... Tome 1 Etat des lieux, Défis et Perspectives de Renforcement de la Protection Sociale



Documents pareils
Cadre de Développement de la Stratégie Nationale de Protection Sociale en Côte d Ivoire

Promouvoir des synergies entre la protection des enfants et la protection sociale en Afrique de l Ouest et du Centre

Couverture du risque maladie dans les pays en développement: qui doit payer? (Paris, 7 mai 2008)

Le système de protection sociale en santé en RDC

PLACE DE L ASSURANCE PRIVEE DANS LA MISE EN ŒUVRE D UNE ASSURANCE MALADIE DITE UNIVERSELLE

POLITIQUE D ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

DONNER NAISSANCE NE DOIT PAS ÊTRE UNE QUESTION DE VIE OU DE MORT

COOPAMI? Rôle des mutuelles sociales dans les processus de mise en place de Couverture Maladie Universelle (CMU).

[LA PLUS-VALUE DES MUTUELLES DANS LE CADRE DE LA CMU] Abidjan, le 02 Février MUGEFCI - TOURE Laciné. MUTREPCI - SERY Jean-Pierre

Note Simplifiée. UNION ECONOMIQUE ET MONETAIRE OUEST AFRICAINE La Commission

NOTE DE PRESENTATION DU PROGRAMME STATISTIQUE DE L UEMOA

LE SYSTÈME DE PROTECTION SOCIALE EN SANTÉ DU SÉNÉGAL

AGENCE FRANCAISE DE DEVELOPPEMENT. Commission de l UEMOA

Le point sur la couverture du risque maladie au Niger

Conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé. Déclaration politique de Rio sur les déterminants sociaux de la santé

Le rôle de la société civile

MINISTERE DE LA FONCTION PUBLIQUE, DU TRAVAIL ET DE SECURITE SOCIALE NOTE ANALYTIQUE SUR LE SECTEUR DE LA PROTECTION SOCIALE

Couverture Maladie Universelle au Sénégal : Etat de mise en oeuvre et perspectives

BELGIQUE. 1. Principes généraux.

Note sur l extension de la couverture d assurance maladie au Rwanda

La protection sociale en France

LES OUTILS EUROPÉENS DE PROTECTION SOCIALE EN BREF

Argumentaire du Développement de la Couverture Universelle en Santé au Niger

Nations Unies Haut Commissariat aux Droits de l Homme, réf: NVebU mes 2011

Evaluation du projet Fonds pour la consolidation de la paix, Welthungerhilfe Butembo République Démocratique du Congo

pas de santé sans ressources humaines

JAPON. Nomenclature. nationale (prestations de maladie) Pension nationale Assurance pension des salariés. Assurance maladie gérée par des sociétés

INTÉGRATION DES SERVICES FINANCIERS DANS LES STRATÉGIES DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ Un aperçu Général

CHARLES DAN Candidat du Bénin pour le poste de Directeur général du Bureau international du Travail (BIT)

DEVELOPPEMENT DU SECTEUR DE LA SANTE/PROJETS. Ministre de la Santé Publique et de la Lutte contre le Sida Hon. Dr. Sabine NTAKARUTIMANA

MEMORANDUM POSITIONNEMENT DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE SENEGALAISE SUR LA COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE

Harmonisation pour la santé en Afrique (HHA) Cadre d action

ATELIER 3 Analyse des différents systèmes de protection sociale en santé en Afrique

Swiss Centre for International Health Les mutuelles de santé dans les districts de Karongi et de Rutsiro au Rwanda

S engager pour la survie de l enfant: Une promesse renouvelée

Enjeux de santé globale à partir de 2015 la Couverture santé universelle accès équitable aux soins pérenne et pour tous»

humanitaire, le GTPE est un domaine de responsabilité du Cluster de protection global.

Activité n du PAA 2014

3 The Millennium Development Goals: Report Objectifs du Millénaire pour le développement Rapport asdf NATIONS UNIES

Conseil d administration Genève, mars 2000 ESP. Relations de l OIT avec les institutions de Bretton Woods BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL

Ministère de la Fonction publique, du Travail, du Dialogue social et des Organisations professionnelles

INTERPRETER UN RAPPORT ACTUARIEL Sélection des hypothèses actuarielles dans le contexte africain Par Papa Babou NDIAYE, Directeur des Etudes

Plan d Action de Ouagadougou contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, tel qu adopté par la Conférence

L'extension de la sécurité sociale aux populations non couvertes

asdf Deuxième Assemblée mondiale sur le vieillissement Madrid (Espagne) 8-12 avril 2002 madrid

LES OMD EN CHIFFRES. Par Raulin Lincifort CADET INTRODUCTION

Comité des produits Discours du Directeur général. 29 mai DISCOURS D OUVERTURE DU DIRECTEUR GÉNÉRAL AU COMITÉ DES PRODUITS.

LES SOINS DE SANTÉ POUR LES MIGRANTS SANS PAPIERS EN SUISSE SERVICES

Le FMI et son rôle en Afrique

Burkina Faso. Une approche intégrée d extension de la protection sociale et de promotion de l emploi productif

Ministère des Mines, de l Industrie et des PME PROGRAMME NATIONAL «PLATE-FORME MULTIFONCTIONNELLE POUR LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETE (PN-PTFM)

Note de présentation du Projet d évaluation d un programme communautaire d hygiène et assainissement au Mali.

STRATEGIE NATIONALE DE FINANCEMENT DE LA SANTE EN VUE DE LA COUVERTURE UNIVERSELLE EN SANTE AU NIGER. Version finale

Réunion préparatoire du groupe d experts de la troisième Conférence des ministres africains chargés de l enregistrement des faits d état civil

L approche populationnelle : une nouvelle façon de voir et d agir en santé

Recommandation de RECOMMANDATION DU CONSEIL. concernant le programme national de réforme du Luxembourg pour 2015

POURQUOI LE GABON A-T-IL BESOIN DE STATISTIQUES FIABLES?

Contributions françaises à la problématique internationale de la protection sociale des travailleurs informels et de leurs familles.

CONSEIL DE COORDIN AT I O N DU PROGRAM M E DE L ONUSID A

La mutuelle de santé, une alternative crédible de couverture du secteur informel?

contre la pauvreté et pour l inclusion sociale

Accès des populations rurales au capital en Agroland

Stratégie du Pôle Social. Stratégie du Pôle Social

Campagne nationale pour l élimination des fistules obstétricales en Mauritanie

Consultations prébudgétaires

Partage des coûts vs gratuité

Commission pour la consolidation de la paix Configuration pays République centrafricaine

Plan d orientations stratégiques

MINISTÈRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE, DE LA SOLIDARITÉ ET DE LA VILLE MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DES SPORTS PROTECTION SOCIALE

ANNULATION DE LA DETTE EXTÉRIEURE POUR LES PAYS TOUCHÉS PAR LA MALADIE À VIRUS EBOLA

FINANCEMENT DE L OFFRE DE SOINS EN AFRIQUE. Prof DIE-KAKOU

Plan de l exposé L assurance maladie obligatoire pour tous: Cas particulier de la république du Rwanda

Réduire la pauvreté : comment les collectivités territoriales peuvent-elles être des catalyseurs du développement économique pro-pauvre?

de plus de moitié, particulièrement dans les pays où la mortalité infantile est élevée 39.

Programme «financement» - Partie I Données de cadrage

Le financement de l apprentissage informel

Analyse. Le mouvement mutualiste et les politiques nationales de santé et de protection sociale au Burkina Faso Par Esther Favre-Félix.

