LEUCEMIES AIGUES MYELOIDES

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Sommaire : LEUCEMIES AIGUES MYELOIDES - définition - incidence, facteurs étiologiques - signes cliniques - hémogramme - myélogramme - morphologie des blastes - principales réactions cytochimiques utiles au diagnostic - classification FAB de 1976 - les anomalies cytogénétiques et moléculaires - classification OMS de 2001 - immunophénotype - diagnostic différentiel des LAM - facteurs pronostiques et traitement 1. Définition Les leucémies aiguës myéloïdes (LAM) sont un ensemble de proliférations malignes aboutissant à l accumulation dans la moelle, le sang et éventuellement d'autres organes, de précurseurs des cellules sanguines de nature myéloïde et bloqués à un stade précoce de leur différenciation (blastes). Le diagnostic repose sur l examen cytomorphologique du sang et de la moelle et l étude cytogénétique. L immunophénotype des blastes et l étude moléculaire complètent le diagnostic et sont en outre utiles au pronostic et aux nouveaux protocoles thérapeutiques. Le traitement des LAM repose avant tout sur la chimiothérapie, éventuellement complétée par l'allogreffe de cellules souches hématopoïétiques, et dans certains cas par des thérapeutiques plus spécifiques. On estime ne pouvoir guérir que 30 à 50% des LAM. 2. Incidence, facteurs étiologiques 3 nouveaux cas / 100 000 H / an, soit 2500 nouveaux cas de LAM/an en France Les LAM prédominent chez l'adulte (avec une médiane autour de 60 ans, et une incidence qui augmente pour atteindre de 10 pour 100 000 sujets de 80 ans et plus) On retrouve des facteurs prédisposants dans environ 10 % des LAM : exposition professionnelle au benzène ou ses dérivés, traitement antérieur par chimiothérapie antimitotique et/ou radiothérapie (se souvenir des effets secondaires des bombes atomiques), prédisposition génétique (trisomie 21, neurofibromatose). Plusieurs études montrent que le tabagisme chronique double le risque d hémopathie 3. Signes cliniques Ils sont la conséquence de la prolifération des blastes dans la moelle (les cellules normales deviennent quiescentes), puis de l accumulation éventuelle dans un ou plusieurs organes. MAJ : janvier 2007 Page 1 sur 10

La symptomatologie liée aux cytopénies sanguines est plus ou moins marquée : - syndrome anémique - syndrome infectieux - syndrome hémorragique Le syndrome tumoral est inconstant : Les adénopathies sont rares Une splénomégalie est rencontrée dans 15 20% des cas, orientant vers une LA à composante monocytaire L hyperplasie gingivale et les localisations cutanées (leucémides) sont plus fréquentes pour les LA à composante monocytaire Parfois localisations neurologiques (comme dans les LAL) Deux situations d urgence nécessitent le transfert d urgence en milieu spécialisé : * les signes de détresse respiratoire liés à la leucostase, conséquence des grandes hyperleucocytoses, possible au-delà de 100 G/L * Un syndrome hémorragique diffus, lié autant à la thrombopénie majeure qu à une coagulopathie de consommation (CIVD et/ou fibrinolyse) 4. Hémogramme 4.1. Anémie quasi constante : modérée à très sévère (hémoglobine = 5-13 g/dl) normochrome normocytaire arégénérative (réticulocytes bas). Si macrocytose : évoquer soit une carence vitaminique (consommation excessive de folates par les cellules tumorales), soit la présence d une myélodysplasie associée ou préexistante Sur l étalement sanguin, rechercher : hématies ponctuées, poïkilocytose, double population d hématies, présence d érythroblastes circulants, qui évoquent une dysérythropoïèse 4.2. Leucocytes: De la leucopénie franche (< 1G/L) sans blastes circulants jusqu à l hyperleucocytose majeure (100-500 G/L) Blastes : nombre variable (parfois presque 100%); un nombre > 20% évoque d emblée d une LA Morphologie des blastes : voir plus loin Neutrophiles : neutropénie fréquente avec parfois agranulocytose (< 0.3 G/L) nécessitant une démarche d urgence (idem agranulocytose), mais parfois nombre normal ou augmenté. On observe dans une partie des cas une dysgranulopoïèse morphologique avec des anomalies superposables à celles des SMD (hyposegmentation nucléaire, hypogranulation) Une myélémie, un excès de granulocytes basophiles ou une hyperéosinophilie sont possibles, selon les variants morphologiques. Une hypermonocytose caractérise les LAM à composante monocytaire MAJ : janvier 2007 Page 2 sur 10

