Royaume du Maroc. L'impact de la baisse des taux d'intérêt : les mécanismes de transmission et les enseignements d'une simulation



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Royaume du Maroc L'impact de la baisse des taux d'intérêt : les mécanismes de transmission et les enseignements d'une simulation

Constituant une sélection mensuelle des travaux menés par les cadres de la Direction de la Politique Economique Générale, les documents de travail engagent cependant la responsabilité des auteurs les ayant initiés. Ils sont diffusés par la Direction pour approfondir le débat sur les sujets en question et susciter des observations.

Résumé Dans les pays industrialisés comme dans certains pays en développement, les politiques monétaires sont appuyées presque exclusivement sur l arme des taux d intérêt. Examiner l impact de la politique monétaire sur l économie réelle revient à analyser les canaux de transmission des taux d intérêt sur les comportements des acteurs économiques. Au Maroc, les règles de conduite de la politique monétaire s inscrivent dans la même approche de régulation monétaire et d orientation de l offre de crédit en se basant essentiellement sur l instrument des taux d intérêt. Dans la perspective de soutenir l activité économique, au cours de ces dernières années, les taux d intérêt bancaires, ainsi que ceux appliqués sur les différentes catégories des bons du Trésor ont enregistré des baisses qui ont dépassé les 500 points de base. Le processus de détente des taux d intérêt au Maroc s est traduit par la contraction de la marge d intermédiation des banques et l amélioration des conditions de financement des entreprises. Il n en demeure pas moins que les impacts macroéconomiques de la baisse des taux restent difficiles à évaluer avec précision sur le plan empirique. Les résultats produits sur l économie par la baisse des taux à court terme, tels que fournis par le modèle Nour permettent d avancer qu une baisse de ces derniers de 1 point au Maroc soutiendrait la croissance de 0,2 point la première et la deuxième année et 0,1 point la troisième année. Le taux de chômage baisserait de 0,1 point au bout d un an et de 0,2 point au bout de 2 ans. Par ailleurs, l effet sur le niveau des prix serait nul et le rythme de progression de ces derniers à partir de la deuxième année serait très faible (0,1% en moyenne par an), dû principalement au fait que le rythme d accroissement de la demande intérieure serait insuffisant pour engendrer des tensions sur le système productif. L impact du choc au niveau des différentes composantes de la demande intérieure serait marqué par une augmentation de la consommation des ménages en volume de 0,4% au bout d un an, 0,3% au bout de 2 ans et 0,2% au bout de 3 ans. L amélioration de la consommation des ménages à court terme serait soutenue par un accroissement du revenu disponible des ménages de 0,1% la première année et 0,2% la deuxième année. L investissement total en terme réel connaîtrait une hausse de 0,2% au bout d un an, de 0,3% au terme de la deuxième et troisième années. Toutefois, au niveau des différentes composantes de l investissement privé, la progression la plus importante proviendrait, à court terme, de l investissement privé en matériel et outillage qui connaîtrait une hausse de 0,4% au terme de la première année et 0,5% au bout de 2 ans, contre 0,2% et 0,3% pour l investissement en bâtiment respectivement pour les mêmes années. L analyse des résultats du choc permet d avancer que l impact d une baisse des taux d intérêt est très modeste face à des attentes très importantes en matière de réduction du chômage au Maroc qui se situe actuellement à 11,6% et aux impératifs d une démographie qui met chaque année plus de 263000 demandeurs d emploi sur le marché du travail. L examen des tendances des composantes de la demande intérieure après le choc sur les taux d intérêt fait ressortir l importance des effets de substitution dans le comportement des ménages et des entreprises. 1

Concernant les ménages, la baisse des taux d intérêt réduit leur épargne à court terme (1 an et 2 ans). De ce fait, leur consommation a tendance à augmenter. Toutefois, le rythme de progression de la consommation est 3 à 4 fois supérieur au taux de ralentissement de la progression de l épargne et 3 à 2 fois supérieur au rythme de progression du revenu disponible. Ceci laisse penser que le supplément de la consommation serait financé par crédit bancaire dans un contexte financier marqué par et le relâchement de la contrainte de liquidité des ménages. L amélioration de l investissement privé est accompagnée d une hausse des crédits à l économie de 0,2% au bout d un an et de 0,8% au bout de 2 ans, et d un accroissement de l emploi respectivement de 0,1% et de 0,2%. Le rythme de progression de l emploi est 4 fois inférieur à celui des crédits à l économie. Ces résultats obtenus laissent croire que les effets de substitution du capital au travail influent sur le comportement de l investissement au Maroc. 2

