COMPLICATIONS DOULOUREUSES ET IMPLICATION DU ERGOTHERAPIE : I.F.E.R. Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes



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Transcription:

I.F.E.R. Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes COMPLICATIONS DOULOUREUSES ET IMPLICATION DU PATIENT DANS SA PRISE EN CHARGE EN ERGOTHERAPIE : De l information à l auto-rééducation En vue de l obtention du Diplôme d Etat d ergothérapeute GINTZ Marion

I.F.E.R. Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes COMPLICATIONS DOULOUREUSES ET IMPLICATION DU PATIENT DANS SA PRISE EN CHARGE EN ERGOTHERAPIE : De l information à l auto-rééducation En vue de l obtention du Diplôme d Etat d ergothérapeute GINTZ Marion

Merci tout d abord à Mme Claude CHARPENTIER, maître de mémoire qui m a accompagnée et conseillée dans l élaboration de ce travail. Merci à tous les ergothérapeutes qui ont eu la patience et la sympathie de répondre au questionnaire. Enfin, merci à toutes les personnes qui m ont soutenue, relue et corrigée.

SOMMAIRE INTRODUCTION...p. 1 1. Définition de la notion de complication douloureuse..p. 4 1.1. Le système nerveux périphérique.p. 4 1.1.1. Généralités...p. 4 1.1.2. Constitution d un nerf périphérique...p. 4 1.2. La lésion neurologique périphérique...p. 5 1.2.1. Les mécanismes étiologiques.p. 5 1.2.2. La classification des lésions nerveuses traumatiques.p. 6 1.2.2.1. La classification de Seddon..p. 6 1.2.2.2. La classification de Sunderland...p. 7 1.3. L évolution de la lésion nerveuse..p. 7 1.3.1. Les modifications distales..p. 7 1.3.2. Les modifications proximales.p. 8 1.3.3. La régénération axonale..p. 8 1.4. La complication douloureuse...p. 9 1.4.1. La douleur...p. 9 1.4.1.1. Définitions de la douleur...p. 9 1.4.1.2. Les différentes composantes de la douleur..p. 11 1.4.1.3. L évaluation de la douleur...p. 12 1.4.1.4. Douleur aiguë et douleur chronique...p. 13 1.4.2. Le phénomène de complication douloureuse...p. 14 1.4.2.1. Généralités sur les douleurs neuropathiques..p. 14 1.4.2.2. Circonstances d apparition des complications douloureuses..p. 15 1.4.2.3. Manifestation des complications douloureuses..p. 16 1.4.2.4. Définition de termes relatifs aux complications douloureuses p. 18 1.4.2.5. Facteurs d aggravation ou de sédation des douleurs neuropathiques..p. 19 1.5. La douleur et ses conséquences sur la personne...p. 19 1.5.1. Les retentissements psychologiques de la douleur...p. 19 1.5.2. Les particularités de la douleur neuropathique.p. 20 1.5.2.1. Contexte de la lésion neurologique périphérique d origine traumatique..p. 21 1.5.2.2. Les retentissements fonctionnels de la douleur...p.21 1.5.2.3. Les retentissements psychologiques des douleurs neuropathiques.p.23 Marion GINTZ

2. Problématique de recherche....p. 24 2.1. Définition de la notion d éducation thérapeutique...p. 24 2.2. Problématique..p. 24 3. Incidence de l éducation thérapeutique sur l évolution des complications douloureuses : Démarche de recherche...p. 26 3.1. Méthodologie p. 26 3.1.1. Démarche de recherche p. 26 3.1.2. Démarche de réalisation du questionnaire p. 26 3.1.3. Professionnels ciblés.p. 27 3.2. Analyse des réponses...p. 28 3.2.1. Les complications rencontrées......p. 28 3.2.2. Information du patient...p. 29 3.2.3. Evaluation de la douleur...p. 30 3.2.4. Rééducation et traitement des complications douloureuses...p. 32 3.3. Interprétation des résultats et propositions...p. 34 3.3.1. Interprétation des réponses...p. 34 3.3.1.1. Information du patient.p. 35 3.3.1.2. Evaluation de la douleur.p. 37 3.3.1.3. Rééducation et traitement des complications douloureuses.p. 39 3.3.2. Conclusion de l enquête...p. 42 3.3.3. Propositions...p. 42 3.3.3.1. Concernant l information du patient p. 43 3.3.3.2. Concernant les évaluations.p. 44 3.3.3.3. Concernant l auto-rééducation..p. 46 4. Limites et apports de la recherche..p. 47 4.1. Limites du travail de recherche..p. 47 4.2. Apports de la recherche pour l exercice de la profession d ergothérapeute..p. 48 CONCLUSION...p. 49 RESSOURCES DOCUMENTAIRES GLOSSAIRE ANNEXES Marion GINTZ

INTRODUCTION «La douleur est sans doute l expérience humaine la mieux partagée, avec celle de la mort : aucun privilégié ne revendique son ignorance à son endroit ou ne se targue de la connaître mieux que quiconque.» David LE BRETON, Anthropologie de la douleur. 1 J ai souhaité introduire mon sujet avec cette citation de David LE BRETON. En effet, qui dans sa vie n a pas une fois eu mal? La douleur est une sensation que chacun a pu «expérimenter» au moins une fois au cours de son existence (traumatisme, blessure, coupure, etc.). Pourtant, malgré le fait que cette expérience soit commune et usuelle, ne pouvons-nous pas penser que l individu qui souffre se sent seul et désemparé face à sa douleur? En effet, la douleur est également une expérience personnelle perçue différemment par chaque individu et dépendant de divers facteurs (physiologiques, psychologiques, culturels, religieux, etc.). Ainsi le patient qui souffre et le thérapeute ont un vécu et une vision différents de la douleur et bien qu à priori on puisse penser que cela rendra difficile les échanges et la communication entre ces deux acteurs, tout thérapeute se doit de prendre en compte la douleur du patient et de tout faire pour limiter les effets de cette douleur destructrice. Car «la douleur paralyse l activité de pensée ou l exercice de la vie. Elle pèse sur le jeu du désir, le lien social. Elle crée le sentiment d un malheur à tout instant remâché par celui qu elle touche et d une grâce particulière échue à ceux qu elle épargne.» 2 La douleur est un phénomène complexe, il existe différentes catégories de douleur : les douleurs par excès de nociception, les douleurs psychogènes et les douleurs neurogènes ou neuropathiques qui font l objet de ce travail. C est au cours d un de mes premiers stages cliniques que j ai été confrontée à la réalité des douleurs neuropathiques. J ai eu l occasion de prendre en charge un patient, Monsieur F. qui souffrait d une complication douloureuse dénommée «allodynie mécanique» (douleur causée par un stimulus qui normalement ne produit pas de douleur) dans un contexte d étirement du plexus brachial. Cette rencontre m a beaucoup interpellée, touchée et a suscité quelques questionnements. En effet, cette complication, invisible à l inverse des troubles moteurs, s avérait être très importante dans ses répercussions tant sur le plan fonctionnel que 1 LE BRETON D., Anthropologie de la douleur, Métaillé, 1995, p.23. 2 Op. cit., p.26. Marion GINTZ Page 1