Lymphocytes : nombre normal 4.3. Plaquettes : Thrombopénie dans la majorité des situations, pouvant être majeure (< 10 G/L) Dans quelques cas : nombre de plaquettes normal voire augmenté, mais lesyndrome hémorragique reste possible (thrombopathie) [Il faut toujours réaliser un bilan d hémostase à la recherche d un syndrome de défibrination au diagnostic d une LA] 5. Myélogramme Habituellement richement cellulaire Remarque : la moelle est pauvre dans < 10% des cas, et une biopsie ostéo-médullaire est alors nécessaire pour rechercher une myélofibrose Mégacaryocytes : en général absents ou très rares, en parallèle de la thrombopénie S ils sont présents : rechercher une éventuelle dysmégacaryopoïèse Blastose médullaire : 20 à 100% Il faut définir : - le % de blastes - la persistance d une lignée granulocytaire et dire s il existe une dysgranulopoïèse - quantifier les érythroblastes (< ou > 50%) et dire s il existe une dysérythropoïèse - le % de monocytes - la présence d éosinophiles morphologiquement anormaux, ou d un excès de granulocytes basophiles. 6. Morphologie des blastes Myéloblastes : cellules plus ou moins arrondies de taille variable (15-30 µm), avec rapport N/C = 0.8-0.95. Le contour nucléaire est souvent régulier (quelquefois un repli profond en cuvette), avec une chromatine fine et 1 à 3 nucléoles. Le cytoplasme est basophile et : - soit il est dépourvu de granulations - soit il contient quelques granulations rouges et/ou un corps d'auer (fin bâtonnet azurophile) - soit (10 15% des cas) les blastes sont très riches en granulations (ressemblent un peu à des promyélocytes) qui peuvent recouvrir ± totalement le noyau, et quelques cellules montrer de très nombreux corps d Auer (=aspect en fagots), évoquant la LA dite à promyélocytes Monoblastes : cellules de taille souvent élevée (20-30 µm), avec rapport N/C faible (0.6-0.9). Le contour du noyau est soit arrondi ou ovalaire (parfois en haricot) dans les cellules les moins différenciées, soit irrégulier et se rapprochant de celui d'un monocyte dans les cellules bien différenciées. La chromatine est fine, avec souvent un seul nucléole volumineux et subcentral pour les grandes cellules peu différenciées. Le cytoplasme est basophile pour les cellules peu différenciées et d aspect gris bleuté quand elles sont plus proches des MAJ : janvier 2007 Page 3 sur 10

monocytes ; quelques granulations (dispersées) sont parfois présentes, de même que quelques vacuoles. La membrane externe est lisse ou parfois émet des bourgeons. Mégacaryoblastes : cellules de taille réduite ou moyenne (12 20 µm), avec rapport N/C élevé parfois = 1 ; la membrane externe peut former des bourgeons ressemblant un peu a des plaquettes (à différencier des plaquettes collées de manière non spécifique sur des blastes) Proérythroblastes : parfois proches de leur contr partie normale, parfois indistinguables des blastes indifférenciés. 7. Principales réactions cytochimiques utiles au diagnostic. On recherche un composant ou une enzyme particulière à une lignée ou un stade de différenciation. - Cytochimie de la myéloperoxydase La myéloperoxydase caractérise les cellules myéloïdes granulocytaires et à un moindre degré les cellules monocytaires. L enzyme dégrade le perhydrol en présence de benzidine qui est oxydée et précipite sous forme de granulations marron vert, ou le chloronaphtol en donnant un produit rouge insoluble. Myéloblastes : positivité focale (uniquement à un pôle de la cellule). Mais parfois absence d enzyme (myéloblastes indifférenciés) ou au contraire positivité majeure et dans toutes les cellules («promyélocytes»?) Monoblastes : positivité en petits grains dispersés ou absence de positivité. Mégacaryoblastes : absence d activité. Remarque : toujours rechercher un éventuel déficit en myéloperoxydase des neutrophiles, signe de dysgranulopoïèse. - Cytochimie des estérases non spécifiques NASDA Hydrolyse du Naphtol-ASD-Acétate, qui donne de fins précipités bleus. Myéloblastes : réaction très faible ou absente Monoblastes : positivité franche, ayant la particularité d être inhibée en présence de fluorure de sodium (inhibition spécifique) Mégacaryoblastes : positivité variable, mais pas ou peu d inhibition. Butyrate estérase (estérase «spécifique»). L hydrolyse de l alpha naphtyl butyrate donne un produit rouge brun. Caractérise surtout les cellules monocytaires différenciées (petite positivité en 1 gros grain dans certains lymphocytes) Chloro-acétate estérases. L hydrolyse du Naphtol-ASD Chloro Acétate produit des précipités bleus dans les cellules de la lignée granulocytaire. En pratique : la cytochimie de la myéloperoxydase est indispensable au diagnostic d une LA, quelle que soit son origine. Les cytochimies des estérases sont à réaliser en fonction de l hypothèse proposée par l examen morphologique MAJ : janvier 2007 Page 4 sur 10

