Théorie de la mesure. S. Nicolay

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Transcription:

Théorie de la mesure S. Nicolay Année académique 2011 2012

ii

Table des matières Introduction v 1 Mesures 1 1.1 Sigma-algèbres................................. 1 1.2 Mesures..................................... 7 1.3 Mesures extérieures............................... 13 1.4 La mesure de Lebesgue............................. 20 2 Intégrales 31 2.1 Applications mesurables............................ 31 2.2 Propriétés vérifiées presque partout...................... 39 2.3 Intégration................................... 40 2.4 Théorèmes concernant la limite et applications............... 47 2.5 L intégrale de Riemann............................ 53 3 Convergence 61 3.1 Notions de convergence............................ 61 3.2 Les espaces L p et L p............................. 64 3.3 Propriétés des espaces L p et L p....................... 70 3.4 Espaces duaux................................. 72 3.5 Applications................................... 73 4 Décomposition de mesures 81 4.1 Mesures signées................................. 81 4.2 Mesures complexes............................... 85 4.3 Mesures absolument continues......................... 89 4.4 Singularités................................... 93 4.5 Mesures à variation finie............................ 95 4.6 Les espaces duaux des espaces L p....................... 99 4.7 Autre définition de la notion de mesure................... 101 5 Produit de mesures 105 5.1 Construction.................................. 105 5.2 Théorèmes de Fubini.............................. 109 5.3 Théorème du changement de variables dans R d............... 110 iii

iv TABLE DES MATIÈRES 6 Mesures sur un espace localement compact 115 6.1 Mesures régulières............................... 115 6.2 Théorème de représentation de Riesz..................... 117 6.3 Régularité des mesures boréliennes signées finies et complexes....... 122 6.4 Complément sur les mesures régulières.................... 122 7 Dérivation 123 7.1 Dérivation de mesures............................. 123 7.2 Dérivation de fonctions............................. 128 A Quelques rappels 133 A.1 Concernant l analyse.............................. 133 A.2 Concernant la topologie............................ 134 A.3 Concernant certains espaces fonctionnels................... 138 A.4 Concernant l algèbre.............................. 139 Bibliographie 141

Introduction Ces notes de cours contiennent la matière du cours Théorie de la mesure qui va être donné cette année académique 2011 2012. Elles en débordent assez largement : j ai voulu donner la possibilité aux étudiants qui le désirent d en apprendre d avantage. Elles sont aussi loin d être complètes ; en fait, un deuxième cours serait nécessaire si on voulait vraiment acquérir les notions essentielles de la théorie de la mesure. Je ne peux qu encourager le lecteur intéressé à consulter la liste des références en fin de volume. La structure de ce cours est proche de celle adoptée dans [6], avec des compléments empruntés à [10] et [18]. J ai aussi mis à profit les cours précédemment enseignés dans cette Université, en m inspirant des idées présentées dans [12] et [16]. Le but de ce cours est triple. Le premier objectif est d établir les résultats admis sans preuve dans le cours Introduction au calcul intégral, enseigné en première année de bachelier. Nous le ferons ici dans le cadre d une mesure quelconque. Le second objectif est de comparer les notions d intégrale de Riemann, Darboux et Lebesgue sur un intervalle compact de la droite R. Enfin, si le temps me le permet, j aborderai quelques résultats transcendants de la théorie de la mesure (théorème de Radon-Niodym, décomposition de Lebesgue, théorème de représentation de Riesz,...). Je tiens à attirer l attention du lecteur sur le fait que ces notes ne sont qu une troisième esquisse. J espère qu elles vont évoluer aux contact des étudiants, de leurs remarques et idées. Je dois par avance m excuser des fautes de frappes et autres coquilles qui ne manqueront pas de jalonner ces notes de première jeunesse. v

