MESSAGE DES FEMMES AGRICULTRICES Novembre 2010 1
PLAIDOYER POUR LA PRESENCE DES FEMMES DANS LES INSTANCES DE PRISE DE DECISIONS ET POUR LEUR ACCES A LA TERRE En initiant le projet sous régional dénommé Using law for rural women s empowerment in West Africa le Bureau sous régional du WILDAF entend contribuer à la réalisation de l objectif 3 des objectifs du millénaire pour le développement qui vise l autonomisation des femmes. Le projet est parti du constat selon lequel les femmes, malgré leur importance numérique (51,7% selon les données du dernier recensement de 2006), sont sous représentées dans les instances de prise de décisions aussi bien au niveau central que local au Burkina Faso. Par ailleurs, en milieu rural elles ont rarement accès à la terre alors que celle-ci constitue la principale source de revenus. L analyse de la situation des deux communes rurales dans lesquelles s exécute le projet à savoir Kombissiri et Ziniaré, confirme ce constat. LA PRESENCE DES FEMMES DANS LES INSTANCES DE DECISIONS Au niveau de la commune rurale de Kombissiri La commune de Kombissiri est située à une quarantaine de kilomètres de la capitale sur l axe Ouagadougou-Pô. Sur une population totale de 16 821 habitants, les femmes sont au nombre de 8705 soit 51%. Quel est le constat en ce qui concerne la présence des femmes dans les structures de prise de décision? Au plan politique : 123 conseillers municipaux dont 80 hommes et 43 femmes. Il faut dire que la décision du parti au pouvoir de faire la promotion de la parité a donné des résultats positifs parce que les femmes sont suffisamment représentées dans le conseil municipal. On note malheureusement que sur les 7 maires de communes, il n y a pas de femmes. C est dire que les femmes ne sont pas dans les postes de responsabilité. Au niveau des 11 villages concernés par le projet, les femmes sont très peu nombreuses dans la structure de base qu est le Comité Villageois de Développement (CVD). Généralement, en dehors du poste de la responsable féminine réservé aux femmes par le texte, le reste est occupé par les hommes. Aucun CVD n est dirigé par une femme. En matière de gestion des conflits : Aucune femme n est membre des tribunaux départementaux, ni de la commission d indication et de règlement des litiges institué au niveau des communes. Dans le domaine de la santé : les femmes sont très faiblement représentées dans les Comités de gestion des centres de santé (COGES) et dans les comités de lutte contre le sida installés dans les communes et villages. Alors qu en matière de santé, 2
les femmes sont plus concernées que les hommes dans la mesure où la division sociale des tâches domestiques leur attribue les soins de santé de la famille. Au niveau de la commune rurale de Ziniare La commune rurale de Ziniaré compte 62 746 habitants soit 33 030 femmes et 29 940 hommes soit 52,64% de femmes. Quel est le constat en ce qui concerne la présence des femmes dans les structures de prise de décision? Au plan politique : sur 107 conseillers municipaux 48 sont des femmes. A ce niveau on peut dire qu un gros effort a été fait et mérite d être salué à sa juste valeur. Notre souhait est que cet élan se poursuivre pour les élections avenir. Nous prenons aussi l engagement de soutenir et de contribuer à l amélioration de la participation des femmes dans cette instance. Cependant on note que sur 7 maires de commune que compte la province, il y a une seule femme. Des efforts doivent être faits pour relever ce nombre. Au niveau des villages concernés par le projet, le nombre de femmes varie entre 2 et 3 femmes sur les 12 membres que compte le Comité Villageois de Développement (CVD). On note que sur un ensemble de 45 CVD, aucun n est dirigé par une femme alors que le CVD constitue une structure très importante de prise de décision au niveau village. En matière de gestion des conflits : seulement deux femmes sont membres d un tribunal départemental sur un total 35 membres. Sur les deux femmes membres des tribunaux départementaux, une est préfet et préside donc le tribunal départemental de son ressort Dans le domaine de la santé : les femmes sont très faiblement représentées dans les Comités de gestion des centres de santé (COGES) et dans les comités de lutte contre le sida installés dans les communes et villages. Alors qu en matière de santé, les femmes sont plus concernées que les hommes dans la mesure où la division sociale des tâches domestiques leur attribue les soins de santé de la famille. L ACCES DES FEMMES A LA TERRE Quel constat fait-on par rapport à l