psychologique. Elle gênait toute préhension, affectait le moral du patient, l empêchait de dormir la nuit et retentissait ainsi sur sa qualité de vie. C est en fait le paradoxe entre un trouble qui n est apparemment pas «visible» et les conséquences qui en découlent qui m a motivée à effectuer de plus amples recherches dans ce domaine. De plus, j ai pu observer que dans le service où était hospitalisé ce patient, les ergothérapeutes proposaient également quelques techniques d auto-rééducation afin que les patients souffrant comme lui de complications douloureuses puissent poursuivre au domicile, en dehors des séances de rééducation, le traitement de la douleur. De ces différents éléments observés a découlé ma question de départ qui était : «Quels sont les retentissements dans la vie quotidienne, socio-familiale et professionnelle des complications douloureuses survenant suite à une lésion neurologique périphérique d origine traumatique? Quels peuvent être nos moyens d évaluation et quelles solutions proposer?» Cette question de départ m a amenée à effectuer des recherches dans les domaines de la neurologie périphérique, des troubles de la sensibilité cutanée, de la douleur et ses conséquences, son évaluation ainsi que son traitement. Ce premier recueil de données m a permis d élaborer une problématique de recherche qui concerne l influence que peuvent exercer à la fois l information du patient et son implication par le biais de l auto-rééducation sur l évolution des complications douloureuses. Les recherches qui ont suivi m ont amenée jusqu à la notion «d éducation thérapeutique» qui m a semblé très intéressante et qui, comme le précise l Organisation Mondiale de la Santé, «implique des activités organisées de sensibilisation, d information, d apprentissage de l auto-gestion et de soutien psychologique, concernant la maladie et le traitement prescrit [ ]». Afin de traiter de ce sujet, je développerai dans une première partie les grandes notions théoriques concernant la lésion neurologique périphérique, le phénomène de complication douloureuse ainsi que les retentissements de la douleur sur la personne. Dans un deuxième temps, je présenterai quelques notions concernant l éducation thérapeutique et ma problématique qui en découle. Dans la partie suivante, sera exposée la démarche de recherche avec l élaboration d un questionnaire destiné à des ergothérapeutes dont j effectuerai une analyse et une interprétation des résultats. Enfin, dans une quatrième partie, je présenterai les limites de mon travail de recherche mais également les apports de celui-ci pour l exercice de la profession d ergothérapeute. Marion GINTZ Page 2

Des exemples concernant Monsieur F. viendront alimenter la première partie afin de rendre plus concrets certains éléments théoriques, c est pourquoi je souhaite rapidement le présenter : Monsieur F. est âgé de 19 ans, il est droitier, célibataire et sans enfant. Il vit chez ses parents avec sa sœur âgée de 15 ans dans un appartement au rez-de-chaussée d un immeuble comportant cinq marches d accès. Il effectue sa première année de DUT Génie électrique et informatique industrie et l essentiel de son travail s effectue sur ordinateur. Monsieur F. se rend tous les jours à l IUT en voiture (80 km aller-retour). Concernant ses loisirs, il pratique le handball en club, le vélo, le ski et le karting. Il s agit donc d un jeune homme actif, qui effectue des études et qui se déplace quotidiennement en voiture. Monsieur F. est victime d un accident de ski entraînant une atteinte du plexus brachial droit, il est pris en charge en ergothérapie un mois après son traumatisme. Marion GINTZ Page 3

1. Définition de la notion de complication douloureuse. 1.1. Le système nerveux périphérique. 1.1.1. Généralités. Le système nerveux périphérique, prolongement du système nerveux central, est un véritable réseau de communication qui relie toutes les régions du corps au système nerveux central. Il est formé de deux groupes de nerfs. Les nerfs sympathiques constituant le système nerveux autonome ou végétatif et les nerfs cérébro-spinaux constituant le système somatique. Le système végétatif régit les fonctions internes et agit indépendamment de la volonté en collaborant avec le système somatique afin de permettre l ajustement du corps à son activité. Le système somatique régit nos relations avec le monde extérieur et agit sous contrôle de la volonté. Les nerfs qui le constituent sont les nerfs crâniens et les nerfs rachidiens ; ils véhiculent la sensibilité des revêtements cutanés et muqueux et commandent les muscles striés squelettiques. 1.1.2. Constitution d un nerf périphérique. Le nerf périphérique est constitué de faisceaux d axones 3 et a pour fonction de conduire l influx nerveux de la cellule nerveuse jusqu aux effecteurs. La structure d un nerf périphérique est représentée sur les schémas ci-contre. Lorsque la fibre nerveuse innerve un muscle, le corps cellulaire se trouve dans la corne antérieure de la moelle épinière, l effecteur est la plaque motrice d un muscle spécifique et le sens de l influx nerveux est alors proximo-distal. Lorsqu il s agit d une fibre sensitive, le corps cellulaire se trouve dans le ganglion spinal, l effecteur est un récepteur sensitif 4 (nocicepteur 5 ou mécanorécepteur 6 ) et le sens de l influx se fait du récepteur sensitif vers la cellule nerveuse. L axone est entouré d une gaine de myéline 7 formée par l enroulement du cytoplasme des cellules de Schwann 8 ; cette gaine présente des dépressions régulières appelées nœuds de Ranvier 9 qui correspondent à l interstice qui sépare deux cellules de Schwann. Les fibres nerveuses sont regroupées au sein d un nerf en différents faisceaux entourés d une enveloppe 3 Cf. glossaire. 4 Cf. glossaire. 5 Cf. glossaire. 6 Cf. glossaire. 7 Cf. glossaire. 8 Cf. glossaire. 9 Cf. glossaire. Marion GINTZ Page 4