vi INTRODUCTION

Chapitre 1 Mesures Les notions de longueur dans l espace euclidien R, d aire dans l espace R 2 et de volume dans l espace R 3 peuvent être développées à partir de principes géométriques intuitifs. A priori, l application «volume», par exemple, devrait être une application Vol définie sur (R 3 ) à valeur dans [0, ] jouissant des propriétés suivantes, 1. si (X ) N =1 est une suite finie d ensembles deux à deux disjoints, alors N Vol( X ) = =1 N Vol(X ), =1 2. si X et X sont isométriques, alors Vol(X) = Vol(X ), 3. si X désigne le cube de côté de longueur 1, alors Vol(X) = 1. Ces trois conditions sont cependant inconsistantes (en dimension d 3), comme l ont montré Banach et Tarsi 1 [1, 15]. Ce problème persiste (quel que soit la dimension d) si la condition 1 d additivité finie est remplacée par la condition d additivité dénombrable. Nous verrons qu il est en fait possible de définir une telle application en restreignant le domaine de définition, de manière à ne pas prendre en compte les ensembles posant problème. 1.1 Sigma-algèbres Les mesures seront définies sur les σ-algèbres. Définitions et premières propriétés Soit X un ensemble arbitraire. Rappelons qu une collection A de sous-ensembles de X est une algèbre sur X si X A, si A A, alors A c A, pour chaque suite finie A 1, A 2,, A n (n N) d ensembles de A, on a n =1 A A. 1. Le Paradoxe de Banach-Tarsi (version forte) s énonce comme suit : deux ensembles de R 3 bornés et d intérieurs non-vides sont equidécomposables. Ce théorème repose sur l axiome du choix. Cependant, il existe des résultats «peu naturels» ne reposant pas sur cet axiome ; citons par exemple le Paradoxe de Dougherty-Foreman [7]. 1

2 CHAPITRE 1. MESURES Ainsi, A est stable pour le passage au complémentaire et l union finie. Bien sûr, puisque n =1 A = ( n =1 Ac )c, A est aussi stable pour l intersection finie. Remarquons aussi que A. Définition 1.1.1 Soit X un ensemble arbitraire. Une collection A de sous-ensembles de X est une σ-algèbre sur X si X A, si A A, alors A c A, si (A ) est une suite d ensembles de A, alors A A. Remarquons que si une σ-algèbre contient au moins un élément, A, alors elle contient X = A A c. On peut donc remplacer, dans la définition, la condition X A par A non-vide. La différence entre algèbre et σ-algèbre est soulignée par le résultat suivant (donnant un critère pour vérifier si une algèbre est une σ-algèbre). Rappelons qu une suite (A ) d ensemble est croissante si A A +1 et décroissante si A A +1 pour tout. Proposition 1.1.2 Soit X un ensemble quelconque et A une algèbre sur X ; A est une σ-algèbre si une des deux conditions est vérifiée. A est stable pour l union de suites d ensembles croissants, A est stable pour l intersection de suites d ensembles décroissants. Preuve. Supposons que la première condition est vérifiée. Soit (A ) une suite d ensembles de A et soit S = j=1 A j. Les ensembles S appartiennent à A et la suite (S ) est croissante. De là, S A. Puisque A = S, A est une σ-algèbre. Montrons maintenant que si la seconde condition est vérifiée, la première l est aussi. Si (A ) est une suite croissante de A, (A c ) est une suite décroissante de A. La seconde condition implique que A c appartient à A et donc que A = ( A c )c appartient à A, ce qui termine la preuve. Donnons quelques exemples. Exemples 1.1.3 Soit X un ensemble, (X) est une σ-algèbre, {, X} est une σ-algèbre, si A X, {, A, A c, X} est une σ-algèbre, si X est infini, la collection des sous-ensembles finis de X n est pas une algèbre, si X est infini, la collections des sous-ensembles A de X tels que soit A, soit A c est fini est une algèbre mais pas une σ-algèbre, si X n est pas dénombrable, la collection de tous les sous-ensembles dénombrables de X n est pas une algèbre, la collection de tous les sous-ensembles de X tels que soit A, soit A c est dénombrable est une σ-algèbre, la collection de tous les sous-ensembles de R qui peuvent s écrire comme une union finie d intervalles de la forme ]a, b], ]a, [ ou ], b] (a, b R) est une algèbre sur R, mais pas une σ-algèbre, puisqu elle ne contient pas les ensembles du type [a, b] (a, b R), qui peuvent s écrire comme une union d éléments de la collection. Le résultat suivant permet de construire des σ-algèbres. Proposition 1.1.4 Soit X un ensemble quelconque. L intersection d une collection nonvide de σ-algèbres sur X est une σ-algèbre sur X.

