Décision du Défenseur des droits MLD

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Transcription:

Paris, le 11 avril 2013 Décision du Défenseur des droits MLD-2013-47 RESUMÉ ANONYMISÉ DE LA DÉCISION Décision relative au licenciement d une salariée pour absences prolongées, désorganisation et nécessité de remplacement définitif (observations devant la Cour d appel) Domaine de compétence de l Institution : Lutte contre les discriminations Thèmes de la décision : domaine de discrimination : Emploi privé sous-domaine : Licenciement critère de discrimination : Etat de santé Consultation préalable du collège en charge de la lutte contre les discriminations et de la promotion de l égalité Synthèse : La Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l égalité a été saisie d une réclamation de Madame S relative à son licenciement qu elle estime en lien avec son état de santé. La réclamante est embauchée par un cabinet d expertise comptable, la société X, en 2006 en qualité d assistante comptable. Suite à une série d arrêts maladie d une durée de 18 mois, Madame S est licenciée pour absences prolongées désorganisant l entreprise et nécessité de la remplacer définitivement. Cependant, il ressort des éléments de l enquête que pendant toute la durée de ses arrêts maladie, le mis en cause a su pallier son absence par le recours à des contrats à durée déterminée et ne justifie pas de la désorganisation invoquée. Le licenciement a donc été motivé par l état de santé de la réclamante. Dans sa délibération n 2011-79, le collège de la HALDE a constaté que Madame S a fait l objet d un licenciement discriminatoire en lien avec son état de santé et a décidé de présenter ses observations à l audience du Conseil de Prud hommes. Le Conseil de prud hommes a condamné la société X à payer à Madame S 15.000 de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 15.000 de dommages et intérêts pour discrimination à raison de l état de santé. La société X a fait appel de ce jugement. Le Défenseur des droits décide de présenter ses observations devant la Cour d appel.

Décision du Défenseur des droits MLD-2013-47 Le Défenseur des droits, Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ; Vu la loi organique n 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits ; Vu le décret n 2011-904 du 29 juillet 2011 relatif à la procédure applicable devant le Défenseur des droits ; Vu le code du travail ; Après consultation du collège compétent en matière de lutte contre les discriminations et de promotion de l égalité ; Saisi, le 9 juin 2010, par Madame S d une réclamation relative à son licenciement qu elle estime discriminatoire en raison de son état de santé ; Décide de présenter ses observations devant la Cour d appel. Le Défenseur des droits Dominique BAUDIS 1

Observations devant la Cour d appel présentées dans le cadre de l article 33 de la loi n 2011-333 du 29 mars 2011 La haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l égalité a été saisie le 9 juin 2010 d une réclamation de Madame S relative à son licenciement qu elle estime en lien avec son état de santé. Dans sa délibération n 2011-79, le collège de la HALDE a constaté que Madame S a fait l objet d un licenciement discriminatoire en lien avec son état de santé et a décidé de présenter ses observations à l audience du Conseil de Prud hommes. Le Conseil de prud hommes a condamné la société X à payer à la réclamante 15.000 de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 15.000 de dommages et intérêts pour discrimination en raison de l état de santé. La société a fait appel de ce jugement. Le Défenseur des droits décide de présenter ses observations devant la Cour d appel. Le 20 février 2006, Madame S est embauchée par contrat de travail à durée indéterminée par le cabinet d expertise comptable X en qualité d assistante comptable niveau IV coefficient 280 de la convention collective des cabinets d expertise comptable. Madame S n a jamais fait l objet d aucun reproche sur la qualité de son travail. Du 20 juin 2007 au 31 mai 2008, Madame S est arrêtée pour congé pathologique en lien avec sa grossesse suivi de son congé maternité. Pendant cette période, le cabinet X pallie son absence par la répartition de ses tâches sur les autres collaborateurs et par des embauches successives en CDD. Le 12 février 2009, Madame S apprend son cancer du sein et en fait part à Madame G et à Madame B, les deux experts comptables du cabinet. A compter du 12 février 2009, Madame S est en arrêt maladie et ce jusqu au 31 août 2010. Le 25 mars 2010, Madame S est convoquée par le cabinet X afin d envisager les conditions de sa reprise. Le 28 avril 2010, le médecin du travail lors d un examen médical précise : «pas d avis à rendre car salariée en arrêt maladie qu il y a lieu de poursuivre lors de la reprise du travail, il parait hautement souhaitable d envisager une reprise en mi-temps thérapeutique pendant quelques mois.» Le 21 mai 2010, Madame S est convoquée à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement, entretien fixé au 2 juin 2010. Le 18 juin 2010, Madame S est licenciée pour «désorganisation au sein du cabinet et nécessité de procéder à son remplacement définitif dus à son absence prolongée et ininterrompue depuis le 13 février 2009.» Le 1 er juillet 2010, Monsieur L est embauché en contrat à durée indéterminée pour remplacer définitivement Madame S. La réclamante a été licenciée alors qu elle était en arrêt maladie, l employeur considérant que : «votre absence prolongée et ininterrompue depuis le 13 février 2009 a entraîné une 2

