Points d'intervention du M. Gilles de Robien, Ambassadeur de la Cohésion sociale, France

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CONFERENCE OCDE-OIT SUR LA RESPONSABILITE SOCIALE DES ENTREPRISES Emploi et relations professionnelles : Promouvoir un comportement responsable des entreprises dans une économie mondialisée 23-24 juin 2008, Paris, France Points d'intervention du M. Gilles de Robien, Ambassadeur de la Cohésion sociale, France Monsieur le Secrétaire Général, Monsieur le Directeur Général Messieurs les Ministres, Mesdames, Messieurs, Permettez moi, tout d abord, de remercier et de féliciter l OCDE et le BIT pour l organisation d une telle conférence, dans des délais aussi rapides après les recommandations de la réunion des chefs d Etat du G8 d Heiligendamm de juillet 2007. Les contributions préparées pour cette conférence sont en effet de grande qualité. Elles devraient éclairer nos débats en vue de trouver les voies les plus efficaces pour renforcer le respect des principes de la responsabilité sociale des entreprises, comme nous y invite la Déclaration du Sommet du G8. Les travailleurs du monde entier et leurs familles qui vivent des mutations, les chefs d entreprise qui sont confrontés à la concurrence du marché mondial, les responsables politiques qui doivent conduire l adaptation de leurs pays, tous attendent une voie équilibrée entre l impératif économique qui s impose à tous et la prise en compte des réalités et des besoins sociaux dans le processus de mondialisation. Tous souhaitent que les organisations internationales comme l OCDE et l Organisation internationale du travail contribuent à montrer un chemin, dans un souci d équité et de durabilité. L économie mondialisée s est désormais émancipée des mécanismes de régulation nationaux. Il est donc de notre responsabilité à tous, à commencer par les responsables politiques, de nous efforcer de construire les nouvelles régulations sociales de la mondialisation. Il faut faire en sorte qu à côté des enjeux économiques, commerciaux, financiers, les droits sociaux et le respect de l homme au travail trouvent toute leur place. De manière à prolonger le rôle des Etats, désormais limité, nous devons rechercher cette nouvelle régulation sociale dans deux directions. - La première direction est celle des initiatives institutionnelles que nous devons prendre à l échelle européenne et mondiale.

C est le sens de notre engagement, à l occasion de la toute prochaine présidence française de l Union européenne en faveur de la dimension sociale de l Union européenne. C est cette dimension plus humaine qu il faut mettre en avant pour que les peuples continuent d adhérer au projet européen. Nous agirons pour aboutir à des propositions visant à faire évoluer la construction sociale de l Europe et les instruments dont elle dispose. [Rappelons les valeurs qui rassemblent les différents Etats de l Union européenne : la mobilité et la liberté de circuler, l accès à une protection sociale de qualité comme élément caractéristique du modèle social européen qu il faut adapter, mais aussi promouvoir dans le monde, l égalité des chances, la qualité du travail et son rôle dans la cohésion de la société en même temps que pour la force de l économie européenne.] Nous devons porter cette vision d équilibre entre l économique et le social. Nous devons la prolonger au niveau des instances internationales qui animent la gouvernance de la mondialisation. A cet égard, nous nous félicitons de l adoption de la «Déclaration de l OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable» à la dernière Conférence internationale du travail qui orientera désormais l action du BIT pour donner une dimension sociale au processus de mondialisation. Le renforcement de l interaction entre l OIT et les institutions économiques, commerciales ou financières est nécessaire. Les débats sur l introduction de liens avec les normes fondamentales du travail dans les accords commerciaux témoignent de la difficulté et de l ampleur de la tâche. Cette première direction institutionnelle de la régulation sociale mondiale est un enjeu et un objectif pour nos gouvernements. Le chemin est difficile, les avancées sont lentes, mais il nous faut progresser sur une voie pragmatique. - La deuxième direction de l action de régulation s adresse aux acteurs eux-mêmes. Il faut réussir à davantage impliquer les partenaires économiques et la société civile. Les effets d exemplarité de leurs initiatives sont aujourd hui perçus comme bénéfiques à tous. La responsabilité sociale des entreprises s inscrit dans une telle perspective. Elle offre une première réponse aux déséquilibres du monde globalisé, mais elle est aussi un reflet de sa complexité. En effet, les entreprises doivent se positionner par rapport à des contraintes nouvelles : Parmi ces contraintes, soulignons la place des préoccupations sociales et environnementales de plus en plus fortes mais également le rôle joué par une médiatisation à l échelle du monde. Il en résulte que le comportement d un sous- traitant en Asie ou en Afrique peut influencer, par exemple, les choix d investisseurs américains et de consommateurs européens. 2

