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JEÛNE PRÉOPÉRATOIRE Michel Carles, Marc Raucoules-Aimé Département d Anesthésie-Réanimation Ouest - Hôpital Archet 2 - CHU Nice INTRODUCTION Depuis que Mendelson a souligné le risque d inhalation du contenu de l estomac au cours de l anesthésie [1], le jeûne préopératoire est l un des principes majeurs d une prise en charge pré anesthésique adaptée. L objectif en est la prévention de la pneumopathie d inhalation, évènement rare survenant avec une fréquence de l ordre de 1,4 à 4,7 pour 10 000 anesthésies et entraînant une mortalité imputable de 0,1 à 0,2 pour 10 000 [2-4]. Pour cela, suite aux travaux de Mendelson, la règle du jeûne préopératoire strict à partir de minuit la veille de l intervention a été mise en place («nihil per os» : NPO). Depuis une quinzaine d année, le débat s est amplifié pour remettre en cause cette règle qui ne tient, en particulier, pas compte des variations de vitesse de la vidange gastrique selon les aliments (solides ou liquides) [5, 6]. Le propos de ce texte est d exposer les conditions associées au risque d inhalation peropératoire et de préciser les recommandations actuelles qui peuvent être formulées sur le jeûne préopératoire. 1. RISQUE D INHALATION : ÉLÉMENTS DÉTERMINANTS 1.1. VIDANGE GASTRIQUE A l état physiologique la vidange de liquides clairs est rapide avec une demivie dans l estomac de 12 minutes pour l eau et les solutés cristalloïdes et une vidange complète en moins de 2 heures [7, 8]. Les aliments solides ont une vidange complète dans un délai supérieur à 3 heures dans les conditions physiologiques [9]. Le volume gastrique après un jeûne de plusieurs heures est en moyenne de 10 à 30 ml sans excéder 120 ml [9-11]. Seulement 3 % des patients ont un estomac complètement vide après un jeûne prolongé [12]. Plusieurs situations cliniques peuvent ralentir la vidange gastrique, en particulier le diabète [13], l insuffisance rénale chronique [14], le tabagisme [15] ainsi que de nombreuses autres pathologies (ulcère gastrique, maladie cœliaque, maladie de Parkinson, lupus, pathologies thyroïdiennes.) [16]. L impact de l obésité sur

32 MAPAR 2005 la vidange gastrique de jeûne reste controversé : certains auteurs retrouvant une vidange gastrique supérieure à celles des patients de poids normal après un peu plus de 6 heures (et donc un résidu gastrique moindre) [17] alors que d autres travaux concluent à un retard moyen de 33 minutes de cette vidange gastrique chez l obèse (et donc un délai prolongé d obtention d une vidange gastrique «complète») [18]. Enfin, il faut noter que l anxiété liée à la période préopératoire ne semble pas avoir de retentissement sur la vidange gastrique [9, 19]. Les opiacés ont un effet d allongement du délai de vidange gastrique, démontré depuis 30 ans et dont le mécanisme à la fois central et systémique est discuté [20-22]. Ainsi en conditions physiologiques pour une vidange gastrique complète, l ingestion de liquides clairs est sans conséquence après un délai maximal de 2 heures et l ingestion d aliments solides justifie un jeûne d au moins 4 heures et souvent bien supérieur selon la nature lipidique des aliments [23]. L obésité nécessite certainement un allongement de la période minimale de jeûne nécessaire de même que le recours aux opiacés en prémédication. 1.2. ANTIÉMÉTIQUES / ANTIACIDES / STIMULANTS GASTRO-INTESTINAUX Leur emploi vise une amélioration de la vidange gastrique ou du risque de reflux afin de réduire le risque d inhalation ou ses conséquences. Leurs propriétés pharmacodynamiques sont validées (par ex. le métoclopramide améliore d environ 25 %, l érythromycine de 26 à 43 % la vidange gastrique des patients gastroparétiques [16]) mais leur utilisation en routine pour la prévention du risque d inhalation per anesthésique n est pas recommandée [23]. 