Vous demandez également si les non-français résidant fiscalement en France peuvent bénéficier de la même exemption.



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Paris, le 17 mars 2014 AFF. : MAZURELLE/DGI N/REF : 49966 JM/MB Cher monsieur, Comme convenu, j ai examiné la question de savoir si les pensions de retraite par capitalisation versées par la Banque Mondiale à ses anciens fonctionnaires ressortissants français peuvent bénéficier de l exemption fiscale qui a été reconnue aux fonctionnaires en activité de la BIRD par le Conseil d Etat dans sa décision du 23 juillet 2012 (n 346486, 346728, 3 ème et 8 ème s.-s., Brunet : RJF 11/12 n 977, concl. Cortot-Boucher BDCF 2012 n 121) et de l arrêt de la Cour administrative d appel de Paris du 7 mars 2013 (n 12PA03247). Vous demandez également si les non-français résidant fiscalement en France peuvent bénéficier de la même exemption. Et dans l affirmative, vous posez la question de savoir quelle serait la procédure à suivre pour faire reconnaître cette exemption par les services fiscaux, à partir de quand elle produirait ses effets, quelle serait enfin la latitude du législateur s il voulait revenir sur ces immunités en émettant des réserves a posteriori à la ratification de la Convention sur les immunités et privilèges diplomatiques. Vous trouverez ci-après exposées les conclusions auxquelles me conduit cette étude. I Il convient, en premier lieu, de rappeler qu aux termes de l article 4 A du code général des impôts : «Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l impôt sur le revenu en raison de l ensemble de leurs revenus ;» Or selon l article 79 du même code : «les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l impôt sur le revenu.» Il ressort de ces dispositions qu au regard du droit interne, les pensions de retraite versées par quelque organisme que ce soit sont imposables à l impôt sur le revenu français, dès lors que le redevable a fiscalement son domicile en France. Les sommes versées par une caisse de retraite sont qualifiées de pensions ; les sommes versées par un organisme d assurance privée sont qualifiées de rentes viagères. II Il résulte, par ailleurs, de l article VII relatif aux statuts, immunités et privilèges section 9 b) des Accords de Bretton Woods qui contiennent l Accord relatif à la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, dans sa version figurant au recueil des Traités des Nations Unies, qu «aucun impôt ne sera perçu sur les traitements et émoluments versés par

la Banque à ses administrateurs, suppléants, fonctionnaires ou employés de la Banque, qui ne sont pas citoyens, sujets, ou ressortissants à un autre titre du pays où ils exercent leurs fonctions.» Ce texte fait mention des «traitements et émoluments», et non des «pensions ou rentes viagères», ce qui exclut a priori du bénéfice de cette exonération les fonctionnaires à la retraite. En outre, cette disposition vise les fonctionnaires ou employés de la banque «qui ne sont pas citoyens, sujets ou ressortissants du pays où ils exercent leurs fonctions», ce qui milite une fois encore en faveur d une exonération limitée aux fonctionnaires en activité (qui exercent leurs fonctions) à l exclusion de ceux qui sont à la retraite. Au demeurant, il s agit d une disposition dérogatoire au droit commun qui, à ce titre, est d interprétation stricte. III Le Conseil d Etat, dans une décision rendue à propos d un ancien greffier de la Cour de justice internationale de justice (CIJ) à la retraite et de l article 32 du statut de la Cour internationale de justice annexé à la Charte des Nations Unies, a jugé après avoir rappelé les termes du paragraphe 8 de ce texte qui prévoit que : «les traitements, allocations et indemnités sont exempts de tout impôt» : «qu il ressort des termes mêmes du 8 de cet article, auxquels ne peuvent s opposer les déclarations de plusieurs présidents de la Cour internationale de justice, que les pensions ne sont pas comprises parmi les sommes exemptées d impôt ; qu ainsi la cour administrative d appel n a pas commis d erreur de droit en jugeant que les stipulations du statut de la Cour internationale de justice ne faisaient pas obstacle à l imposition de la pension perçue par M. Aquarone ;» (CE 6 juin 1997 n 148683, Ass, Aquarone : RJF 7/97 n 672). Ainsi, il apparaît que, dès lors que le texte qui prévoit l exonération d impôt ne vise pas expressément les pensions de retraite ou les rentes viagères, celles-ci ne sont pas comprises dans son champ. La Cour administrative d appel de Paris, dans un arrêt du 17 mai 2001 (n 98-4439, 2 ème ch, B, Hanna : RJF 12/2001 n 1478) a adopté la même analyse à propos de l article 22 b de l accord entre la République française et l Unesco, relatif au siège de l Organisation des Nations Unies pour l éducation, la science et la culture et à ses privilèges et immunités sur le territoire français, signé à Paris le 2 juillet 1954 : «qu aux termes de l article 22 de l accord susvisé : «les fonctionnaires régis par les dispositions du Statut du personnel de l Organisation : b) seront exonérés de tout impôt direct sur les traitements et émoluments qui leur seront versés par l Organisation» ; qu il ressort des termes mêmes de ces stipulations qui ne visent pas les pensions de retraite ; que les anciens fonctionnaires de l Unesco et notamment M. Hanna ne peuvent, par suite, bénéficier, à raison de telles pensions, de l exonération qu elles prévoient ;»

