La rupture sans autorisation du contrat de travail d'un délégué syndical non salarié.



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Transcription:

1502192 IRP La rupture sans autorisation du contrat de travail d'un délégué syndical non salarié. La rupture du contrat de travail d'un délégué syndical est constitutive d'une faute civile, même si celui-ci n'a pas la qualité de salarié. Dans le cadre d'un redécoupage géographique, entrepris par une société de distribution au sein de son réseau, le contrat de travail du gérant non salarié d'un magasin du groupe a été rompu, sans autorisation administrative. Sa qualité de délégué syndical était ainsi pareillement rompue. Le directeur des relations sociales de la société a été poursuivi des chefs d'entrave à l'exercice du droit syndical et de rupture sans autorisation du contrat d'un délégué syndical. S'il a été relaxé par les juges du fond, la Cour de cassation a cassé l'arrêt d'appel.

La cour d'appel de Lyon, saisie sur renvoi, a dit qu'il n'y avait pas de faute civile dans les termes de l'infraction de licenciement irrégulier de délégué syndical et déclaré les constitutions de partie civile irrecevables. Les parties civiles ont formé un pourvoi en cassation en soutenant que les gérants non salariés des succursales de commerce de détail alimentaire bénéficient du droit syndical. Elles ont ainsi fait valoir que le contrat litigieux ne pouvait être transféré dans le cadre d'un transfert d'établissement. Après renvoi de l'affaire devant son Assemblée plénière, la Cour de cassation, dans un arrêt du 9 janvier 2015, a partiellement cassé l'arrêt d'appel, sur le point contesté, aux motifs que les faits, objet de la poursuite, entraient dans les prévisions de l'article L. 2431-1 alinéa 1 du code du travail et étaient susceptibles de constituer une faute civile. Anne-Sophie LANCE Conséquence de l'absence de recours devant l'inspecteur du travail contre l'avis du médecin du travail. En l'absence de recours exercé devant l'inspecteur du travail contre les avis du médecin du travail, ceux-ci s'imposent au juge. En l'espèce, une salariée, engagée en qualité d'opératrice dans une société, a été victime de plusieurs accidents du travail et maladies professionnelles. A la suite de deux examens médicaux des 8 et 30 décembre 2008, elle a été déclarée inapte à tous postes dans l'entreprise par la médecine du travail. Le 6 février 2009, la salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Contestant la validité de l'avis du médecin du travail, la salariée a saisi la juridiction prud'homale. La cour d'appel d'orléans a, par un arrêt du 18 décembre 2012, déclaré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a déclaré sa décision opposable à la médecine du travail en relevant que celle-ci n'avait sollicité l'agrément de ses secteurs médicaux que le 7 juillet 2009, postérieurement aux visites médicales des 8 et 30 décembre 2008 et, par conséquent, la déclaration d'inaptitude du salarié par le médecin du travail s'avérait inopérante. La Cour de cassation a cassé la décision rendue par la cour d'appel d'orléans par un arrêt du 17 décembre 2014. Par application des dispositions de l'article L. 4624-1 du code du travail, la Cour de cassation a constaté qu'à aucun moment la salariée n'avait contesté l'avis d'inaptitude devant

l'inspecteur du travail et en a conclut qu'en l'absence de recours devant l'inspecteur du travail, l'avis d'inaptitude du médecin du travail s'imposait au juge. Melissa PINTO L'abandon de poste : Les réponses d'une avocate Claire Puissilieux Un salarié qui abandonne son poste sans aucune justification vis-à-vis de son employeur s'expose à des sanctions disciplinaires qui peuvent être très lourdes. Comment l'employeur doit-il réagir face à un abandon de poste? Un salarié n'a-t-il pas intérêt à privilégier une approche plus diplomatique s'il souhaite quitter son employeur? I - Quels sont les risques pour un salarié qui abandonne son poste? A - Qu'est-ce que l'abandon de poste? L abandon de poste est l absence non justifiée par un motif légitime ou non autorisée par l employeur du salarié à son poste de travail. Cela peut se traduire par une absence non justifiée du salarié pendant un ou plusieurs jours ou par un départ anticipé et non justifié du salarié pendant le temps de travail. Certains salariés préfèrent opter pour l abandon de poste plutôt que d avoir à démissionner, puisqu en cas de démission, le salarié ne perçoit, en principe, pas d allocation chômage sauf cas exceptionnels. B - Du dédommagement au licenciement Le salarié, qui abandonne son poste de travail, commet un manquement à ses obligations contractuelles. En effet, toute absence doit être justifiée. Généralement, le règlement intérieur prévoit le délai dans lequel le justificatif d absence doit parvenir à l employeur. Le salarié est tenu de le respecter. A défaut de justificatif, l employeur peut le sanctionner disciplinairement, sanction qui peut aller jusqu au licenciement pour faute grave selon les circonstances. Il est possible que le salarié ait à dédommager son employeur du fait de son absence. Il en est ainsi de l abandon de poste au cours du préavis. Dans ce cas, le salarié pourrait se voir condamner par le juge prud homal à verser une indemnité de préavis correspondant au salaire de la période non travaillée, et ce quel que soit le préjudice réel de l employeur. II - Que doit faire l'employeur?