1.1. SIGMA-ALGÈBRES 3 Preuve. Soit C une collection non-vide de σ-algèbres sur X et A l intersection des éléments de C. L ensemble X appartient à tous les éléments de C et donc à A. Si A A, A appartient à tous les éléments de C, qui contiennent aussi A c. Ainsi, A c A. Enfin, si (A ) est une suite appartenant à A, elle appartient à tous les éléments de C ; il en va donc de même pour A, ce qui implique A A. Remarquons que l union d une famille de σ-algèbres n est pas nécessairement une σ- algèbre. Corollaire 1.1.5 Soit X un ensemble quelconque et F (X) une famille de sousensembles de X. Il existe une plus petite σ-algèbre sur X qui contient F. Preuve. Soit C la collection de toutes les σ-algèbres sur X contenant F. Cette collection n est pas vide, puisque (X) est un élément de C. Suivant la Proposition 1.1.4, l intersection A de tous les éléments de C est une σ-algèbre sur X incluant F. Qui plus est, A est incluse dans toutes les σ-algèbre sur X contenant F. Définition 1.1.6 Soit X un ensemble quelconque et F (X) une famille de sousensembles de X. La plus petite σ-algèbre contenant F est appelée la σ-algèbre engendrée par F et est notée σ(f ). Ensembles boréliens Les σ-algèbres de Borel sont de première importance ; elles contiennent la plupart des ensembles d un intérêt pratique 2. Définition 1.1.7 Soit (X, Ω) un espace topologique ; la σ-algèbre de Borel B(X, Ω) de l espace (X, Ω) (notée simplement B(X) lorsque la topologie est implicite) est définie comme suit, B(X, Ω) = σ({a Ω}) = σ({a X : A ouvert}). Un ensemble de B B(X) est appelé un ensemble borélien. Si X est l espace R d muni de la distance euclidienne, on note 3 et B = B(R). B d = B(R d ) Proposition 1.1.8 Si C B(X) est tel que tout ouvert de X est union dénombrable d éléments de C, alors σ(c ) = B(X). Preuve. Il suffit de démontrer l inclusion suivante, B(X) σ(c ). Par définition d une sigma algèbre, σ(c ) contient les ouverts de X. Puisque B(X) est la plus petite σ-algèbre jouissant de cette propriété, l inclusion est vérifiée. Proposition 1.1.9 Si (X, d) est un espace métrique séparable, B(X, d) = σ({b(x, ε) : x X, ε > 0}), où B(x, ε) désigne la boule ouverte de centre x et de rayon ε de X. 2. Tous les ensembles boréliens ne sont cependant pas des ensembles de Souslin [6]. 3. Cette notation, qui peut paraître abusive, sera justifiée dans la suite (Corollaire 5.1.6).

4 CHAPITRE 1. MESURES Preuve. En vertu de la Proposition 1.1.8, il suffit de démontrer que tout ouvert U de X peut s écrire comme une union dénombrable de boules. Soit D X un ensemble dénombrable tel que D = X et posons C = {(x, ε) D Q >0 }. On a U = (x,ε) C B(x,ε) U B(x, ε). En effet, soit a U ; puisque U est ouvert, il existe 0 < ε Q tel que B(a, 2ε) U. Par densité, il existe aussi un point x D tel que d(x, a) < ε. Maintenant, x B(x, ε) implique d(a, x ) d(a, x) + d(x, x ) < 2ε et donc B(x, ε) B(a, 2ε) ; ainsi, a B(x, ε) U et (x, ε) C. Intéressons nous plus particulièrement à B. Proposition 1.1.10 La σ-algèbre B est engendrée par chacune des collections d ensembles suivantes, la collection de tous les ensembles fermés de R, la collection des demi-droites de R de la forme ], b] (b R), la collection des semi-intervalles de R de la forme ]a, b] (a, b R). Preuve. Soient B 1, B 2 et B 3 les σ-algèbres engendrées par les trois collections d ensembles de l énoncé (dans l ordre). Nous allons montrer que les inclusions suivantes sont vérifiées. B 3 B 2 B 1 B B 3. Bien sûr, B contient tous les ensembles ouverts de R, donc aussi tous les ensembles fermés de R et donc B 1 B. Puisqu un ensemble de la forme ], b] est fermé, on a B 2 B 1. De plus, on a ]a, b] =], b] ], a] c, et donc B 3 B 2. Intéressons-nous maintenant à la dernière inclusion. Soient C la collection des intervalles ]a, b] de R tels que a, b Q. Tout ensemble ouvert U de R se décomposant comme suit, U = I C I U la Proposition 1.1.8 implique σ(c ) = B. Puisque, pour tout élément I de C, I B 3, on obtient σ(c ) B 3. Proposition 1.1.11 La σ-algèbre B d est engendrée par chacune des collections d ensembles suivantes, la collection de tous les ensembles fermés de R d, la collection de tous les demi-espaces de la forme d =1 ], b ] (b R ), la collection de tous les rectangles semi-ouverts de la forme d =1 ]a, b ] (a, b R ). I,