Dans les pays industrialisés comme dans certains pays en développement, les politiques monétaires sont appuyées presque exclusivement sur l arme des taux d intérêt. Examiner l impact de la politique monétaire sur l économie réelle revient, en fait, à analyser les canaux de transmission des taux d intérêt sur les comportements des acteurs économiques. Au Maroc, les règles de conduite de la politique monétaire s inscrivent dans la même approche de régulation monétaire et d orientation de l offre de crédit en se basant essentiellement sur l instrument des taux d intérêt. Pour assouplir les conditions de financement, Bank Al Maghrib a modifié ses taux d intérêts directeurs à huit reprises depuis 1996. Parallèlement, dans un contexte de réduction du déficit budgétaire et de réforme du marché de la dette intérieure, les taux des bons du Trésor pour les différentes maturités ont accusé des baisses qui ont dépassé les 500 points de base. Cette volonté des autorités monétaires à ramener les taux d intérêt à des niveaux relativement bas, pour soutenir l activité économique, traduit la place et le rôle important qu occupe la politique monétaire en général et celle des taux d intérêt en particulier au sein des grandes orientations de la politique économique. S il est vrai qu au cours des trois dernières années, la marge d intérmédiation des banques a accusé une baisse notable et que, par ailleurs, les chefs d entreprises jugent les conditions de financement moins défavorables, il n en demeure pas moins que les impacts macroéconomiques de la baisse des taux restent difficiles à évaluer avec précision sur le plan empirique. Toutefois, les résultats produits sur l économie par la baisse des taux à court terme, tels que fournis par le modèle Nour, reflètent des comportements macroéconomiques conformes à l intuition théorique et vont dans le sens des objectifs recherchés par les pouvoirs publics. L objet de cette note est d apporter un éclairage sur l incidence de la baisse des taux d intérêt sur l économie marocaine en examinant successivement : les répercussions sur les conditions de fonctionnement des intermédiaires financiers, ainsi que la façon dont se répercute sur l économie un choc de taux d intérêt. 1. Evolution des niveaux des taux et son incidence sur la marge d intermédiation des banques 1.1. Evolution des niveaux des taux Depuis le début de la libéralisation du secteur financier, une série de facteurs qui interviennent dans la formation des taux bancaires ont connu une évolution favorable : L inflation a été maîtrisée à des niveaux faibles : de 5,1 % en 1993, l'indice du coût de la vie a été ramené à 0,7% en 1999, à 1,9% en 2000, 0,6% en 2001 et à 2,8% en 2002. Les taux des différentes catégories des bons du Trésor ont considérablement baissé en dépit du financement du Trésor aux conditions du marché. L essor du marché des adjudications s est accompagné d une baisse des taux de 4,5 à près de 6 points selon les maturités à partir de 1993. 3

Le coût des ressources et de refinancement des banques a été notablement diminué. Les taux de refinancement de l Institut d Emission ont été réduits, pour la période 1995 et 2001, de 375 points de base pour les appels d offres à 7 jours et de 425 points de base pour les prises en pensions à 5 jours. Les taux appliqués aux comptes sur carnet ont été abaissés d environ 500 points de base entre 1993 et 2002. Ces évolutions ont été accompagnées d une décrue des différentes catégories de taux, y compris ceux qui demeurent administrés. L effet conjugué de ces diminutions s est traduit au niveau des taux débiteurs des banques qui ont affiché entre 1993 et 2002 une baisse de 700 points de base respectivement pour le court et moyen terme et de 600 points de base pour le long terme. La comparaison du taux interbancaire aux taux de base bancaire (graphique 1) montre que les baisses qui ont caractérisé le premier ont été suivies souvent d une baisse du deuxième. 12 10 8 6 4 2 0 Graphique (1) : Evolution des taux interbancaires et du taux de base bancaire à court terme entre 1996 et 2002 janv-96 mais-96 sept-96 janv-97 mais-97 sept-97 janv-98 mais-98 sept-98 janv-99 mais-99 sept-99 janv-00 mais-00 sept-00 janv-01 mai-01 sept-01 janv-02 mai-02 sept-02 TIB TBB à CT Source : Bank Al Maghrib Il a été constaté que depuis 1996, une baisse des taux interbancaires allant de 0,50 à 1 points a pour conséquence une réduction des taux de base bancaires de 0,50 à 0,75 point de pourcentage. Parallèlement, les conditions débitrices effectives des banques, représentées par le taux apparent 1, ont suivi la même tendance (Graphique 2). 1 Le taux apparent des banques est le rapport entre les intérêts reçus au titre des crédits distribués à la clientèle et l encours moyen de ces derniers. 4