8. Classification FAB (Franco Américano Britannique) de 1976 Cette classification est encore utilisée aujourd hui : purement morphologique, elle s applique au laboratoire quand on ne dispose d aucun renseignement clinique (et cytogénétique). Il faut > 30% de blastes dans la moelle osseuse pour définir une LA (on s adapte aujourd hui en retenant a priori un seuil à 20% de blastes). Les critères sont définis sur le myélogramme. LAM zéro: LAM sans différenciation. (2% des LAM) Blastes > 90%; il s'agit de myéloblastes sans granulations ni corps d'auer ni positivité pour la MPO; l'immunophénotype est nécessaire (positivité pour 2 Ag myéloïdes) LAM1: LAM peu différenciée. (20% des LAM) Blastes > 90% ; myéloblastes avec quelques granulations, un corps d'auer, ou les 2; la cytochimie de la MPO est + dans 3% des blastes LAM2: LAM avec différenciation. (30% des LAM) Blastes : 30 90% (on tolère 20 90% aujourd'hui). Myéloblastes avec souvent un corps d'auer volumineux, et persistance d'une lignée granulocytaire (dysplasie particulière) Remarque: quelques cas sont associés à un excès de granulocytes basophiles. LAM3: LA dite à promyélocytes. (10% des LAM) Les blastes (>20 30%) sont souvent hypergranuleux et quelques uns contiennent des corps d'auer très nombreux (= fagots); MPO très +. Remarque: à côté de la forme classique il existe une forme "variante" ou LAM3v, dont les blastes sont pauvres ou dépourvus de granulations (ce variant est souvent hyperleucocytaire) LAM4: Leucémie myélomonocytaire aiguë. (15% des LAM) Ressemble à la LAM2, avec monocytose sanguine > 5 G/L ou monocytose médullaire > 20% (ou lysozyme sérique ou urinaire > 3N; N dans le sérum = 5-15 mg/l). Remarque: le variant LAM4eo présente dans la moelle (mais pas dans le sang) un excès d'éosinophiles dysplasiques. LAM5: LA monoblastique. (15% des LAM) Cellules monocytaires > 80% dans la moelle. Selon que les blastes sont des monoblastes (peu différenciés) ou plutôt des monocytes / promonocytes (aspect différencié) on définit les LAM5a ou LAM5b. La MPO est négative ou finement positive, et les estérases NASDA sont + et inhibées par le NaF. LAM6: érythroleucémie. (5% des LAM) Nécessite la présence de > 50% d'érythroblastes (parfois très dysplasiques). Le nombre de blastes doit être au moins de 30 pour 100 cellules de la granulomonopoïèse (en excluant du décompte les érythroblastes et lymphocytes) [dans la classification OMS ce nombre est de 20%). Les blastes sont des myéloblastes. LAM7: LA mégacaryocytaire. (2% des LAM) Les blastes sont des cellules mégacaryocytaires plus ou moins différenciées. La BOM et l'immunophénotype sont utiles pour conforter le diagnostic. MAJ : janvier 2007 Page 5 sur 10

9. Les anomalies cytogénétiques (CG) et moléculaires 9.1. La recherche d anomalies CG acquises Elle est indispensable au diagnostic : * la classification OMS des LAM utilise les données cytogénétiques * les anomalies CG ont un caractère pronostique. - LAM avec anomalies CG récurrentes selon l OMS : 4 anomalies ont une importance majeure : t(15;17), t(8;21), inv(16) ou t(16;16), anomalie 11q23 (gène mll). (= ; 30 % des pts) - Les LA avec délétion partielle ou complète des chromosomes 5 ou 7, ou des anomalies CG complexes ( 3 anomalies) sont de mauvais pronostic ; 20 25 % des pts - LAM avec anomalies CG diverses (+8, +11, divers ): 10-15 % des pts - LAM à caryotype normal: 40% des pts 9.2. Génétique moléculaire et DNA microarrays La technique des DNA microarrays permet d'étudier l'expression de plus de 15 000 gènes dans un échantillon donné (détermination de la quantité relative de cdna complémentaire). Les techniques dites "supervisées" permettent la prévision de classe (on classe le cas étudié dans un groupe déjà connu), et les techniques "non supervisées" sont utilisées pour trouver de nouvelles classes de pathologies (on classe les pts selon le profil d'expression génique). On peut classer les diverses LAM avec anomalies CG récurrentes de la classification OMS selon leur profil d'expression génique. On peut également classer les pts selon 3 groupes de risque: faible, intermédiaire, et élevé. Certains gènes sont mis en avant et sont utilisés comme base de chimiothérapies ciblées (duplication en tandem de FLT-3, dont la présence dans ± 20% des LAM est de mauvais pronostic, qui a une activité tyrosine kinase), ou de stratégies thérapeutiques selon leur expression ou non (FLT-3, RAS, WT1 (gène de la tumeur de Wilms), NPM (nucléophosmine). MAJ : janvier 2007 Page 6 sur 10