VIIème Congrès international FATO Yamoussoukro 2013

Inégalités sociales de santé et accès aux soins. Inégalités sociales de santé et protection sociale Psychomot 1 UPMC/VHF

MINISTERE DE LA SANTE ET DE L ACTION SOCIALE

L Assurance agricole au Sénégal

Modélisation de la réforme des pensions

Les personnes handicapées ont les mêmes droits

Questions générales sur le Pacte

CONTRIBUTION DU RÉGIME D ASSURANCE MALADIE, MATERNITÉ DE L OFATMA AU FINANCEMENT DE LA SANTÉ EN HAÏTI

ROYAUME DU MAROC DIRECTION DU BUDGET

UNE MEILLEURE CROISSANCE, UN MEILLEUR CLIMAT

Investir dans la santé pour l Afrique L argumentation en faveur du renforcement des systèmes pour de meilleurs résultats sanitaires

Renforcement des systèmes de santé

Le FMI conclut les consultations de 2008 au titre de l article IV avec le Maroc

Programme statistique du Secrétariat Exécutif de la CEDEAO

Évaluation et recommandations

Ensemble des mécanismes de prévoyance collective pour faire face aux conséquences financières des risques sociaux.

Liste de vérification de la mise en œuvre d une équipe de santé familiale

Programme du Forum National sur la Nutrition et l Alimentation à l Hôtel KEMPINSKI N Djamena avril 2015

Thème 2 : Le rôle du «secteur informel» dans l intégration régionale

APPEL A COMMUNICATIONS

Pacte européen pour la santé mentale et le bien-être

Réformes socio-économiques

D A N S L E S PAY S F R A N C O P H O N E S

Transcription:

Cadre de Développement de la Stratégie Nationale de Protection Sociale en Côte d Ivoire Tome 1 Etat des lieux, Défis et Perspectives de Renforcement de la Protection Sociale... Janvier 2012

CADRE DE DEVELOPPEMENT DE LA STRATEGIE NATIONALE DE PROTECTION SOCIALE EN COTE D IVOIRE Tome 1 Etat des Lieux, Défis et Perspectives de Renforcement de la Protection Sociale Janvier 2012

Avant-propos / Avis aux lecteurs Cette étude a été conduite entre juin et décembre 2011 par une équipe d Oxford Policy Management (OPM) composée de Anthony Hoges, Cécile Cherrier, Auguste Blibolo et Francois Aka Bedia, sous la direction d un Comité de Pilotage interministériel, avec l appui financier du Fonds des Nations Unies pour l Enfance (UNICEF). Les auteurs sont très reconnaissants de l appui apporté par les divers ministères concernés, qui leur ont accordé des entretiens et qui ont mis à leur disposition la documentation et les données statistiques utilisées dans cette étude. Les auteurs remercient aussi tous les participants aux deux ateliers nationaux qui ont eu lieu en août et décembre 2011 dans le cadre de cette étape prélinaire de réflexion et d analyse si importante pour assurer le bien-fondé des orientations stratégiques du dispositif futur de protection sociale dans le pays. I

Table des matières Sigles et acronymes V Préface IX Résumé exécutif X I 1 Introduction 1 1.1 Contexte et objectif 1 1.2 Méthodologie et structure du rapport 2 2 Cadre analytique : conceptualisation de la protection sociale 3 2.1 Fondements conceptuels 3 2.2 Les instruments de la protection sociale 5 3 Profil de la vulnérabilité et des risques en Côte d Ivoire 9 3.1 L es risques et chocs 9 3.2 Les sources de vulnérabilité 15 4 Programmes existants et défis de renforcement de la protection sociale 28 4.1 La protection sociale informelle 28 4.2 L assurance sociale 30 4.3 Les transferts sociaux 35 4.4 Les programmes à haute intensité de main d oeuvre (HIMO) et la promotion de l emploi 40 4.5 Les services d action sociale 43 4.6 La protection sociale dans le secteur de l éducation 51 4.7 L a protection sociale et l accès aux services de santé 57 5 Contexte politique, institutionnel et financier pour le renforcement de la protection sociale 66 5.1 Le cadre politique 66 5.2 L architecture institutionnel et la capacité administrative 68 5.3 Le financement de la protection sociale 74 6 Perspectives de renforcement de la protection sociale 78 6.1 La future Stratégie Nationale de Protection Sociale 78 6.2 Un rôle plus large pour la protection sociale non contributive 80 6.3 Le rôle potentiel des transferts sociaux monétaires et des programmes de travaux publics à HIMO 80 6.4 Le renforcement des services d action sociale 82 6.5 Les mesures de promotion de l accès de tous à l enseignement 83 6.6 Mesures pour assurer un accès abordable et équitable aux services de santé 84 6.7 Le renforcement du cadre institutionnel, des capacités administratives et du financement de la protection sociale 85 Bibliographie et annexes 89 Annexe A Liste des personnes rencontrées 96 Annexe B Dépenses publiques de protection sociale 99 Tableau b.1 Dépenses publiques courantes de protection sociale (hors personnel) : exécution, 2008-2010 (FCFA) 99 III

LISTE DES ENCADRÉS, FIGURES ET TABLEAUX Liste des encadrés Encadré 3.1 La vulnérabilité accentuée de l enfant sans cadre familial protecteur 24 Encadré 4.1 Le droit coutumier et la protection de l enfant 28 Encadré 4.2 Les subventions croisées dans le secteur de l eau potable : protègent-elles les plus pauvres en pratique? 36 Encadré 4.3 Les projets pilotes de transferts en espèces 37 Encadré 4.4 Quelques expériences prometteuses dans la lutte contre les VBG 47 Encadré 4.5 L expérience prometteuse des Comités de Veille et de Protection des Enfants 48 Encadré 4.6 Le dossier technique de l AMU était-il bien conçu? 63 Encadré 5.1 Les services spécialisés dans le développement du jeune enfant 70 Encadré 5.2 Les Centres Sociaux du MEMEASS 71 Liste des figures Figure 3.1 Chocs économiques et politiques, croissance du PIB et incidence de pauvreté, 1985-2011 10 Figure 3.2 Dépenses moyennes par tête et par an selon les déciles de consommation (FCFA), 2002 et 2008 11 Figure 3.3 Risques selon le cycle de la vie 22 Figure 4.1 Disparités des taux d accès et d achèvement scolaire selon le genre, le milieu de résidence et le niveau de richesse, 2006 52 Figure 4.2 Dépenses de santé par sources de financement (%), 2008 59 Figure 4.3 Dépenses catastrophiques par quintile de richesse, 2008 61 Figure 4.4 Utilisation des services sanitaires publics, mai 2010 et mai 2011 65 Liste des tableaux Tableau 3.1 Taux de pauvreté (%) selon les sources d eau, les types d assainissement et les types de consultations médicales, 2008 17 Tableau 3.2 Risques sociaux par quintile de bien-être économique, 2006 18 Tableau 3.3 Pauvreté monétaire et risques sociaux par milieu de résidence (%) 19 Tableau 3.4 Indicateurs de pauvreté monétaire par régions (%), 2008 21 Tableau 3.5 Risques sociaux par région (%), 2006 21 Tableau 3.6 Distribution de la population par groupe d âge et décile de consommation, 2008 23 Tableau 3.7 Disparités filles/garçons dans le système d enseignement (%), 2009 25 Tableau 4.1 Répartition des dépenses selon les catégories d assurés de la CNPS, 2010 32 Tableau 4.2 Les mutuelles professionnelles 35 Tableau 4.3 Activités du CNLVFE, 2000-2011 46 Tableau 4.4 Couverture des cantines scolaires, 2009 54 Tableau 5.1 Dépenses courantes de protection sociale (hors personnel), 2009-2010 75 Tableau 5.2 Cadre macro économique et budgétaire 76 Tableau 5.3 Programmation des investissements de protection sociale, 2010-2012 77 IV