Enfin, dans une décision plus récente, le Conseil d Etat a confirmé cette interprétation de l article 22 de l accord relatif au siège de l Unesco et, plus encore, sa conception restrictive de ce type de clause : «qu en l absence de toute définition fixée par l accord lui-même, il ne ressort pas du sens ordinaire à attribuer aux termes «traitement» et «émoluments», rapprochés du champ d application de l article 22 qui concerne les fonctionnaires de l UNESCO, que les pensions de retraite versées aux anciens fonctionnaires de l Unesco bénéficient de l exonération fiscale définie au b de l article 22» (CE 17 décembre 2003 n 239677, 9 ème et 10 ème s.-s., Heskes : RJF 3/2004 n 249). Il semble que l interprétation donnée par le Conseil d Etat à propos de l exonération prévue par le statut de la Cour internationale de justice ou de l Accord relatif au siège de l Unesco doive être identique à celle de l exonération prévue par l Accord relatif à la BIRD : traitements et émoluments ne se confondent pas avec pensions de retraite et rentes viagères de sorte que les fonctionnaires à la retraite ne peuvent bénéficier de l exonération d impôt réservée aux fonctionnaires en activité. IV La même interprétation peut être donnée au texte de ce même article VII, section 9, de l accord relatif à la Banque internationale pour la reconstruction et le développement tel qu il figure au Journal officiel de la République française (JO du 27 décembre 1945 p 8605) qui énonce : «Aucun impôt ne sera perçu sur les traitements et émoluments versés par la Banque aux administrateurs, suppléants, fonctionnaires ou employés de la Banque, qui ne sont pas des nationaux, qui ne sont des citoyens, sujets ou ressortissants à un autre titre du pays où ils résident ;» Ce texte ne vise que les traitements et émoluments à l exclusion des pensions de retraite ou rentes viagères de sorte qu une fois encore, il ne paraît pas pouvoir bénéficier à un ancien fonctionnaire à la retraite. V Il n existe aucun raisonnement objectif qui pourrait aboutir à ce que le Conseil d Etat modifie son mode d interprétation. C est pourquoi, il semble qu un ancien fonctionnaire de la BIRD à la retraite ne peut se prévaloir utilement de l exonération d impôt prévue par l article VII section 9 b) de l accord relatif cette institution, quelle que soit la rédaction envisagée. VI Peut-il alors se prévaloir de l exonération prévue par la section 18 de la Convention du 13 février 1946 sur les privilèges et immunités des Nations Unies, laquelle est applicable aux fonctionnaires de la BIRD comme le Conseil d Etat et la cour administrative d appel de Paris l ont jugé dans les décision et arrêt précités (CE 23 juillet 2012 n 346486, 346728, 3 ème et

