Apériodique n 15/293 1 er octobre 2015 FRANCE : déficit ramené à 3,3 % du PIB en 2016 Le gouvernement a annoncé ses nouvelles prévisions de déficit public pour 2015 et 2016. Elles sont fixées à respectivement 3,8 % et 3,3 % du PIB (après 3,9 % en 2014). L objectif de retour à 3 % serait atteint en 2017. Les prévisions de croissance qui soustendent le projet de loi de finances 2016 sont fixées à 1 % en 2015 et 1,5 % en 2016. Elles sont prudentes et proches de nos propres prévisions. L effort structurel est concentré sur les dépenses publiques, avec 50 milliards d économies prévus en 2015-2017. En 2016, la croissance des dépenses en volume sera très faible, 0,3 %. Les économies en dépenses atteindront 16 milliards (après 19 en 2015). Le déficit structurel se contracte peu à peu, passant de 2 % du PIB en 2014 à 1,7 % en 2015 et 1,2 % en 2016. Toutefois, le déficit public se réduit plus lentement, du fait notamment d une légère dégradation du solde conjoncturel. Ces prévisions budgétaires sont atteignables, compte tenu de la prudence des estimations en matière de croissance et d inflation. Mais les efforts importants en termes de dépenses ont un effet assez limité sur la trajectoire de réduction des déficits, du fait des baisses d impôts et du poids de la conjoncture. publique sur PIB. Celui-ci est très élevé, 96,3 % estimé en 2015, après 95,6 % en 2014. Réduire le déficit/pib à 3% en 2017 et ramener le déficit structurel à un quasiéquilibre en 2018-2019. Concentrer l effort structurel sur les dépenses publiques, avec 50 milliards d économies prévus en 2015-2017. Les efforts structurels ont été marqués en 2011-2013, mais concentrés sur les hausses de prélèvements. L effort est désormais axé sur les dépenses, dont la croissance en volume sera très modérée, 0,9 % en 2015 et 0,3 % en 2016, contre 2 % par an en moyenne en 2002-2011. Ces économies en dépenses permettent de diminuer les déficits mais également de réduire les prélèvements obligatoires (montée en puissance du CICE et du pacte de responsabilité et de solidarité), afin de soutenir la croissance et l emploi. % PIB France : solde public 4 2 0-2 -4 prévisions Les objectifs de la stratégie de finances publiques Les principaux objectifs de la politique budgétaire restent inchangés : Continuer à réduire les déficits publics, afin de respecter les engagements européens et de réduire peu à peu le ratio de dette -6-8 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 solde public solde structurel solde conjoncturel Source : Minefi, CASA. Études Économiques Groupe http://etudes-economiques.credit-agricole.com
Un contexte économique mieux orienté en 2016 Les prévisions de croissance qui sous-tendent le projet de loi de finances 2015 sont fixées à 1 % en 2015 et 1,5 % en 2016. En 2015, les résultats du second trimestre ont été décevants, 0 %, après une forte hausse au premier (0,7 % t/t). Mais l acquis de croissance reste favorable, 0,9 %, et le climat des affaires se redresse dans l ensemble des branches (sauf la construction). Un léger rebond est attendu au second semestre. En 2016, la croissance serait plus marquée, 1,5 % contre 1 % en 2015. Ceci tient à trois raisons. D abord, une amélioration des débouchés extérieurs de la France, avec une demande adressée en hausse de 5,2 % (après 3,7 % en 2015) et notamment une croissance soutenue aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, une amélioration en zone euro et un mieux relatif dans les pays émergents. Ensuite, un redémarrage de l investissement des entreprises, lié au redressement des profits (baisse du pétrole, allégements d impôts et de charges), à des taux très bas et la mesure de suramortissement. Enfin, une consommation des ménages toujours soutenue, en hausse de 1,7 % en 2016 après 1,8% en 2015. Les gains de pouvoir d achat resteraient élevés (hausses de salaires, redémarrage de l emploi marchand, baisses d impôts) et le taux d épargne serait un peu réduit. L inflation est prévue à 1 % en 2016, après 0,1 % en 2015. Ces prévisions sont prudentes et très proches du consensus des économistes et de nos propres prévisions, qui sont à 1,1 % de croissance pour 2015 et 1,3 % pour 2016. Les grandes lignes du scénario sont similaires. Notre prévision est plus prudente sur la consommation des ménages, avec une légère hausse du taux d épargne. Elle est également plus modérée sur les exportations, avec un environnement émergent jugé moins favorable. Cette prévision est atteignable, mais certains aléas baissiers persistent, notamment le risque d un attentisme persistant des entreprises en matière d investissement et un ralentissement plus marqué des économies émergentes. 