SIGLES ET ACRONYMES ACF Action Contre la Faim ACTED Agence d Aide à la Coopération Technique et au Développement AFJCI Association des Femmes Juristes de Côte d Ivoire AGEFOP Agence Nationale de la Formation Professionnelle AGEPE Agence d Etudes et de Promotion de l Emploi du MEMEASS AGEROUTE Agence de Gestion Routière AGR Activités génératrices de revenus AMU Assurance Maladie Universelle ARV Antirétroviral BIT Bureau International du Travail BNI Banque Nationale d Investissement CDMT Cadre des Dépenses à Moyen Terme CEDEAO Communauté Economique des Etats de l Afrique de l Ouest CEPE Certificat d Etudes Primaires Elémentaires CES Centre d Education Spécialisée CFC Contribution financière communautaire CGRAE Caisse Générale de Retraite des Agents de l Etat CNAM Caisse Nationale d Assurance-Maladie CNLTEE Comité National de Lutte contre l Exploitation et la Traite des Enfants CNLVFE Comité National de Lutte contre les Violences faites aux Femmes et aux Enfants CNPS Caisse Nationale de Prévoyance Sociale CNO Centre, Nord et Ouest CNS Comptes nationaux de la santé COFOG Classification des Fonctions des Administrations Publiques («Classification of the Functions of Government») COGES Comité de Gestion CPPE Centre de Protection de la Petite Enfance CS Centre Social CSA Caisse Sociale Agricole CSB+ mélange maïs-soja enrichi («Corn Soya Blend Plus») CSE Complexe Socio Educatif DANIDA Agence Danoise pour le Développement International («Danish International Development Agency») DEPG Direction de l Egalité et de la Promotion du Genre du MFFE DGT Direction Générale du Travail du MEMEASS DIJE Développement intégré du jeune enfant DMOSS Direction de la Mutualité et des Œuvres Sociales en Milieu Scolaire du MEN DPS Direction de la Protection Sociale du MEMEASS DREN Direction Régionale de l Education Nationale DSRP Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté DTS Dépenses totales de santé EDSCI Enquête Démographique et de Santé de Côte d Ivoire EIS Enquête sur les Indicateurs du SIDA ENV Enquête sur le Niveau de Vie des ménages ESCOM Etablissement sanitaire communautaire ESPC Etablissement sanitaire de premier contact FCFA Franc de la Communauté Financière Africaine FMI Fonds Monétaire International FNAMU Fonds National de l AMU V

FNUAP Fonds des Nations Unies pour la Population FPM Fonds de Prévoyance Militaire FPPN Fonds de Prévoyance de la Police Nationale FSE-THIMO Fonds de Soutien à l Emploi par les Travaux d Utilité Publique à Haute Intensité de Main d œuvre GAVI Alliance Globale pour les Vaccins et l Immunisation («Global Alliance for Vaccines and Immunization») GIZ Coopération allemande («Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit») HCR Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies HIMO Haute intensité de main d œuvre ICI Initiative Internationale sur le Cacao («International Cocoa Initiative») IFEF Institution de Formation et d Education Féminine IM2S Institut de Formation aux Métiers de la Sécurité Sociale INFS Institut National de Formation Sociale IPEC Programme International pour l Abolition du Travail des Enfants («International Programme on the Elimination of Child Labour») IRA Infection respiratoire aiguë IRC Comité International de Secours («International Rescue Committee») IST Infection sexuellement transmissible LEAP Programme de renforcement des moyens de subsistance contre la pauvreté au Ghana («Livelihood Empowerment Against Poverty») LTTE Lutte contre la Traite et les Pires Formes de Travail des Enfants LUTRENA Projet Sous Régional de Lutte contre la Traite des Enfants en Afrique de l Ouest et du Centre MAG Malnutrition aiguë globale MEMEASS Ministère d Etat, Ministère d Etat, Ministère de l Emploi, des Affaires Sociales et de la Solidarité MEN Ministère de l Education Nationale MFFE Ministère de la Famille, de la Femme et de l Enfant MGF Mutilation génitale féminine MICS Enquête par Grappes à Indicateurs Multiples («Multiple Indicator Cluster Survey») MUGEFCI Mutuelle Générale des Fonctionnaires de Côte d Ivoire NHIS Système national d assurance maladie du Ghana («National Health Insurance System») OEV Orphelins et autres Enfants Vulnérables OIM Organisation Internationale pour la Migration OMD Objectifs du Millénaire pour le Développement OMS Organisation Mondiale de la Santé ONG Organisation Non Gouvernementale OPM Oxford Policy Management PAE Programme d Aide à l Embauche PAM Programme Alimentaire Mondial PAPC Projet d Assistance Post-Conflit PAPCS Programme d Appui à la Pérennisation des Cantines Scolaires PDI Personnes déplacées internes PDM Questionnaire de suivi Post-Distribution PEPFAR Plan d urgence du président américain pour la lutte contre le SIDA («U.S. President s Emergency Plan for AIDS Relief») PEV Programme Elargi de Vaccination PIB Produit intérieur brut PIP Programme d Investissements Publics PIPCS Programme Intégré de Pérennisation des Cantines Scolaires PME Petites et moyennes entreprises VI

PNDS Plan National de Développement Sanitaire PN-OEV Programme National de Prise en Charge des Orphelins et autres Enfants rendus Vulnérables du fait du VIH/SIDA PVVIH Personnes vivant avec le VIH/SIDA PRODIGE Programme de Développement des Initiatives Génératrices de Revenus PSNP Programme de filets de sécurité productifs en Ethiopie («Productive Safety Net Programme») PSP Pharmacie de Santé Publique PTF Partenaires techniques et financiers RESEN Rapport du Système Educatif National SALTE Service Autonome de la Lutte contre le Travail des Enfants SICGD Système intégré de collecte et de gestion de données SMART Standardized Monitoring and Assessment of Relief and Transitions SMIG Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti SODECI Société de Distribution d Eau de la Côte d Ivoire SSTE Système de Suivi du Travail des Enfants TTC Toutes taxes comprises UA Union Africaine UEMOA Union Economique et Monétique de l Afrique de l Ouest UNICEF Fonds des Nations Unies pour l Enfance UNIFEM Fonds de Développement des Nations Unies pour la Femme USDOS Département Américain des Affaires Etrangères («U.S. Department of State») USDOL Département américain du travail («U.S. Department of Labour») VBG Violences basées sur le genre VIH/SIDA Virus d immunodéficience humaine / syndrome d immunodéficience acquise WACAP Projet de lutte contre le travail des enfants dans le secteur du cacao et de l agriculture commercial en Afrique de l Ouest («West Africa Cocoa/Commercial Agriculture Project») VII

