COMPOSITION. Les institutions de la Vème république et leur pratique de 1958 à nos jours.

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Transcription:

COMPOSITION Les institutions de la Vème république et leur pratique de 1958 à nos jours. A la fin de la seconde guerre mondiale, la IVème république est fondée. Cette république a pour principal objectif de reconstruire la France et de la doter d institutions solides et durables. Cependant 13 ans après sa création, en mai 1958, la guerre d Algérie va marquer la fin de la IVème république. La Vème république, modelée par le général de Gaulle, voit alors le jour, et s oppose à la IVème république par un pouvoir exécutif plus fort. Ce régime a su persister bien plus longtemps que la IVème république et est aujourd hui encore en pratique. En quoi les pratiques des institutions de la Vème république ont-t-elles permis le maintient d un régime politique plus efficace et plus durable que le précédent? Dans un premier temps nous verrons que cette durabilité a été permise par de nombreuses réformes. Dans un second temps, nous nous intéresserons au fait que ce régime a survécu à de nombreuses crises. Enfin, nous étudierons le tournant qu a représenté l année 1981 dans l histoire de la Vème république. La fin de la IVème république est principalement causée par une mauvaise gestion de la guerre d Algérie par le gouvernement français. En effet, ce dernier souhaite maintenir l Algérie française. En 1956, le président Guy Mollet accentue l effort de guerre et envoie le contingent afin de maitriser la guérilla en Algérie. Dans un même temps, le FLN intensifie ses actions terroristes. Ni le gouvernement de Guy Mollet, ni les gouvernements suivants ne seront capable de résoudre la crise. Au printemps 1958, Pierre Pflimlin, partisan d une négociation avec le FLN, est pressentit pour former un nouveau gouvernement. Le 13 mai, jour prévu de l investiture de Pflimlin, la foule attachée à l Algérie française manifeste pour montrer son opposition et parvient à s emparer du bâtiment du gouvernement général. Un comité de salut public y est créé par le général Massu. Pflimlin, investit président du conseil à Paris, na parvient pas à rétablir l autorité de la république à Alger. Le 15 mai, le général de Gaulle intervient publiquement et se déclare prêt à revenir au pouvoir. Le 1 er juin, il est ainsi investit président du conseil à une large majorité. Le lendemain, l assemblée nationale l autorise à rédiger une nouvelle constitution. La nouvelle Constitution est écrite au cours de l été 1958 par de hauts fonctionnaires rassemblés autour de Michel Debré, le ministre de la justice, et s inspire largement des idées de de Gaulle. Le projet est présenté au pays par le général de Gaulle le 4 septembre. Le 28 septembre, les électeurs sont appelés à se prononcer par référendum. La participation est massive, avec seulement 16% d abstention, et le «oui» l emporte à 79% des voies. Cette nouvelle constitution forme l acte de naissance de la Vème république, et confère à de Gaulle une double victoire. En effet, les nouvelles institutions correspondent à sa vision constitutionnelle : le président, élu au suffrage indirect par les grands électeurs, nomme désormais directement le 1 er ministre et le gouvernement, et peut dissoudre l assemblée nationale. La constitution raffermit ainsi le pouvoir exécutif. De plus, le général de Gaulle est largement soutenu par le peuple français. Cette popularité va se traduire en novembre 1958 par la victoire du partit gaulliste, l UNR, aux élections législatives, puis par l élection du général de Gaulle le 21 décembre 1958 comme président de la république. Si la Vème république nait en 1958 dans l épreuve de la guerre d Algérie, elle ne trouve ses réels contours constitutionnels qu un 1962. Cette année est en effet marquée par une grande révision constitutionnelle : de Gaulle souhaite que l élection du président de la république s effectue au suffrage universel direct. Il veut ainsi faire de la France un état fort