1.3. CONDITIONS DE SURVENUE D UNE PNEUMOPATHIE D INHALATION Les caractéristiques du liquide inhalé susceptible de provoquer une pneumopathie d inhalation ont été expérimentalement déterminées : le volume et le ph du liquide inhalé en sont les principaux déterminants [24]. La situation à risque usuellement retenue [17, 25] est celle de patients «HVLP» (High Volume Low ph) soit ayant un volume résiduel > 25 ml et un ph gastrique < 2,5. L inhalation d un volume de 0,4 à 0,6 ml.kg -1 de poids corporel à ph 1 a une incidence clinique et radiologique mineure et un volume «minimal» de 0,8 ml.kg -1 à ph 1 est associé à la survenue d une pneumopathie, sur modèle animal [24]. Ainsi une certaine discordance existe entre les données expérimentales attestant d un nombre élevé de situations à risque et la fréquence constatée des pneumopathies d inhalation. Par ailleurs l existence d un reflux gastro-œsophagien quel qu en soit le mécanisme (hernie hiatale, modifications des pressions thoraco-abdominales...) augmente le risque per anesthésique d inhalation [26]. Les problèmes de contrôle des voies aériennes (difficulté d intubation par ex.) favorisent un tel reflux et donc la survenue d inhalation, par divers mécanismes (ingestion de sang, toux.) [2, 4, 27]. Enfin toutes les circonstances entraînant une perte de contrôle des voies aériennes c est-à-dire une perte de coordination entre respiration et déglutition (pathologies neuromusculaires, coma quelle qu en soit l origine, anesthésie générale) représentent des conditions favorables à la survenue d une inhalation.

1.4. SITUATIONS SPÉCIFIQUES Estomac plein 33 1.4.1. PÉDIATRIE Le risque d inhalation chez l enfant a été évalué plus fréquent que chez l adulte, en particulier pour la tranche d âge de 0 à 9 ans [2]. Un travail prospectif sur une période de 12 ans (1985-1997) à la Mayo Clinic a permis d évaluer le risque d inhalation chez 58 138 patients de 2 mois à 17 ans ayant bénéficié de 63 180 anesthésies générales et d établir une fréquence de 0,04 % du risque d inhalation chez l enfant [28]. Ce travail souligne la faible morbidité associée à l inhalation per anesthésique chez l enfant. De même, sur une étude rétrospective de 50 880 anesthésies générales en pédiatrie, aucune des 52 inhalations rapportées n a entraîné le décès, les facteurs de risque indépendants d inhalation identifiés étant une classe ASA 3 ou 4 et un âge compris entre 1 et 6 ans [29]. La vidange gastrique du nourrisson est dépendante de la nature du lait ingéré : la vidange est plus rapide avec le lait maternel qu avec les formules maternisées [30, 31]. Le jeûne préopératoire prolongé chez l enfant ne permet pas d éviter dans 10 à 55 % des cas un résidu gastrique «à risque» (ph < 2,5 et volume 0,4 ml.kg -1 ) [32]. A contrario, plusieurs études ont démontré l absence d effet de l ingestion de liquides clairs dans un délai de 2 heures sur le résidu gastrique et le risque d inhalation [33-35]. Une étude prospective de 60 enfants de moins de 5 ans comparant le temps de vidange gastrique entre jeûne prolongé (12 h) et alimentation par, soit solution glucosée, soit formule maternisée écrémée, soit lait maternel, montre que le groupe jeûne prolongé est celui présentant le plus d enfant «à risque» d inhalation et que la vidange gastrique est la plus rapide dans le groupe solution glucosée [36]. Ainsi en pédiatrie le recours à l allaitement par formules maternisées doit être pris en compte pour l allongement du jeûne préopératoire. De plus la possibilité d une hydratation orale préopératoire avec des liquides clairs et des hydrates de carbone améliore la vidange gastrique chez l enfant. 1.4.2. OBSTÉTRIQUE La description initiale de 66 pneumopathies d inhalation par Mendelson a été rapportée en obstétrique [1]. Au cours de la grossesse, les modifications anatomiques et hormonales génèrent une hypotonie du sphincter inférieur de l œsophage, une baisse globale de la motilité intestinale avec un ralentissement général du transit et une augmentation des pressions transdiaphragmatiques [37]. La fréquence de l inhalation chez la femme enceinte a fait l objet de nombreuses études épidémiologiques avec des incidences variables mais globalement deux fois supérieures pour la césarienne par rapport à une chirurgie standard [38]. La pneumopathie d inhalation est l une des causes les plus usuelles de détresse respiratoire de la femme enceinte, de pronostic identique aux autres détresses respiratoires de réanimation malgré un âge en moyenne plus jeune [39]. Néanmoins la mortalité est faible et les conséquences à long terme sur la fonction respiratoire négligeables [39, 40]. Ainsi en obstétrique la fréquence plus élevée (tout particulièrement pour les césariennes, donc en contexte d urgence le plus souvent) d inhalation justifie la mise en œuvre de mesures préventives.