A ) Une procédure stricte Pour pouvoir sanctionner disciplinairement un salarié qui a abandonné son poste, l employeur doit au préalable le mettre en demeure de reprendre son travail ou lui demander de justifier son absence. A défaut de réponse du salarié, l employeur pourra envisager d engager à son encontre une procédure disciplinaire. A compter du jour où l employeur aura connaissance de l abandon de poste, il disposera d un délai de deux mois pour engager des poursuites. Au-delà de ce délai de prescription, l acte fautif ne pourra faire l objet d aucune poursuite disciplinaire. Il faut préciser que l acte d engagement des poursuites (par exemple, la convocation à l entretien préalable ou le prononcé d une mise à pied conservatoire) interrompt le délai de prescription. B ) Et si le salarié décide finalement de revenir? Il est possible que le salarié reprenne son travail, après avoir justifié son absence. Cependant, le retour du salarié à son poste de travail n empêchera pas l employeur d engager ou de poursuivre la procédure disciplinaire diligentée à l encontre du salarié, s il estime que les motifs invoqués par le salarié sont illégitimes. Les motifs invoqués par le salarié pourraient être considérés comme illégitimes, s il abandonne son poste sans autorisation et dans un contexte de forte activité de l entreprise. III - L'employeur a-t-il le droit d'arrêter le paiement des salaires? L employeur pourra décider de suspendre le paiement des salaires du salarié durant la période pendant laquelle le salarié est en abandon de poste, alors même qu il n a pas encore engagé à son encontre de procédure de licenciement. Si l employeur arrête de payer au salarié son salaire, le salarié pourrait saisir le juge prud homal pour prise d acte de la rupture de son contrat de travail ou pour résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l employeur. En cas de prise d acte de la rupture de son contrat de travail, le salarié devra au préalable formaliser sa prise d acte par l envoi d un courrier à l employeur, ce qui mettra immédiatement fin à son contrat de travail. Ensuite, le salarié sollicitera du juge la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Si les griefs du salarié sont fondés, le juge condamnera l'employeur à verser au salarié des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité de

licenciement, une indemnité compensatrice de préavis et les salaires et congés payés afférents à la période de suspension de son contrat de travail. En cas de demande de résiliation judiciaire, le contrat de travail du salarié n est pas rompu. Seul le juge peut prononcer la rupture du contrat de travail, si les griefs évoqués par le salarié sont fondés. Dans ce cas, l employeur sera condamné à verser au salarié des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis et les salaires et congés payés afférents à la période de suspension de son contrat de travail. Le salarié bénéficiera d allocations chômage seulement s il obtient une décision judiciaire définitive qualifiant la prise d acte de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou reconnaissant la résiliation judiciaire aux torts de l employeur, ce qui peut prendre plusieurs années. IV - Un salarié qui abandonne son poste a t-il des droits? Le salarié peut saisir le juge prud homal, s il estime pouvoir justifier son absence par un motif légitime. Si le juge fait droit à sa demande en la reconnaissant légitime, il pourra lui accorder des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, les salaires et congés payés afférents à la période de suspension de son contrat de travail. S il a été licencié pour faute grave, il aura également droit à une indemnité de licenciement et à une indemnité compensatrice de préavis. Par ailleurs, Lorsque le licenciement pour abandon de poste est fondé sur une faute grave alors le salarié perd son indemnité de licenciement ainsi que son indemnité de préavis. Néanmoins, il se peut que certaines conventions collectives prévoient que de telles indemnités sont dues même en cas de licenciement pour abandon de poste fondé sur une faute grave. Le salarié licencié peut percevoir, le cas échéant, son indemnité de congés payés et la portabilité de ses droits à la formation. Enfin, Un salarié licencié pour abandon de poste pour faute grave peut prétendre au versement de ses allocations chômage. C'est même l'intérêt premier pour un salarié d'opter pour un abandon de poste vient du fait qu'il peut percevoir son allocation chômage, ce qui n'est pas le cas lorsqu'il démissionne. Conclusion Après constat de l abandon de poste du salarié, l employeur pourrait attendre avant d engager des poursuites disciplinaires que le salarié, privé de salaire, réagisse :