PRÉFACE Les chocs économiques, sociaux et politiques qui ont touché la Côte d Ivoire ces trente dernières années ont eu un impact majeur sur le bien-être de la population ivoirienne. Le taux de ménages pauvres a quadruplé entre 1985 et 2008, et les ménages déjà pauvres se sont encore appauvris. Les déficits en matière d accès aux services essentiels tels que la santé et l éducation se sont accrus, le phénomène de malnutrition s est aggravé, et la participation à la vie économique des individus s est affaiblie. Les inégalités se sont amplifiées, risquant de porter atteinte à une cohésion sociale déjà fragile. Pour surmonter ces défis multiples, la Côte d Ivoire reconnait le potentiel que la protection sociale représente : permettre à l ensemble de la population de mieux faire face aux risques et aux chocs, faire en sorte que les personnes pauvres et vulnérables surmontent les obstacles qui les empêchent d accéder aux services essentiels et contribuer à améliorer leurs conditions de vie et à accroître leur productivité. Les enfants qui n ont pas été éduqués, qui ont été exposés à la malnutrition, ou qui ont un accès très limité aux soins de santé ne pourront pas bénéficier du développement physique, mental et émotionnel normal dont aura besoin la Côte d Ivoire pour atteindre son objectif de pays émergent. Investir dans la protection sociale, c est contribuer à améliorer la productivité globale de la Nation et le bien-être général de la population en favorisant l éducation des populations, en améliorant durablement leur santé et en élargissant leurs opportunités d investir dans leur capital humain. Par ses effets positifs sur la réduction de la pauvreté et des inégalités, une politique efficace de protection sociale contribue également à réduire les sources de tension sociale et de conflit. Ce faisant, elle stimule l environnement requis pour une accélération des investissements nécessaires à la relance rapide de l économie, et assure une croissance plus favorable aux personnes pauvres et vulnérables. Fort de ce constat, la Côte d Ivoire souhaite s engager dans le développement progressif d un système de protection sociale intégré répondant aux besoins, priorités et ressources du pays. Pour ce faire, le Gouvernement envisage la formulation d une stratégie de protection sociale pour doter le pays d un cadre global pour l orientation des programmes, la formulation de mesures idoines et une mise en œuvre efficiente. Ce processus s appuiera sur le travail d analyse présenté dans ce rapport en deux volets, sous l intitulé Cadre de développement de la stratégie nationale de protection sociale en Côte d Ivoire, ainsi que sur d autres analyses en cours de réalisation, notamment en ce qui concerne les mesures envisagées pour améliorer l accès des populations aux soins de santé. La présente étude propose aux acteurs engagés dans ce processus un état des lieux de la situation actuelle en protection sociale, un examen des déficits, des perspectives de renforcement ainsi qu une analyse comparée de différentes options de transferts sociaux monétaires pouvant contribuer à ériger un dispositif de protection sociale plus adéquat aux besoins des couches les plus pauvres de la population ivoirienne. Elle vise à aider au processus de prise de décision, notamment par la priorisation des choix stratégiques et opérationnels qui seraient les plus pertinents et efficaces. En s engageant dans cette initiative, le Gouvernement et l UNICEF ont l intime conviction - qu en dépit d un espace sociétal fragilisé par des années de crise et d un contexte économique et financier difficile - l environnement en Côte d Ivoire ouvre de réelles opportunités pour progressivement mettre en place un socle de protection sociale et assurer la solidarité nationale indispensable pour corriger les inégalités sociales, réduire la haute vulnérabilité des populations, consolider la paix sociale et garantir le succès de la relance économique. Gilbert Koné KAFANA Ministre d Etat, Ministre de l Emploi, des Affaires Sociales et de la Solidarité Hervé Ludovic De Lys Représentant Résident UNICEF IX

Contexte et objectif de l étude Résumé exécutif A la suite de presque trois décennies de chocs économiques et plus d une décennie de crises politiques, la Côte d Ivoire se trouve dans une situation sociale extrêmement précaire. Dès son investiture, le nouveau gouvernement a donné une forte priorité à la réduction de la vulnérabilité des populations. Depuis juin 2011, le Gouvernement de Côte d Ivoire coordonne, à travers un Comité de Pilotage intersectoriel, un processus devant conduire à l élaboration de la Stratégie Nationale de Protection Sociale. Cette étude prétend fournir des éléments de base pour l élaboration de la Stratégie Nationale de Protection Sociale. Le présent rapport dresse le profil de la vulnérabilité en Côte d Ivoire, évalue les mécanismes existants de protection sociale ainsi que leurs paramètres politiques, institutionnels et financiers, et analyse les perspectives de renforcement de la protection sociale. Cadre conceptuel L étude est basée sur la notion que la protection sociale vise à réduire la vulnérabilité des populations aux risques et l impact des chocs, à éviter l emploi de stratégies d adaptation néfastes et à garantir des niveaux minimums de dignité humaine. La protection sociale va ainsi au-delà d une simple «protection» dans le sens passif du terme pour englober également la «prévention» des risques et la «promotion» des capacités des ménages et des individus les plus vulnérables à travers le renforcement de leur capital humain et productif. Profil de la vulnérabilité et des risques Les populations ont été frappées par une série de chocs, surtout économiques (depuis 30 ans) et politiques (depuis plus de 10 ans), et leur vulnérabilité économique a été fortement amplifiée, réduisant la capacité des ménages à gérer les risques. Non seulement l incidence de pauvreté a presque quadruplé entre 1985 et 2008, passant de 10% en 1985 à 49% en 2008, mais la profondeur et la sévérité de pauvreté se sont aussi aggravées. Ce drame humain s est accentué davantage suite à la crise postélectorale, qui a conduit à la paralysie de l économie et au déplacement de centaines de milliers de personnes. Les pauvres sont beaucoup plus nombreux en milieu rural, dans les zones du nord et de l ouest et dans le secteur agricole informel. Les ménages de plus grande taille et dont les chefs sont handicapés ou analphabètes ont aussi des probabilités plus élevées d être pauvres. La plupart des risques sociaux affectent davantage les plus pauvres. Par exemple, le risque de mortalité infanto-juvénile est 1,5 fois plus élevé dans les deux premiers quintiles que dans le cinquième quintile (le plus riche). Les risques de malnutrition restent à des niveaux élevés dans les trois premiers quintiles, diminuant plus abruptement à partir du quatrième quintile. Les enfants les plus pauvres sont plus souvent malades que les enfants les plus riches et ont une probabilité beaucoup plus faible de recevoir un traitement approprié. Dans le cas du paludisme, qui constitue la première cause de mortalité infanto-juvénile, seulement 20% des enfants du premier quintile reçoivent des médicaments antipaludéens, environ la moitié de la proportion dans le cinquième quintile (41%). Moins de 30% des femmes du premier quintile accouchent dans des établissements sanitaires ou avec assistance qualifiée, tandis que ces taux dépassent 90% dans le cinquième quintile. Vu sous l angle du cycle de la vie, les enfants sont particulièrement vulnérables. Leur fragilité physique, surtout pendant la petite enfance, menace la survie dans un contexte de pauvreté, de conditions de vie insalubres et de faible accès aux services sanitaires. Un enfant sur huit meurt avant l âge de 5 ans et ce risque est plus élevé pour les enfants des ménages les plus pauvres, ainsi que pour ceux qui vivent en milieu rural et dans quelques régions du nord et de l ouest. XI