désorganisation au sein du cabinet et notamment de graves difficultés dans la gestion de votre portefeuille ( ) entraînant une nécessité de procéder à votre remplacement définitif». Si l article L.1132-1 du Code du travail fait interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé, ce texte ne s oppose pas au licenciement motivé, non par l état de santé du salarié, mais par la situation objective de l entreprise qui se trouve dans la nécessité de pourvoir au remplacement définitif d un salarié dont l absence prolongée ou les absences répétées perturbent son fonctionnement. (Cass. Soc., 21 septembre 2005, n 03-45.820 ; Cass. Soc, 13 juillet 2005, n 03-47.990 ; Cass. Soc, 5 mai 2009, n 07-45.713). Il s agit là de conditions cumulatives, l employeur doit démontrer à la fois la perturbation engendrée par les absences du salarié et le fait que ces absences l ont contraint à procéder à son remplacement définitif. A défaut, le licenciement est discriminatoire et donc nul. (Cour d Appel de Paris, 7 septembre 2010). En premier lieu, le cabinet X soutient qu il a été contraint de licencier Madame S car il était dans l impossibilité de prévoir la date de reprise de la réclamante. Or, Madame S devait reprendre le travail initialement le 1 er juillet 2010. C est d ailleurs dans le cadre de sa future reprise de travail que la réclamante rencontre le médecin du travail, le 28 avril 2010, visite au cours de laquelle il est envisagé qu elle reprenne le travail en mi-temps thérapeutique. C est dans ce contexte que le 29 avril 2010, Madame S adresse un courrier électronique à Madame G, expert comptable du cabinet X, lui précisant qu elle fait suite à sa visite chez le médecin du travail lui recommandant une reprise en mi-temps thérapeutique. Madame S doit donc reprendre le travail à cette période là et le mis en cause est parfaitement informé de cette reprise, contrairement à ce qui est allégué. Le compte rendu d entretien préalable au licenciement du 2 juin 2010 fait d ailleurs état de cette reprise, puisque Madame S y précise qu elle doit reprendre en juillet 2010 comme évoqué entre elle et Madame G. Lors de l entretien préalable, le conseiller du salarié, Monsieur C, demande si Madame G est au courant du retour de Madame S qui répond : «Oui, mais le mi-temps thérapeutique n est pas possible, ça désorganise le cabinet.» Madame S indique alors à Madame G que le mi-temps n est qu une recommandation de la médecine du travail mais qu aucune démarche n a été engagée en ce sens. Le cabinet X a donc licencié Madame S alors qu elle avait connaissance de sa date imminente de reprise. Or, il a été jugé qu est sans cause réelle et sérieuse le licenciement d un salarié en raison de ses absences prolongées pour maladie, alors que l employeur avait prononcé ledit licenciement au moment où le salarié était apte à reprendre le travail et où son remplacement n était en conséquence plus nécessaire. (Cass. Soc., 30 mai 2007, n 06-42796). De plus, il ressort des courriers électroniques communiqués par le mis en cause que Madame S n a eu de cesse de donner des nouvelles aux deux experts comptables de l évolution de son état de santé pendant toute la durée de ses arrêts maladie et est même restée disponible alors qu elle était arrêtée. 3