conjonctive, c est ce qu on appelle les fascicules. Chaque fascicule est délimité par une gaine, le périnèvre 10. Entre les fibres constituant le fascicule se situe l endonèvre 11, riche en tissu conjonctif et en vaisseaux. Enfin, entre les différents fascicules du nerf se trouve une enveloppe conjonctive, l épinèvre 12 qui s épaissit à la périphérie pour former le névrilème. 1.2. La lésion neurologique périphérique. Toute situation entraînant un ralentissement, une anomalie ou un interruption de la conduction nerveuse peut être considérée comme une situation pathologique. Il existe différents types de mécanismes étiologiques à l origine des lésions traumatiques des nerfs périphériques. Afin d en déterminer l importance, ces lésions peuvent également être classées selon deux classifications : la classification de Seddon et la classification de Sunderland. Pour traiter ce sujet que sont les complications douloureuses, j ai choisi de cibler mes recherches sur la lésion traumatique des nerfs périphériques. 1.2.1. Les mécanismes étiologiques. Nous pouvons distinguer trois mécanismes lésionnels principaux. Il arrive assez souvent que ces mécanismes soient associés entre eux. La section : Elle peut être plus ou moins étendue et plus ou moins complète. Elle résulte d une plaie directe (traumatismes ouverts par arme blanche, arme à feu, verre, outils, etc.) et est donc associée à une atteinte des parties molles avoisinantes. La section peut se présenter de différentes manières qui auront une incidence sur les possibilités de réparation et de récupération. Quelques exemples de sections : section franche, section-arrachement qui s accompagne d une dilacération, section-écrasement L étirement : Il peut s observer dans le cas de fractures, luxations, arrachements de segments de membre. Les atteintes plexiques par étirement peuvent se rencontrer à la suite de graves traumatismes comme les accidents de la voie publique ou accidents de ski dont a été victime Monsieur F. 10 Cf. glossaire. 11 Cf. glossaire. 12 Cf. glossaire. Marion GINTZ Page 5

La compression : Elle peut être brève et transitoire ou prolongée. Son origine peut être due à un hématome, au maintien prolongé dans une position comprimant le bras, par exemple lors du sommeil ou lors d une anesthésie générale, ou encore à la compression par un plâtre ou un appareillage, etc. Autres lésions : Il existe d autres mécanismes de lésion nerveuse observés en dehors des traumatismes précédents, purement «mécaniques». Il peut s agir entre autre de brûlures électriques ou d irradiation. 1.2.2. La classification des lésions nerveuses traumatiques. Les lésions nerveuses produites par les mécanismes précédents peuvent être classées selon leur importance anatomique et histologique. La classification de Seddon met en évidence trois types de lésions et la classification de Sunderland, elle, met en évidence cinq degrés de gravité croissante. Tout comme plusieurs mécanismes lésionnels peuvent être associés pour un même nerf, plusieurs types de lésions peuvent s associer sur des fascicules différents d un même nerf. 1.2.2.1. La classification de Seddon : La neurapraxie : Il s agit d une contusion 13 ou d un étirement simple de l axone dont la continuité est conservée. Elle correspond donc à une interruption momentanée de la conduction nerveuse dûe à des lésions ne touchant que la gaine de myéline. La principale cause mécanique est la compression et la récupération débute lorsque la cause de la compression est supprimée. Une lésion de neurapraxie pure d origine compressive spontanée ou traumatique récupère en général dans des délais variables de quatre à douze semaines. L axonotmésis : Dans le cas de l axonotmésis, il y a une interruption de la continuité des axones, mais il existe une solution de continuité grâce aux structures histologiques qui sont restées intactes et qui vont guider la repousse nerveuse. Ces structures histologiques préservées peuvent être soit les tubes endoneuraux, soit le périnèvre, soit l épinèvre. Le plus souvent, les mécanismes à l origine de cette lésion sont l écrasement et l étirement. 13 Cf. glossaire. Marion GINTZ Page 6

Si le corps cellulaire est intègre, la régénération pourra avoir lieu. La fibre nerveuse va reconstituer sa partie distale en étant guidée par les gaines existantes jusqu à la plaque motrice ou jusqu au récepteur sensitif. La récupération fonctionnelle sera variable selon la gravité et l étendue de la lésion. Il est possible que d après son étiologie, l atteinte plexique de Monsieur F. soit de type axonotmésis. Le neurotmésis : Cette lésion correspond à la fois à une interruption des axones et des gaines qui l entourent. Il y a une perte complète de la continuité du nerf, le mécanisme à l origine est donc une section qui s accompagne d une rétraction des deux extrémités du nerf. Il n y a aucun espoir de récupération spontanée, seul un geste chirurgical permettra d observer une récupération. 1.2.2.2. La classification de Sunderland : 1 er degré Neurapraxie de Seddon (la lésion ne touche que la gaine de myéline et la continuité de l axone est conservée). 2 e degré Interruption de la continuité des axones mais les tubes endoneuraux sont préservés et vont guider la repousse nerveuse. 3 e degré Interruption de la continuité des axones, les tubes endoneuraux sont atteints mais le périnèvre est préservé et va guider la repousse nerveuse. 4 e degré Atteinte des tubes endoneuraux et du périnèvre. L épinèvre est préservé mais la repousse nerveuse sera de mauvaise qualité et nécessitera une intervention chirurgicale. 5 e degré Neurotmésis de Seddon, la seule possibilité de récupération est l intervention chirurgicale. 1.3. L évolution de la lésion nerveuse. 1.3.1. Les modifications distales. Après une lésion complète d un nerf périphérique, on observe distalement la dégénérescence dite «wallérienne». Quelques jours après la section, la partie distale du nerf devient incapable de conduire l influx nerveux. En dehors de l axone et de la gaine de myéline, toutes les autres structures de l extrémité distale du nerf restent intactes (endonèvre, vaisseaux, etc.). Les cellules de Schwann, elles, survivent et prolifèrent sous la forme d un Marion GINTZ Page 7

