L ANI du 11 Janvier 2013 : la véritable étape II de la réforme de 2003-2004



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Transcription:

L ANI du 11 Janvier 2013 : la véritable étape II de la réforme de 2003-2004 Le projet d ANI du 11 janvier 2013 ayant pour intitulé : «pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l emploi et des parcours professionnels», il est logique que la formation professionnelle, et plus largement le développement des compétences des salariés, qui concourt à la fois à la compétitivité et à la sécurisation, y occupe une large place. Sept articles abordent directement la question des compétences des salariés. Toutefois, ces dispositions n ont ni la même ambition ni la même portée. Si le compte personnel de formation (art. 5) est une des mesures phares de l accord, il faut mettre quasiment au même niveau la création d une prestation de conseil en évolution professionnelle (art. 16) et l articulation entre la négociation sur la GPEC et le plan de formation (art. 14). A l inverse, les dispositions concernant le CIF-CDD (art. 6), la POE (art. 9) et le CSP (art. 8) apparaissent comme des aménagements techniques de dispositifs existant qui sont plus des correctifs ou des améliorations que de véritables nouveautés structurantes. Reste la mobilité volontaire sécurisée pour développer ses compétences, à laquelle on reconnaîtra une vertu pédagogique mais qui ne ressort pas vraiment de la catégorie des innovations (art. 7). 1

I. Les nouveautés structurantes I.I LE COMPTE PERSONNEL DE FORMATION Présent depuis (très) longtemps dans le débat, le compte personnel de formation trouve dans l ANI du 11 janvier 2013 sa première traduction juridique. Insuffisantes pour la mise en œuvre opérationnelle du compte personnel, les dispositions de l article 5 fixent les propriétés du compte, les principes de son fonctionnement et le calendrier de sa mise en œuvre. Concernant les propriétés du compte personnel de formation, l ANI en dénombre 3 : le compte est universel, individuel et unique (un seul compte tout au long de la vie professionnelle). Sur l universalité, et même si l on reconnaît à l ANI un rôle exploratoire pour une loi à venir ce qui conduit à ne pas le cantonner à son strict champ d application, elle paraît réduite à la lecture de l article 5 : les salariés et demandeurs d emploi ce sont certes plus de 20 millions d actifs, mais l universalité supposerait que les non salariés soient également concernés pour ne pas parler des fonctionnaires et autres agents publics, soit au total 28 millions d actifs. Il appartiendra au législateur de confirmer, ou non, le caractère véritablement universel du compte. Si la dimension individuelle ne pose guère de problème, l unicité du compte aboutit mécaniquement à une gestion centralisée et unique du compte personnel de formation qui ne pourra plus, contrairement au DIF, être géré par les entreprises. Reste à déterminer la ou les structures qui pourront assurer, et garantir dans le temps, la gestion de 18 millions (salariés) à 28 millions (ensemble des actifs) de comptes. Il peut difficilement s agir des OPCA, entre autres du fait de leur nombre et de l étanchéité de leurs champs de compétences qui ne permet pas de gérer un droit universel. La solution est sans doute à rechercher du côté de structures qui ont déjà des pratiques de gestion à la fois individuelles et massives (organismes de sécurité sociale, organismes gestionnaires de régimes de retraite, etc.), sachant que la gestion devra certainement être confiée à un interlocuteur unique pour des questions d opérationnalité et de coût. A cet organisme la gestion des compteurs et de l information des bénéficiaires, aux OPCA le financement du compte personnel dans les cas d utilisation qui relèvent de son intervention. Les partenaires sociaux ont également défini des principes de fonctionnement du compte personnel de formation, largement calqués sur le DIF qui se trouve absorbé par le dit compte et tel le phénix, ne disparaît donc que pour mieux renaître. Le DIF aura ainsi servi de matrice à un droit plus large et mieux garanti. Saluons ici ce dispositif dont les principes sont intégralement préservés (compteur en heures, acquisition annuelle liée à l ancienneté, négociation obligatoire avec le financeur pour sa mise en œuvre notamment) et qui bascule dans un dispositif à gestion externe ce qui garantira une égalité absolue des salariés en matière d information et de gestion des droits, sinon de possibilités d utilisation. 2