10. Classification OMS des leucémies aiguës myéloïdes (2001) Elle intègre les données cytogénétiques et moléculaires Quatre grands groupes: LAM avec anomalies cytogénétiques récurrentes - LAM avec t(8;21)(q22;q22); réarrangement AML-ETO. [10 % des LAM]; constituent une partie des LAM2 - LAM avec t(15;17)(q22;q12); réarrangement PML-RAR. [8 % des LAM]; ce sont les LAM3 - LAM avec éosinophiles médullaires anormaux et anomalies sur le chromosome 16 : inv(16)(p13q22) ou t(16;16)(p13;q22); réarrangement CBF -MYH11. se sont les LAM4eo [10 % des LAM]; - LAM avec anomalie chromosomique 11q23; réarrangement mll. [6 % des LAM]; pas de morphologie spécifique, mais parfois LAM5 (surtout chez l'enfant). LAM avec dysplasie multilignées [10% des cas] - Suite à un syndrome myélodysplasique ou un syndrome myéloprolifératif/dysplasique - Sans antécédent de myélodysplasie LAM post chimiothérapie [10% des cas] - Liée aux agents alkylants - Liée aux inhibiteurs de topoisomérase type II (quelques unes pouvant être lymphoïdes) - Liées à d autres composants LAM non classées par ailleurs [40 50% des cas] - LAM avec différenciation minime - LAM sans maturation - LAM avec maturation - LA myélomonocytaire - LA monoblastique ou monocytaire - LA érythroïde - LA mégacaryoblastique - LAM à composante basophile - Panmyélose aiguë avec myélofibrose - Sarcome granulocytaire [on peut y ajouter les LA indifférenciées, biphénotypiques et LA bilinéales (présence de 2 populations cellulaires distinctes)] MAJ : janvier 2007 Page 7 sur 10

11. L immunophénotype Complément utile au diagnostic, il est indispensable dans quelques cas précis (LAM0, LAM7). Par ailleurs certains traitements nécessitent de rechercher la présence ou non de diverses molécules (CD33 car il existe un Ac monoclonal thérapeutique, CD117 car associé à une forte activité tyrosine kinase : traitements ciblés). [Groupe d'etude de l'immunologie des Leucémies (GEIL) www.inserm.fr/geil] La détermination se réalise avec un cytofluoromètre de flux multicouleurs, avec des Ac monoclonaux fluorescents. Le schéma d analyse de la population blastique suit classiquement 2 étapes : 11. 1. Affiliation à une lignée en recherchant les Ag qui caractérisent plus ou moins spécifiquement une lignée cellulaire : cytcd79a, cytcd22, CD19 cytcd3 Myéloperoxydase (MPO), CD13 cyt ou mb, CD33, CD117 CD41, CD42, CD61 Glycophorine A, CD36 Lignée lymphoïde B Lignée lymphoïde T Lignée myéloïde Lignée plaquettaire Lignée érythroblastique On affirme le diagnostic de LA myéloïde par la présence de plusieurs (au moins 2) Ag myéloïdes et l absence d Ag des cellules lymphoïdes B et T. 11. 2. Recherche d Ag d immaturité ou de différenciation : permet d affiner le diagnostic. HLA classe II (DR), CD34 MPO, CD13 cyt ou mb, CD33, CD117 CD15, CD65, CD64 CD11b, CD14, CD4 CD41, CD42, CD61 Glycophorine A, CD36 Cellules souches Lignée myéloïde Ag granulocytaires Ag monocytaires Ag plaquettaires Ag érythroblastiques 11.3. Présence d Ag aberrants. Dans 15 30% des cas on retrouve un ou plusieurs Ag non attendus. On attribue un score aux divers Ag en fonction de leur spécificité ± grande de lignée: Lignée B Lignée T Lignée myéloïde 2 points ccd79a, ccd22, cµ CD3, TCR MPO, Lysozyme 1 point CD19, CD10, CD20 CD2, CD5, CD8, CD13, CD33, CD10 CD65, CD117 0.5 point TdT, CD24 TdT, CD7, CD1a CD14, CD15, CD64 Dans la majorité des cas on parle de LA avec expression aberrante d un ou 2 Ag. MAJ : janvier 2007 Page 8 sur 10