cordon de cellules dit «bande de Büngner». Elles conservent leur potentiel de remyélinisation pendant plusieurs années. 1.3.2. Les modifications proximales. Suite à la section d un nerf périphérique, l extrémité proximale de l axone va évoluer en deux phases, une phase de «survivance» et une phase de régénération 14. La phase de «survivance» dure entre dix et vingt jours et est marquée par une augmentation progressive du volume du corps cellulaire et par une augmentation de son métabolisme. Nous pouvons également noter que l extrémité proximale de l axone dégénère jusqu au nœud de Ranvier sus-jacent, puis après quelques jours de dégénérescence, l extrémité de l axone bourgeonne. 1.3.3. La régénération axonale. La phase de régénération débute entre le quatrième et le vingtième jour après la section et sa durée peut s étaler sur deux à dix mois selon la longueur d axone à régénérer. Elle est marquée par le bourgeonnement de l extrémité proximale de l axone sectionné et correspond à un phénomène naturel de repousse de l axone dans le tube endoneural distal. Si ce bourgeon axonal proximal rencontre une bande de Büngner, les cellules de Schwann qui la constituent se retubulisent autour de la repousse axonale et la remyélinisent. Par contre, s ils ne rencontrent pas de cellule de Schwann mais du tissu conjonctif (endonèvre, épinèvre, etc.), les axones prolifèrent localement, bourgeonnent, un tissu cicatriciel se forme et englobe l ensemble donnant un renflement pseudo-tumoral. La récupération ne pourra se faire qu à condition qu il y ait un contact possible entre les bourgeons axonaux proximaux et les bandes de Büngner correspondantes. En absence de rupture ou si les deux extrémités du nerf ont été parfaitement suturées, la repousse sera guidée par les gaines nerveuses jusqu aux terminaisons périphériques. Cette repousse de l axone se fait à une vitesse moyenne de l ordre de un millimètre par jour mais elle dépend de très nombreux facteurs avec des variations parfois assez importantes d un individu à l autre. Parmi les facteurs les plus connus figurent 15 : - La nature de la lésion (qui modifie le délai initial nécessaire au bourgeonnement proximal de l axone et la vitesse de repousse axonale). 14 REVOL M., SERVANT J.M., Paralysies de la main et du membre supérieur, Médecine et Sciences Internationales, 1987, p.63. 15 Op. cit., pp.63-64. Marion GINTZ Page 8

Représentation très schématique de la structure d un nerf périphérique 1 A : Les corps cellulaires sont situés dans la corne antérieure de la substance grise de la moelle pour les neurones moteurs et dans le ganglion spinal pour les neurones sensitifs. B : La coupe transversale d un tronc nerveux montre l épinèvre (1), le périnèvre fasciculaire (2), l endonèvre (3) et les fibres nerveuses (4). C : La figure C montre le corps cellulaire (5), l axone (6), la myéline et les cellules de Schwann (7), les nœuds de Ranvier (8) et la membrane basale (9). 1 Marc REVOL, Jean-Marie SERVANT. Paralysies de la main et du membre supérieur. Editions Médecine et Sciences Internationales, 1987, p.62.

- L âge du patient (en principe un enfant ou un adulte jeune récupère mieux qu un sujet plus âgé). - Le niveau lésionnel (plus la lésion est haute sur le tronc du nerf, plus les signes de récupération fonctionnelle apparaissent rapidement). - Le temps nécessaire à la repousse (plus le temps écoulé depuis la réparation est long, plus la vitesse de régénération est lente). D autres facteurs interviennent encore dans le pronostic de réparation nerveuse comme la nature du traumatisme, la longueur de la perte de substance nerveuse, les troubles associés, l état local du membre et le délai séparant le traumatisme de la réparation nerveuse ainsi que la technique chirurgicale employée. Enfin, n oublions pas qu il faudra également que les récepteurs de la fibre nerveuse régénérée aient conservé des capacités de récupération. D autres travaux récents expliquent que lorsque la régénération axonale est achevée, il reste une possibilité de récupération sensitive grâce au phénomène de neuroplasticité. «La neuroplasticité se définit comme la capacité du système nerveux central chez l adulte de se réorganiser et de modifier ses fonctions en s adaptant aux changements externes et internes.» 16 B. DEGRANGE, L. NOEL, C. SPICHER et E. M. ROUILLER pensent que la neuroplasticité mise en évidence au niveau du système moteur pourrait aussi se produire dans le système somesthésique. «Suite à des stimulations vibrotactiles le bourgeonnement d axones sains pourrait compenser les axones lésés, [ ].» 17 1.4. La complication douloureuse. 1.4.1. La douleur. 1.4.1.1. Définitions de la douleur. Selon le dictionnaire «Le Petit Larousse», la douleur est : «une sensation pénible, désagréable, ressentie dans une partie du corps. Douleur aiguë.» 18. Pour le dictionnaire de médecine Flammarion, la douleur est «une sensation anormale et désagréable provoquée par l excitation excessive d une partie vivante de l organisme, perçue 16 HERNANDEZ, MUELLA S., MULAS F. et MATTOS L cités par : DEGRANGE B., NOEL L., SPICHER C., ROUILLER E. M., De la rééducation de l hyposensibilité cutanée tactile à la contre-stimulation vibrotactile, in Expériences en ergothérapie, Sauramps Médical, 2006, p. 208. 17 DEGRANGE B., NOEL L., SPICHER C., ROUILLER E. M., De la rééducation de l hyposensibilité cutanée tactile à la contre-stimulation vibrotactile, in Expériences en ergothérapie, Sauramps Médical, 2006, p. 209. 18 Dictionnaire le petit Larousse 2003, Larousse, 2002, p.347. Marion GINTZ Page 9