16 milliards de nouvelles économies en dépenses prévus en 2016 L objectif de 50 milliards d économies en 2015-2017 se poursuit. Après un effort de 18,6 milliards en 2015, un nouvel effort de 16 milliards est programmé en 2016. Il est permis par une hausse des dépenses publiques limitée à 0,3 % en volume et 1,3 % en valeur, en net ralentissement par rapport à la progression de 3,2 % par an en valeur observée entre 2007 et 2012. Les «économies en dépenses» ne correspondent pas à une baisse des dépenses (en valeur ou en volume), mais à la différence entre les dépenses effectives et les dépenses «spontanées», qui suivent leur évolution tendancielle. Les dépenses publiques ont en effet une dynamique tendancielle, qui s explique notamment par les évolutions démographiques, le vieillissement et les progrès de la médecine, les mécanismes d indexation automatique de la plupart des prestations, etc. Il faut toutefois noter que le très net ralentissement de l inflation a un effet négatif sur les économies en dépenses. Il réduit le rendement attendu de certaines de ces mesures. Si par exemple certaines prestations sociales sont gelées, alors qu elles sont normalement indexées sur l inflation, la différence par rapport à leur évolution spontanée, significative avec une inflation à 1 %, devient nulle avec une inflation à 0 %. C est pourquoi des mesures d économies complémentaires ont été décidées pour 2015 et 2016, de l ordre de 5 milliards par an, pour respecter l objectif de 50 milliards d économies en 2015-2017. Les 16 milliards d économies en dépenses en 2016 se répartissent comme suit : 5,1 milliards d économies sur les dépenses de l État et de ses agences. Ceci concerne la masse salariale, les crédits de fonctionnement et les crédits d intervention (prestations, exonérations de charges ). On peut retenir les points suivants : Un gel du point d indice de la fonction publique (qui sert de base au calcul du salaire). Des économies de fonctionnement des ministères. La fusion de la PPE et du RSA et la réforme des APL (aides personnalisées au logement). 3,4 milliards d économies sur les dépenses d assurance-maladie. Ceci sera notamment permis via le respect de l ONDAM, objectif de hausse des dépenses d assurance-maladie, fixé à 1,75 % seulement en valeur en 2016, rythme nettement inférieur à la N 15/293 1 er octobre 2015 2
croissance tendancielle des dépenses de santé estimée à 3,6% en valeur. Les efforts d économies seront ainsi poursuivis, portant sur une meilleure organisation des parcours de soins, de moindres dépenses de médicaments, une réduction du nombre d actes médicaux, etc. 4 milliards sur les autres dépenses sociales. Mesures d économies sur les prestations familiales. Economies sur les régimes de retraite complémentaire Agirc-Arrco et d assurancechômage Unedic. Montée en puissance des réformes déjà mises en place en 2012-2013, notamment sur les régimes de retraite et la politique familiale. Refonte des modalités de revalorisation des prestations. 