REPUBLIQUE DE COTE D IVOIRE ----------------- COUR D APPEL D ABIDJAN ---------------- TRIBUNAL DE COMMERCE D ABIDJAN --------------- RG N 159/2014 ------------- ORDONNANCE DU JUGE DES REFERES -------------- Affaire : -MONSIEUR SEYDOU KONE MAITRE AJAVON MARIE ELISE Contre -LA SOCIETE de DISTRIBUTION d EAU de CÔTE d IVOIRE dite SODECI MAITRE ADJOUSSOU THIAM -------------- DECISION : Contradictoire Au principal renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu elles aviseront ; Dès à présent, vu l urgence et par provision ; Recevons monsieur SEYDOU KONE en son action ; L y disons partiellement fondé ; L autorisons à consigner entre les mains de la Caisse des Règlements Pécuniaires des Avocats en abrégé CARPA, la somme de 800.000 FCFA correspondant au montant de quatre factures Faisons défense à la SODECI d interrompre la fourniture d eau ; Disons n y avoir lieu à astreinte ; Mettons les dépens à la charge de la SODECI ; AUDIENCE PUBLIQUE DU 12 FEVRIER 2014 L an deux mil quatorze Et le douze février Nous, TOURE AMINATA, Juge délégué dans les fonctions du Président du Tribunal de commerce d Abidjan, statuant en matière de référés ; Assisté de Maître DOLEGBE SELIKA LEONIE, Greffier ; Avons rendu l ordonnance dont la teneur suit : Par exploit en date du 21 janvier 2014 de maître ASSEMIEN AGAMAN huissier de justice à Abidjan, monsieur SEYDOU KONE a fait servir assignation à la société de DISTRIBUTION d EAU de CÔTE d IVOIRE dite SODECI d avoir à comparaître devant la juridiction présidentielle de ce siège aux fins d entendre : -l autoriser à consigner entre les mains de la Caisse des Règlements Pécuniaires des Avocats en abrégé CARPA, la somme de 800.000 FCFA correspondant au montant de quatre factures -faire défense à la SODECI d interrompre la fourniture d eau et ce sous astreinte de 10.000.000 FCFA par acte d interruption constatée ; Au soutien de son action, monsieur SEYDOU KONE expose qu il a souscrit à un contrat d abonnement auprès de la société SODECI aux termes d un contrat de fourniture d eau pour un usage domestique ; Il précise que le 28 août 2013, la SODECI a procédé à l enlèvement de son compteur sans qu aucune anomalie ne soit préalablement constatée et l a remplacé par le compteur N 150005 ; Il ajoute qu en novembre 2013, la facture de la période d Août 2013, septembre 2013 et octobre 2013 avec une facture complémentaire de novembre 2013, lui a été remise par la SODECI et il s en est acquitté le 11 novembre 2013 ; Poursuivant le demandeur ajoute que contre toute attente, il a reçu le 08/01/2014 quatre factures complémentaires pour les périodes de facturation de janvier 2013, avril 2013, juillet 2013 et octobre 2013 ayant toutes comme date limite de paiement le 25 janvier 2014 ; Selon le demandeur, ayant envoyé son fils se renseigner auprès de la SODECI, il apprenait que l ancien compteur enlevé était truqué et ce sans qu aucun élément de preuve ne soit produit par la SODECI ; Il fait noter qu il est prêt à payer si des éléments de preuve lui sont fournis, mais qu en attendant, il sollicite la consignation à la CARPA de la somme de 800.000 FCFA représentant le montant total des quatre factures complémentaires et qu il soit fait défense 1
à la SODECI d interrompre la fourniture d eau chez lui ; En réplique, la société de DISTRIBUTION d EAU de CÔTE d IVOIRE dite SODECI soulève de prime abord l incompétence de la juridiction des référés, au motif qu aux termes de leur contrat les factures doivent être payées dès leur réception de sorte qu en ne payant pas le demandeur s expose à la suspension immédiate de la fourniture d eau et à la résiliation du contrat d abonnement ; Elle précise qu en cas de grief et conformément à la procédure applicable, l abonné doit d abord payer la facture contestée et exercer ensuite un recours auprès d elle ; Elle estime qu en écartant l application d une clause contractuelle, le juge des référés risque de préjudicier au fond du litige, ce qu il n est pas habilité à faire en application de l article 221 du code de procédure civile, commerciale et administrative ; Elle fait valoir qu elle est concessionnaire du service public national de distribution publique urbaine d eau potable en Côte d Ivoire, en vertu de la convention de concession conclue entre l Etat de Côte d Ivoire et elle, approuvée par décret N 87-1471 du 17 décembre 1987 et reconduite en 1997 sous la dénomination de contrat d affermage du service de distribution publique urbaine d eau potable ; En vertu de cette convention soutient la demanderesse, l Etat lui a concédé des prérogatives de puissance publique qui lui donne le privilège de l exécution préalable, de sorte que les abonnés se doivent d exécuter avant toute discussion ses actes ; Elle argue que le privilège d exécution préalable exprimé à l article 4.3 du contrat liant les parties fait obstacle aux demandes de monsieur SEYDOU KONE et affirme que la convention de concession sus citée est un acte administratif revêtu du pouvoir exécutoire ; Ce dernier répond à ces moyens en soutenant que le juge des référés est compétent pour ordonner les mesures à caractère provisoire et conservatoire qu il sollicite ; DES MOTIFS En la forme Sur le caractère de la décision La SODECI ayant comparu et conclu, il y a lieu de statuer par décision contradictoire ; Sur l exception d incompétence La SODECI soulève l exception d incompétence de la juridiction des référés au motif que connaitre de la présente action amènerait le juge des référés à préjudicier au fond du litige, ce qu il n est pas habilité à faire ; En application de l article 226 alinéa 1 du code de procédure civile commerciale et administrative qui dispose : «Le juge des référés statue par ordonnance. Sa décision ne peut en aucun cas porter préjudice au principal.», la décision du juge des référés ne peut 2
