Comment fonctionne la CNEDiMTS L évaluation des dossiers de demande d inscription sous nom de marque sur la Liste des Produits et Prestations Remboursables La Commission nationale d évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS) fait partie de la Haute Autorité de santé. Au sein de cette autorité publique indépendante à caractère scientifique, la CNEDiMTS formule des recommandations et rend des avis en vue du remboursement de dispositifs médicaux ou d autres produits à visée diagnostique, thérapeutique ou de compensation du handicap (à l exclusion des médicaments) et des prestations qui leur sont associées. Elle éclaire ainsi les pouvoirs publics sur les décisions de remboursement et contribue à améliorer la qualité des pratiques professionnelles et des soins aux patients. Un avis nécessaire pour toute inscription sous nom de marque Un fabricant (ou un distributeur) a deux possibilités d inscription de son produit sur la Liste des Produits et Prestations remboursables (LPPR). Il peut l inscrire sur une ligne générique 1. Il peut aussi l inscrire sous nom de marque, si le produit présente un caractère innovant ou si l impact sur les dépenses d assurance maladie, les impératifs de santé publique ou le contrôle des spécifications techniques minimales nécessite un suivi particulier du produit ou de la prestation. Cette inscription sous nom de marque ne peut se faire qu après avis de la Commission nationale d évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS). Pour formuler son avis sur le service attendu d un produit ou d une prestation, la CNEDiMTS travaille en trois étapes. I Le recueil et l analyse des informations Les informations nécessaires à la Commission ont trois sources : le dossier fourni par le fabricant ; l étude de la littérature, notamment pour une catégorie de produits non encore évaluée par la CNEDiMTS, si besoin, le recours à un ou des professionnels externes. 1 Une ligne (ou description) générique représente un ensemble de produits ou prestations qui ont la même indication, remplissent la même fonction et présentent des caractéristiques communes appelées «spécifications techniques». Les produits ou prestations regroupés sous une même ligne générique sont remboursés par l assurance maladie sur la base d un tarif unique. 1
Ces informations sont analysées par un chef de projet du Service d Evaluation des Dispositifs de la HAS. Elles décrivent le produit ou la prestation, font le point sur la pathologie en cause et son traitement, permettent d évaluer le rapport effet/risque du produit et d envisager son intérêt de santé publique (ISP), c est-à-dire les conséquences de son utilisation à l échelle de la population française et l impact de sa prise en charge sur le système de soins. Les professionnels externes peuvent éclaircir d éventuelles zones d ombre, principalement en ce qui concerne la stratégie diagnostique ou thérapeutique de référence, la place du produit dans cette stratégie et la transposabilité des résultats des essais à l utilisation «dans la vie réelle». II L évaluation du Service Attendu et de l Amélioration du Service Attendu Le SA est un service clinique. Il répond à des besoins des professionnels de santé et des patients dans une pathologie ou un handicap. Il se mesure à l amélioration clinique de l état du patient. Lors d une réunion de la CNEDiMTS, pour chaque produit ou prestation étudié : Le membre référent de la Commission présente la pathologie, les différents traitements et la stratégie de référence. Le chef de projet présente la synthèse des informations recueillies dans le dossier et la littérature. La Commission peut entendre, pour éclairer ses réflexions, un ou des professionnels externes. La CNEDiMTS étudie ensuite le Service Attendu (SA) du produit et l éventuelle Amélioration du Service Attendu (ASA) par rapport à un comparateur, à partir des informations recueillies sur le besoin médical, la stratégie actuelle, le rapport efficacité/risque du produit et son intérêt de santé publique. Elle évalue en particulier la pertinence de l ASA éventuellement revendiquée par le demandeur. Après délibération, les membres de la CNEDIMTS doivent voter pour préciser, dans chaque indication, si le Service Attendu est suffisant, et pour indiquer s il existe une Amélioration du Service Attendu. 1) Le Service Attendu (SA) est-il suffisant? La réponse, par oui ou par non, dépend pour l essentiel des réponses aux questions suivantes et ce, indication par indication : a) Quel est le besoin médical auquel le produit ou la prestation apporte une réponse? Les données de la littérature renseignent sur le besoin médical : quelle est la pathologie ou le handicap et quel est le nombre de patients concernés? La pathologie ou le handicap en question sont-ils graves, en terme de mortalité, de morbidité et de qualité de vie? 2
b) Quelle est actuellement la stratégie diagnostique et/ou thérapeutique ou de compensation d'un handicap de référence? Est-elle efficace? Est-elle efficiente? La littérature et l avis d un professionnel externe permettent de définir les critères pertinents pour évaluer le produit (ou de la prestation) proposé(e). Les critères cliniques permettent d évaluer son rapport effet/risque. c) L effet clinique est-il suffisant au regard des risques liés à l utilisation du produit et à ses effets indésirables? L étude des essais cliniques permet de préciser les effets du produit : son effet thérapeutique ou de compensation du handicap (ou son apport au diagnostic, selon les cas) ; ses effets indésirables, pour le patient mais aussi, dans certains cas, pour l opérateur (fréquence, gravité) ; les limites, les contraintes et les risques liés à son utilisation. d) Les preuves fournies par le fabricant sont-elles suffisamment pertinentes? Les éléments fournis doivent apporter des preuves scientifiques. Les critères de jugement doivent correspondre à l effet diagnostique, thérapeutique ou de compensation du handicap. Les