Pour les enfants d âge scolaire, le risque de ne pas fréquenter l école est majeur : environ 30% pour l inscription à la première classe du primaire (CP1) et encore plus élevé pour les enfants du premier quintile. La vulnérabilité est accentuée chez les enfants qui vivent sans cadre familial protecteur. Il s agit non seulement des enfants de la rue, des enfants dans les prisons et d autres enfants vivant complètement hors d un cadre familial, mais aussi des enfants (beaucoup plus nombreux) qui vivent dans un cadre familial mais qui sont exposés à de forts risques de maltraitance. Pour les jeunes, notamment en milieu urbain, le chômage est un des risques les plus importants, en plus de ceux du VIH/SIDA et d es infections sexuellement transmissibles. Les personnes âgées, bien que peu nombreuses, sont sujettes à des risques accrus de réduction de revenu, de maladies et de handicaps, et se trouvent souvent avec peu de soutien familial, voire même exposées à des abus et à la perte de leurs biens, notamment dans le cas des veuves dans les ethnies matrilinéaires. Les personnes qui vivent avec un handicap représentent un autre groupe parmi les plus vulnérables, souffrant de toute une série de discriminations, allant des barrières d accès à l enseignement et à l emploi jusqu aux contraintes à leur pleine participation dans la vie sociale et culturelle. Les maladies chroniques, telles que le SIDA et la tuberculose, rendent les ménages plus vulnérables, diminuant leur capacité productive et augmentant leurs besoins médicaux, mais la prévalence du VIH est paradoxalement plus élevée dans les quintiles plus aisés de la population, rendant la relation entre cette maladie et la vulnérabilité plus nuancée. Les relations de genre sont un autre facteur de vulnérabilité à ne pas ignorer. La subordination de la femme, la division traditionnelle du travail, les discriminations et le lourd fardeau du rôle reproductif de la femme mettent les femmes dans une situation globalement désavantageuse par rapport aux hommes et les rendent plus vulnérables à toute une série de risques : la non-scolarisation ou l abandon scolaire, les discriminations dans l emploi, l excision, les violences conjugales, les abus sexuels et l exploitation sexuelle. Les mariages et grossesses précoces amplifient les risques plus larges associés à la santé reproductive, y compris ceux de mortalité maternelle, qui restent élevés. Situation existante, défis et perspectives de renforcement de la protection sociale Protection sociale informelle Les mécanismes informels apparaissent prédominants dans le système de protection, mais ne sont pas bien adaptés aux chocs à large échelle et semblent de plus en plus affaiblis par les migrations, les déplacements, l urbanisation et la modernisation. Assurance sociale La protection sociale est largement limitée à sa branche contributive, c est-à-dire à l assurance sociale, mais celle-ci a une couverture très faible et un impact minime en matière de protection de la population générale contre les risques sociaux. A peine 6% de la population vit dans un ménage ayant au moins une personne bénéficiaire de pensions de retraite ou d autres régimes d assurance. Les deux caisses de sécurité sociale, la CGRAE et la CNPS, ne couvrent qu une minorité de la population liée au secteur formel de l économie. Qui plus est, elles sont en situation de déséquilibre financier, ce qui met en péril leur pérennité et requiert des réformes pour assurer leur survie. La CGRAE nécessite notamment des subventions coûteuses de la part du gouvernement. L assurance maladie est limitée au secteur public (à travers la MUGEFCI et d autres «mutuelles» paraétatiques) et aux plus grandes entreprises du secteur privé (à travers l assurance privée ou leurs propres centres de santé). XII

L expansion de l assurance sociale sans système de subventionnement semble ne pas être une piste viable de renforcement de la protection sociale des plus vulnérables, compte tenu des contraintes de la faible capacité contributive des ménages pauvres et des difficultés administratives énormes de gestion de cotisations dans le secteur informel, où le prélèvement à la source est quasi impossible. Transferts sociaux Un rôle beaucoup plus important devrait être accordé à la protection sociale non contributive, qui est actuellement très peu développée. Les aides sociales aux indigents n existent pratiquement plus et la Côte d Ivoire n a pas encore développé de programmes de transferts sociaux réguliers et à large échelle comme les allocations familiales, les pensions sociales de vieillesse ou les transferts en espèces pour ménages très pauvres. D autres types de transferts (en nature) existent, tels que l aide humanitaire (principalement alimentaire), des appuis aux OEV et, dans le secteur de l éducation, les cantines scolaires, les bourses et les kits scolaires. Un programme de transferts en espèces à large échelle aurait des impacts importants sur la réduction de la pauvreté. Une analyse conduite en parallèle à cette étude (Tome 2, une première analyse du rôle, de l impact, des coûts et de la faisabilité de diverses options de programmes de transferts sociaux monétaires) a montré que la mise en œuvre d un programme de transferts ciblés au premier quintile de consommation de la population pourrait réduire l écart de pauvreté de 22% pour les ménages bénéficiaires et de 16% au niveau de l ensemble de la population, tout en stimulant des augmentations de la scolarisation et de l utilisation des services de santé par les enfants dans les ménages les plus pauvres. L analyse a souligné néanmoins quelques défis majeurs pour une éventuelle mise en œuvre : les difficultés de ciblage, le besoin de mobiliser des ressources importantes (1,8% du PIB), et la nécessité de renforcer les capacités du système de l action sociale. Les travaux publics à haute intensité de main d œuvre (HIMO) sont un autre type de transfert, conditionné sur le travail. La Côte d Ivoire a des expériences à petite échelle de travaux publics à haute intensité de main d œuvre. Deux institutions nationales sont impliquées dans des programmes de ce type, en partenariat avec les collectivités locales. Il s agit de l Agence d Etudes et de Promotion de l Emploi et de l Agence de Gestion Routière, mais le nombre d emplois créés reste très réduit par rapport à l ampleur du chômage. L analyse a mis en relief les impacts potentiellement importants d un programme HIMO mis en œuvre à grande échelle, qui embaucherait près de 700 000 chômeurs âgés de 18 à 39 ans pendant cinq mois de l année au niveau du SMIG. Sous les hypothèses retenues, ce programme aurait un impact fort sur l écart de pauvreté au niveau des ménages bénéficiaires ( 23%) et un impact moyen sur l écart de pauvreté au niveau de l ensemble de la population ( 15%), en plus des impacts à long terme des travaux réalisés. Pour réduire les coûts d un tel programme (2,7% du PIB) et les besoins en capacité administrative (de gestion d un grand nombre de projets de travaux publics), l étude a suggéré un programme moins ambitieux dans le court à moyen terme. Services d action sociale Dans l ensemble, ces services bénéficient à une frange limitée des nombreuses familles et individus vivant dans une situation à haut risque. Ces services sont très faibles pour de nombreuses raisons, parmi lesquelles : la diversité des types de risques ; le grand nombre d acteurs étatiques et non étatiques engagés (centres sociaux du ministère chargé des affaires sociales, services sociaux d autres ministères et des collectivités locales, ONG et confessions religieuses) ; l absence de cadre politique cohérent pour orienter et prioriser les actions ; le faible niveau de coordination inter et intra sectorielle ; l insuffisance des ressources financières ; la dépendance à l aide extérieure ; et les difficultés à assurer la pérennisation des programmes et projets. On trouve donc un grand nombre de petits projets éparpillés, mal coordonnés et limités dans le temps et dans l espace. XIII