Tous les pays sont donc concernés, pays développés, émergents ou en développement. A cet égard, je me félicite de la participation à nos débats de M. Nana Akomea, Ministre de la maind œuvre et de l emploi du Ghana. Nos débats seront l occasion d aborder la dimension proprement sociale de la RSE sous l angle d un double enjeu : - L enjeu économique pour l entreprise et son développement à long terme - Le rôle des pouvoirs publics aujourd hui pour favoriser et «crédibiliser» les initiatives des entreprises. I. La responsabilité sociale des entreprises est un enjeu de compétitivité pour l entreprise et son développement. Confrontées à des risques nouveaux, des entreprises de plus en plus nombreuses, et pas seulement des grandes multinationales, adoptent des stratégies de progrès social et de développement durable. Elles le font parce que c est un atout concurrentiel et une question de soutenabilité à long terme. En d autres termes, même s il n est pas prouvé que les comportements sociaux vertueux créent de la valeur, ne pas les adopter semble un risque que de moins en moins d entreprises acceptent de courir. A cet égard, je me réjouis des résultats de l étude réalisée pour l OCDE sur les pratiques en matière de RSE qui mettent en évidence les comportements positifs des sociétés mères européennes quant au respect des normes du travail internationalement reconnues, en particulier les droits fondamentaux du BIT. Il ne me semble pas que les résultats économiques et financiers de ces entreprises soient aujourd hui particulièrement menacés. En effet, la responsabilité sociale des entreprises répond à l aspiration des salariés. Investir dans la formation, assurer de bonnes conditions de travail, contribuer à la protection sociale sont source de motivation et de développement personnel qui améliorent la productivité. La responsabilité sociale des entreprises répond aussi à une exigence grandissante des consommateurs dont les actions ne sont pas sans effets sur les parts de marché des entreprises. La responsabilité sociale des entreprises contribue enfin au besoin de sécurité de l investisseur. Grâce aux indicateurs sociaux fournis par les rapports d activité des entreprises ou les agences de notation, les investisseurs ont la possibilité de mieux juger la capacité de «gouvernance globale» des entreprises qui constitue un gage de leur performance de long terme. L investissement socialement responsable est aussi perçu comme un outil de réduction des risques financiers. L implication directe des représentants des entreprises dans la promotion des principes directeurs de l OCDE (à l exemple du MEDEF en France) a, sans nul doute, largement contribué à la diffusion de ces nouveaux comportements. 3

Les Etats et les partenaires sociaux ont également joué leur rôle pour favoriser la mise en œuvre de ces principes. A cet égard, il convient de se féliciter des perspectives ouvertes par l élargissement de l OCDE à cinq nouveaux pays et des ouvertures qui naitront de l engagement renforcé vers cinq autres. L adhésion aux principes directeurs sur une base volontaire, qui a conduit, par exemple, l Argentine à jouer un rôle actif au sein du Comité de l investissement de l OCDE est particulièrement encourageante, et je salue la présence à cette conférence de M Carlos Tomada, Ministre du travail, de l emploi et de la sécurité sociale de l Argentine. L élargissement de l OCDE et la mise en œuvre de l engagement renforcé vont, sans nul doute, valoriser l intérêt d une adhésion active aux principes directeurs par les pays concernés. Cela offrira aussi une perspective concrète à l appel au dialogue de haut niveau aux responsables des grandes économies émergentes sur la responsabilité sociale des entreprises, comme recommandé par la déclaration du G8 d Heiligendamm. II - Dans un cadre plus général, comment se présente le rôle spécifique des pouvoirs publics? Les pouvoirs publics doivent contribuer à l expression et à la réalisation des objectifs de la responsabilité sociale des entreprises. Pour ma part, je vois trois objectifs majeurs à appuyer : - La transparence et l exemplarité ; - Le dialogue, et notamment le dialogue social ; - L accompagnement de la gouvernance mondiale. Premier objectif : la transparence et l exemplarité Il convient de progresser dans les instruments d analyse, d évaluation, de reporting pour employer le langage des auditeurs ou de rapportage, son équivalent français. La France a prévu, depuis 2001, pour les entreprises côtés en bourse, un cadre législatif, à travers la loi sur les nouvelles régulations économiques. Il leur est ainsi demandé d intégrer des indicateurs permettant d évaluer la manière dont elles prennent en compte les conséquences sociales et environnementales de leur activité dans le rapport annuel qu elles soumettent à leur conseil d administration. Les premières évaluations des effets de cette loi montrent que la grande majorité des grandes entreprises fournissent un nombre limité de tels indicateurs sociaux et les plus importantes d entre elles, un rapport approfondi de développement durable. Une réflexion est en cours en France pour améliorer ce cadre, en proposant, par exemple, d étudier les moyens de mieux prendre en compte les filiales des sociétés dans les rapports ou d envisager dans quelle 4