- soit en lui adressant sa démission se manifestant par une volonté claire et non équivoque, soit en saisissant le juge prud'homal pour prise d'acte de la rupture de son contrat de travail ou pour résiliation judiciaire aux torts de l'employeur. Cependant, il devra veiller à ne pas dépasser le délai de prescription de deux mois, auquel cas l abandon de poste ne pourra plus faire l objet de sanction disciplinaire. Représentants du personnel - Liberté de déplacement - Restrictions admises - Confidentialité de certaines zones de l'entreprise La procédure applicable pour accéder à certaines zones confidentielles avait pour seul objet de s'assurer de l'appartenance du salarié à l'établissement et de son statut de représentant du personnel, le responsable de celles-ci ne disposant d'aucun droit de regard sur l'opportunité de la demande d'accès et devant faire droit à celle-ci après avoir procédé aux vérifications prévues. D'autre part, l'accord d'entreprise relatif au droit syndical ne prévoyait pas l'attribution aux représentants du personnel d'un badge leur donnant accès aux zones en cause, au même titre que les salariés y travaillant. Par conséquent, la procédure contestée, justifiée au regard du caractère hautement confidentiel de ces zones, ne méconnait ni les exigences découlant de la liberté de circulation reconnue aux représentants du personnel à l'intérieur de l'entreprise ni celles résultant de l'accord d'entreprise (Cass. soc. 9 juillet 2014, n 13-16151, Peugeot-Citroën Automobiles). RPDS 2014, n 836, somm. n 106, comm. A.L.M. Quand des primes de servitude sont à intégrer dans le calcul des congés payés Cour de cassation du 27 novembre 2014, pourvoi n 13-14817 Contexte de l'affaire Un salarié est engagé le 6 novembre 2000, en qualité de chauffeur poids lourd. Le 5 mai 2008, il démissionne sans réserve, mais saisit la juridiction prud'homale de diverses demandes, notamment de rappels concernant ses indemnités de congés payés.

Selon le salarié, les primes de pneu, d accident, d entretien et d assiduité devaient être prises en compte dans le calcul de l indemnité de congés payés. Dans un premier temps, la cour d appel déboute le salarié de sa demande, estimant que lesdites primes correspondent à un risque ou un inconvénient qui cesse en période de repos, ne permettant pas ainsi leur prise en compte dans le calcul de l indemnité de congés payés. Ce n est toutefois pas l avis de la Cour de cassation qui casse et annule l arrêt de la cour d appel, renvoyant les deux parties devant une nouvelle cour d appel. Selon la Cour de cassation, les juges du fond auraient du rechercher si les diverses primes compensaient une servitude permanente de l'emploi, ce dont ils auraient dû déduire qu'elles constituaient un élément de salaire devant être intégré dans l'assiette des congés payés. Cour de cassation du 27/11/2014, pourvoi n 13-14817 Cet arrêt de la Cour de cassation «relance» le débat sur les primes devant être prises en compte, ou pas, dans le calcul de l indemnité de congés payés selon la méthode dite du «1/10ème». Rappelons à ce sujet, quelles sont les primes qui doivent être prises en compte et celles qui sont exclues, sous réserve bien entendu de conditions conventionnelles ou d usages plus favorables, et façon plus large les notions importantes concernant le calcul de l indemnité de congés payés selon cette méthode. Principe fondamental L indemnité de congés payés est la somme que l entreprise verse au salarié lors de la prise de congés payés. Un principe fondamental doit être respecté dans cette situation : Le salarié doit percevoir au minimum le salaire, qu il aurait perçu s il avait été présent dans l entreprise au moment du départ en congés payés. Article L3141-22 (...) II.- Toutefois, l'indemnité prévue au I ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler. Calcul au 1/10ème plus favorable en cas de faible revalorisation du salaire Le calcul au dixième est réputé être le plus favorable pour le salarié lorsque l augmentation de salaire durant la période de référence est inférieure à 4%. La méthode est nommée «dixième» car elle correspond à : - 5 semaines de congés payés sur un total de 52 semaines dans l année.