Les services existants semblent largement orientés vers un nombre réduit de problèmes spécifiques en raison des incitations du financement extérieur. L aide des partenaires techniques et financiers (PTF) est concentrée de manière déséquilibrée sur des programmes cloisonnés en faveur des OEV (dans le cadre d un programme conçu de manière étroite et restrictive pour prendre en compte uniquement les enfants rendus vulnérables en raison du VIH/SIDA), sur le travail des enfants dans les plantations de cacao et de café, et sur les violences basées sur le genre (VBG). Il convient de repenser le système de l action sociale, de le doter d un cadre politique clair et de renforcer les capacités à la base afin qu il puisse s acquitter au mieux de son important mandat. Il est primordial de développer un cadre politique clair, au sein de la Stratégie Nationale de Protection Sociale, qui établisse sur la base des évidences du terrain (et des enquêtes nationales) des priorités nationales, tout en laissant une marge de manœuvre importante (appuyé par l octroi de ressources) au niveau des directions régionales des affaires sociales et surtout aux Centres Sociaux pour répondre de manière flexible aux besoins locaux. Les Centres Sociaux devraient bénéficier de travailleurs sociaux mieux formés, d une meilleure autonomie budgétaire ainsi que d un plus grand pouvoir décisionnel. Leur répartition sur le territoire national devrait également être améliorée pour couvrir mieux le milieu rural et les régions (notamment dans le Nord) où les risques et les vulnérabilités sont les plus graves. Dès à présent, un important travail de renforcement du système d accréditation, d inspection et de référencement doit être entrepris, compte tenu du fait que nombre de structures d action sociale (des orphelinats et des centres d hébergement temporaire par exemple) ne répond pas aux normes nationales (et internationales) en vigueur. De nouvelles approches doivent être envisagées pour relever le défi de l animation sociale et renouer le lien entre travailleurs sociaux et communautés. Afin de remplir leur mission d animation communautaire, de détection et d assistance aux plus vulnérables, les services sociaux doivent également s engager dans des stratégies visant au changement des normes sociales (par exemple, pour la lutte contre l excision, le travail des enfants, la dépossession des veuves dans les ethnies matrilinéaires, etc.), en utilisant des méthodes de communication et sensibilisation au niveau communautaire. Protection sociale dans le secteur de l éducation L accès à l école est marqué par de fortes inégalités, surtout selon le niveau de richesse familiale. Le système éducatif ivoirien est l un des moins équitables d Afrique. Les disparités selon le niveau de richesse sont plus importantes que celles selon le lieu de résidence, ou le genre, bien que celles-ci soient aussi importantes. Le taux d accès au primaire des enfants du premier quintile n est que de 51%, par rapport à 89% pour les enfants du cinquième quintile et ces disparités augmentent selon la classe, malgré l abolition des frais d inscription depuis 2001 et d autres initiatives comme les cantines scolaires et la distribution de kits scolaires. Les mesures de réduction des barrières financières à l accès devraient jouer un rôle critique en complément des mesures d amélioration de l offre et de la qualité de l enseignement. Des mesures de cette nature sont envisagées dans le Plan d Actions à Moyen Terme du Secteur de l Education 2012-2014, basées sur un ciblage géographique qui favorise les enfants dans les zones où les taux de pauvreté, de malnutrition et de non scolarisation sont les plus importants. Le ciblage géographique peut se justifier à court terme par un manque de ressources, mais à long terme une approche universelle semble plus cohérente avec le principe de l accès gratuit et universel à l enseignement et le fait que le facteur économique est plus déterminant que la région de résidence (on trouve des enfants vulnérables sur toute l étendue du territoire même s ils sont plus concentrés dans certaines zones). XIV

En premier lieu, il est nécessaire de rendre l enseignement primaire effectivement gratuit. Ceci requiert des réformes dans les procédures d exécution budgétaire pour mettre fin à la situation actuelle de décaissement tardif et incomplet des subventions aux COGES des écoles primaires, qui laisse les écoles privées de fonds de fonctionnement et les incite à continuer à imposer des cotisations informelles aux familles. Deuxièmement, les évidences de l impact des cantines scolaires sur la scolarisation et la rétention des élèves justifient l expansion de celles-ci. Il s agit d élargir éventuellement la couverture à toutes les écoles (la moitié des écoles primaires publiques sont actuellement impliquées), d augmenter la prestation des repas pour couvrir tous les jours de l année scolaire, et de supprimer le prélèvement de 25 FCFA par repas. Troisièmement, d autres mesures, telle que la suppression des obstacles à la scolarisation liés à l état civil, devraient jouer un rôle complémentaire. Il faut assurer que les directeurs des écoles appliquent la directive du Ministère de l Education Nationale de ne plus faire obstacle à l inscription des enfants au CP1 pour défaut d extraits d acte de naissance, tout en faisant les investissements nécessaires pour renforcer et rendre plus accessible le système d état civil. Finalement, la restauration du port obligatoire de la tenue scolaire en septembre 2011 semble un pas rétrograde qui risque de renforcer les barrières d accès pour les enfants les plus pauvres. Protection sociale et l accès aux services de santé L abandon de la gratuité des services sanitaires à la suite de la crise économique des années 80 a eu de graves retombées sur l accès des populations aux soins. Le recouvrement des coûts s est généralisé en 1994 dans tous les établissements publics de santé et est resté en vigueur jusqu à la déclaration de la gratuité exceptionnelle des services sanitaires publics d avril 2011 à la fin du conflit postélectoral. Quelques rares cas de gratuité, financés essentiellement par l aide extérieure, avaient fait exception à la règle : les vaccinations lors des campagnes PEV, le traitement de la tuberculose, le traitement antirétroviral des malades du SIDA (depuis 2008) et la prise en charge médicale des OEV du fait du VIH/SIDA et de leurs familles. Il y a eu aussi un système d exemptions des frais médicaux en faveur des indigents, mais limité dans la pratique à un nombre très réduit de patients dans les hôpitaux d Abidjan. Le facteur coût, ainsi que la distance (en milieu rural) et la faible qualité des services font que les taux d utilisation des services sanitaires publics sont parmi les plus faibles d Afrique de l Ouest. Les taux de traitement des maladies chez les enfants, notamment pour le paludisme, et les taux d accouchement en établissements sanitaires sont particulièrement faibles dans le premier quintile. Le financement de la santé s est reposé principalement sur les dépenses des ménages. Les Comptes Nationaux de la Santé montrent une répartition très régressive des dépenses de santé, où les ménages dépensent quatre fois plus que ne le fait l Etat. Les dépenses publiques de santé sont parmi les plus faibles dans la région ouest africaine (0,9% du PIB en 2008) et sont affectées principalement au niveau tertiaire du système. La faiblesse du financement public, surtout au niveau primaire, limite énormément le potentiel rôle de l Etat dans la redistribution des dépenses de santé des plus riches vers les plus pauvres. Le faible niveau de mutualisation des risques maladie fait que la quasi-totalité des dépenses de santé des ménages est effectuée directement au moment de la prestation de services. Moins de 4% de ces dépenses sont prépayées (à travers l assurance maladie). Selon l ENV 2008, 18% des ménages subissent des dépenses «catastrophiques» supérieures à 40% des dépenses non-alimentaires. La mise en place d un système d assurance maladie universelle (AMU), promulguée en 2001, n a pas pu aboutir dans la pratique. La gratuité de tous les services sanitaires, décidée en avril 2011, a conduit à une forte augmentation de la demande que le système de santé a eu du mal à gérer en raison du manque de préparation préalable. Introduite à titre exceptionnel pour faire face à la situation XV