doté d un pouvoir exécutif solide et stable. Cette décision est hâtée par l attentat du petit Clamart, monté par l OAS, dans lequel il manque de perdre la vie. Le 12 septembre, il propose donc une révision de la constitution par référendum. Cette proposition va entrainer le censure du gouvernement Pompidou par les partis hostiles à cette révision, et la dissolution de l assemblée nationale par de Gaulle. Le référendum a tout de même lieu et, malgré que tous les partis, l UNR exceptée, se soient prononcés pour le «non», le «oui» l emporte avec 62% des suffrages. A partir de cette date, les élections présidentielles s effectuent donc au suffrage universel direct. Cette victoire de de Gaulle renforce sa popularité et annonce la réélection de de Gaulle aux présidentielles de 1965. Cette période, située au cœur des 30 glorieuses, se caractérise par un contexte de croissance économique et d expansion qui favorise l enracinement rapide de la révision constitutionnelle. L histoire de la Vème république est par la suite marquée par de nombreuses réformes. Les événements de mai 1968 ayant amorcé une mutation socioculturelle importante, des projets son mis en place pour «moderniser» la société française. Durant le septennat de Georges Pompidou, son 1 er ministre, Jacques Chaban-Delmas lance un projet de «nouvelle société». Ce projet est cependant largement critiqué et Jacques Chaban-Delmas contraint de démissionner. En revanche, après son élection en mai 1974, le président Valery Giscard d Estaing annonce une politique de changement et engage une série de réformes sociales : la majorité est fixée à 18 ans, le divorce par consentement mutuel est adopté. Plus tard, la victoire de la gauche aux élections présidentielles de 1981 entraine un changement de politique, et donc la mise en place de réformes : la peine de mort est abolie, le travail hebdomadaire est ramené à 35 heures, la 5 ème semaine de congé est payée, la retraite passe à 60 ans et l impôt sur les grandes fortunes (IGF) est créé. Le SMIC et les prestations sociales sont augmentés. Ces réformes visent à relancer la consommation, et donc l économie, dont la croissance s est stoppée avec la fin des 30 glorieuses. Plus récemment, en septembre 2000, la réduction du mandat à 5 ans est décidée par référendum. La durabilité de la Vème république s explique donc tout d abord par la révision constitutionnelle de 1962, qui a permis de donner à ce régime établit dans la précipitation ses caractères définitifs, puis par les nombreuses réformes mises en place tout au long de l histoire de la Vème république, qui ont permis d accorder la pratique politique à la situation économique et sociale de chaque époque. Mais malgré sa durabilité, la Vème république a du faire face à de nombreuses crises qui auraient bien pu causer sa perte. La Vème république est donc une république solide et stable. Néanmoins, ce régime a traversé de nombreuses crises qui auraient pu causer sa perte. La première de ces grandes crises est la guerre d Algérie. En effet, cette guerre est à l origine de la fin de la IVème république. Malgré que la France se soit dotée d un nouveau régime, le problème Algérien reste entier. La politique de de Gaulle réussi tout de même à y mettre fin. En septembre 1959, il évoque pour la première fois le principe de l autodétermination. Dès cette date, s il gagne des partisans du côté des algériens en faveur de l indépendance, il ce détache totalement des partisans de l Algérie française. En septembre 1960, le chef de l état évoque l éventualité d une république algérienne et en janvier 1961, il organise un référendum portant sur le principe de l autodétermination en Algérie. Le «oui» l emporte à 72,5%. Ces succès entrainent la création de l organisation armée secrète (OAS), favorable à l Algérie française. A Alger, les généraux Challe, Jouhaud, Salan et Zeller organisent un putsch. Malgré cela, le

régime tient bon, et le général de Gaulle poursuit les négociations avec le FLN. Le 18 mars 1962, les accords d Evian sont signés. Ces accords sont approuvés par 90% des électeurs au référendum du 8 avril 1962, tandis que l OAS multiplie les attentats en Algérie et en métropole. A la fin du printemps 1962, les pieds noirs sont contraints de rejoindre la France, le plus souvent dans la violence. A Oran, 200 à 300 européens sont massacrés. L Algérie obtient son indépendance le 3 juillet 1962. Cette guerre a ébranlé le régime, mais contribue dans un même temps à son enracinement, en prouvant que la Vème république est capable de gérer les crises de manière plus efficace que la IVème république. A partir de la fin de la guerre d Algérie, la France sous de Gaulle connaît une période de puissance et d expansion qui permet l enracinement du régime. En 1965, de Gaulle et réélu. Mais en mai 1968, une nouvelle crise va mettre fin à son septennat. La crise est dans un premier temps universitaire : au sein des universités, des idéologistes d extrême gauche anticapitalistes rassemblent de plus en plus d