modes d évaluation de l efficacité du produit, de ses effets secondaires et des risques liés à son utilisation reposent sur des critères cliniques pertinents. e) Quelle est la place du produit dans la stratégie diagnostique, thérapeutique ou de compensation du handicap, pour l indication revendiquée? Cette place dépend du rapport effet/risque du produit dans les essais cliniques réalisés. Les conditions d utilisation dans la vie réelle sont susceptibles de modifier ce rapport effet/risque. Les prescripteurs doivent pouvoir correctement repérer la population concernée. Par exemple, la CNEDiMTS doit préciser si le produit s utilise en première, deuxième, voire troisième intention. Les indications du produit doivent être codifiées, de même que les modalités d apprentissage. Il faut aussi déterminer comment le produit s intègre dans l organisation des soins habituelle, et quelles sont les adaptations à réaliser. f) Le produit a-t-il un intérêt de santé publique? L impact du produit sur la santé publique est fonction de son effet prévisible sur le système de soins (nombre de consultations, nombre et durée des hospitalisations, nombre d actes ) et de son effet potentiel sur la santé de la population (morbidité, mortalité, handicap, qualité de vie ). 3
2) Y a-t-il une Amélioration du Service Attendu (ASA)? Si oui, de quel niveau? Il s agit de comparer le SA du produit au service rendu par les moyens occupant une place comparable dans la stratégie de référence. La décision dépend des réponses aux questions suivantes : a) Quel est le comparateur retenu? Le comparateur doit être une référence clinique pertinente selon les données actuelles de la science (pour tous les types de moyens diagnostiques, thérapeutiques ou de compensation du handicap, remboursés ou non). b) Quels sont les critères de comparaison? Les critères d amélioration doivent être cliniquement pertinents. Il peut s agir de l efficacité (mortalité, morbidité, compensation du handicap, qualité de vie), des effets indésirables, de la commodité d emploi, de l efficience, etc. c) Une comparaison est-elle disponible, et son niveau de preuve est-il suffisant? Il faut disposer d études cliniques comparatives s appuyant sur une méthodologie reconnue. Il est recommandé que la comparaison soit directe, mais une comparaison indirecte peut dans certains cas être admissible. La mesure du niveau de preuve aidera à la décision. III La formulation de l avis 1) L avis adopté par la CNEDiMTS indique si le Service Attendu (SA) est suffisant pour justifier la prise en charge du produit (ou de la prestation) par la collectivité. Que la décision soit positive ou négative, elle doit être motivée. Si le SA est suffisant, l avis doit préciser : la stratégie thérapeutique avec les recommandations d utilisation, les modalités éventuelles d encadrement de la prescription (évaluation du produit, modalités de délivrance de soins, qualification des praticiens utilisant ce produit et mode d apprentissage de son utilisation) et le conditionnement le mieux adapté au produit. 2) L avis indique aussi l Amélioration du Service Attendu (ASA), le ou les critères concernés, le comparateur retenu et la population concernée. L ASA est cotée de I à V. Elle est déterminée par les changements dans la prise en charge, les modifications de la mortalité, de la morbidité et de la qualité de vie, et la commodité d emploi. ASA I, amélioration majeure ASA II, amélioration importante ASA III, amélioration modérée : ASA IV, amélioration mineure ASA V : absence d amélioration. 4
Si une ASA V est retenue et que le produit répond à une description générique, la Commission devra préciser le mode d inscription qu elle recommande : - inscription sous description générique ; - inscription sous nom de marque lorsque les impératifs de santé publique, l impact sur les dépenses d assurance maladie ou le contrôle des spécifications techniques nécessitent un suivi particulier, dont les conditions doivent être définies. 3) L avis doit apporter des précisions complémentaires concernant la population cible, l opportunité d études sur le service rendu dans la vie réelle après l avis sur le SA et l échéance souhaitable de réévaluation du produit. Quelle est la population cible? La nature de la population concernée est précisée d après les indications retenues et la stratégie thérapeutique. Sa taille est aussi évaluée au vu des données épidémiologiques. Des études sur le service rendu dans la vie réelle sont-elles nécessaires? La Commission demande de telles études si elle considère que le service attendu est suffisant pour la prise en charge du produit par la collectivité, mais que des données complémentaires sont nécessaires pour atteindre différents objectifs : déterminer la transposabilité des résultats des essais cliniques à la pratique dans la vie réelle à l'échelle d'une population : reproductibilité de la pratique, adaptation du système de soins au produit, observance du traitement par le malade. déterminer le rapport efficacité/effets indésirables à long terme. déterminer le respect des indications et de l encadrement. déceler un risque particulier dans tout ou partie de la population cible (cette possibilité est d autant plus forte que le rapport entre le nombre de patients inclus dans les essais cliniques et la population cible est faible). déterminer l efficience du produit. Enfin, quelle doit être la durée de l inscription du produit sur la LPPR? Le produit devra être réévalué par la Commission au bout de 5 ans au maximum. Dans certains cas, notamment lorsqu une étude clinique a été demandée, la Commission décide de réévaluer le produit avant cette limite. 4) L avis ainsi formulé ne deviendra définitif qu après une possible phase contradictoire demandée par le fabricant pour faire reconnaître ses observations. 5) L avis définitif est transmis au CEPS. Il est consultable sur le site de la HAS, www.has-sante.fr. Ses conclusions sont traduites en anglais. 5