Graphique (2) : le taux de base bancaire explique t-il correctement les variations des taux débiteurs? 15,00 14,00 13,00 12,00 11,00 10,00 9,00 8,00 7,00 6,00 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 Court terme Moyen terme Taux apparent des banques Source : Bank Al Maghrib 1.2. L effet de la baisse des taux sur les marges d intermédiation des banques Les informations disponibles confirment que la marge d intermédiation, calculée d après les états financiers des banques, a baissé entre 2000 et 2002. Graphique (3) : Evolution de la marge d intermédiation d un échantillon des banques commerciales 8,0% 7,0% 6,0% 5,0% 4,0% 3,0% 2,0% 1,0% 0,0% BCM BMCE Wafabank BMCI CDM 2000 2001 2002 5

La marge d intermédiation calculée à partir de l écart entre la rémunération moyenne des emplois et le coût moyen des ressources a atteint 5,4% en 2002 à la BCM, 5,1% à la BMCE, 5,5 % à Wafabank et 6,9% au CDM. Elle était en 2000 à 6,2% à la BCM, 5,4% la BMCE, 5,7% à Wafabank et 6,9% au CDM. Par ailleurs, d après les états financiers consolidés des banques marocaines, la marge d intermédiation est passée de 4,5% en 2000 à 4,35% en 2001 pour les banques commerciales et de 3,71% à 3,62% pour l ensemble des banques. 2. Les impacts de la baisse des taux sur l économie réelle L objet de cette section est d analyser l effet sur l économie réelle d une variation à la baisse du taux d intérêt à court terme. Il sera procédé d abord à la présentation des résultats du choc sur le taux d intérêt pour en tirer en suite quelques enseignements quant à la conduite de la politique monétaire au Maroc dans le contexte actuel de l économie nationale. 2.1. Les résultats du choc Les résultats de la simulation sont présentés en terme de différence par rapport à un scénario de base. 2.1.1. L impact sur la croissance, les prix et l emploi Les résultats fournis par le modèle Nour, permettent d avancer qu une baisse du taux d intérêt à court terme de 1 point au Maroc soutiendrait la croissance de 0,2 point la première et la deuxième année et 0,1 point la troisième année. Le taux de chômage baisserait de 0,1 point au bout d un an et de 0,2 point au bout de 2 ans. Par ailleurs, l effet sur le niveau des prix serait nul et le rythme de progression de ces derniers à partir de la deuxième année serait très faible (0,1% en moyenne par an ) qui tient principalement au fait que le rythme d accroissement de la demande intérieure serait insuffisant pour engendrer des tensions sur le système productif. Graphique (5) : Evolution du PIB réel, des prix et du chômage 0,25 0,2 0,15 0,1 0,05 0-0,05-0,1-0,15-0,2-0,25 1an 2 ans 3 ans 4 ans PIB reél les prix le taux de chômage 6