3,5 milliards sur les collectivités locales. La dotation globale de fonctionnement de l État aux collectivités locales est réduite de 10,7 milliards en 2015-2017. Après 3,4 milliards en 2015, une nouvelle réduction serait mise en place en 2016. Ceci conduirait à un freinage des dépenses des collectivités locales. En contrepartie, mesures de soutien à l investissement et renforcement de la péréquation des ressources entre communes. France : dépenses publiques par fonction 45% 12% 7% 4% 9% 23% Éléments sur le déficit public 2015 Le déficit public pour 2015 est prévu à 3,8 % du PIB, soit une faible réduction après 3,9 % en 2014. Le déficit public 2014, annoncé à 4 % en mars dernier, a été légèrement révisé en baisse à 3,9 %. Le déficit se réduirait très peu en 2015, à 3,8 %. Le solde conjoncturel se dégrade en effet un peu, passant de -1,9 % à -2 % du PIB. Le solde conjoncturel est égal à la différence entre le solde public et le solde structurel et reflète l effet du cycle économique sur le déficit, notamment sur les recettes. Il peut être approximé par 0,50*(PIB PIB potentiel)/pib potentiel, i.e. 0,50 *output gap. Avec une croissance du PIB de 1 % et une croissance potentielle évaluée à 1,1 %, le déficit conjoncturel s accroît de 0,1 point de PIB entre 2014 et 2015. Le solde structurel s améliore mais assez modérément, de 0,3 point de PIB, passant de -2 % à -1,7 % du PIB. Pourtant, un effort d économies en dépenses marqué a été mis en place cette année, à hauteur de 18,6 milliards, via une faible hausse des dépenses, 0,9 % en volume, 1 % en valeur. Dans le calcul du solde structurel, on raisonne non sur les «économies en dépenses», mais sur «l effort en dépenses» (cf. encadré ci-dessous). La hausse du PIB potentiel en valeur étant de 2,1 % et celle des dépenses de 1 %, l effort en dépenses est estimé à 0,7 % du PIB. Mais d autres éléments jouent en sens inverse. D abord, l élasticité des recettes fiscales à la croissance, en général proche de 1, est estimée à 0,9 en 2015. En phase de basse conjoncture, les impôts croissent moins vite que le PIB. Cet élément dégrade le solde structurel de 0,1 point de PIB. Ensuite, les premières mesures du pacte de responsabilité et de solidarité sont entrées en vigueur, notamment une exonération des cotisations patronales, totale au niveau du SMIC, dégressive jusqu à 1,6 SMIC (4,6 milliards) et une baisse de l impôt sur le revenu pour les ménages à revenu modéré (3,2 milliards). Ces mesures sont en partie compensées mais affectent le solde structurel à hauteur de 0,1 à 0,2 point de PIB. achats rémunérations charge de la dette prestations sociales autres transferts investissements Source : Insee (chiffres 2014), Crédit Agricole SA N 15/293 1 er octobre 2015 3
L effort en dépenses est une des deux composantes de l effort structurel, avec les mesures nouvelles en prélèvements obligatoires. Il est calculé comme suit : D PIB pot ( D D PIB pot PIB pot ) où D désigne les dépenses publiques (hors dépenses chômage, très cycliques et prises en compte dans le solde conjoncturel) et PIBpot le PIB potentiel. Le ratio D/PIBpot est de l ordre de 55 %. L effort en dépenses est obtenu par une progression des dépenses inférieure à la croissance potentielle. Comptes publics : prévisions officielles (en % du PIB) 2014 2015 2016 PIB réel 0,2 1,0 1,5 PIB potentiel réel 1,0 1,1 1,5 Solde public -3,9-3,8-3,3 Solde conjoncturel -1,9-2,0-1,9 Solde structurel -2,0-1,7-1,2 Dette publique 95,6 96,3 96,5 Source : Ministère des Finances et des Comptes Publics Éléments sur le déficit public 2016 Le déficit public 2016 est réduit à 3,3% du PIB. En 2016, l effet croissance va jouer de façon relativement neutre sur le déficit. La croissance est prévue à 1,5 % (notre prévision est de 1,3 %). Ce chiffre est égal à la croissance potentielle, estimée à 1,5 %. Le solde conjoncturel va rester stable à 2 %. Au niveau du solde structurel, l effort en dépenses correspond aux 16 milliards d économies planifiées pour 2016 (cf. ci-dessus). La hausse des dépenses en valeur serait de 1,3 %. La hausse du PIB potentiel en valeur étant d environ 2,4 %, l effort structurel en dépenses atteindrait 0,5 à 0,6 %. Le déficit structurel prend également en compte un certain nombre de baisses d impôts et charges dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité : exonération des cotisations patronales, étendue aux salaires entre 1,6 et 3,5 SMIC (3,1 milliards en 2016), suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés (1 milliard), nouvelle baisse de l impôt sur le revenu pour les ménages à revenu modéré (2 milliards), etc. Elles sont compensées en partie et l effet «nouvelles mesures en