préjudicier au fond ; Il y a risque de préjudice au fond toutes les fois où la juridiction des référés doit, pour prendre la mesure sollicitée, trancher une question de fond ; En l espèce, il est demandé à la juridiction de céans, de consigner une somme d argent et de faire défense à la SODECI d interrompre la fourniture d eau ; Les parties étant en conflit quant au montant de la facture due par le demandeur, les mesures sollicitées sont des mesures à caractère purement provisoire et conservatoire n ayant aucune incidence sur le fond du litige ; De telles mesures relèvent bien de la compétence de la juridiction des référés ; Il échet en conséquence de rejeter l exception d incompétence soulevée ; Sur la recevabilité de l action La présente action ayant été initiée dans le respect des exigences légales de forme et de délai ; Il sied de la déclarer recevable ; 3 Au fond Sur la demande de consignation des sommes d argent Monsieur SEYDOU KONE sollicite d être autorisé à consigner entre les mains de la Caisse des Règlements Pécuniaires des Avocats en abrégé CARPA, la somme de 800.000 FCFA correspondant au montant de quatre factures En application des articles 221 et suivants du code de procédure civile, commerciale et administrative, le juge des référés qui est juge de l évidence et des mesures conservatoires est habilité à prendre toute mesure à caractère provisoire et conservatoire tendant à la sauvegarde des droits et intérêts des parties ; En outre, en application de l article 1961 du code civil, en cas d urgence, le juge des référés a pouvoir pour ordonner une mesure de séquestre ; Cet article dispose : «La justice peut ordonner le séquestre : 1 Des meubles saisis sur un débiteur ; 2 D un immeuble ou d une chose mobilière dont la propriété ou la possession est litigieuse entre deux ou plusieurs personnes ; 3 Des choses qu un débiteur offre pour sa libération.» ; Il est constant en l espèce que les parties sont liées par une convention d abonnement en application de laquelle la SODECI concessionnaire du service public national de distribution d eau potable en Côte d Ivoire fournit de l eau au demandeur moyennant le paiement de factures ; Il n est pas contesté qu en l état, les parties divergent quant au montant des factures restant dû, le demandeur estimant qu il s est acquitté des factures et qu il ne doit plus rien tandis que selon la
défenderesse les factures complémentaires émises suite au constat de fraude restent dues ; Le litige sérieux condition de la nomination d un séquestre existe en l espèce ; En outre la mesure sollicitée s avère indispensable et urgente, puisque la SODECI peut à tout moment interrompre la fourniture d eau alors que celle-ci est vitale parce qu étant source de vie ; Le demandeur ayant donc offert de payer, le privilège de l exécution préalable invoqué par la SODECI ne saurait prospérer en l espèce, le paiement effectué entre les mains du séquestre étant libératoire en application de l article 1961 sus indiqué, de sorte qu il en résulte que celle-ci s est effectivement exécutée ; Il y a donc lieu de faire droit à la demande de consignation en désignant la Caisse des Règlements Pécuniaires des Avocats en abrégé CARPA en qualité de séquestre pour conserver les fonds en attendant l issue du litige opposant les parties sur le paiement et le montant des factures ; Sur la demande tendant à faire défense à la SODECI d interrompre la fourniture d eau Monsieur SEYDOU KONE sollicite qu il soit fait défense à la SODECI d avoir à interrompre la fourniture d eau ; Le paiement des factures litigieuses entre les mains du séquestre étant libératoire ainsi qu il a été sus jugé, la SODECI ne peut plus valablement se fonder sur un quelconque défaut de paiement pour interrompre la fourniture d eau ; Il y a donc lieu de lui faire défense d avoir à le faire en attendant le règlement du litige opposant les parties ; Sur la demande d astreinte L astreinte tend à vaincre la résistance d un justiciable récalcitrant qui n entend pas se soumettre à l exécution d une décision de justice ; Ladite résistance ne saurait donc être présumée ; La présente décision n ayant pas encore été signifiée il ne saurait être question de résistance et donc d astreinte ; Il sied dès lors de rejeter cette demande en disant n y avoir lieu à astreinte ; Sur les dépens La SODECI succombant, il sied de mettre les dépens de l instance à a charge ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référés et en premier ressort ; Au principal renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu elles aviseront ; Dès à présent, vu l urgence et par provision ; 4
Recevons monsieur SEYDOU KONE en son action ; L y disons partiellement fondé ; L autorisons à consigner entre les mains de la Caisse des Règlements Pécuniaires des Avocats en abrégé CARPA, la somme de 800.000 FCFA correspondant au montant de quatre factures Faisons défense à la SODECI d interrompre la fourniture d eau ; Disons n y avoir lieu à astreinte ; Mettons les dépens à la charge de la SODECI ; ET AVONS SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER. / 5