étudiants «gauchistes». A la fac de Nanterre, des heurts ont lieu entre policiers et étudiants. En quelques jours, les universités de France sont paralysées par la grève. La crise devient ensuite sociale : le 13 mai, les syndicats ouvrier appellent à la grève générale pour protester contre la répression et le régime Gaulliste. Le chef de l état et le 1 er ministre semblant incapables de régler la situation, ils donnent à la population française l impression d un pouvoir chancelant. La crise devient alors politique. Le 27 mai, les accords de Grenelle sont signés entre le patronat et les syndicats ouvriers après deux jours de négociation, mais la base ouvrière repousse les accords et continue la grève. Le 29 mai, de Gaulle dissout l assemblée nationale. Les élections législatives sont fixées au 29 et 30 juin. Le mouvement étudiant s essouffle, le travail reprend peu à peu. A l assemblée nationale, le parti gaulliste (UDR) obtient 294 sièges sur 487. De Gaulle semble ainsi sortir renforcé de la crise de mai 1968. Ces contestations débouchent néanmoins sur une crise politique aigue. Pour reprendre l initiative, de Gaulle propose en février 1969 un référendum sur la réforme du sénat et la régionalisation. Le «non» est préconisé par la majorité des partis, même au sein de la droite. Le 25 avril, de Gaulle annonce alors : «Si je suis désavoué par une majorité d entre vous, je cesserai aussitôt d exercer mes fonctions. Le 27 avril, le «non» obtient 52% des suffrages. Le lendemain, de Gaulle démissionne. Cependant, si la crise de mai 1968 entraine le fin du septennat de de Gaulle, elle ne cause pas la fin de la Vème république, qui parvient à survivre au départ de son «fondateur». En juin 1969, Georges Pompidou est ainsi élu président. Malgré les deux crises majeures qu elle a traversées, la Vème république a su se maintenir. Cependant, si le mandat de Pompidou s effectue dans un contexte de forte croissance, les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979 marquent la fin des 30 glorieuses et le début de la crise économique. La France passe d une période d expansion à une période de stagnation. Le changement de président (l élection de Valéry Giscard d Estaing à la mort de Pompidou en 1974) ne parvient pas à y mettre un terme. Dès 1974, la crise économique entraine un ralentissement de la croissance et une hausse du chômage. Le premier ministre Jacques Chirac mène successivement deux politiques : une politique de refroidissement de l économie, en 1974, qui passe par la restriction du crédit, et une politique de relance par la consommation, en 1975, grâce à une facilitation du crédit et au maintient du pouvoir d achat des salariés. En 1976, Chirac démissionne. Il est remplacé par Raymond Barre. Le second choc pétrolier ruine les efforts de redressement du nouveau 1 er ministre et entraine une inflation (plus de 13% en 1980), et une forte augmentation du chômage. C est dans ce contexte qu auront lieu les élections de 1981.

A la fin du septennat de Valery Giscard d Estaing, la droite est affaiblie par le prolongement de la crise économique, et par les divisions au sein des différents partis. A gauche, au parti socialiste, Mitterrand élimine son rival Michel Bocard au premier tour. Une partie de l opinion pense que l arrivée au pouvoir d un président de gauche entrainerait une baisse du chômage et une augmentation du niveau de vie. Au second tour, Mitterrand remporte l élection avec 51,7% des voies, et devient ainsi le 1 er président de gauche de toute l histoire de la Vème république. Cette élection marque le début de l alternance. Aux élections législatives de juin, le PS obtient la majorité absolue des sièges. Le gouvernement est soutenu par les communistes, représentés par quatre ministres. La marge économique reste cependant étroite : le chômage frôle les 2 millions, l inflation annuelle est plus de 14%, et la balance des paiements est déficitaire. Des réformes sont engagées dans le but de relancer la consommation. La politique économique est marquée par de nombreuses nationalisations : sociétés industrielle, 2 compagnies financières et 36 banques sont nationalisées. Les mesures prises sont cependant peu efficaces, et les difficultés économiques continuent de croitre : l inflation, le déficit de la balance commerciale et le nombre de chômeurs continuent d augmenter. Les difficultés sociales s aggravent. En décembre 1986, une grave grève de la SNCF paralyse le pays pendant mois. En soutenant les grévistes, Mitterrand parvient à retrouver