Pourquoi plus favorable? Parce que 5/52 = 9.615%, l administration pratique donc un arrondi supérieur en amenant le résultat à 10%. Règle de calcul La valeur du droit global correspond à la somme des salaires bruts versés durant la période de référence (1er juin N au 31 mai N+1) divisée par 10. Exemple : Un salarié bénéficie d un droit global de 30 jours ouvrables ; Le cumul des salaires bruts versés durant la période de référence est de 32.000 ; Les 30 jours de congés payés correspondent à 32.000 / 10 = 3.200 Les sommes à exclure du calcul Toutes les sommes versées au salarié sont à prendre en compte à l exclusion des éléments suivants : - Remboursements de frais professionnels (y compris la prise en charge des frais de transports collectifs) ; - Indemnité compensatrice de congés payés (pour congés reportés par exemple) ; - Sommes correspondant à la participation ou à l intéressement ; - Avantages en nature dont le salarié continuerait à bénéficier pendant ses congés payés (par exemple l avantage en nature logement, si cet élément n était pas exclu, cela reviendrait à le payer 2 fois, voir article L 3141-23 à ce sujet) ; - Les primes allouées tout au long de l année (y compris pendant la période de congés payés) parmi lesquelles on peut citer les primes 13ème mois, les primes vacances, les primes d assiduité, les primes exceptionnelles** ; - Les primes «facultatives» ou «bénévoles» ; - Les indemnités au titre de l activité partielle (sauf conditions conventionnelles ou collectives plus favorables) ou de chômage intempéries ; - Revenus de remplacement (IJSS maladie) ; - Prime de partage de la valeur ajoutée (aussi appelée «prime dividendes»). ** Nota : - concernant ces primes à exclure, peu importe que le versement de ladite prime soit annuel ou réparti par trimestre ou semestre. Article L3141-23 Pour la fixation de l'indemnité de congé, il est tenu compte des avantages accessoires et des prestations en nature dont le salarié ne continuerait pas à jouir pendant la durée de son congé. La valeur de ces avantages et prestations ne peut être inférieure à celle fixée par l'autorité administrative Sommes à «ajouter»

L article L 3141-22 du code du travail prévoit que des périodes assimilées à un temps de travail effectif soient prises en compte. Il est question des salaires qui auraient été versés au salarié s il avait été présent pendant une période assimilable à du travail effectif par la loi. Sont donc à prendre en compte les salaires «fictifs» des absences assimilées à du travail effectif, donc au titre : - De l accident du travail ou de la maladie professionnelle, dans la limite d une année ; - D une période d activité partielle. Exemple : un salarié est en arrêt de travail consécutif à un accident du travail. Tous les salaires correspondant à la durée de l arrêt doivent être considérés à la valeur de ce que le salarié aurait perçu s il avait été présent. Article L3141-22 - I.- Le congé annuel prévu par l'article L3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence. Pour la détermination de la rémunération brute totale, il est tenu compte : 1 De l'indemnité de congé de l'année précédente ; 2 Des indemnités afférentes au repos compensateur obligatoire prévues à l'article L3121-28 ; 3 Des périodes assimilées à un temps de travail par les articles L. 3141-4 et L. 3141-5 qui sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération en fonction de l'horaire de travail de l'établissement. Lorsque la durée du congé est différente de celle prévue à l'article L3141-3, l'indemnité est calculée selon les règles fixées ci-dessus et proportionnellement à la durée du congé effectivement dû. II.- Toutefois, l'indemnité prévue au I ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler. Cette rémunération, sous réserve du respect des dispositions légales, est calculée en fonction : 1 Du salaire gagné dû pour la période précédant le congé ; 2 De la durée du travail effectif de l'établissement. III.- Un arrêté du ministre chargé du travail détermine les modalités d'application du présent article dans les professions mentionnées à l'article L3141-30. Article L3141-5 Modifié par Ordonnance n 2010-462 du 6 mai 2010 - art. 1 Sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé : 1 Les périodes de congé payé ; 2 Les périodes de congé maternité, paternité et d'adoption ; 3 Les contreparties obligatoires en repos prévues par l'article L. 3121-11 du présent code et l'article L 713-9 du code rural et de la pêche maritime ;