2.1.2. L impact sur la consommation, l épargne et le revenu disponible réel des ménages L impact du choc au niveau des différentes composantes de la demande intérieure serait marqué par une augmentation de la consommation des ménages en volume de 0,4% au bout d un an, 0,3% au bout de 2 ans et 0,2% au bout de 3 ans. L amélioration de la consommation des ménages à court terme serait soutenue par un accroissement du revenu disponible des ménages de 0,1% la première année et 0,2% la deuxième année, ainsi que par la réduction de l effort de l épargne de 0,1% et 0,2% respectivement. Graphique (6) : Evolution additionnelle de la consommation, de l épargne et du revenu disponible des ménages 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0-0,1-0,2 1an 2 ans 3 ans 4 ans la consommation privée en térme réel Epargne Nationale Brute revenu disponible des ménages 2.1.3. L impact sur l investissement L investissement total en terme réel connaîtrait une hausse de 0,2% au bout d un an, de 0,3% au bout de 2 ans et de 0,3% au bout de 3 ans. Toutefois, au niveau des différentes composantes de l investissement privé, la progression la plus importante proviendrait, à court terme, de l investissement privé en matériel et outillage qui connaîtrait une hausse de 0,4% au terme de la première année et 0,5% au bout de 2 ans, contre 0,2% et 0,3% pour l investissement en bâtiment respectivement pour les mêmes années. 7

Graphique (7) : Evolution additionnelle de l investissement 0,45 0,4 0,35 0,3 0,25 0,2 0,15 0,1 0,05 0 1an 2 ans 3 ans 4 ans l'investissement total en terme réel l'investissemnt privé en terme réel l'investissement privé réel en matériel et outillage investissement privé réel en batiment 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0 2.2. Les enseignements tirés de la simulation de baisse des taux d intérêt En première analyse, l impact d une baisse des taux d intérêt apparaît très modeste face à des attentes très importantes en matière de réduction du chômage au Maroc qui se situe actuellement à un taux de 11,6% et aux impératifs d une démographie qui met chaque année plus de 263000 demandeurs d emploi sur le marché du travail. Certes, le sens et l amplitude de réactivité des différentes variables macroéconomiques au choc des taux d intérêt doivent être interprétés avec beaucoup de prudence. En effet, le processus de libéralisation financière au Maroc est relativement récent, ce qui peut expliquer la fragilité de la relation entre la sphère financière et celle réelle. L examen des tendances des composantes de la demande intérieure, après le choc sur les taux d intérêt, fait ressortir l importance des effets de substitution dans le comportement des ménages et des entreprises. Concernant les ménages, la baisse des taux d intérêt réduit leur épargne à court terme (1 an et 2 ans). De ce fait, leur consommation a tendance à augmenter. Toutefois, le rythme de progression de la consommation est 3 à 4 fois supérieur au taux de ralentissement de la progression de l épargne et 3 à 2 fois supérieur au rythme de progression du revenu disponible. Ceci laisse penser que le supplément de la consommation serait financé par crédit bancaire. En effet, il est probable que les modifications structurelles intervenues au cours des dix dernières années dans le système financier marocain- désencadrement des crédits, baisse du Taux Effectif Global (TEG), libéralisation des taux d intérêt et le développement de la concurrence au sein du secteur - renforcent le lien entre la consommation et l offre du crédits bancaire. Par conséquent, l accélération du processus de la déréglementation financière pourrait s accompagner d une augmentation de l encours des crédits aux ménages, relâchant ainsi leur contrainte de liquidité. 8