et intégrée au niveau le plus élevé du cortex cérébral, qui lui confère son caractère de «vécu personnel» et sa tonalité émotionnelle et affective» 19. La distinction entre douleur somatique et psychogène peut être effectuée de cette manière : le soma «désigne le corps en tant qu organisme physique, par opposition à la psychée, c est-à-dire au phénomène psychique» 20. Psychogène signifie : «dont la cause relève du fonctionnement psychique» 21. Nous pouvons alors déduire de ces deux dernières définitions que la douleur somatique correspond à une douleur qu on appelle communément «douleur physique» par opposition à la douleur psychogène qui correspond plutôt à une «douleur morale». Une définition de la douleur a été établie en 1979 par l Association Internationale de l Etude de la Douleur (I.A.S.P.). Il s agit d «une expérience sensorielle et émotionnelle 22 désagréable, liée à une lésion tissulaire existante ou potentielle, ou décrite en termes évoquant une telle lésion.» 23 Dans cette définition, nous retrouvons : - la composante sensitive : la douleur peut être localisée et son intensité décrite ; - la composante affective : la douleur est insupportable, angoissante, déprimante. L I.A.S.P. donne une définition riche de sens à la douleur. C est une «expérience», c est-àdire qu elle constitue une connaissance unique, singulière, spécifique à chacun, susceptible de se modifier selon son histoire personnelle. La douleur est «sensorielle», c est-à-dire qu elle utilise nos sens, notre capacité à percevoir, à décoder et à intégrer les stimuli. Mais la douleur est également «émotionnelle», elle s enracine dans la subjectivité de la personne, il peut être difficile de l évaluer et de la quantifier au moyen des échelles analogiques de la douleur. Notons cependant que les définitions proposées insistent beaucoup sur l importance donnée à l'appréciation de la douleur par le patient lui-même, cela pouvant conduire, entre autres, à méconnaître la douleur de ceux qui n'ont pas cette capacité d'auto-appréciation. Enfin, n oublions pas que comme la douleur est une expérience singulière, spécifique à chacun, ses niveaux de perception et de tolérance dépendront de nombreux facteurs comme la 19 Dictionnaire de médecine Flammarion, Médecine-Sciences, Flammarion, 2001, p.287. 20 Op. cit., p.811. 21 Op. cit., p.738. 22 La sensation est par exemple la brûlure ou le picotement alors que l émotion correspond par exemple au malaise ou à la peur engendré par la douleur. 23 JACQUOT L., L ergothérapie et la douleur chronique, Journal d ergothérapie, Edition Médicale Techni Media Services, Sept. 2004, n 15, p.29. Marion GINTZ Page 10

culture, la religion et le milieu sociologique, l éducation parentale, le contexte d apparition de la douleur et la signification que le patient lui donne (injustice, punition ) 24. Pour le thérapeute la douleur est considérée comme un signal d alarme, il s agit d un avertisseur biologique des dangers menaçant l intégrité de l organisme obligeant le corps lésé à se mettre au repos. Elle peut s avérer gênante, frustrante, insupportable ; rendant les soins difficiles. La douleur peut également être considérée en tant que symptôme et de ce fait peut participer à l établissement d un diagnostic «par exemple quand la douleur prédomine plus la nuit que le jour ce qui peut orienter vers une origine de déafférentation ou de composante algodystrophique en contexte postopératoire orthopédique» 25. En dehors de son signal d alarme, elle est une ennemie contre laquelle nous avons à lutter activement en nous disant qu elle est un non-sens. 1.4.1.2. Les différentes composantes de la douleur. Toute douleur peut être présentée selon quatre composantes 26 : La composante sensori-discriminative qui correspond aux mécanismes neurophysiologiques permettant le décodage de la qualité (brûlures, décharges électriques, torsions, etc.), de la durée (brève, continue, etc.), de l intensité et de la localisation des messages nociceptifs 27. La composante affectivo-émotionnelle qui confère à la douleur sa tonalité désagréable, pénible, voire insupportable. Elle est toujours fonction d un état antérieur (douleur ayant déjà été ressentie) et peut se prolonger vers des états émotionnels comme l anxiété ou la dépression. La composante cognitive qui désigne l ensemble des processus mentaux susceptibles d influencer la perception et les réactions comportementales qu elle détermine : processus 24 ISELIN F., PEZE M., REDONDO P., Douleurs des lésions des nerfs périphériques du membre supérieur, in Paralysies nerveuses périphériques du membre supérieur, Masson, 1991, (Collection de pathologie locomotrice), pp.58-64. 25 DANSAULT C., PELLIEUX S., METIVIER J.C., FOUQUET B., Processus d évaluation de la douleur par l équipe de soins infirmiers, in Douleur et Médecine physique et de réadaptation, Masson, 2000, (Collection Problèmes en médecine de rééducation), pp.254-261. 26 CAIRE J.M., TAUNAIS A., SUREAU P., BROCHET B., DOUSSET V., SIBRAC M.C., L entretien, un espace d évaluation de l impact de la douleur sur la qualité de vie et BLAIN E., DANIEL J., PETRILLI S., Expérience de mise en place d un Comité de Lutte contre la Douleur au sein d un Centre de Médecine Physique et de Réadaptation pour adultes, in Journal d ergothérapie, Edition Médicale Techni Media Services, Sept. 2004, n 15, p.6 et 22. 27 Cf. glossaire. Marion GINTZ Page 11

d attention, d interprétation et de valeur attribuée à la douleur. Elle est forcément en rapport avec des facteurs socio-culturels et l histoire personnelle du sujet. La composante comportementale qui représente les mécanismes de réaction que nous mettons en place face aux douleurs. Elle englobe l ensemble des manifestations verbales et non verbales observables chez la personne douloureuse (plaintes, mimiques, postures antalgiques ) qui constituent des indices reflétant l importance du problème de la douleur. Cette composante est propre à chacun et est susceptible d évoluer au cours de la vie. La douleur est donc multidimensionnelle, ce qui explique que le retentissement douloureux se répercute dans toute la vie du patient, tant au niveau relationnel, socio-familial, qu au niveau affectif et cognitif. Ces répercutions de la douleur sur la vie du sujet seront détaillées dans la partie «1.5. La douleur et ses conséquences sur la personne». 1.4.1.3. L évaluation de la douleur. La douleur, si subjective soit-elle, doit être évaluée par l ensemble de l équipe soignante afin de mieux comprendre le patient et de mieux le soigner. L évaluation pratiquée par l ergothérapeute sera importante notamment pour ajuster la prise en charge rééducative mais aussi pour connaître les retentissements que la douleur peut avoir dans la vie quotidienne, sur le niveau d indépendance et sur le moral du patient. Cette évaluation s effectuera grâce à un entretien avec le patient au cours duquel sont recueillis les circonstances d apparition de la douleur, sa périodicité, ses localisations, ses caractéristiques, son intensité ainsi que ses retentissements dans les activités de la vie quotidienne, socio-familiale et professionnelle. Pour cela, nous avons à notre disposition différents types d outils validés qu il est important de connaître. Certains sont plutôt restrictifs et n évaluent qu une dimension de la douleur. Mais comme nous l avons vu précédemment la douleur est multidimensionnelle d où l importance de savoir combiner plusieurs de ces outils d évaluation. Ces outils validés sont : les échelles unidimensionnelles, pluridimensionnelles et comportementales. Les échelles unidimensionnelles : Ces échelles apprécient la douleur en l'assimilant à une sensation globale d'intensité. Il est demandé au patient de coter sa douleur au moment présent, sa douleur la plus importante des 24 heures écoulées, sa douleur la plus faible des 24 heures écoulées et la moyenne de sa douleur des 24 heures. Marion GINTZ Page 12