de précarité générale qui prévalait à la fin de la crise postélectorale, la gratuité généralisée était censée durer 45 jours mais a été prorogée jusqu au mois de janvier 2012. Le personnel a été surchargé et les ruptures de médicaments se sont aggravées. La gratuité généralisée remet en cause ses propres gains en matière d amélioration de l accès des populations aux soins si des mesures d accompagnement ne sont pas rapidement mises en place : le renforcement du financement du système, la résolution des problèmes d approvisionnement des médicaments, et le renforcement des ressources humaines. Il est urgent d adopter une politique cohérente et réaliste pour assurer l accessibilité financière aux soins, surtout aux plus vulnérables : les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes. La première version du texte de la nouvelle Politique Nationale de Santé énonce comme une de ses priorités celle d «améliorer l accessibilité financière et l utilisation des services de santé» mais ne clarifie pas comment le faire. Le passage d une exemption généralisée à une approche d exemption ciblée du paiement des soins visant les parturientes et les enfants de moins de cinq ans devrait constituer une porte d entrée à la reforme plus globale du système de santé pour progressivement tendre vers un système universel. La gratuité devrait s intégrer à terme dans une stratégie de Couverture Maladie Universelle (CMU) plus large, qui inclue des modalités d exemption ciblée, un paquet subventionné pour les pauvres, et un mécanisme d assurance maladie contributif qui prend en compte les caractéristiques du pays, y compris le large secteur informel et la faible capacité contributive des personnes pauvres et vulnerables. Un tel contexte nécessite ainsi de fortes subventions étatiques, comme au Ghana, pour réduire les inégalités d accès à l assurance. Même si l assurance est retenue comme une des composantes d une stratégie de financement de la santé, elle devrait être accompagnée par la gratuité des services les plus critiques, notamment pour les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes en vue de réduire les taux élevés de mortalité infanto-juvénile et maternelle. Ces mesures de gratuité ciblée devraient être accompagnées par des mesures de renforcement du financement, de l approvisionnement en médicaments et des ressources humaines pour assurer le bon fonctionnement du système. Il est de plus crucial de mener une réflexion technique conjointe entre les différents acteurs engagés et de s accorder sur une feuille de route adaptée pour la formulation et la mise en œuvre de la stratégie de CMU intégrée, qui inclue les leçons initiales du premier modèle d exemption ciblée. Cadre politique, institutionnel et financier pour le renforcement de la protection sociale La Stratégie de Relance du Développement et de Réduction de la Pauvreté (SRDRP), adoptée en 2009, a donné une place importante à la protection sociale, mais ses engagements sont restés vagues et sans financement adéquat. La stratégie a pris position pour «étendre la protection sociale à l ensemble de la population, et singulièrement aux couches les plus vulnérables» (RCI, 2009a). Mais la nature vague de la plupart des engagements traduit le fait qu il n y avait pas de cadre politique cohérent de la protection sociale avec des priorités claires, liées à l octroi des ressources à travers la planification budgétaire à moyen terme. C est le besoin de relever ce défi qui justifie le processus actuellement en cours d élaboration de la Stratégie Nationale de Protection Sociale. Le système de protection sociale est caractérisé par une faible coordination intersectorielle et interinstitutionnelle, une forte centralisation et la nature verticale des principaux programmes. Différents ministères, ainsi que les collectivités locales et de nombreuses ONG, interviennent dans le domaine de la protection sociale mais leur coordination demeure limitée, conduisant ainsi à des approches sectorielles et cloisonnées et engendrant des chevauchements dans les mandats et les activités des diverses structures de base. En outre, le processus de prise de décision dans le domaine de la protection sociale reste encore très centralisé, laissant peu d autonomie aux structures de base. Toutes les décisions, que ce soit par rapport aux stratégies, plans d actions, personnel, budget, ou même pour l approbation de demandes de secours social, sont prises au niveau central. Faute de cadre politique et de moyens, les activités XVI

des structures de base sont en pratique largement influencées par les PTF à travers des programmes verticaux qui ne répondent pas toujours aux problèmes les plus prioritaires des populations. Il conviendra d adopter une approche de programmation plus systémique et d améliorer la coordination intersectorielle et interinstitutionnelle. L adoption de la Stratégie Nationale de Protection Sociale devrait fournir le cadre nécessaire pour orienter les actions des divers intervenants de manière plus cohérente, harmonisée et efficace au niveau national. On devrait envisager l établissement d un cadre de concertation et de coordination, pour le suivi de la mise en œuvre de la Stratégie Nationale de Protection Sociale. Il est de plus souhaitable qu une certaine stabilité institutionnelle soit assurée à l avenir et que les mandats des différentes structures de base soient revisités en fonction des avantages comparatifs de chacune, pour éviter les chevauchements actuels. L absence de système de gestion de l information et de suivi-évaluation constitue actuellement un handicap dans l élaboration et la gestion des politiques publiques et dans la gestion des bénéficiaires de l action sociale. Le défi est celui de développer le système intégré de collecte et de gestion de données (SICGD) actuellement envisagé par le MEMEASS. Tout en commençant par les programmes directement sous l égide du Ministère chargé des Affaires Sociales, ce système devrait s élargir progressivement pour devenir un système de gestion multisectoriel. Ce système de gestion d information devrait permettre la saisie et le suivi de données sur les bénéficiaires individuels des programmes et interventions, incluant par exemple les informations obtenues par les travailleurs sociaux lors d enquêtes sociales, les informations sur leur inscription dans des programmes spécifiques (par exemple de transferts sociaux) et les informations sur les mesures complémentaires d accompagnement. Il faudra renforcer la formation et améliorer la répartition géographique des ressources humaines. L existence d un grand nombre de travailleurs sociaux qualifiés constitue un atout du système de protection sociale, mais ceux-ci sont fortement concentrés à Abidjan et les programmes de formation souffrent de quelques faiblesses. L INFS devrait renforcer ses formations initiales, former des cadres supérieurs et offrir des formations courtes de recyclage. Mise à part les subventions à la CGRAE et les bourses d études, la protection sociale reçoit actuellement une part faible des dépenses publiques. Ces dépenses sont gonflées par les subventions effectuées par l Etat à la CGRAE pour combler ses déficits. Ces subventions, qui peuvent difficilement être considérées comme de «véritables» dépenses de protection sociale (au profit des couches vulnérables de la population) représentent la moitié des dépenses courantes de protection sociale (hors personnel). En excluant ces subventions, ainsi que les bourses d études, qui sont principalement au niveau de l enseignement supérieur, l ensemble des autres volets de la protection sociale n ont reçu que 3,7% des dépenses courantes hors personnel en 2010. Par ailleurs, seulement 3,9% des dépenses programmées dans le cadre du Programme d Investissements Publics 2010-2012 ont été attribuées aux projets de protection sociale. Bien que limité à court terme, l «espace budgétaire» potentiel pour une expansion des dépenses publiques de protection sociale devrait augmenter à partir de 2012. La relance de l activité économique est déjà en cours et le FMI prévoit un rebond économique important en 2012. A long terme, l espace budgétaire pour une expansion durable du financement de la protection sociale devrait venir de la croissance des recettes fiscales et de l amélioration de l efficacité des dépenses par rapport aux priorités politiques. Un fort accent sur la réduction de la vulnérabilité des populations devrait favoriser une augmentation de la part des dépenses de protection sociale en vue d accroître le niveau de consommation des ménages, améliorer l accès aux services sociaux et stimuler une croissance inclusive afin de réduire la pauvreté et accélérer le progrès vers les OMD. Même au sein des dépenses dites de protection sociale, il y a des opportunités pour atteindre une meilleure efficacité, notamment à travers la réaffectation des ressources actuellement consacrées au subventionnement de la CGRAE. XVII