8 ème s.-s., Brunet : RJF 11/12 n 977, concl du rapporteur public Mme Emmanuelle Cortot- Boucher BDCF 2012 n 121 ; CAA Paris 7 mars 2013 n 12PA03247)? Tel ne paraît pas être le cas, et cela pour les mêmes raisons que précédemment. Aux termes de l article V section 18 de la Convention sur les privilèges et immunité des Nations Unies, approuvée par l Assemblée générale des Nations Unies le 13 février 1946, lequel est applicable aux fonctionnaires de la BIRD en vertu de l article VI, sections 18 et 19 de la Convention sur les privilèges et immunités des institutions de Nations Unies du 21 novembre 1947 : «Les fonctionnaires de l Organisation des Nations Unies : b) seront exonérés de tout impôt sur les traitements et émoluments versés par l Organisation des Nations Unies ;» Force est de constater que ces dispositions, qui sont d interprétation stricte, ne font mention que des traitements et émoluments à l exclusion des pensions de retraite ou des rentes viagères. Il est à craindre, par conséquent, que le Conseil d Etat, faisant application de sa jurisprudence précitée relative au Statut de la Cour internationale de justice ou de l Accord sur le siège de l Unesco, ne considère qu elles ne sont applicables qu aux fonctionnaires en activité, et non à ceux qui sont à la retraite. VII En outre, la section 20 du même article dispose que : «Les privilèges et immunités sont accordés aux fonctionnaires uniquement dans l intérêt des Nations Unies et non à leur avantage personnel ;» Or, ainsi que le Conseil d Etat l a jugé à propos d un ancien fonctionnaire du Bureau international du travail, «l exonération à l IR des pensions versées à un ancien fonctionnaire du Bureau international du travail ne constitue pas un privilège nécessaire à l exercice par cet agent de ses fonctions auprès de l organisation internationale à laquelle il a appartenu ; qu ainsi la CAA de Lyon n a pas commis d erreur de droit en jugeant que les dispositions précitées de l article 40 ne faisaient pas obstacle à l imposition de la pension perçue par M. Paulin ;» (CE 28 juillet 2000 n 178834, 8 ème et 3 ème s.-s., Paulin, RJF 11/2000 n 1194). VIII Il convient enfin de noter qu en application de l article 29 de l Accord entre le gouvernement de la République française et l Organisation des Nations Unies pour l éducation, la science et la culture (UNESCO) relatif au siège de l UNESCO et à ses privilèges et immunités sur le territoire français signé à Paris le 2 juillet 1954, la France et l Unesco ont soumis à arbitrage le litige les opposant sur l imposition des pensions de retraite versées par la Caisse commune des pensions des Nations Unies aux anciens fonctionnaires de cette Organisation internationale.

Le tribunal arbitral était prié de dire si l article 22b) de l accord de siège précité qui prévoit que «les fonctionnaires régis par les dispositions du statut personnel de l Organisation seront exonérés de tout impôt direct sur les traitements et émoluments qui leur seront versés par l Organisation» est applicable aux anciens fonctionnaires de l Organisation résidant en France et percevant, après la cessation de leur activité, une pension de retraite versée par la Caisse commune des pensions du personnel des Nations Unies. Or, dans sa sentence du 14 janvier 2003, le tribunal arbitral a répondu par la négative. Ainsi les pensions de retraite versées aux anciens fonctionnaires de l Unesco sont imposables en France dans les conditions de droit commun. En application de l article IX du compromis d arbitrage signé entre la France et l Unesco, cette sentence est définitive et obligatoire (inst.24 mars 2003, 14 I-1-03 et 5 B-10-03, BOI-IR- LIQ-20-30-30 n 360). Cette décision arbitrale est certes afférente à l article 22 de l Accord sur le siège de l Unesco mais elle fait référence aux pensions de retraite versée par la Caisse commune des pensions du personnel des Nations Unies. Or le tribunal arbitral a jugé qu elles ne pouvaient être assimilées aux traitements et émoluments, lesquels bénéficient d une exonération totale des impôts. Pour l ensemble de ces raisons, il ne semble pas qu il soit possible de se prévaloir des dispositions de l article V section 18 de la Convention sur les privilèges et immunité des Nations Unies, approuvée par l Assemblée générale des Nations Unies le 13 février 1946. IX Certes, vous m indiquez que d après vos informations, les pensions de la Banque mondiale ne sont pas taxées dans certains pays tels que l Italie et il vous semble que les adhésions à la Convention de 1947 sur les privilèges et immunités devraient emporter les mêmes effets quel que soit le pays. Il paraît toutefois difficile de nous prévaloir de cette interprétation propre à l Italie. Chaque pays est souverain et interprète la convention qu il a signée comme il l entend. Il en va de même des juridictions suprêmes nationales chargées d interpréter une convention. Le principe d égalité devant la loi suppose que les personnes placées dans une situation identique soient traitées de la même manière. Or tous les anciens fonctionnaires de la BIRD, fiscalement domiciliés en France sont soumis aux mêmes règles : leurs pensions de retraite sont soumises à l impôt sur le revenu français. Le droit français ne crée aucune discrimination. Et il n est nulle part prévu que l interprétation favorable des dispositions de la Convention de 1947 sur les privilèges et immunités adoptée par un Etat devrait être étendue aux autres Etats signataires.