4 Les jours de repos accordés au titre de l'accord collectif conclu en application de l'article L. 3122-2 ; 5 Les périodes, dans la limite d'une durée ininterrompue d'un an, pendant lesquelles l'exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle ; 6 Les périodes pendant lesquelles un salarié se trouve maintenu ou rappelé au service national à un titre quelconque. Les primes à prendre en compte Nombreuses sont les incertitudes concernant la prise en compte des primes dans la base de calcul de l indemnité de congés payés. Précisons que sont à inclure les primes suivantes : Primes de sujétion ou de servitude inhérentes à l emploi : - prime de salissure ; - prime de soirée ; - prime de nuit ; - prime de froid. Autres primes ayant la nature de complément de salaire : - prime de rendement ; - prime de production ; - prime d ancienneté (sauf si elle est versée tout au long de l année, périodes de travail et de congés confondues) ; - prime d objectif liée à des résultats personnels. L employeur doit fournir du travail au salarié La conclusion d'un contrat de travail emporte pour l'employeur obligation de fourniture du travail. Une société de portage salariale ne peut licencier un salarié au motif qu'il n'avait pas respecté la clause d'objectifs de son contrat de travail qui lui faisait obligation de conclure avant la fin de sa mission en cours une ou des missions nouvelles équivalentes à cinq jours. [Cass. soc., 4 février 2015, n 13-25627, FS-P+B] Prise de connaissance de mails privés de ses collaborateurs : manquement au principe de délicatesse

Constitue un manquement au principe de délicatesse le fait pour un avocat de prendre connaissance de messages provenant d'une messagerie électronique mise à la disposition du personnel par le cabinet, en dépit du caractère privé de cette boîte aux lettres électronique, nonobstant le fait que l'accès au serveur de l'opérateur internet sur lequel se trouvent stockés les messages en cause s'effectue par le moyen de l'ordinateur professionnel. Tel est le rappel opéré par la cour d'appel de Paris, dans un arrêt rendu le 22 janvier 2015 (CA Paris, Pôle 2, 1ère ch., 22 janvier 2015, n 14/01680). Dans cette affaire, après avoir pris connaissance de mails échangés entre ses deux collaboratrices sur leurs messageries électroniques privées, un avocat a mis fin à leurs contrats de collaboration libérale. Celles-ci se sont adressées à la commission d'arbitrage et, dans le cadre de cette instance, l'avocate de l'une d'entre elles a saisi la commission de déontologie à propos de la production de ces mails effectuée par l'avocat lors de la phase de conciliation. La commission de déontologie a émis un avis en demandant le retrait des correspondances en cause. L'autorité de poursuite a décidé d'ouvrir une procédure disciplinaire en ce que l'avocat aurait manqué aux principes essentiels de la profession d'avocat par violation du secret des correspondances privées et utilisation de celles-ci et en ce qu'il n'aurait pas respecté l'avis de la commission de déontologie en maintenant les courriers litigieux dans le cadre de l'instance d'arbitrage. La cour confirme l'atteinte au principe de délicatesse et rappelle, d'abord, que la communication des mails litigieux pendant la phase de conciliation préalable suffit à constituer une utilisation et il n'est donc pas nécessaire de connaître la suite donnée au recours formé contre la sentence arbitrale pour statuer sur le grief relatif à l'utilisation de correspondances privées. La cour énonce, ensuite, que si l'avocat estimait qu'il avait un intérêt légitime à connaître un message stocké dans cette boîte aux lettres, en ce qu'il aurait présenté un caractère professionnel, il lui appartenait de solliciter l'autorisation du juge, selon les règles de l'article 145 du Code de procédure civile. Par ailleurs, le droit à la preuve n'est pas un droit absolu et il suppose que celle-ci soit obtenue loyalement. Une information Lexbase. CA Paris, Pôle 2, 1ère ch., 22 janvier 2015, n 14/01680 Travail dominical : le point sur les zones touristiques et commerciales du projet de loi «Macron» Le projet de loi «Macron», qui devrait être prochainement adopté en première lecture par l Assemblée nationale, comporte un volet relatif aux exceptions au travail dominical.