mesure un cadre généralisable et comparable internationalement, pour un petit nombre d indicateurs significatifs, serait souhaitable et réalisable. Les labels, élaborés par les pouvoirs publics pour valoriser l exemplarité de bonnes pratiques de RSE, sont aussi des instruments efficaces de leur diffusion. En France, le label égalité, établi en 2004 pour récompenser les entreprises qui mènent de véritables politiques d entreprise pour l égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, a connu un vrai succès. Enfin, la prise en compte de la dimension sociale dans les procédures de la commande publique a été intégrée en France dans la réforme du code des marchés publics en 2006. Notre expérience est encore limitée dans ce domaine par rapport à celle de certains de nos partenaires européens. Cependant, d ores et déjà, des objectifs sociaux deviennent désormais des éléments à prendre en compte, tant dans la détermination des besoins que dans les conditions d exécution des marchés. Nous espérons approfondir ces réflexions au niveau de l Union européenne, notamment dans le cadre de la conférence sur la responsabilité sociale des entreprises qui sera organisée le 30 octobre à Paris, pendant la présidence française. Deuxième objectif : le dialogue, notamment de dialogue social Il apparait clairement, comme nous le montre la diversité des participants à la réunion d aujourd hui, que la responsabilité sociale des entreprises est une responsabilité partagée. Même si elle repose avant tout sur un engagement volontaire de l entreprise, elle ne peut être que partagée avec : - Les syndicats de salariés, - Les consommateurs, les citoyens et les ONG ; - Les pouvoirs publics. Je souhaiterai insister sur la qualité du dialogue social comme garantie de l efficacité et de la durabilité des engagements des entreprises. Les principes directeurs de l OCDE, et encore plus explicitement la Déclaration tripartite de l OIT, incitent à l amélioration des relations professionnelles par le respect du droit syndical, le recours à la négociation collective ainsi que par la prévention et le règlement des conflits. Un dialogue social de qualité, encouragé par un cadre législatif adéquat, doit naturellement trouver sa place avec les autres parties prenantes. Les représentants des salariés, lorsqu ils sont présents dans le dialogue externe de l entreprise et associés à des mécanismes de suivi, sont souvent une garantie de crédibilité pour la mise en œuvre des engagements des entreprises, dans la durée, vis-à-vis des autres parties prenantes. Une des richesses d une telle modalité de RSE, que l on pourrait qualifiée de RSE négociée, réside justement dans les potentialités qu elle ouvre pour ce dialogue élargi. 5

Un tel dialogue doit être encouragé comme modalité d accompagnement de la gouvernance mondiale, troisième objectif de la RSE que les pouvoirs publics doivent soutenir. Dans ce domaine, le développement des accords cadres internationaux de RSE, dont un premier bilan vient d être établi par le BIT, doivent être encouragés. Les partenaires sociaux impliqués dans ces accords ont également dressés des bilans précis des premiers accords. Par exemple, un premier Bilan de l accord du groupe EDF, signé en 2005, a permis aux représentants des salariés de dresser, je cite, «un constat plutôt positif» de ses effets. Ainsi, dans deux transferts d entreprises le groupe a imposé des clauses sociales au repreneur pour maintenir, sur un ou deux ans selon les cas, les salaires, les effectifs ou les acquis sociaux. On a constaté aussi une amélioration du dialogue social au sein du groupe et au niveau local, par une participation active dans ce dialogue de représentants des filiales chinoises, par exemple. En conclusion, il est clair que la responsabilité sociale des entreprises n a pas vocation à se substituer à la réglementation, mais à la compléter. Elle constitue un nouveau mode d expression du dialogue social. Elle joue en quelque sorte un rôle de défricheur, aussi bien au niveau de nos pratiques nationales que des évolutions de la régulation mondiale. A cet égard, la Conférence qui nous réunit aujourd hui autour de nouveaux travaux d évaluation des pratiques des entreprises et de l efficacité des instruments d accompagnement de la RSE, répond exactement aux besoins de toutes les parties prenantes engagées dans la promotion et la mise en œuvre des comportements socialement responsables. 6