X Autre question : un ancien fonctionnaire de la BIRD peut-il invoquer utilement une interprétation que l administration aurait faite de ces différentes conventions et qui lui serait favorable? La réponse est une fois encore négative. La doctrine administrative vous est défavorable. Ainsi, dans une réponse ministérielle reprise dans une instruction (rép de Cuttoli : Sén. 15 avril 1999 p 1250 n 14002 ; inst 14 mai 1999, 14 I-1-99), il est énoncé : «L article 4 A du code général des impôts prévoit que les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l impôt sur le revenu à raison de l ensemble de leurs revenus. L article 79 du même code précise, notamment, que les pensions concourent à la formation du revenu global servant de base à cet impôt. L accord de siège entre la France et l Unesco du 2 juillet 1954 ne comporte aucune dérogation à cette règle au profit des anciens fonctionnaires de cette organisation. Il n accorde en effet d exonération que pour les traitements et émoluments versés par l organisation. Au demeurant, cet accord dispose que les privilèges qu il institue sont consentis dans l intérêt de l organisation, dans le cadre de ses buts organiques et non pour procurer des avantages personnels aux fonctionnaires de cette institution. La nécessité d une exonération ne se justifie donc plus lorsque les fonctionnaires cessent toute activité au service de cette organisation internationale.» Cette position a été confirmée dans une instruction du 24 mars 2003 qui rappelle la décision arbitrale précitée du 14 janvier 2003 et conclut de la façon suivante : «D une manière générale, cette sentence conforte la position de l administration selon laquelle, à l exception des anciens agents des Communautés européennes, les anciens agents ou fonctionnaires des organisations internationales ne bénéficient d aucune exonération d impôt en France sur les rentes, pensions de retraite et de survie qu ils perçoivent après la cessation de leur activité. (Rép de Cuttoli 15-4-1999).» (Inst.24 mars 2003, 14 I-1-03 et 5 B- 10-03 ; BOI-IR-LIQ-20-30-30- n 360). X Enfin, il ne paraît pas possible de se prévaloir d exonération prévue en faveur des anciens agents des Communautés européennes en arguant le principe d égalité. D une part, parce que les exonérations d impôts sont d interprétation stricte. D autre part, parce qu un ancien agent des Communautés européennes n est pas dans la même situation qu un ancien fonctionnaire de la BIRD, les deux organisations étant distinctes.

XI En conclusion, il apparaît que les pensions de retraite par capitalisation versées par la Banque Mondiale à ses anciens fonctionnaires ressortissants français ne peuvent bénéficier de l exemption fiscale telle que reconnue par le Conseil d Etat dans sa décision du 23 juillet 2012 (n 346486, 346728, 3 ème et 8 ème s.-s., Brunet : RJF 11/12 n 977, concl du rapporteur public Mme Emmanuelle Cortot-Boucher BDCF 2012 n 121) et de l arrêt de la Cour administrative d appel de Paris du 7 mars 2013 (n 12PA03247). Il en va de même de celles versées à des non français qui auraient leur domicile fiscal en France, d une part, parce que les dispositions des articles 4 A et 79 du code général des impôts s appliquent quelle que soit la nationalité de la personne en cause, du seul fait de sa résidence fiscale en France, d autre part, parce que ni les dispositions de l Accord relatif à la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, ni la Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées approuvée par l Assemblée générale des Nations Unies le 21 novembre 1947, ni enfin la Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies approuvée par l Assemblée générale des Nations Unies le 13 février 1946 ne prévoient une exonération des pensions de retraite ou rentes viagères versées à leurs anciens fonctionnaires à la retraite. Si en dépit de cet avis négatif, vous décidiez de demander la décharge des impositions assises sur les pensions de retraite versées par la Banque mondiale, il conviendrait de déposer une réclamation contentieuse auprès du Centre d impôts, puis en cas de rejet de cette demande de porter le litige devant le tribunal administratif d où dépend ce centre dans un délai de deux mois à compter de la décision de rejet. La réclamation ne pourrait porter que sur une imposition afférente aux années 2011 et 2012, et 2013 conformément aux dispositions de l article R196-1 du livre des procédures fiscales. Je reste à votre disposition. Veuillez agréer, cher monsieur, l expression de mes meilleurs sentiments. Jacques MOLINIÉ PIWNICA & MOLINIÉ Avocat au Conseil d'etat et à la Cour de cassation 62 boulevard de Courcelles 75017 Paris Tél. 01 46 22 83 77 Fax 01 46 22 16 66 courrier@p-m.fr