATERGIQUES du niveau des cornes postérieures de la moelle épinière. Le SYSTÈME DESCENDANT ANTINOCICEPTIF - a l origine dans le centre de l analgésie endogène localisé dans la substance grise péri-apéductale (autour de l aqueducte de Sylvius) et a les suivantes caractéristiques: reçoit les informations nociceptives du système limbique, de l hypothalamus et de la formation réticulaire inhibe la conduction de l excitation nociceptive au niveau spinal par l activation des neurones intercalaires inhibiteurs opiatergiques par l intermède du noyau magnus du raphé médian et du noyau réticulaire paragigantocellulaire o le noyau magnus du raphé médian comprend les neurones sérotoninergiques (neurotransmetteur: la sérotonine) o le noyau réticulaire paragigantocellulaire comprend les neurones adrénergiques (neurotransmetteur: la noradrénaline) Les NEURONES INHIBITEURS INTERCALAIRES OPIATERGIQUES du niveau des cornes postérieures de la moelle épinière: 6
expriment des récepteurs tant pour la sérotonine (rec. 5-HT), que pour la noradrénaline (rec. 2-adrénergiques) aussi libèrent des enképhalines qui, par l intermédiaire des récepteurs opioïdes (spécialement du type ), inhibent la transmition de l excitation au niveau de la synapse entre le premier et le deuxième neurone de la voie nociceptive Les mécanismes de l inhibition au niveau spinal L inhibition présynaptique représente la baisse de la libération de GLU dans la fente synaptique par la baisse de l influx de Ca 2+ dans le bouton pré-synaptique L inhibition postsynaptique représente l hyperpolarisation de la membrane postsynaptique par l activation des canaux de K + (efflux de K + ) de la membrane postsynaptique À retenir! La stimulation du système descendant antinociceptif explique: l effect analgésique de l administration d amitriptiline (antidépresseur tricyclique) qui baisse la recaptation présynaptique de la sérotonine du niveau du noyau magnus du raphé médian l effet de potentialisation des analgésiques opioïdes par la Clonidine (agoniste spécifique des récepteurs 2 adrénergiques centraux) qui stimule la libération de la noradrénaline du niveau du noyau réticulaire paragigantocellulaire. III. LA SENSIBILITÉ DOULOUREUSE 1. Les paramètres de la sensibilité douloureuse Le seuil de la sensibilité douloureuse Représente l intensité minimale à laquelle les stimuli sont perçus comme douleur = le seuil de la perception sensorielle. Le seuil de tolérance à la douleur Représente la durée ou l intensité de la douleur maximale qu une personne peut supporter = le seuil de la perception affective émotionnelle. Il varie d une personne à l autre et à la même personne dans le temps. Le seuil de tolérance à la douleur: baisse par la répétition de l exposition à la douleur, en cas de fatigue et de privation de sommeil augmente par médication, consommation d alcool, hypnose, activités qui détournent l attention, le désir du patient de vaincre la maladie. 2. Troubles de la sensibilité douloureuse L hyperalgésie Définition: Est définie comme la sensation de douleur d intensité beaucoup plus grande que l intensité du stimulus douloureux. C est le résultat d un mécanisme de sensibilisation PÉRIPHÉRIQUE et/ou CENTRALE Classification étiopathogénique: périphérique lésions au niveau du SNP de type névralgique: l irritation/la compression des fibres sensitives du nerf périphérique 7
de type causalgique: la lésion/la désafférentation des fibres sensitives du nerf périphérique de type myalgique: hyperexcitabilité neuro-musculaire secondaire à la lésion des fibres sensitives du nerf périphérique centrale - lésions au niveau du SNC lésions spinales (cordons post.-latérales) lésions thalamiques (syndrome thalamique post. latéral Dejerine-Roussy) L hypoalgésie/l analgésie Définition: Représente la réduction/suppression de la sensation douloureuse Classification étiopathogénique: acquise (traumatismes, infections neurologiques, etc.) congénitale ( indifférente par mécanisme central ou insensible par mécanisme périphérique) L allodynie Définition: Représente la sensation de douleur produite par des STIMULI NON- DOULOUREUX comme suite des mécanismes de sensibilisation périphérique ou centrale Caractéristiques: déclenchée par l exitation mécanique ou thermique de certains points trigger dans des situations comme: le toucher du linge, pendant la douche, l exposition au vent, etc. accompagne l hyperalgésie de la douleur neuropathique IV. TYPES DE DOULEUR 1. En fonction de la COMPOSANTE ALGOGÈNE La douleur peut être: nociceptive (vraie) par excès de nociception (hyperstimulation des fibres