1.1. SIGMA-ALGÈBRES 5 Preuve. Comme pour la proposition précédente, soient B 1, B 2 et B 3 les σ-algèbres engendrées par les trois collections d ensembles de l énoncé (dans l ordre). Bien sûr, B 1 B d. Pour les mêmes raisons que précédemment, B 3 B 2 B 1. Enfin, tout ensemble ouvert U est l union de tous les rectangles semi-ouverts à sommets rationnels inclus dans U, d =1 ]a, b ] (a, b Q ), ce qui permet de conclure comme dans la démonstration précédente. Incidemment, nous avons aussi démontré le résultat suivant. Corollaire 1.1.12 On a B d = σ({r R d : R est un rectangle fermé}). Preuve. Soit A la σ-algèbre engendrée par les rectangles fermés de R d. Puisque tout ensemble fermé appartient à B d, A B d. Dans la démonstration précédente, il a été montré que, si C désigne la collection de tous les rectangles fermés de sommets rationnels, σ(c ) = B d. Par conséquent, B d A. Regardons de plus près quelques ensembles de B d. Définition 1.1.13 Soient F (R d ) la famille de tous les ensembles fermés de R d et G (R d ) la famille de tous les ensembles ouverts de R d. Soient F σ (R d ) la collection des unions de suites d éléments de F (R d ) et G δ (R d ) la collection des intersections de suites d éléments de G (R d ). Un ensemble de F σ est appelé un ensemble F σ et un ensemble de G δ est appelé un ensemble G δ 4. Proposition 1.1.14 Tout ensemble fermé de R d est un ensemble G δ ; tout ensemble ouvert de R d est un ensemble F σ. Preuve. Soit F un ensemble fermé de R d et définissons la suite (U ) comme suit, U = {x R d : d(x, y) < 1/ pour un y F }. Si F =, alors U =. Qui plus est, U est ouvert et F U. Montrons que l inclusion inverse est aussi vérifiée. Tout point de U est la limite d une suite de points de F. Puisque F est fermé, cette limite appartient à F. Nous venons donc de montrer que F est un ensemble G δ. Si A est un ensemble ouvert, A c est fermé et A c = U. De là, A = U c et A est un ensemble F σ. Pour une collection C d ensemble, soit C σ la collection obtenue en prenant les unions de suites de C et C δ la collection obtenue en prenant les intersections de suites de C. On peut itérer les opérations représentées par σ et δ pour obtenir, à partir de la classe F, les classes F σ, F σδ, F σδσ,... et, à partir de la classe G, les classes G δ, G δσ, G δσδ,... (remarquons que F δ = F, G σ = G et F σσ = F σ, G δδ = G δ ). Le diagramme suivant est donc valide G G δ G δσ G δσδ F F σ F σδ F σδσ Ces classes ne sont donc pas égales. Qui plus est, il existe des ensembles boréliens n appartenant à aucune d entre elles [6]. 4. Les lettres F et G ont vraissemblablement été choisies pour représenter les mots fermé et Gebiet, alors que les symboles σ et δ représentent les mots Summe et Durchschnitt.