S agissant des dérogations qui reposent sur un fondement géographique, plusieurs points sont à relever, en attendant la reprise des débats au Sénat. Des zones touristiques internationales (ZTI) seraient créées (projet, art. 72). Cette notion viserait des zones de rayonnement international disposant d une offre commerciale particulièrement importante et attractive pour les touristes (ex. : Champs-Élysées à Paris). En outre, les commerces de détail alimentaire situés dans ces zones pourraient ouvrir le dimanche après 13 h (projet, art. 78). Les actuelles communes d intérêt touristique ou thermales, ainsi que les zones touristiques d affluence exceptionnelle ou d animation culturelle permanente, seraient transformées en zones touristiques (ZT) (projet, art. 73). Les périmètres d usage de consommation exceptionnel (PUCE) seraient transformés en zones commerciales (ZC) (projet, art. 74). Enfin, le travail dominical serait autorisé pour les établissements situés dans certaines gares listées par arrêté, qui ne seraient pas comprises dans l emprise d une des zones précitées (projet, art. 79). Par ailleurs, les commerces de détail alimentaire situés dans ces gares pourraient ouvrir le dimanche après 13 h (projet, art. 78). En termes de contreparties, les ouvertures dominicales dans l ensemble de ces zones seraient subordonnées à la conclusion d un accord collectif (qu il soit de branche, d entreprise ou d établissement, territorial, ou conclu, en l absence de délégué syndical, avec des représentants du personnel élus ou un salarié mandatés) (projet, art. 76). Cet accord doit fixer, notamment : -les contreparties, en particulier, salariales ; -les mesures destinées à faciliter la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle pour les salariés privés du repos dominical ; -les contreparties mises en œuvre par l employeur pour compenser les charges induites par la garde des enfants pour les salariés privés du repos dominical ; -les conditions dans lesquelles l employeur prend en compte l évolution de la situation personnelle des salariés privés du repos dominical. Le texte prévoit donc le principe d une contrepartie salariale, à négocier entre les partenaires sociaux, mais sans fixer de montant plancher. On notera que, dans le système actuel, il n y a légalement aucune contrepartie obligatoire dans les communes d intérêt touristique ou thermales et dans les zones touristiques d affluence exceptionnelle ou d animation culturelle permanente. À l inverse, dans les zones PUCE, le salaire est au moins doublé et s y ajoute un repos compensateur. Signalons enfin que le projet de loi contient des mesures transitoires pour permettre la transition entre l ancien et le nouveau zonage (projet de loi, art. 82).

Les salariés ne sont pas tenus de cesser le travail pendant toute la durée indiquée par le préavis de grève Si, dans les services publics, la grève doit être précédée d'un préavis donné par un syndicat représentatif et si ce préavis, pour être régulier, doit mentionner l'heure du début et de la fin de l'arrêt de travail, les salariés qui sont seuls titulaires du droit de grève ne sont pas tenus de cesser le travail pendant toute la durée indiquée par le préavis. Il en résulte que l'employeur ne peut, dans la période ainsi définie, déduire de l'absence de salarié gréviste au cours des trois premiers jours de la période visée par le préavis que celuici est devenu sans effet. Une note d'information indiquant : «Le 27 juin dernier, la CGT a déposé un préavis de grève du 3 juillet à 0 heure 00 au 31 décembre 24 heures 00. Or, depuis le 3 juillet aucun salarié ne s'est mis en grève, le mouvement n'ayant pas débuté à la date initialement prévue, le préavis ne peut plus produire d'effet. Aucun arrêt de travail ne peut donc avoir lieu dans le cadre de ce préavis. La Direction tenait à porter cette information à la connaissance des salariés notamment de ceux ayant déposé une déclaration individuelle d'intention de grève», en laissant craindre aux salariés qu'ils pouvaient faire l'objet de sanctions en cas d'arrêt de travail, portait atteinte à leur droit de grève et devait ainsi être retirée des panneaux d'affichage de l'entreprise. [Cass. soc., 11 février 2015, n 13-14607, FS-P+B] Protection des élus et mandatés - Réintégration et indemnisation - Hostilité d'une partie du personnel - Pas d'impossibilité absolue En raison de la protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun dont bénéficient les salariés investis de fonctions représentatives, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, seule une impossibilité absolue peut libérer l'employeur de l'obligation de réintégrer le salarié à son poste de travail, avec maintien de ses conditions de travail antérieures, à la suite du refus d'une autorisation administrative de licenciement. Une telle impossibilité constitue, à ce titre, une cause étrangère propre à justifier la suppression de l'astreinte dont est assortie la décision ordonnant la réintégration.

Le refus d'une partie du personnel de travailler à nouveau avec le salarié investi d'un mandat représentatif pour des motifs écartés par l'autorité administrative ne peut suffire à caractériser une impossibilité absolue de réintégrer celui-ci dans son poste (Cass. soc. 24 juin 2014, n 12-24623, StéPrecia). RPDS 2014, n 835, somm. n 084, comm. M.C. RPDS n 837 Janvier 2015