Il existe trois types d échelles unidimensionnelles : - l échelle visuelle analogique (le patient déplace le curseur de la réglette sur laquelle figure à gauche "pas de douleur" et à droite "douleur maximale imaginable", sur la face évaluateur figure une graduation de 0 à 10 cm) ; - l échelle verbale simple (le patient choisit un qualificatif correspondant à l'intensité de sa douleur : pas de douleur, faible, modérée, intense, extrêmement intense) ; - l échelle numérique (le patient donne un chiffre à sa douleur compris entre 0 et 10 : zéro correspondant à l'absence de douleur, et 10 à la douleur maximale imaginable). Monsieur F. évaluait sa douleur entre 6 et 7 sur 10. Les échelles pluridimensionnelles : Ces échelles correspondent à des listes d'adjectifs qui analysent plus particulièrement les composantes sensorielles et émotionnelles de la douleur. Ces questionnaires sont divisés en plusieurs rubriques ou catégories et chaque catégorie comprend des sous-classes. Les plus connues sont : - le MPQ : Mac Gill Pain Questionary élaboré par Melzack et Wall - le QDSA : Questionnaire Douleur Saint-Antoine 28, adaptation française du MPQ. Les échelles comportementales : Ce type d échelles apprécie les retentissements de la douleur sur les comportements ou la qualité de vie du patient (par exemple, état de dépression : échelle de BECK). L'évaluation comportementale de la douleur est un des seuls moyens disponibles afin d évaluer la douleur des personnes ayant des difficultés d'expression verbale (par exemple un enfant en bas âge, un patient présentant des troubles des fonctions supérieures...). Cependant, n oublions pas que le comportement douloureux du patient dépend de nombreuses variables (influences éducatives, normes culturelles et religieuses, personnalité du patient ) et que la perception du comportement douloureux grâce à l'observation dépend aussi de la personnalité, de l expérience, de la disponibilité de l évaluateur. 1.4.1.4. Douleur aiguë et douleur chronique. La douleur aiguë assure la survie de l individu grâce à des actions de protection (elle est un signal d alarme), de prévention (elle a une fonction d apprentissage), de traitement (elle impose le repos et limite l activité). La douleur aiguë survient brutalement et ne dure pas longtemps. 28 Cf. Annexe n 1. Marion GINTZ Page 13

Contrairement à la douleur aiguë, la douleur chronique perd cette finalité d avertisseur biologique car un signal continu 29 n est plus un signal d alarme. La douleur chronique s installe dans la vie du patient, elle est destructrice et inutile. Différentes causes peuvent expliquer sa perception, comme un échec du contrôle de la nociception : soit parce qu un afflux excessif et permanent de stimulation le déborde (douleurs somatiques), soit parce que des lésions compromettent le fonctionnement des dispositifs modulateurs (douleurs neurologiques), soit parce que le patient accorde au message une signification telle que, consciemment ou non, il se refuse à l inhiber, voire il l amplifie (douleurs psychogènes). L ANAES 30 définit le syndrome douloureux chronique d origine non maligne comme une douleur persistante qui peut concorder avec les données physiques et qui est associée avec au moins deux des conditions suivantes : - une détérioration progressive de la capacité fonctionnelle au domicile, sur le plan social et au travail ; - une augmentation progressive de la demande et du recours à des médicaments ou des procédures médicales invasives ; - un trouble de l humeur, de la colère et de l hostilité significatives. 1.4.2. Le phénomène de complication douloureuse. 1.4.2.1. Généralités sur les douleurs neuropathiques. Les douleurs, secondaires à une atteinte neurologique périphérique sont regroupées sous le terme de douleurs neuropathiques, douleurs neurogènes ou encore douleurs par désafférentation 31. Les mécanismes, les caractères sémiologiques et les thérapeutiques de ces douleurs diffèrent totalement des douleurs par excès de nociception (douleurs dues à une «hyperstimulation des récepteurs ou des conducteurs nerveux périphériques, soulagées par des traitements pharmacologiques» 32 ). A l origine des douleurs neuropathiques, nous pouvons retrouver un dysfonctionnement du système nerveux périphérique ou central. 29 En général, on parle de douleur chronique à partir d une durée comprise entre 3 et 6 mois d évolution. 30 ANAES (Agence Nationale d Accréditation et d Evaluation de Santé). Evaluation et suivi de la douleur chronique chez l adulte en médecine ambulatoire (page consultée le 22 août 2006). Site de la Haute Autorité de Santé, [en ligne] Adresse URL : http://www.has-sante.fr 31 Cf. glossaire. 32 ALBE-FESSARD D., La Douleur, Masson, 1996, p.149. Marion GINTZ Page 14

Comme nous l explique J. BRUXELLE 33, différentes circonstances traumatiques ou pathologiques peuvent être à l origine de lésions nerveuses périphériques ou centrales : - un traumatisme à type d étirement ou de section partielle ou totale d un nerf, secondaire à un accident ou à une intervention chirurgicale, - une compression nerveuse provoquée par une hernie discale, un engainement d un tronc nerveux par des éléments ligamentaires ou fibreux (canal carpien, fibrose post-chirurgicale ou post-radique), - un envahissement tumoral des structures nerveuses, - une infection, à l occasion d un zona 34, ou d une maladie de Lyme 35, - un accident vasculaire survenant au niveau de la moelle ou du cerveau, - des troubles métaboliques observés lors du diabète ou de l alcoolisme chronique, - les effets neurotoxiques de certains antimitotiques ou antituberculeux. Dans le cadre de ce travail, je ciblerai les douleurs neuropathiques dues à une lésion neurologique périphérique d origine traumatique. 1.4.2.2. Circonstances d apparition des complications douloureuses. Les douleurs neuropathiques sont souvent appelées douleurs de désafférentation, dans la mesure où elles résulteraient d une diminution des afférences sensitives périphériques, voire centrales, au sein du système nerveux central. «Après lésion ou section des afférences périphériques, les neurones spinaux ou supra-spinaux peuvent devenir hyperexcitables par des mécanismes encore imparfaitement élucidés : défaut d inhibition, démasquage de connexions excitatrices, hypersensibilité» 36 D autres travaux, plus récents démontrent également l implication de mécanismes périphériques dans l apparition des douleurs neuropathiques comme par exemple la transmission par contiguïté de l influx de fibre à fibre. Quelques semaines après la lésion, il se forme des connexions entre deux fibres conductrices au niveau du névrome 37 ou des fibres en cours de remyélinisation, que l on nomme éphapses 38. Ces connexions «anormales» font que des messages périphériques normalement non nociceptifs vont être véhiculés en cours de route 33 BRUXELLE J., Douleurs neuropathiques, in La Douleur, Diagnostic, Traitement et Prévention, Ellipses, 1995, p.283. 34 Cf. glossaire. 35 Cf. glossaire. 36 L infirmière et la douleur, sous la coord. DEYMIER V., WROBEL J., Institut UPSA de la douleur, 2001,p.36. 37 Cf. glossaire. 38 Cf. glossaire. Marion GINTZ Page 15