6 CHAPITRE 1. MESURES Classes de Dynin Les classes de Dynin sont utiles pour vérifier l égalité de mesures ou la mesurabilité de fonctions. Définition 1.1.15 Soit X un ensemble quelconque. Une collection D de sous-ensembles de X est une classe de Dynin sur X si X D, si A, B D et A B, alors B \ A D, si (A ) est une suite croissante d ensembles de D, alors A D. Le résultat suivant procure une définition alternative des classes de Dynin. Proposition 1.1.16 Soit X un ensemble quelconque. Une collection D de sous-ensembles de X est une classe de Dynin ou un système de Dynin sur X si et seulement si X D, si A D, alors A c D, si (A ) est une suite d ensembles deux à deux disjoints de D, alors A D. Preuve. Supposons que D est une classe de Dynin. Si A D, alors A c = X \ A D. Soit maintenant (A ) une suite d ensembles disjoints deux à deux de D et posons S = j=1 A. La suite (S ) est une suite croissante d ensembles. On a S 1 D et par récurrence, S +1 = A +1 S = (A c +1 \ S ) c D, car, puisque les ensembles A sont disjoints, S A c +1. Ainsi, A = S D. Supposons maintenant que D est une classe vérifiant les conditions de l énoncé. Soient A, B D, A B. On a B \ A = (B c A) c D, puisque B c et A sont disjoints. Soit maintenant (A ) une suite croissante d ensembles de D et posons D 1 = A 1, D +1 = A +1 \ A. Les ensembles D sont disjoints deux à deux. Qui plus est, D 1 D et D +1 = A +1 \ A D, puisque A A +1. On obtient donc A = D D. Une collection de sous-ensembles D vérifiant les conditions de l énoncé est parfois appelée un λ-système. Le résultat suivant est évident. Proposition 1.1.17 L intersection d une famille non-vide de classes de Dynin est encore une classe de Dynin. Définition 1.1.18 Soit X un ensemble arbitraire et C une collection de sous-ensembles de X. L intersection de toutes les classes de Dynin contenant C est la classe de Dynin engendrée par C. On la note λ(c ). Bien sûr, λ(c ) est la plus petite classe de Dynin comprenant C. Nous allons maintenant faire la liaison entre les classes de Dynin et les σ-algèbres. Définition 1.1.19 Soit X un ensemble arbitraire. Une collection de sous-ensembles de X est un π-système sur X si elle est stable pour l intersection finie (i.e. si A, B C entraîne A B C ). Proposition 1.1.20 Une classe de Dynin qui est un π-système est une σ-algèbre.

1.2. MESURES 7 Preuve. Soit D un λ-système qui est aussi un π-système. Si (A ) est une suite de D, il suffit de montrer que A D. Soient S = j=1 A j, D 1 = A 1 et D +1 = A +1 \ S. On a S c = j=1 Ac j D, D 1 D et D +1 = A +1 S c D, puisque D est stable pour le complément et l intersection. Ainsi (D ) est une suite d ensembles disjoints deux à deux de D. Par conséquent, A = D D. Théorème 1.1.21 (Dynin) Soit C un π-système sur un ensemble arbitraire X. On a λ(c ) = σ(c ). Preuve. Puisqu une σ-algèbre est une classe de Dynin, σ(c ) est une classe de Dynin contenant C, donc λ(c ) σ(c ). Nous allons maintenant montrer que λ(c ) est une σ-algèbre. En vertu de la Proposition 1.1.20, il nous suffit de montrer que λ(c ) est un π-système. Pour B λ(c ), soit D B = {A λ(c ) : A B λ(c )}. Montrons que D B est un λ-système. Seule la stabilité pour l opération complément n est pas immédiate. Si A D B, A c B = (A B) c B = ((A B) B c ) c λ(c ), et donc A c D B. Qui plus est, si B C, on a C D B, puisque par hypothèse, A C implique A B C ; ainsi, λ(c ) D B pour tout B C. Si B λ(c ) et A C, nous venons donc de montrer que B D A, c est-à-dire A B λ(c ). Autrement dit, C D B et donc λ(c ) D B pour tout B λ(c ). Au final, nous avons donc A, B λ(c ) implique A B λ(c ), ce qui devait être montré. 1.2 Mesures Dans cette section, nous allons d abord définir les mesures sur une σ-algèbre et donner ensuite les propriétés de bases de ces applications. Nous présenterons ensuite un résultat concernant l unicité et terminerons avec les mesures complétées. Définitions et propriétés de base Maintenant que le concept de σ-algèbre a été introduit, nous pouvons définir la notion de mesure. Définition 1.2.1 Soient X un ensemble quelconque et A une σ-algèbre sur X. Une application µ définie sur A et à valeurs sur la demi-droite étendue [0, ], µ : A [0, ] A µ(a) est une mesure sur A si µ( ) = 0, si (A ) est une suite d ensembles de A disjoints deux à deux, alors µ( A ) = µ(a ). (1.1)