nerveuses sensitives qui transmettent le message nociceptif) neurogène (neuropathique) par la modification du processus de transmission et/ou contrôle du message nociceptif dans des lésions nerveuses périphériques ou centrales psychogène - par somatisation, sans substrat organique (a) La douleur nociceptive Cause: Est declenchée par l action d un stimulus nociceptif connu au niveau d un tissu périphérique Mécanisme pathogénique: l hyperstimulation des nocicepteurs périphériques sensibilisation PERIPHERIQUE Caractéristique : la douleur est intense ( vive ) et bien localisée. (b) La douleur neurogène (neuropathique) Cause: les lésions nerveuses centrales (lésions médulaires) ou périphériques (neuropathies, névralgies) 8
Mécanisme pathogénique: l hyperexitabilité des cellules corticales désafférentées et l affectation du système endogène analgésique. Types de douleur neuropathique la névralgie la causalgie la causalgie - apparaît dans les lésions partielles des nerfs périphériques qui contiennent des fibres sensitives somatiques (ex: la neuropathie diabétique, éthanolique, toxique, médicamenteuse, etc) et dans les lésions des fibres végétatives ou moteurs. Se manifeste par une douleur continue, à caractère de brûlure, et l'apparition de certains troubles vasomoteurs (vasodilatation) et trophiques musculaire qui dépassent le territoire desservi par le nerf lésé. S accompagne de l allodinie. la névralgie - apparaît par l'«irritiation» des fibres sensitives somatiques d'un nerf spinal périphérique (ex: la névralgie postherpétique ou le zona zoster) ou crânien (ex: la névralgie trigéminale) et elle est caractérisée par des attaques paroxystiques de douleur aiguë, sous forme de piqûre, systématisés (qui ne dépassent pas les dermatomes desservis par le nerf lésé). S accompagne de l allodinie. 2. En fonction de l'évolution (a) La douleur aiguë C'est la douleur d'une durée < 3-6 mois, à apparition brusque, récente, qui est bien localisée et associée toujours à une lésion primaire qui peut être: une maladie aiguë, un traumatisme aigu, une intervention chirurgicale, une manoeuvre thérapeutique, etc. Le tableau clinique dans la douleur aiguë est dominé par la réaction végétative de type sympatique ( fight or flight ) manifestée par: tachycardie, hypertension artérielle, mydriase, transpirations, etc. La réaction affective-émotionnelle est intense et suppose l'anxiété et l'agitation. La douleur aiguë disparaît une fois la lésion primaire éloignée mais elle peut être intensifiée, à 2-3 jours après sa production, à la suite de la sensibilisation périphérique des nocicepteurs par un processus inflammateur local. Elle répond bien aux analgésiques habituels. (b) La douleur chronique C'est la douleur d'une durée > 3-6 mois, à apparition continue ou intermittente, et qui devient de plus en plus faiblement localisée. Elle peut exister même dans l'absence de la lésion primaire qui, quelquefois, ne peut plus être identifiée. Le mécanisme pathogénique est la sensibilisation périphérique, en cas d'affections chroniques musculo-squelettiques et viscérales, et la sensibilisation centrale (hyperexitabilité corticale par «désafférentation» et l'affectation du système endogène analgésique) en cas d'affections du nerf périphérique. Le tableau clinique est dominé par la réaction affective émotionnelle caractérisée par dépression, irritabilité, troubles du sommeil et du comportement, tandis que la réaction végétative est d'habitude absente. L'évolution de la douleur est variable (peut s'accentuer ou peut diminuer). La douleur chronique répond bien au traitement aux antidépresseurs tricycliques et anticonvulsivants. 9
3. En fonction de la LOCALISATION (a) La douleur superficielle C'est la douleur déclenchée par les stimuli algogènes représentés par tout facteur mécanique, thermique ou chimique qui produit des lésions au niveau des téguments et des tissus sous-cutanés. Elle est transmise par les fibres nociceptives, prédominant de type A- («douleur rapide»). C'est une douleur précisément localisée au niveau des dermatomes (le territoire cutané desservi par un segment médullaire) Ne s'accompagne pas de phénomènes végétatifs. La composante affective est faible. (b) La douleur profonde C'est la douleur déclenchée par les stimuli algogènes de nature somatique et viscérale. Les stimuli algogènes du niveau musculaire peuvent être: l'ischémie (la claudication intermittente), la rupture des tissus de liaison, la nécrose, les hémorragies, l'injection de solutions hypo- ou hypertoniques, la contracture musculaire. Les stimuli algogènes du