A l occasion du salon Pêche, Chasse, Tir, Pro Natura a été invitée par ChasseSuisse et le canton hôte, Argovie, à donner un exposé sur ses attentes et souhaits à l égard des chasseurs dans le domaine de la biodiversité. C est avec plaisir que nous avons donné suite à cette invitation.
La biodiversité en Suisse est menacée, comme en attestent les listes rouges qui ne cessent de s allonger, mais aussi les tableaux de chasse. Par exemple, celui du lièvre brun dans le canton d Argovie a tellement régressé depuis 1960, que les chasseurs renoncent depuis quelques années à tirer cet animal. Chasseurs et défenseurs de la nature se sont plus d une fois disputés au sujet du lièvre brun, mais ce qui importe aujourd hui, c est d agir de façon concertée pour améliorer le sort de l espèce, qui se porte mal. Défenseurs de la nature et chasseurs beaucoup de gens sont d ailleurs l un et l autre à la fois veulent que la nature aille mieux. Cela implique que nous agissions ensemble.
La biodiversité a besoin d alliances politiques. Nombreux sont les secteurs de la politique qui ont un gros impact sur la biodiversité: c est le cas notamment de la politique agricole. Le message sur la politique agricole 14-17 a été publié récemment. La NZZ a jugé qu il s agissait là d une réforme timide. C est avant tout dans le domaine de l écologie que Pro Natura y décèle de graves lacunes. L agriculture peut pourtant faire beaucoup pour protéger et favoriser la nature, à condition qu elle reçoive les incitations adéquates de la part des instances politiques. Si l on veut apporter des améliorations en faveur de l habitat du lièvre, alors les milieux de la chasse et ceux de la protection de la nature doivent unir leurs forces pour en exiger davantage.
Foto: Patrice Malavaux Un autre exemple d une telle alliance existe déjà. En travaillant main dans la main, la Fédération suisse de pêche (FSP) et Pro Natura ont obtenu de beaux résultats en faveur des habitats aquatiques. C est ainsi qu à travers leur initiative populaire commune «Eaux vivantes», les deux organisations sont parvenues à augmenter les débits résiduels, afin d éviter l anéantissement de milieux aquatiques, avec leur flore et leur faune, comme ici sur le Doubs. Grâce à cette initiative, les deux organisations ont provoqué un débat politique et enclenché une dynamique forte en matière de préservation et de revalorisation de biotopes. Pro Natura n est pas toujours d accord non plus avec la FSP. Néanmoins, toutes deux ont réussi à s entendre sur une approche pragmatique leur permettant de se mobiliser ensemble sur des thèmes cruciaux tout en continuant, le cas échéant, à se disputer sur des sujets de moindre importance.
Nous espérons nouer des alliances de ce genre avec les milieux de la chasse. Non seulement ChasseSuisse, avec qui nous développons depuis quelque temps un dialogue constructif, mais aussi les représentants des chasseurs au sein des instances politiques. Pro Natura a analysé les votes ayant trait à la nature intervenus ces quatre dernières années au Conseil national et au Conseil des Etats. A cette occasion, elle s est intéressée notamment à la manière dont les représentants des chasseurs ont voté sur des thèmes environnementaux. Le résultat est alarmant: beaucoup de ces parlementaires ont rarement, voire jamais défendu la nature. Or, si les chasseurs prétendent œuvrer en faveur de la nature et de la biodiversité, on doit le retrouver dans la politique. Nous attendons des milieux de la chasse un plus gros engagement politique pour la biodiversité.
L avenir pourrait se décliner ainsi: pêche, chasse, protection. Car à l avenir, la chasse devra se préoccuper tout autant de protection de la nature que d utilisation durable des ressources cynégétiques.