par des fibres véhiculant les messages nociceptifs 39. Ce phénomène ayant pour conséquence une analyse, au niveau des neurones médullaires, des messages non nociceptifs comme étant des messages douloureux. Les délais d apparition de ces douleurs varient selon l origine de la lésion. Le plus souvent, lorsque l origine est traumatique, la survenue de ces douleurs est assez rapide (quelques jours à quelques semaines) mais ces douleurs peuvent aussi survenir à distance du traumatisme alors que la lésion est cicatrisée. La douleur de Monsieur F. était présente dès la première évaluation de la douleur effectuée en ergothérapie, c est-à-dire un mois et dix jours après son accident. 1.4.2.3. Manifestation des douleurs neuropathiques/des complications douloureuses. Les douleurs neuropathiques ont une sémiologie variée que l on peut diviser en deux groupes : les douleurs spontanées et les douleurs provoquées. Selon B. CALVINO 40, «la lésion d un nerf périphérique ou d une racine nerveuse est associée à des douleurs chroniques, caractérisées par des douleurs spontanées de type brûlure accompagnées d hyperalgésies et d allodynies dans le territoire désafférenté.» Le schéma ci-contre récapitule les «Caractères sémiologiques des douleurs neurogènes» 41. Ces douleurs sont en général observées dans le territoire où se situe l hypo ou l anesthésie desservie par la structure nerveuse lésée. Elles peuvent être perçues en l absence de stimulation (douleurs spontanées) ou lors de stimulations (douleurs provoquées). On retrouve dans les douleurs spontanées une composante continue qui peut être superficielle (sensation de brûlure) ou profonde (sensation d étau, de crampe, de torsion, de contracture ) pouvant être associée à une composante paroxystique (décharges électriques, coup de poignard, élancements). Souvent plus intenses que les douleurs spontanées, les douleurs provoquées peuvent être l allodynie (douleur déclenchée par une stimulation non douloureuse) et l hyperalgésie (exagération de la douleur induite par une stimulation douloureuse). 39 BRUXELLE J., Op. cit. p.284. 40 CALVINO B., Les nouveaux concepts émergents dans la compréhension de la nociception et de la douleur, in Douleur et Médecine physique et de réadaptation, Masson, 2000, (Collection Problèmes en médecine de rééducation), pp.1-8. 41 Schéma réalisé à partir de l ouvrage : BOUGUERRA A., BELHASSEN S., BESSON J.M., BLOND S., COLLIGNON P., DEFONTAINE-CATTEAU M.C., DETAILLE U., MEYNADIER J., O MIEL G., PLAGHKY L., PREVINAIRE J.G., REMY-NERIS O., ROQUES C.F., Douleur neurologique et rééducation, Frison-Roche, 1998, p.11. Marion GINTZ Page 16

Le patient présente alors un fond douloureux permanent, caractérisé par des douleurs spontanées de type brûlure accompagnées d hyperalgésies et d allodynies. En plus de ces sensations douloureuses, le patient peut également ressentir des sensations non douloureuses mais désagréables telles que les paresthésies (fourmillement, picotement, engourdissement ) et les dysesthésies (mêmes sensations que les paresthésies ayant une tonalité plus désagréable) spontanées ou provoquées. Enfin, la sensation douloureuse est souvent associée à des phénomènes sympathiques apparaissant sous la forme de troubles vasomoteurs et de troubles de la sudation. Monsieur F. présentait une allodynie mécanique sur la face palmaire du pouce droit (de la base de l éminence thénar à la pulpe), c est-à-dire que chaque contact avec cette surface de peau déclenchait chez lui une sensation de brûlure d une intensité qu il évaluait à 6-7/10. Sur le plan trophique et cutané, cette allodynie mécanique s accompagnait d une amyotrophie de l éminence thénar et d une sécheresse cutanée du pouce et de l index droits. En théorie, il n existe pas de critère diagnostique établi afin de déterminer la présence d une douleur neuropathique. Néanmoins, en pratique, Claude SPICHER 42 explique que : «Vous pouvez parler de douleurs neuropathiques SI trois symptômes ou plus, parmi la liste suivante, sont décrits par le patient : «Brûlure» : sensation de brûlure cutanée à la surface comme une brûlure réelle ; à distinguer absolument de la sensation de cuisson, de feu à l intérieur du membre du syndrome loco-régional douloureux complexe de type II 43. «Engourdissement», ou vulgairement son synonyme «Endormissement» : Hypoesthésie. «Intouchable», «douleur au toucher» : Allodynie mécanique. «Elancement», «Décharges électriques» : c est ce que les Français nomment explicitement les «fulgurances». «Fourmillements», «Picotements», «Sensations bizarres» : Dysesthésies ou «Irradiations» : Paresthésies.» Ces descriptions qui constituent les symptômes peuvent être faites spontanément par le patient ou par l intermédiaire d un questionnement (comme le questionnaire de la douleur de Saint Antoine par exemple). 42 SPICHER C., Manuel de rééducation sensitive du corps humain, Médecine et Hygiène, 2003, p.132. 43 Cf. glossaire. Marion GINTZ Page 17