1 Introduction 1.1 Contexte et objectif A la suite de presque trois décennies de chocs économiques et d une décennie de crises politiques, la Côte d Ivoire se trouve dans une situation sociale extrêmement précaire. Même avant la crise postélectorale de 2010-2011, l incidence de la pauvreté avait augmenté, passant de 10% en 1985 à 49% en 2008 (MEMPD/INS, 2008). Ce drame humain s est aggravé davantage en conséquence directe des évènements qui ont suivi les élections de 2010 et qui ont conduit à la paralysie de l économie et au déplacement de centaines de milliers de personnes. Bien que la situation se soit stabilisée depuis l investiture du nouveau gouvernement en mai 2011, permettant le retour progressif des populations déplacées à leurs lieux d origine et une reprise graduelle des activités économiques, la Côte d Ivoire doit faire face aux défis du retour à la croissance et du combat à long terme contre la pauvreté. Entretemps, une large partie de la population risque de se trouver piégée dans une situation de haute vulnérabilité chronique sans moyens à court terme de s en sortir, compte tenu de l affaiblissement des mécanismes traditionnels d entraide informelle (et de leur insuffisance pour faire face à l ampleur des chocs subis) et de l absence de mécanismes efficaces de protection sociale. Au niveau international, la protection sociale est devenue de plus en plus en vue dans les politiques de développement, notamment dans les documents de stratégies de réduction de la pauvreté (DSRP) et dans la réponse à la triple crise alimentaire, énergétique et financière qui a frappé l économie mondiale de 2008 à 2009. En avril 2009, le Système des Nations Unies a proposé un «socle de protection sociale» comme une des composantes de la réponse à la crise mondiale et a demandé à chaque pays de définir son propre socle pour sauvegarder les revenus des couches les plus vulnérables et pour assurer l accès des populations aux services essentiels (ONU, 2009). L Union Africaine a également pris position en adoptant le «Cadre de Politique Sociale Africaine» (UA, 2008) lors de sa conférence des Ministres chargés du développement social, tenue à Windhoek, Namibie, en octobre 2008. Cette politique, qui a été ratifiée par le Comité Exécutif des Chefs d État réuni à Addis-Abeba en janvier 2009, note l émergence d un consensus sur l idée d un «ensemble minimum de protection sociale essentielle» et affirme que «la protection sociale doit constituer une obligation de l État» avec des dispositions y afférentes dans la législation nationale, les plans de développement national et les DSRP. Plusieurs pays africains se sont dotés de stratégies ou politiques nationales de protection sociale. C est le cas, par exemple, du Cap-Vert, du Ghana, du Mali, du Niger et du Sénégal en Afrique de l Ouest. En outre, presque tous les DSRP en Afrique accordent une place importante à la protection sociale, parfois en y consacrant un de leurs «axes». La Côte d Ivoire n est pas restée en marge de ce mouvement d engagement en faveur du renforcement de la protection sociale, bien que les dispositifs actuels de protection sociale soient de portée très réduite. Dès son investiture, le nouveau gouvernement a donné une forte priorité à la réduction de la vulnérabilité des populations. Même avant la crise postélectorale, le Ministère du Plan et du Développement avait proposé, mi-2010, l élaboration d une stratégie nationale de protection sociale. Devant se baser sur une analyse approfondie des vulnérabilités et des risques, et d une réflexion conjointe de tous les acteurs concernés sur les options de renforcement et d expansion du système de protection sociale, la stratégie viserait le renforcement des capacités des couches les plus démunies de la population afin de leur permettre de sortir de leur situation fragilisée. A cette fin, le bureau de l UNICEF en Côte d Ivoire, dans le cadre de son programme de coopération avec le gouvernement de la Côte d Ivoire, a contracté une équipe d experts d Oxford Policy Management (OPM) pour entreprendre les analyses préalables. 1

1.2 Méthodologie et structure du rapport Prévus initialement en 2010, mais reportés en raison de la crise postélectorale, les travaux ont été reprogrammés pour se dérouler de juin à décembre 2011. L équipe de consultants a entamé les premiers échanges avec les ministères du Gouvernement, l UNICEF et d autres acteurs en juin 2011, donnant lieu à un rapport de démarrage (OPM, 2011a). Le Ministère d Etat, Ministère du Plan et du Développement a ensuite établi un Comité de Pilotage, comprenant des représentants de tous les ministères les plus concernés par la protection sociale, en août 2011, en vue d orienter les travaux de la présente étude et les préparatifs de l élaboration de la Stratégie Nationale de Protection Sociale. Un atelier de renforcement des connaissances a eu lieu à Abidjan les 24 et 25 août 2011 (MEMPD, 2011). Concernant la méthodologie retenue, les analyses ont porté sur le dispositif existant de protection sociale, les paramètres politiques, institutionnels et de financement de la protection sociale et les perspectives de renforcement de la protection sociale. Ces analyses constituent une étape préliminaire à l étude de la faisabilité d expansion de la protection sociale et des options de politique présentées dans la tome 2 de cette publication (Une première analyse du rôle et de l impact, des coûts et de la faisabilité de diverses options de programmes de transferts sociaux monétaires). En effet, l etude de la faisabilite d expansion suppose une bonne connaissance des besoins prioritaires d expansion, ce qui exige tout d abord qu un profil de la vulnérabilité et des risques en Côte d Ivoire soit dressé. C est à ce profil que le système de protection sociale est censé donner une réponse et il est donc crucial de commencer par l analyse de ces besoins et ensuite d évaluer le degré d adéquation des mécanismes de protection sociale existants. Les conclusions de ces analyses de base permettent de cerner les faiblesses du système existant et ainsi d identifier les options de politique les plus pertinentes pour son élargissement et son renforcement. L analyse de la faisabilité d expansion de la protection sociale requiert aussi l analyse de l existant, tout en évaluant les opportunités de renforcement des capacités. Cette analyse s est penchée surtout sur le cadre politique, le niveau et la composition du financement de la protection sociale, l architecture institutionnelle, les capacités administratives et les ressources humaines. L équipe d experts a employé des méthodes mixtes de recherche. L étude a requis à la fois la revue documentaire, des entretiens avec les principaux acteurs concernés par la protection sociale et des analyses quantitatives et qualitatives. Les documents consultés se trouvent dans la bibliographie à la fin du rapport. Des entretiens ont eu lieu avec un grand nombre d officiels des ministères et d autres institutions étatiques, organisations de la société civile et partenaires techniques et financiers. La liste des personnes rencontrées se trouve dans l Annexe A. Les analyses quantitatives sont basées principalement sur les rapports et les bases de données des enquêtes nationales auprès des ménages, notamment l Enquête sur le Niveau de Vie des ménages (ENV) de 2008 et l Enquête par Grappes à Indicateurs Multiples (MICS) de 2006, ainsi que les données administratives des ministères et les statistiques démographiques, économiques et de finances publiques. La structure du rapport. Après cette introduction, le Chapitre 2 présente un cadre conceptuel pour l analyse de la protection sociale. Le Chapitre 3 analyse la nature et le degré de vulnérabilité de différentes couches de la population et les types de risques auxquels elles sont exposées. Le Chapitre 4 analyse le système actuel de protection sociale, afin d évaluer son adéquation au profil de la vulnérabilité et des risques décrit dans le chapitre précédent. Le Chapitre 5 analyse les paramètres politiques, institutionnels et financiers de l expansion de la protection sociale, mettant en exergue les contraintes actuelles et les besoins et opportunités de renforcement des capacités institutionnelles et des ressources financières. Le Chapitre 6 évalue les perspectives de renforcement de la protection sociale, sur la base des analyses des chapitres précédents, en vue d orienter l analyse des options de politique dans la deuxième phase des travaux. 2