progressivement sa popularité. En 1988, Mitterrand est réélu pour un second septennat, et nomme comme 1 er ministre Michel Rocard. Mais le PS est affaiblit, notamment par la multiplication des scandales politico-financiers. En mai 1991, Mitterrand exige la démission de Rocard et le remplace par Edith Cresson. Après des élections cantonales et régionales désastreuses pour le PS, Edith Cresson est à son tour remplacée par Pierre Bérégovoy en avril 1992. Le gouvernement met en place une politique de prolongement de la construction européenne. En septembre 1992, un référendum est organisé sur le traité de Maastricht. Le «oui» l emporte à 51%. L inflation ralentit mais l emploi diminue toujours. Au début de l année 1993, le seuil symbolique des 3 millions de chômeurs est atteint. Aux élections de 1995, la gauche, n ayant pas su mettre fin à la crise économique, est affaiblie. L élection de Jacques Chirac marque le retour au pouvoir de la droite. Il nomme Alain Juppé comme 1 er ministre. La politique du nouveau gouvernement vise à réduire la dette d état, accumulée depuis le début des années 30, de manière à ce que la France remplisse les conditions du traité de Maastricht pour la création de l euro. Pour ce faire, les sont augmentés, en contradiction avec certaines des promesses de la campagne électorale. En décembre 1995, la France est victimes de grandes grèves suite aux réformes mises en place par le gouvernement Juppé, dont la réforme sur la sécurité sociale. Durant cette même année, la France est victime du terrorisme des groupes islamiques armés (GIA). Les difficultés économiques persistent, et le chômage continue d augmenter. En avril 1997, Jacques Chirac décide de dissoudre l assemblée nationale, avançant ainsi les élections législatives d un an. La gauche promet alors la création de 750 000 emplois et la semaine des 35 heures, et remporte ainsi les élections législatives. Le 2 juin, Lionel Jospin est désigné comme 1 er ministre et forme un gouvernement rassemblant socialistes, communistes et écologistes. C est le début de la 3 ème cohabitation. En effet, depuis la victoire de la gauche aux élections présidentielles de 1981, les gouvernements de la Vème république ont été marqués par de nombreuses cohabitations. La première de ces cohabitations a eu lieu durant le second septennat de François Mitterrand, lorsque ce dernier est contraint de nommer un premier ministre de droite, Jacques Chirac, suite à la victoire de la droite aux élections législatives de 1986. La seconde cohabitation a également lieu durant le septennat de Mitterrand, à la suite une fois encore d élections législatives catastrophiques pour le PS, qui n obtiennent que 17,4% des voies au 1 er tour

contre 44% pour la droite. Mitterrand est alors confronté à une majorité de droite et nomme Balladur, membre du RPR, comme 1 er ministre. En 1994, celui-ci lance une nouvelle campagne de privatisations, et met en place des réformes dans le régime des retraites et dans le secteur privé. Sa popularité reste haute, tandis que celle de Mitterrand, affaibli par sa maladie et par la révélation de son passé vichyste, diminue. Enfin, la 3 ème cohabitation, qui rassemble cette fois un président de droite et un gouvernement de gauche, est dans un premier temps caractérisé par une reprise de la croissance. Les réformes entreprises par Jospin (semaine des 35 heures, création de centaines de milliers d emplois jeunes dans le secteur public) lui assurent une popularité durable, et la cohabitation semble lui réussir face au président. Peu à peu, cependant, le rapport de force se rééquilibre. Des désaccords éclatent au sein de la «gauche plurielle», tandis que le mécontentement de certaines catégories sociales grandit. En décembre 2001, des manifestations éclatent, regroupant enseignants, fonctionnaires des impôts et gendarmes. La victoire de la gauche, en 1981, marque donc le début du temps de l alternance et des cohabitations. Ces cohabitations n ont néanmoins pas permis à la France de retrouver la croissance économique connue sous de Gaulle. La Vème république est donc un régime solide, qui a su durer dans le temps et qui a résisté à de nombreuses crises. Cependant, si la France a connu une grande période de croissance économique pendant les 30 glorieuses, les chocs pétroliers de 1973 et de 1979, et le crash de Wall Street en ont entrainé un important déclin économique. De plus, la progression des partis extrémistes comme le front national démontre sans doute un certain malaise de la société française.