recettes» accroît de 0,1 % le déficit structurel. Au total, le solde structurel est réduit de 0,5 point de PIB, passant de -1,7 % à -1,2 % du PIB. Éléments sur la dette publique Le ratio de dette publique, 95,6 % du PIB en 2014, serait encore en hausse à 96,3 % en 2015 et 96,5 % en 2016. en % du PIB 100 90 80 70 60 50 40 Dette publique 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14 15 16 17 Source : Minefi, Crédit Agricole S.A. Prévisions Cette hausse du ratio de dette publique s explique par le niveau toujours élevé des déficits et la faiblesse de la croissance nominale. L écart est ainsi encore marqué entre le déficit public effectif et celui qui permettrait de stabiliser le ratio d endettement (-2,4 % du PIB en 2016). Le poids de la dette devrait se stabiliser en 2017 et commencer à se réduire en 2018, grâce à une nouvelle réduction du déficit et à une croissance un peu plus soutenue. En conclusion, ces prévisions budgétaires sont atteignables, compte tenu de la prudence des estimations en matière de croissance et d inflation. Des aléas baissiers persistent, mais la croissance française devrait peu à peu accélérer compte tenu de l amélioration de la conjoncture européenne, de la baisse de l euro et du pétrole et de la montée en puissance des mesures d allégements fiscaux. La priorité donnée à l effort en dépenses et non aux hausses de prélèvements est un point positif. Les ajustements en dépenses sont généralement plus durables et moins défavorables à la croissance que les efforts en recettes. L effort planifié en 2015-2017 est significatif et en rupture avec les pratiques passées. Les dépenses freinent nettement. On peut toutefois noter qu elles continuent à progresser en valeur. Et leur poids dans le PIB reste très élevé et supérieur à la N 15/293 1 er octobre 2015 4
moyenne européenne. Il atteindrait encore 55,1 % en 2016, après 55,8 % en 2015. % PIB 60 50 France : poids des dépenses publiques Prév. Ces efforts structurels en termes de dépenses ont un effet assez lent et mesuré sur la réduction des déficits. Ceci est lié au poids de la conjoncture, avec un solde conjoncturel qui ne s améliore toujours pas, et aux mesures d allègements fiscaux. Le processus d assainissement budgétaire est donc graduel. Malgré tout, le déficit structurel se réduit de façon continue, à -1,7 % du PIB en 2015 et -1,2 % en 2016. Il retrouve son plus bas niveau depuis quinze ans et se rapproche de l équilibre. 40 00 02 04 06 08 10 12 14 16 Source : INSEE dépenses publiques/pib Crédit Agricole S.A. Études Économiques Groupe 12 place des Etats-Unis 92127 Montrouge Cedex Directeur de la Publication : Isabelle Job-Bazille - Rédacteur en chef : Jean-Louis Martin Documentation : Dominique Petit - Statistiques : Robin Mourier Secrétariat de rédaction : Véronique Champion-Faure Contact: publication.eco@credit-agricole-sa.fr Consultez les Etudes Economiques et abonnez-vous gratuitement à nos publications sur : Internet : http://etudes-economiques.credit-agricole.com ipad : application Etudes ECO disponible sur l App store Androïd : application Etudes ECO disponible sur Google Play Cette publication reflète l opinion de Crédit Agricole S.A. à la date de sa publication, sauf mention contraire (contributeurs extérieurs). Cette opinion est susceptible d être modifiée à tout moment sans notification. Elle est réalisée à titre purement informatif. Ni l information contenue, ni les analyses qui y sont exprimées ne constituent en aucune façon une offre de vente ou une sollicitation commerciale et ne sauraient engager la responsabilité du Crédit Agricole S.A. ou de l une de ses filiales ou d une Caisse Régionale. Crédit Agricole S.A. ne garantit ni l exactitude, ni l exhaustivité de ces opinions comme des sources d informations à partir desquelles elles ont été obtenues, bien que ces sources d informations soient réputées fiables. Ni Crédit Agricole S.A., ni une de ses filiales ou une Caisse Régionale, ne sauraient donc engager sa responsabilité au titre de la divulgation ou de l utilisation des informations contenues dans cette publication. N 15/293 1 er octobre 2015 5