En ce qui concerne l investissement des entreprises, la réponse positive de cette composante de la demande à la baisse des taux d intérêt va dans le sens des objectifs fixés par des pouvoirs publics qui cherchent, après dix années de libéralisation financière, à améliorer la réactivité de l économie à cette variable de politique monétaire en dépit du rôle faible des taux d intérêt comme variable explicative de l investissement dans le modèle Nour dont l évolution est expliquée principalement par la valeur ajoutée réelle des entreprises ; L amélioration de l investissement privé, est accompagnée d une hausse de crédits à l économie de 0,2% au bout d un an et de 0,8% au bout de 2 ans et d un accroissement de l emploi respectivement de 0,1% et de 0,2% seulement. Le rythme de progression de l emploi est 4 fois inférieur à celui des crédits à l économie. Ces résultats obtenus laissent croire que les effets de substitution du capital au travail influent sur le comportement de l investissement au Maroc. En effet, au niveau des entreprises privées, toutes choses égales par ailleurs, la baisse des taux d intérêt est de nature à réduire relativement leurs coûts du capital et les incite à en être plus intensives en capital (augmentation des investissements en matériel et outillage et augmentation des crédits à l économie) et donc à tempérer leur demande de travail. Par ailleurs, l effet revenu et l effet de richesse sont difficiles à cerner. L effet revenu est positif dans le cas d une baisse des taux d intérêt que si le consommateur est débiteur au cours de la période présente, et il est négatif si le consommateur est créditeur. La difficulté de mettre en évidence cet effet au niveau macroéconomique sur l ensemble des ménages résulte de l hétérogénéité de ce groupe structurellement préteur (mais à l intérieur duquel il existe des débiteurs et des créanciers) et de l absence des comptes des agents présentés dans cette optique. Ainsi, il est délicat d interpréter l effet revenu dégagé par le secteur des ménages à la suite d une variation des taux. Enfin, il est difficile d évaluer l impact sur la dépense courante des gains ou pertes en capital de l épargne. On peut en effet supposer que les épargnants ne suivent pas de près la valeur de leur épargne ainsi placée et/ou qu ils considèrent qu il s agit de variation cyclique sans conséquence. De même, l impact de l effet de richesse sur le comportement des ménages dans leur arbitrage entre la consommation et l épargne est impossible à analyser dans l état actuel des comptes nationaux. 9

Annexe 1.Aperçu théorique sur les voies d action du taux d intérêt Les taux d intérêt exercent leurs effets sur l activité économique de trois façons essentiellement : un effet de revenu, un effet de substitution intertemporelle et un effet de richesse. Le taux d intérêt réagit sur les principales grandeurs de la demande finale, à savoir la consommation et l investissement. L incidence globale d une variation des taux d intérêt varie selon que les ménages et les entreprises sont créanciers ou débiteurs nets. Elle dépend également de la proportion des emprunts contractés à taux variable, qui subissent immédiatement les effets des changements de taux. 1.1 Effet de revenu Une baisse des taux d intérêt accroît le revenu disponible des débiteurs, mais diminue celui des épargnants. L incidence d une variation des taux d intérêt dépend des fluctuations du solde des intérêts reçus au titre de la rémunération de l épargne et des intérêts payés sur les emprunts. Dans les pays où les ménages ont davantage (moins) de dettes que d actifs (à taux variables), les baisses des taux d intérêt gonflent (diminuent) les revenus nets des ménages. Dans la plupart des grandes économies, les entreprises sont débitrices nettes. Une baisse des taux se répercute alors favorablement sur leur trésorerie. 1.2 Effet de substitution Les variation de taux d intérêt modifient l attrait de la consommation par rapport à l épargne. Une baisse des taux d intérêt incite à consommer aujourd hui au lieu de demain, car l épargne devient moins attractive et le crédit moins cher. La charge de remboursement des ménages devient moins contraignante, ce qui les encourage à accroître leur consommation financée par crédit. Cet effet sera d autant plus important que la part de la consommation à crédit est élevée. S agissant des effets sur l investissement, un taux d intérêt réel moins élevé implique : un coût d usage du capital moins important, une meilleure profitabilité et une offre supérieure de biens à terme. En outre, il y a substitution de capital au travail, devenu relativement plus cher. Ces deux effets impliquent une hausse de l investissement, le premier avec une offre de biens supérieure, le second pour une offre donnée. L investissement en logement des ménages serait aussi amélioré à cause de l allégement de cette contrainte financière. 1.3 L effet de richesse Nommé également effet Keynes, l effet de richesse est le produit de la relation inverse qui existe entre le prix des titres et les taux d intérêt. 10

L effet de richesse est complémentaire des deux effets précédents : l impact d une variation de taux d intérêt sur la dépense globale dépend aussi du patrimoine déjà constitué par les agents privés, c est à dire du niveau et de la structure de leur richesse nette. Cet effet s analyse donc dans une optique de stocks et non plus en termes de flux comme pour les effets de substitution et de revenu. Une baisse des taux d intérêt entraîne des plus values sur les actifs financiers et accroît la valeur du patrimoine des agents. Le gain en capital incite à l accroissement de leur dépense (consommation). Cet effet sera d autant plus prononcé que le portefeuille des ménages est important. 11