8 CHAPITRE 1. MESURES Une application vérifiant l égalité (1.1) est qualifiée de dénombrablement additive ou σ-additive. Si cette égalité n a lieu que pour les suites (A ) finies, l application est dite finiment additive. Si X est un ensemble quelconque, A est une σ-algèbre sur X et µ une mesure sur A, le triplet (X, A, µ) est appelé un espace mesuré ; le couple (X, A ) est appelé un espace mesurable. Si (X, A, µ) est un espace mesuré, µ est une mesure sur (X, A ), ou même une mesure sur X, si le contexte est clair. Les ensembles de A sont parfois appelés ensembles A -mesurables. Si on considère une mesure µ sur une σ-algèbre de Borel, i.e. si l espace mesuré est du type (X, B(X), µ), on dit que µ est une mesure borélienne. La théorie des probabilités repose sur ces définitions. Définition 1.2.2 Un espace probabilisé ou espace de probabilité est un espace mesuré (Ω, A, P ) tel que P (Ω) = 1. Dans ce cas, l ensemble Ω est appelé l univers, A une tribu sur Ω et P une probabilité sur A. Un élément de A est appelé un évènement et P (A) est la probabilité de l évènement A A. Les axiomes des probabilités découlent des propriétés des mesures finies. Donnons quelques exemples de mesure. Exemples 1.2.3 Soient X un ensemble quelconque et A une σ-algèbre sur X. Les application µ définies ci-après sont des mesures. L application définie sur A telle que µ(a) = #A si #A < ℵ 0 et µ(a) = sinon est la mesure de dénombrement, Si X est un ensemble non-vide, soit x X. L application δ x telle que δ x (A) = 1 si x A et δ x (A) = 0 sinon est la mesure de Dirac en x, l application µ telle que µ( ) = 0 et µ(a) = si A est une mesure dégénérée. Les principales propriétés des mesures sont résumées dans le résultat suivant. Théorème 1.2.4 Soient (X, A, µ) un espace mesuré et (A ) une suite de A. On a les relations suivantes. (monotonie) Si A 1 A 2, alors si A 1 A 2 et µ(a 1 ) <, alors µ(a 1 ) µ(a 2 ), µ(a 2 \ A 1 ) = µ(a 2 ) µ(a 1 ), (sous-additivité dénombrable) on a toujours µ( A ) µ(a ), (continuité à gauche) si la suite (A ) est croissante, µ( A ) = µ(lim A ) = lim µ(a ),

1.2. MESURES 9 (continuité à droite) si la suite (A ) est décroissante et s il existe un indice 0 tel que µ(a 0 ) <, µ( A ) = µ(lim A ) = lim µ(a ), on a toujours µ(lim A ) lim µ(a ), s il existe un indice 0 tel que µ( 0 A ) <, µ(lim A ) lim µ(a ). Preuve. Pour la monotonie, remarquons que si A 1 A 2, µ(a 2 ) = µ(a 1 ) + µ(a 2 \ A 1 ) µ(a 1 ). Si, qui plus est, µ(a 1 ) <, cette relation entraîne µ(a 2 \ A 1 ) = µ(a 2 ) µ(a 1 ). Pour la sous-additivité, considérons les ensembles B 1 = A 1 et B +1 = A +1 \ j=1 A j. Les ensembles B sont deux à deux disjoints et B A. Par conséquent µ( A ) = µ( B ) = µ(b ) µ(a ). Pour la continuité à gauche, remarquons d abord que s il existe un indice 0 tel que µ(a 0 ) =, le résultat découle de la monotonie de la mesure. Sinon, soient les ensembles B 1 = A 1 et B +1 = A +1 \ A. Ces ensembles sont disjoints et donc µ(lim A ) = µ( A ) = µ(b ) = µ(a 1 ) + lim µ(a j+1 \ A j ) j=1 = µ(a 1 ) + lim µ(a j+1 ) µ(a j ) = lim µ(a ). Pour la continuité à droite, nous pouvons supposer que µ(a 1 ) <. Puisque la suite est décroissante, la suite (A 1 \ A ) est croissante et nous venons de montrer que pour une telle suite, j=1 µ( A 1 \ A ) = lim µ(a 1 \ A ) = µ(a 1 ) lim µ(a ) Qui plus est, µ( A 1 \ A ) = µ(a 1 \ A ) = µ(a 1 ) µ( A ). Ces deux dernières relations permettent d écrire µ( A ) = lim µ(a ). Pour l avant dernière assertion, posons B = j= A j. La suite (B ) est croissante et lim B = lim A. Vu ce qui a été montré précédemment, on a µ(lim A ) = lim µ(b ) lim µ(a ), puisque B A. Le dernier point se démontre de la même manière en posant B = j= A j.