niveau articulaire sont le résultat de l'inflammation de la membrane synoviale, du périoste, des tendons et des ligaments, ou de la capsule articulaire. Les stimuli algogènes du niveau viscéral peuvent avoir l origine dans: le myocarde l ischémie l appareil digestif la lésion/la congestion de la muqueuse, la distension de la capsule des organes parenchymateux, la distension des organes cavitaires, le spasme de la musculature lisse, la traction des mésos ou des vaisseaux les arthères piqûre, incision, inflammation, traction, pulsations excéssives, obstruction athérosclérotique séreuses: inflammation, friction, traction, compression. Les fibres nociceptives, en nombre réduit et avec des ramifications extensives, sont exclusivement de type C ( douleur lente ). La douleur profonde est faiblement localisée et a un caractère diffus à cause de la superposition des territoires viscéraux desservis par les segments médullaires joints (la précision de la localisation est d au moins 2-3 segments médullaires). La douleur profonde s accompagne de phénomènes végétatifs. La composante affective est intense. Les types particulaires sont la douleur irradiée et la douleur pariétale. 1. La douleur IRRADIÉE C est le déplacement SPATIAL de la douleur de la zone de la lésion qui la produit. Les types de douleur irradiée sont la douleur référée et la douleur projetée. a. La douleur viscérale référée C est une erreure de localisation CORTICALE de la douleur viscérale avec son déplacement du PROFONDEUR vers la SURFACE, au niveau des dermatomes. La cause c est la même origine embryonnaire des dermatomes et des viscères. Le même segment spinal dessert la structure viscèrale (le siège de la douleur) et aussi le tégument (le siège de l irradiation). Le tégument (fibres A- ) a une représentation corticale plus EXACTE que la structure viscérale (fibres C). Le cerveau ne peut pas localiser avec précision la 10
source viscérale de la douleur et détermine la perception de la douleur viscérale comme DOULEUR CUTANÉE. Par exemple, les fibres nociceptives qui desservent le coeur et les dermatomes du niveau du cou et du thorax supérieur ont la même origine au niveau des segments médullaires C3- T5. Ainsi, la localisation typique de la douleur angineuse, produite par l ischémie du myocarde, est référée dans la partie gauche du thoras supérieur, le ventricule gauche étant plus fréquemment affecté. Un autre exemple est constitué par les fibres nociceptives qui desservent l appendice vermiforme et les dermatomes de la région épigastrique et péri-ombilicale. Ceux-ci ont l origine commune au niveau des segments médullaires T10-L1, ainsi que la douleur viscérale déterminée par l inflammation de l appendice (l appendicite) est référée dans la région épigastrique et péri-ombilicale. b. La douleur viscérale projetée C est une erreur de localisation de la douleur somatique produite par l irritation proximale des troncs nerveux du niveau de la zone PROXIMALE vers la zone DISTALE, au niveau des dermatomes, qui contiennent des fibres sensitives du nerf (ex., l irritation proximale du tronc du nerf sciatique, à la suite d une discopathie lombaire, détermine la projection de la douleur dans le membre inférieur, au niveau des dermatomes desservis par les fibres sensitives du nerf sciatique). 2. La douleur PARIÉTALE La plèvre, le péricarde et le péritoine présentent une innervation différente au niveau du feuillet viscéral et pariétal. La lésion de ces séreuses (inflammation, traumatisme) déclenche deux types de douleur: la douleur viscérale profonde, faiblement localisée et référée en cas de la lésion du feuillet viscéral qui a l innervation des viscères profonds la douleur pariétale intense, localisée, en cas de la lésion du feuillet pariétal qui a une innervation riche, rapprochée à celle des structures somatiques de la paroi thoracique et abdominale Par exemple, un processus inflammatoire ayant pour point de départ l appendice (l appendicite) qui affecte initialement seulement le feuillet viscéral du péritoine déclenchera au début une douleur référée dans la région épigastrique et péri-ombilicale. Lorsque le processus inflammatoire intéresse aussi le feuillet pariétal du péritoine, apparaît la douleur pariétale localisée au niveau de la fosse iliaque droite. Lorsque le processus inflammatoire irrite aussi les fibres nociceptives somatiques de la paroi abdominale apparaîtra la rigidité musculaire permanente, irréductible et douloureuse des muscles abdominaux comme expression d un réflexe nociceptif local (la défense musculaire ou le ventre de bois ). 11