34 MAPAR 2005 2. RECOMMANDATIONS SUR LE JEÛNE PRÉOPÉRATOIRE : DONNÉES RÉCENTES Depuis plus d une vingtaine d années de nombreux travaux (voir ci-dessus) ont remis en cause la règle NPO à partir de minuit la veille de l intervention. Les principales raisons sont de différents niveaux : Incidence faible du risque d inhalation en regard des critères classiques de risque, en dehors de pathologies spécifiques (reflux gastro-œsophagien par exemple). Absence de lien entre durée prolongée du jeûne préopératoire et vidange gastrique complète. Intérêt de la prise de liquides «clairs» (jusqu à 400 ml) et/ou hydrates de carbone pour améliorer la vidange ou l acidité gastrique [41]. Effet délétère sur le plan métabolique du jeûne prolongé ; intérêt démontré de l apport en hydrates de carbone en terme de baisse des phénomènes de résistance à l insuline y compris chez le patient non diabétique (facteur indépendant associé à la durée d hospitalisation) ainsi que de l anxiété préopératoire et du confort postopératoire [9, 41, 42]. Les recommandations de l American Society of Anesthesiologists (ASA) formulées en 1999 [23] restent, à ce jour, le document de référence (voir tableau I). Ces recommandations excluent la femme enceinte et le patient ayant une pathologie à risque d altération de la vidange gastrique mais s appliquent par ailleurs quel que soit l âge. Tableau I Synthèse des recommandations de l ASA [23] : Aliment Descriptif Jeûne minimal (h) Liquides clairs Eau, jus de fruit sans pulpe, boissons gazeuses, thé, café 2 Lait maternel 4 Lait maternisé Lait non humain 6 Repas léger Pain grillé/biscottes et liquide clair. Attention : les aliments gras, fritures, viandes peuvent justifier une durée de jeûne supplémentaire 6 CONCLUSION Le débat sur la libéralisation des consignes de jeûne préopératoire soulèvent des restrictions supportées par le risque lié à la complexité de règles de jeûne à géométrie variable, à la méconnaissances de facteurs de risque ainsi que par des cas cliniques alertant sur des cas «limites» en terme de durée de jeûne en regard des nouvelles recommandations proposées [6, 43, 44]. Par rapport à la règle NPO à partir de minuit, les nouvelles recommandations offrent la possibilité en chirurgie réglée d améliorer le confort des patients et de réduire les effets métaboliques délétères d un jeûne prolongé, qui n a pas

Estomac plein 35 d intérêt par ailleurs en terme de prévention du risque d inhalation per anesthésique (donc en permettant la prise de liquides clairs jusqu à 2 heures préopératoires). Néanmoins la possibilité de proposer une alimentation solide «légère» 6 heures avant l intervention doit être envisagée avec prudence, en partie en raison des variabilités des délais dans l enchaînement du programme opératoire. La poursuite de l évaluation épidémiologique de l incidence des inhalations per anesthésiques doit permettre d évaluer l apport de ces récentes recommandations. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] Mendelson CL. The aspiration of stomach contents into the lungs during obstetric anesthesia. Am J Obstet Gynecol 1946;52:191-205 [2] Olsson GL, Hallen B, Hambreus-Jonzon K. Aspiration during anesthesia: a computer-aided study of 185,358 anesthetics. Acta Anesthesiol Scand 1986;30:84-92 [3] Tiret L, Desmonts JM, Hatton F, Vourc h G. Complications associated with anesthesia a prospective survey in France. Can J Anesth 1986;33:336-43 [4] Warner MA, Warner ME, Weber JG. Clinical significance of pulmonary aspiration during the perioperative period. Anesthesiology 1993;78:56-62 [5] Green CR, Pandit SK, Schork MA. Preoperative fasting time: Is the traditionnal policy changing? Results of a national survey. Anesth Analg 1996;83:123-8 [6] Colas MJ. Les règles du jeûne préopératoire ont-elles évoluées? In : Conférences d actualisation SFAR 2001:81-93 [7] Hunt JN. Some properties of an alimentary osmoreceptor mechanism. J Physiol 1956;132:267-88 [8] Erskine L, Hunt JN. The gastric emptying of small volumes given in quick succession. J Physiol 1981;313:335-41 [9] Ljungqvist O, Soreide E. Preoperative fasting. Br J Surg 2003;90:400-6 [10] Philipps S, Hutchinson S, Davidson T. Preoperative drinking does not affect gastric contents. Br J Anaesth 1993;70:6-9 [11] Maltby JR, Pytka S, Watson NC, Cowan RA, Fick GH. Drinking 300 ml of clear fluid two hours before surgery has no effect on gastric fluid volume and ph in fasting and non-fasting obese patients. Can J Anaesth 2004;51:111-5 [12] Soreide E, Stromskag KE, Steen PA. Statistical aspect in studies of perioperative fluid intake and gastric content. Acta Anaesthesiol Scand 1995;39:738-43 [13] Keshavarzian A, Iber FL, Vaeth J. Gastric emptying in patients with insulin-requiring diabetes mellitus. Am J Gastroenterol 1987;82:29-35 [14] Strid H, Simren M, Stotzer PO, Abrahamsson H, Bjornsson ES. Delay in gastric emptying in patients with chronic renal failure. Scan J Gastroenterol 2004;39:516-20 [15] Scott AM, Kellow JE, Shuter B, Nolan JM, Hoschl R, Jones MP. Effects of cigarette smoking on solid and liquid intragastric distribution and gastric emptying. Gastroenterology 1993;104:410-6 [16] Parkman HP, Hasler WL, Fisher RS; American gastroenterological association technical review on the diagnosis and treatment of gastroparesis. Gastroenterology 2004;127:1592-622 [17] Harter R, Kelly W, Kramer M, Perez C, Dzwonczyk R. A comparison of the volume and ph of gastric contents of obese and lean surgical patients. Anesth Analg 1998;86:147-52 [18] Jackson SJ, Leahy FE, McGowan AA, Bluck LJ, Coward WA, Jebb SA. Delayed gastric emptying in the obese : an assesment using the non-invasive (13)C-octanoic acid breath test. Diabetes Obes Metab. 2004;6:264-70 [19] Haavik P, Soreide E, Hofstad P, Steen PA. Does preoperative anxiety influence gastric fluid volume and acidity? Anesth Analg 1992;75:91-4 [20] Nimmo WS, Wilson J, Prescott LF. Narcotic analgesics and delayed gastric emptying during labour. Lancet. 1975;1:890-3 [21] Thorn SE, Wattwil M, Lindberg G, Sawe J. Systemic and central effects of morphine on gastroduodenal motility. Acta Anaesthesiol Scand. 1996;40:177-86.

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