10 CHAPITRE 1. MESURES Mesures σ-finies et unicité Nous présentons ici deux résultats concernant l unicité. Remarquons que les hypothèses font intervenir un π-système. Lemme 1.2.5 Soit (X, A ) un espace mesurable et C un π-système sur X tel que A = σ(c ). Si µ et ν sont deux mesures finies sur A telles que µ(x) = ν(x) et µ(c) = ν(c) quelque soit C C, alors µ = ν. Preuve. Soit D = {A A : µ(a) = ν(a)}. On vérifie directement qu il s agit d un λ- système. Par hypothèse, C D et donc λ(c ) D. Le Théorème 1.1.21 implique alors A = σ(c ) D, ce qui suffit. Pour le second résultat nous aurons besoin de la définition suivante. Définition 1.2.6 Soient (X, A, µ) un espace mesuré et C A. La mesure µ est dite σ-finie sur C s il existe une suite croissante (X ) d ensembles de C telle que X = X et µ(x ) <. Si C = A, on dit simplement que la mesure est σ-finie. Si µ est une mesure σ-finie, l espace (X, A, µ) est appelé un espace mesuré σ-fini. Un ensemble A A est σ-fini pour µ s il existe une suite croissante (A ) de A telle que A = A et µ(a ) <. Bien sûr, si µ est une mesure finie, elle est σ-finie sur toute collection C A contenant une suite croissante vers X et sur tout ensemble A A. Proposition 1.2.7 L espace mesuré (X, A, µ) est σ-fini si et seulement s il existe une suite (A ) de A recouvrant X telle que µ(a ) <. La suite peut être choisie telle que les ensembles soient deux à deux disjoints. Preuve. Si (X, A, µ) est un espace mesuré σ-fini, soit (X ) une suite croissante de A telle que X = X et µ(x ) <. La suite (A ) définie comme suit, A 1 = X 1 et A +1 = X +1 \ X 1 est la suite recherchée. Maintenant, si (A ) est une suite de A recouvrant X telle que µ(a ) <, il suffit de poser A 1 = A 1 et A +1 = A +1 \ j=1 A j pour 1 afin d obtenir une suite d ensembles deux à deux disjoints avec les mêmes propriétés que la suite (A ). La suite (X ) définie par X = j=1 A j pour 1 montre que µ est une mesure σ-finie. Théorème 1.2.8 Soient (X, A ) un espace mesurable et C un π-système sur X tel que A = σ(c ). Si µ et ν sont deux mesures sur A σ-finies sur C et si µ(c) = ν(c) quel que soit C C, alors µ = ν. Preuve. Soit (C ) une suite croissante de C telle que C = X et µ(c ) <. Définissons, pour tout, les mesures µ et ν sur A comme suit, µ (A) = µ(a C ), ν (A) = ν(a C ). Le résultat précédent implique que µ = ν. Dès lors, on a µ(a) = lim µ(a C ) = lim ν(a C ) = ν(a), pour tout A A, ce qui suffit.

1.2. MESURES 11 Ensembles négligeables et complétion de mesures Les mesures complètes possèdent des propriétés, notamment reliées aux fonctions mesurables, très intéressantes, comme nous le verrons plus tard. Définition 1.2.9 Soit (X, A, µ) un espace mesuré. Un sous-ensemble B de X est un ensemble µ-négligeable (ou simplement négligeable si le contexte est clair) s il existe un ensemble A A tel que B A et µ(a) = 0. La mesure µ est une mesure complète si tout ensemble µ-négligeable est un élément de A ; autrement dit, si µ(a) = 0 (donc A A ) et B A impliquent B A. Une mesure peut être étendue en une mesure complète. Soit (X, A, µ) un espace mesuré. Appelons la complétion de A la collection A µ des sous-ensembles A de X pour lesquels il existe deux ensembles A I, A S A tels que A I A A S et µ(a S \ A I ) = 0. On obtient immédiatement µ(a I ) = µ(a S ) et, pour tout sous-ensemble B A de A, µ(b) µ(a S ) = µ(a I ). La valeur sup{µ(b) : B A, B A} ainsi définie ne dépend que de l ensemble A (et pas des ensembles A I et A S choisis). Définition 1.2.10 Soit (X, A, µ) un espace mesuré. La complétion de µ, notée µ est l application µ : A µ [0, + ] A µ(a) telle que µ(a) = µ(a I ), où A I est un ensemble tel que défini plus haut. L application µ est la mesure voulue. Proposition 1.2.11 Soit (X, A, µ) un espace mesuré. La complétion de µ est une mesure complète définie sur une σ-algèbre qui inclus A. Preuve. Soit A µ la complétion de A, définie plus haut. Il est clair que A A µ et donc X A µ. Soit A A µ. Il existe A I, A S A tels que A I A A S et µ(a S \ A I ) = 0. On a A c S Ac A c I et µ(ac I \ Ac S ) = µ(a S \ A I ) = 0. Ainsi A A µ implique A c A µ. Soit maintenant (A ) une suite de A µ. Pour chaque ensemble A, il existe A I,, A S, A tels que A I, A A S, et µ(a S, \ A I, ) = 0. On a A I,, A S, A et A I, A A S,. De plus µ( A S, \ A I, ) µ( A S, \ A I, ) µ(a S, \ A I, ) = 0 et A A µ. Nous venons donc de montrer que A µ est une σ-algèbre. Soit µ l application définie plus haut à partir de µ. Bien sûr, µ est à valeurs positives, si A A, µ(a) = µ(a) et µ( ) = 0. Soit (A ) une suite d ensembles de A µ deux à deux disjoints. Ici encore, pour chaque, il existe A I,, A S, A tels que A I, A A S, et µ(a S, \ A I, ) = 0. Bien sûr, les ensembles A I, sont deux à deux disjoints et µ( A ) = µ( A I, ) = µ(a I, ) = µ(a ), ce qui montre que µ est une mesure. Par construction, cette mesure est complète. Remarquons que si le recours à la complétion peut parfois faciliter la tâche, la nouvelle σ-algèbre ainsi définie peut se révéler beaucoup plus compliquée que l originale. Qui plus est, rien n assure que deux mesures définies sur la même σ-algèbre possèdent la même σ-algèbre complétée.