C est donc sous le terme de complications douloureuses que sont regroupées ces douleurs neuropathiques, douleurs secondaires à une atteinte neurologique périphérique. Ces complications douloureuses peuvent être de divers types, étant au centre de mon questionnement, il m a paru essentiel de les distinguer les unes des autres et de les définir précisément avant de débuter le recueil de données. 1.4.2.4. Définition de termes relatifs aux complications douloureuses : Les définitions ci-dessous sont tirées du dictionnaire de médecine Flammarion 44, de l ouvrage : «Le phénomène de la douleur, comprendre pour soigner» 45 ainsi que des définitions de l IASP que l on peut trouver dans l ouvrage : «Douleur neurologique et rééducation» 46. Allodynie : Douleur causée par un stimulus qui normalement ne produit pas de douleur. Causalgie : Douleur de type brûlure associée à une allodynie et à une hyperpathie faisant suite à des lésions nerveuses traumatiques résultant en des troubles vasomoteurs (circulation sanguine) et trophiques (facteurs nourriciers du système nerveux). Hyperalgésie : Douleur accrue à un stimulus nociceptif. Hyperesthésie : Sensibilité exagérée à toute stimulation excluant les stimulations sensorielles spécifiques. La localisation et la qualité du stimulus sont claires. Cette définition peut être utilisée pour une diminution du seuil d un stimulus et une réponse exagérée (hyperpathie), mais aussi pour une sensation douloureuse résultant d une stimulation normalement non douloureuse (allodynie). Hyperpathie : Syndrome douloureux caractérisé par un seuil de douleur diminué et une réponse excessive à une stimulation répétée. L hyperpathie peut être associée à l hyperesthésie et la dysesthésie. Une mauvaise localisation du stimulus, un délai de réponse augmenté, une sensation de radiation et des sensations persistantes peuvent être présents, et la douleur peut avoir un caractère explosif. Paresthésies et dysesthésies : sensations anormales, désagréables ou non désagréables mais non douloureuses à type de fourmillements, engourdissement, etc., qui peuvent être spontanées ou provoquées. 44 Dictionnaire de médecine Flammarion, Op. cit. 45 MARCHAND S., Le phénomène de la douleur, Comprendre pour soigner, Masson, 1998, 311 p. 46 BOUGUERRA A., BELHASSEN S., BESSON J.M., BLOND S., COLLIGNON P., DEFONTAINE- CATTEAU M.C., DETAILLE U., MEYNADIER J., O MIEL G., PLAGHKY L., PREVINAIRE J.G., REMY- NERIS O., ROQUES C.F., Douleur neurologique et rééducation, Frison-Roche, 1998, p.17. Marion GINTZ Page 18

1.4.2.5. Facteurs d aggravation ou de sédation des douleurs neuropathiques : Les douleurs neuropathiques peuvent être déclenchées par différentes stimulations que l on imagine difficilement pouvoir être nociceptives lorsque nous ne sommes pas concernés par ce type de douleur. Il peut s agir par exemple du contact d un vêtement sur la peau, du frottement d un drap ou du froid (dans le cas par exemple d une allodynie au froid). Au contraire, les douleurs pourront être soulagées par le frottement ou la palpation profonde de la zone douloureuse. Certains facteurs peuvent aggraver la sensation douloureuse comme les émotions et le stress alors que d autres comme le repos et la relaxation peuvent la soulager. Concernant les répercussions de la douleur sur le sommeil, on peut dire qu elle aura plus tendance à perturber le sommeil qu à empêcher le patient de le trouver. En effet, le patient douloureux pourra trouver le sommeil sans trop de difficulté mais pourra parfois être réveillé par cette douleur. 1.5. La douleur et ses conséquences sur la personne. 1.5.1. Les retentissements psychologiques de la douleur. Comme nous l avons déjà vu, les douleurs aiguës et les douleurs chroniques sont deux processus totalement différents : l un joue le rôle d avertisseur biologique et l autre s installe dans la vie du patient et est destructif et inutile. Grâce à cette opposition nous pouvons aisément comprendre que les retentissements psychologiques de ces douleurs ne seront pas les mêmes. La douleur aiguë si elle est intense et fréquente pourra générer une réaction anxieuse. L importance de la réaction anxieuse, pour un stimulus douloureux d intensité donnée, dépendra de la structure psychologique de l individu mais aussi de son histoire car comme toute information, la douleur va être comparée à des expériences antérieures pour subir une première interprétation. Cette anxiété primaire va entraîner une augmentation de la vigilance aux signaux d alerte. Il faudra alors être attentif à ce que cela ne provoque pas chez le patient des incertitudes et des craintes concernant son traitement. Cet exemple nous met en valeur l importance que peut avoir l information du patient, le comportement des différents intervenants de l équipe de soin et la cohérence de leur démarche. Marion GINTZ Page 19

La douleur chronique entraîne une modification de la thymie 47 dans le sens de la dépression. Cette humeur dépressive peut s accompagner dans certains cas d une irritabilité, d une diminution de la tolérance au stress et aux frustrations. Le patient a souvent conscience de la modification de son humeur et se sent coupable de son état. Cette culpabilité pourra entraîner une altération de l image de soi qui, associée à la douleur, peut perturber les relations du patient avec son entourage (familial, professionnel, social ) et peut conduire à un isolement progressif du patient et à une inhibition (notamment dans la prise d initiatives). D autre part, la douleur chronique va être responsable dans certains cas d un arrêt des activités professionnelles, sociales, voire quotidiennes, cela pouvant également avoir un retentissement psychologique et générer un isolement, une dévalorisation et modifier les relations avec l entourage. Irritabilité, auto-dépréciation, culpabilité, repliement sur soi, inhibition sont les symptômes de la dépression, conséquence de la douleur chronique. Ces retentissements de la douleur chronique apparaissent en général dans les trois à six mois suivant le début de la pathologie douloureuse. Enfin, gardons à l esprit que toutes ces modifications sur le plan psychologique peuvent amplifier la perception de la douleur et faire entrer le patient dans le cercle vicieux de la douleur. 1.5.2. Les particularités de la douleur neuropathique. Dans le cas des douleurs neuropathiques, nous avons vu précédemment que le patient peut présenter un fond douloureux permanent auquel peuvent s associer des douleurs spontanées ayant une composante paroxystique et des douleurs provoquées. On retrouve classiquement dans les ouvrages les douleurs neuropathiques dans la catégorie «douleur chronique» ce qui est effectivement justifié puisque la douleur neuropathique dure dans le temps et qu on ne peut pas admettre qu elle assure la survie de l individu grâce à des actions de protection, de prévention et de traitement comme nous avons pu le voir dans la partie 1.4.1.4. Douleur aiguë et douleur chronique. Dans le cas des complications douloureuses survenant suite à une lésion nerveuse périphérique d origine traumatique d autres facteurs interviennent. 47 Cf. glossaire. Marion GINTZ Page 20