En deuxième lieu, s agissant de la désorganisation alléguée par le mis en cause engendrée par les absences de Madame S depuis le 13 février 2009, il convient de s intéresser au lien de causalité entre l absence de la salariée et les difficultés rencontrées par l entreprise, notamment au regard de la qualification professionnelle et de l emploi occupé par la salariée. Ainsi, un salarié dépourvu de toute qualification ou de qualification peu élevée peut aisément être remplacé, le cas échéant par recours à l intérim. Les absences du salarié ne sont alors pas de nature à entraîner la désorganisation de l entreprise. (Cass. Soc., 19 décembre 1991, n 91-40966). Le cabinet X soutient que le poste occupé par Madame S comporte des spécificités importantes, des connaissances particulières liées à l activité de l entreprise, que le cabinet X est une petite structure au sein de laquelle le collaborateur comptable est en charge d un portefeuille de clients gérés de façon autonome et complète et qu elle joue l interface entre le client et l expert comptable, qui lui délègue la gestion courante des dossiers. Le cabinet précise enfin que la stabilité du collaborateur est un élément essentiel pour son bon fonctionnement. Or, le mis en cause ne peut pas raisonnablement arguer d une nécessité absolue de stabilité sur ce poste d assistante comptable quant il est constaté, à la lecture du registre d entrée et de sortie du personnel, qu il existe un important roulement de salariés sur ce poste. En effet, à titre d exemple, Madame R est embauchée comme employée comptable N4 (comme Madame S) du 10/09/2002 au 30/06/2003, Madame BT, employée comptable N4 du 06/01/2003 au 31/05/2003, Madame H, employée comptable N4 du 06/01/2003 au 27/05/2004, Madame Z, employée comptable N4 du 16/06/2004 au 18/11/2005, Madame F, employée comptable N4 du 15/12/2005 au 25/01/2006, Madame J, employée comptable N4 du 02/01/2006 au 30/04/2006, Monsieur W, employé comptable N4 du 03/04/2006 au 28/02/2007 La stabilité de ce poste d employée comptable N4 n est donc pas une réalité et cela depuis de très nombreuses années au sein des effectifs du cabinet X. Pour justifier des désorganisations qu auraient entraînées les absences de madame S, le cabinet X communique alors des courriers de clients datés du 31 mai 2010 au 17 février 2011 qui font état d insatisfaction du fait du «défilé» des collaborateurs sur ce poste, de retard dans le traitement de dossiers et de périodes fiscales désorganisées. Il convient de relever que ces courriers sont tous postérieurs à la décision de l employeur de rompre le contrat de travail de Madame S, soit après le 21 mai 2010 date de la convocation à entretien préalable au licenciement. Or, la désorganisation invoquée par l employeur doit s apprécier au moment où il prend la décision de licencier le salarié malade. De plus, dans le compte rendu d entretien préalable du 2 juin 2010, lorsque le conseiller du salarié demande à Madame G si elle a reçu des plaintes écrites de clients concernant la désorganisation, elle répond n avoir eu aucun écrit. Monsieur K, client du cabinet X, dans son courrier du 14 décembre 2010, soit six mois après le licenciement de Madame S, se plaint d un bilan toujours en «décalé» compte tenu du défilé des collaborateurs et ce depuis 2001, soit neuf ans avant le licenciement de la réclamante. 4

Tous les autres courriers de clients, rédigés en termes généraux, font état de retards et désagréments dans le suivi des dossiers sur l exercice 2009. Toutefois, le fait que tous ces courriers soient adressés postérieurement à l engagement de la procédure de licenciement et que le «défilé» des collaborateurs au poste de Madame S soit une réalité du cabinet X depuis de nombreuses années ne sauraient suffire à établir la désorganisation invoquée. Enfin, les perturbations alléguées par le mis en cause doivent avoir eu pour conséquence la nécessité pour le cabinet X de procéder au remplacement définitif de Madame S par une embauche en contrat à durée indéterminée. Il est de jurisprudence constante que l absence du salarié ne perturbe pas l entreprise lorsque des solutions de remplacement temporaires sont possibles, lesquelles ont été trouvées et pouvaient être prolongées. (Cass.Soc, 5 mai 2009, n 07-45.713). En l espèce, Madame S a été absente une première fois du 20 juin 2007 au 31 mai 2008 pendant son congé maternité puis à compter du 12 février 2009, date à laquelle elle apprend son cancer du sein. Le cabinet X, pendant l intégralité de ces périodes, a toujours su remplacer Madame S par des solutions de remplacement temporaires. De même, le critère de la nécessité du remplacement définitif du salarié malade n est pas rempli lorsque les absences du salarié peuvent être palliées par un travail supplémentaire des autres employés ou l embauche d un travailleur intérimaire. (Cass. Soc, 13 mars 2001, n 99-40.110) En l espèce, le cabinet X précise que pour pallier l absence de la réclamante pendant 18 mois, et, afin d assurer la gestion de son portefeuille, les dossiers ont été répartis entre les experts comptables et les autres collaborateurs et par le recrutement de deux salariés en CDD, Madame EG et Monsieur L. En effet, il ressort des pièces communiquées que Madame EG a été embauchée en CDD du 30 mars 2009 au 31 juillet 2009, puis Monsieur L du 15 juin 2009 au 1 er juillet 2010, date de son embauche en contrat à durée indéterminée. Le cabinet X a donc parfaitement été en mesure de s adapter aux absences répétées et prolongées de Madame S en ayant recours à la fois à une répartition de ses tâches auprès des autres salariées et par l embauche de contrats précaires. La haute autorité a d ailleurs déjà considéré dans sa délibération n 2009-349 du 5 octobre 2009 que, dès lors que le mise en cause n apporte pas d éléments probants justifiant qu une absence prolongée engendre des perturbations telles qu elles nécessitent le remplacement définitif de la personne absente, il convient de considérer que le motif véritable du licenciement n est pas la désorganisation de l entreprise mais la maladie. En l espèce, l employeur ne démontrant ni la perturbation occasionné par l absence de Madame S, ni la nécessité du remplacement définitif, il convient de considérer que le licenciement a été motivé par l état de santé de cette dernière. Or, l article L.1132-1 du Code du travail interdit de licencier un salarié en raison de son état de santé. Le Défenseur des droits considère donc que Madame S a subi une discrimination en raison de son état de santé. 5