accès des femmes à la terre? S agissant de l accès des femmes à la terre, le constat est le même dans les deux localités du projet. En effet, les règles d acquisition de la terre dans les zones rurales sont régies par les coutumes en dépit de l existence de la loi n⁰034-2009/an du 16 juin 2009 portant régime foncier rural. Or, selon les dites coutumes, les femmes n héritent pas de la terre parce celle-ci appartient à une famille. Alors que la femme est considérée comme étrangère dans sa famille et dans celle de son mari. S agissant des terres cultivables, celles-ci sont généralement données aux femmes à titre de prêt lorsqu elles sont regroupées en associations ou groupements. La durée du prêt pas jamais précisée. Ce qui laisse au propriétaire de la retirer quand il veut 3
et très souvent lorsque la terre a été rendue fertile par des apports en engrais ou en composte. En ce qui concerne les parcelles d habitation, la femme n y a généralement pas droit, au motif qu elle n est pas chef de famille. Dans les périmètres aménagés, la répartition des domaines d exploitations agricoles, des intrants et des moyens modernes de production se fait par famille; ce qui exclut les femmes parce que non responsables de famille, même lorsqu elles vivent seules pour cause de veuvage ou pour tout autre raison. Cela justifie d ailleurs le fait que les femmes ne soient pas représentées dans les commissions d attribution des parcelles. Aucune femme n est membre de la commission d attribution de la commune de Ziniaré et de Kombissiri. Quelles sont les conséquences d une telle situation? Les conséquences qui découlent de l absence des femmes dans les structures de prise de décision sont entre autres: - Une participation très limitée des femmes au développement de la communauté ; - La méconnaissance des intérêts et besoins des femmes entrainant leur prise en compte dans les décisions concernant le développement de la communauté dont elles font partie ; - La non prise en compte des intérêts des enfants, généralement liés à ceux de leur mère ; - Le ralentissement du développement du pays tout entier, parce que privé de l apport d une frange importante de sa population. Le non accès des femmes aux terres cultivables, aux intrants agricoles, aux périmètres aménagés et aux parcelles d habitation limite leur source de revenu et accroit grandement leur pauvreté ; de même qu il porte atteinte à leur droit à l égalité dans la jouissance des biens de la communauté. Pourquoi les femmes doivent-elles être présentes dans les structures où se décide la vie de la communauté? 1. En tant que femmes, elles ont leur façon de voir la vie et des événements. Elles peuvent, si elles sont consultées compléter et enrichir les idées des hommes ; 2. En tant que membres de la communauté, elles ont aussi leur mot à dire sur la manière dont celle-ci est gérée ; 3. Elles ont des besoins spécifiques qui ne peuvent être traduits que par ellesmêmes ; 4. Le Burkina Faso a pris des engagements envers la communauté internationale en ratifiant des conventions sur l égalité de traitement entre les femmes et les hommes. 4
Pourquoi les femmes doivent-elles accéder à la terre? 1. En milieu rural, la terre demeure la principale source de richesse pour les habitants. Il serait donc injuste de ne pas permettre à la femme d exploiter la terre pour se procurer des revenus. 2. Lorsque la femme a des revenus propres, elle contribue à la prise en charge des enfants et de la famille 3. L autonomisation de la femme contribue à la réduction de la pauvreté ; 4. Le Burkina a ratifié la plupart des instruments juridiques internationaux reconnaissant l égalité de traitement entre l homme et la femme. Or, le fait de denier à la femme le droit de posséder dans les mêmes conditions que l homme est une injustice faite à la femme ; Sollicitations Nous femmes rurales, sollicitons des autorités coutumières et administratives : 1. La présence d au moins 40 de femmes dans toutes les structures de décision au niveau village et communautaire. 2. La prise de décisions imposant un minimum de cinq ans la durée de prêt des terres cultivables aux femmes; 3. La prise de décision permettant aux femmes de bénéficier de parcelles d habitation au même titre que les hommes. 4. La prise de décision permettant aux femmes exploitantes agricoles de bénéficier des mêmes avantages d'accès aux intrants agricoles et aux moyens modernes de production. Nous avons foi en votre engagement en faveur de la cause de la femme et espérons qu une suite favorable sera réservée à notre requête. 5