Dans 1 2% des cas on définit la LA bi- ou multi-phénotypique (BAL : bi-phenotypic acute leukemia si le score est strictement supérieur à 2 pour les marqueurs myéloïdes et strictement supérieur à 1 pour les marqueurs lymphoïdes B ou T. 12. Diagnostic différentiel des LAM Quand on observe des blastes dans le sang : - syndromes myélodysplasiques : mais ces derniers ont le plus souvent 0-5% de blastes circulants (le myélogramme fera ensuite la différence) - LAL : morphologie, cytochimies, immunophénotype permettent le diagnostic différentiel - syndromes myéloprolifératifs : LMC en phase d accélération ou en phase blastique ; splénomégalie myéloïde (ou myélofibrose primitive) au cours de laquelle on observe une petite blastose sanguine et une érythromyélémie, transformation des thrombocytémies essentielles et des maladies de Vaquez en LAM après de nombreuses années d évolution. Histoire de la maladie, cytogénétique (chromosome Philadelphie de la LMC) permettent le diagnostic différentiel - phase de dissémination des lymphomes diffus à grandes cellules (parfois aspect se rapprochant de celui de grands monoblastes) : clinique (souvent adénopathies) et histoire de la maladie aident à la différenciation Présence de blastes uniquement au myélogramme: - Phase de réparation des agranulocytoses ou d une aplasie médullaire : un excès transitoire de myéloblastes et promyélocytes (parfois > 50% du total cellulaire) est possible transitoirement : histoire de la maladie, évolution en quelques jours, absence de corps d Auer, sont utiles pour avancer En l absence de blastose sanguine : - Syndromes myélodysplasiques : AREB de type II où l on a parfois des difficultés à quantifier précisément la blastose (< 20% = SMD ; > 20% = leucémie aiguë) ; myélodysplasies avec grand excès d érythroblastes, qu il faut séparer de la LA érythroblastique - quelques tumeurs solides (rhabdomyosarcome, cancer du poumon à petites cellules) 13. Facteurs pronostiques et traitement Ils sont très importants à considérer car ils vont conditionner l attitude thérapeutique. Dans les LAM un âge élevé, une hyperleucocytose importante et certaines anomalies des chromosomes des cellules leucémiques sont de mauvais pronostic Traitement symptomatique (transfusions de concentrés globulaires ou/et plaquettaires, antibiothérapie) Le traitement comporte une phase de réduction tumorale ou traitement d'induction avec chimiothérapie intensive : daunorubicine (anthracycline) (3j) et aracytine (7j); la phase d'aplasie est de 4 semaines (on peut renforcer, avant 50 ans, avec étoposide ou 6 thioguanine). MAJ : janvier 2007 Page 9 sur 10

Il est suivi d une phase de consolidation (aracytine à fortes doses) avec 4 cures de consolidation, ou l'allogreffe de cellules souches hématopoïétiques. Dans quelques cas, des médicaments "ciblés" sur les cellules leucémiques peuvent être proposés. Les LAM3 ont un traitement particulier: acide trans rétinoïque qui a un effet différenciant (associé à une anthracycline). Critères de rémission complète : - neutrophiles > 1G/L - plaquettes > 100 G/L - Blastes médullaires < 5% Critères de rechute (chez un pt ayant eu une rémission complète) : - réapparition de blastes dans le sang (quel que soit le nombre) - ou 5% blastes dans la moelle osseuse (non attribuables à une régénération post chimiothérapie) Références. - Jaffe ES et coll. Tumors of haematopoietic and lymphoid tissues. IARC press, Lyon, 2001. - Modern diagnosis in acute leukemias. Cr Rev Oncol/Hematol 2005, 56 : 223-34 - Mrozek K, et coll. Chromosome aberrations, gene mutations and expression changes, and prognosis in adult acute myeloid leukemias. ASH educational program, Hematology 2006, 169-177. - Mason KD, et coll. The immunophenotype of acute myeloid leukemia : is there any relationship with prognosis? Blood Reviews 2006, 20 : 71-82. (M Zandecki, janvier 2007) MAJ : janvier 2007 Page 10 sur 10