12 CHAPITRE 1. MESURES Mesures finiment additives La définition d une mesure finiment additive peut sembler plus naturelle que la définition d une mesure. Toutefois, la théorie relative aux mesures est bien plus puissante. Définition 1.2.12 Soient X un ensemble quelconque et A une algèbre sur X. Une application µ définie sur A et à valeurs sur la demi-droite étendue [0, ], µ : A [0, ] A µ(a) est une mesure finiment additive sur A si µ( ) = 0 et si, pour toute suite finie d ensembles deux à deux disjoints A 1,..., A n (n N 0 ) de A, on a µ( n A ) = =1 n µ(a ). Une mesure finiment additive n est donc pas une mesure. Pour bien différencier ces notions, on parle parfois de mesure dénombrablement additive plutôt que de mesure. Bien sûr une mesure (dénombrablement additive) est une mesure finiment additive. L inverse n est cependant pas vrai. Exemple 1.2.13 Soit X l ensemble des nombre entiers strictement positifs et A la collection des sous-ensembles A de X tels que soit A, soit A c soit fini. Nous savons (exemples 1.1.3) que A est une algèbre mais pas une σ-algèbre. L application µ définie sur A telle que µ(a) vaut 1 si A est infini et 0 sinon est une mesure finiment additive. Il est impossible de l étendre à une mesure sur la σ-algèbre engendrée par A. En effet, soit A = {} ( X) ; on a µ( A ) = µ(x) = 1 et µ(a ) = 0. Le résultat suivant, utile pour vérifier qu une mesure finiment additive est une mesure, peut être vu comme une réciproque partielle des propriétés de continuité d une mesure (théorème 1.2.4). Proposition 1.2.14 Soient (X, A ) un espace mesurable et µ une mesure finiment additive sur (X, A ). Si l une des conditions suivantes est vérifiée, pour toute suite croissante (A ) de A, on a =1 lim µ(a ) = µ( A ), pour toute suite décroissante (A ) de A telle que A =, on a alors µ est une mesure sur (X, A ). lim µ(a ) = 0, Preuve. Soit (B j ) j une suite d ensembles deux à deux disjoints de A et montrons que si l une des deux conditions est vérifiée, alors on a µ( j B j ) = j µ(b j). Si la première condition est vérifiée, soit A = j=1 B j ( N 0 ). Par définition, on a µ(a ) = j=1 µ(b j), tandis que, par hypothèse, µ( A ) = lim µ(a ). Puisque j B j = A, on obtient µ( j B j ) = j µ(b j). Supposons maintenant que la seconde hypothèse est vérifiée et posons A = j= B j ( N 0 ). Par définition, on a µ( j B j ) = j=1 µ(b j) + µ(a +1 ). Puisque, par hypothèse, lim µ(a +1 ) = 0, on a µ( j B j ) = j µ(b j).