Cette renaissance du DIF en compte personnel de formation suppose toutefois un important travail technique, prévu par l ANI du 11 janvier sous forme d actualisation des dispositions conventionnelles, pour «remodeler» les dispositions actuelles régissant le DIF afin d en faire des modalités opérationnelles du nouveau dispositif. Ce travail devrait permettre de régler les quelques scories (portabilité, licenciement pour faute grave ) qui parasitent le régime du DIF, voire de régler quelques questions complémentaires de manière explicite (modalités d acquisition des heures, possibilités d utilisation du compte personnel de formation hors-temps de travail et compatibilité de la formation avec certains temps de congés et/ou de repos, etc,). Au-delà de ce travail d adaptation au niveau interprofessionnel, l entrée en vigueur du compte personnel de formation nécessitera également une révision des accords de branche, l intégralité des dispositions applicables au DIF n étant pas nécessairement transférables en l état. Reste le calendrier. L ANI annonce une mise en œuvre du compte personnel de formation dans les six mois suivant l entrée en vigueur de l accord, celle-ci étant conditionnée par l adoption des dispositions législatives et règlementaires permettant son effectivité. Si l on fait l hypothèse, déjà optimiste, que l ensemble du corpus législatif et règlementaire sera élaboré dans l année 2013, cela conduit au milieu de l année 2014, ce qui donnerait vraisemblablement l échéance du 1 er janvier 2015 pour que le compte personnel de formation se substitue au DIF. Il est, en tout état de cause, difficile d envisager un calendrier plus rapide si l on tient compte des délais nécessaires à la mise en place des millions de compte concernés par un organisme gestionnaire. I.2 LA PRESTATION DE CONSEIL EN EVOLUTION PROFESSIONNELLE La création d une prestation de conseil en évolution professionnelle (art. 16) peut s analyser comme la conséquence logique des limites, sinon de l échec au regard des intentions initiales, du bilan de compétences. Introduit dans le Code du travail en 1991, le bilan de compétences se voulait la traduction d un véritable droit à l orientation professionnelle. Il a plus souvent pris la forme d une analyse des motivations et compétences personnelles, avec une forte dimension psychologisante qui a conduit à minorer, voire faire disparaître, l accompagnement des bénéficiaires au sein d un environnement socio-économique. D où la création de cette prestation de conseil en évolution professionnelle qui certes peut porter sur l analyse des compétences du bénéficiaire, mais doit surtout apporter une meilleure maîtrise de l environnement professionnel territorial dans le cadre d une quasi gestion individuelle des compétences territorialisée. Reste à identifier les structures qui délivreront ces prestations. Pour les (futurs) signataires de l ANI, une articulation devra être trouvée avec le service public d orientation, dont la finalité n est pas exactement celle du conseil en évolution professionnelle mais qui peut très certainement y concourir. Relevons que s agissant des organismes paritaires, l ANI ne cite que les FONGECIF et l APEC mais pas les OPCA. Cette omission, qui n est pas un oubli, est une tentative de maintien du Yalta qui a déjà été opéré par les ANI précédent portant sur la formation professionnelle entre les FONGECIF conseils des salariés et les OPCA conseils des entreprises. 3

Cette distinction ne devrait pourtant plus être maintenue avec la généralisation du compte personnel de formation et le rôle qui est reconnu aux OPCA en matière d accompagnement des entreprises, notamment au niveau territorial. Le maintien de la distinction, qui n a pas véritablement de fondement juridique puisque la gestion des OPCA est paritaire et que si les fonds sont versés par les entreprises ils concernent la formation des salariés, risque de s avérer fortement artificiel et plutôt que de structurer de manière simple le service et l identification des interlocuteurs il aboutira nécessairement à une déperdition de moyens et d énergie. I.3 LE LIEN ENTRE LA NEGOCIATION SUR LA GPEC ET LE PLAN DE FORMATION Le DIF devait être le cheval de Troie permettant d ouvrir les portes de la négociation sur le plan de formation, par une extension de la négociation individuelle à la négociation collective. Cela n a été que rarement le cas, pour des raisons tenant tant au faible développement quantitatif du dispositif qu aux craintes qu il a inspirées, à la faible appropriation du dispositif par les représentants du personnel et surtout par une erreur stratégique des organisations syndicales qui ont souvent souhaité déconnecter le DIF du Plan plutôt que d en faire un levier pour introduire de la négociation à l intérieur de celui-ci. C est donc la GPEC qui sera le terreau sur lequel la négociation du plan de formation fleurira peut être. L ANI ne va pas jusque-là mais il inclut les orientations du plan de formation, soit la politique de formation de l entreprise, dans la négociation obligatoire sur la GPEC dans les entreprises de plus de 300 salariés, ce que le Code du travail ne prévoit pas à ce jour (art. 14). D autre part, l articulation entre la GPEC et le plan de formation sera un des thèmes à aborder lors de la consultation du comité d entreprise sur la formation. Enfin, dans la lignée du conseil en évolution professionnelle et de sa dimension territoriale, il est demandé aux organisations syndicales et patronales de produire dans le cadre du dialogue social territorial des informations utilisables par les TPE/PME en matière d anticipation des besoins d emploi et de compétences. Ici encore, les OPCA pourraient jouer un rôle utile, eux dont la mission inclut «de participer à l'identification des compétences et des qualifications mobilisables au sein de l'entreprise et à la définition des besoins collectifs et individuels au regard de la stratégie de l'entreprise, en prenant en compte les objectifs définis par les accords de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences» (C. Trav, art. L 6332-1-1). Cette approche globale de la formation selon la finalité (besoins de compétences en lien avec les évolutions de l entreprise et de son environnement) pourrait utilement faire évoluer les débats sur la formation à l intérieur des entreprises d une approche quantitative (budgets, actions, salariés, heures de formation ) vers une dimension plus qualitative : capacité d anticipation de l entreprise, d adaptation, objectifs poursuivis, etc. Plus de fins et un peu moins de moyens en quelque sorte. 4

II. LES AJUSTEMENTS ET CORRECTIFS II.1 Les conditions d accès au CIF-CDD Selon l article L 6332-20 du code du travail, pour bénéficier du CIF-CDD il est nécessaire de remplir deux conditions : avoir travaillé au moins 24 mois en qualité de salarié au cours des 5 dernières années, dont 4 mois en CDD pendant les 12 derniers mois. Dans le cadre de la réduction de la précarité des jeunes qui entrent le plus souvent dans la vie active par des CDD, et pour ne pas les priver d un droit à la formation, seule la condition d avoir travaillé en CDD pendant 4 mois au cours des 28 derniers mois sera applicable aux moins de 30 ans. Si l on comprend la finalité de la disposition, on peut s étonner de la création d un nouveau seuil lié à l âge qui conduit à ne pas appliquer les mêmes conditions à tous et à ne pas rechercher un droit commun qui englobe toutes les situations. La multiplication des règles particulières, aussi légitimes ou justifiées soit-elles, alourdit à la fois la gestion, le coût de fonctionnement et la lisibilité du système de formation. La suppression totale de la condition de 24 mois de salariat aurait permis de régler la question, car quel salarié de plus de 30 ans n a pas travaillé au moins 24 mois au cours des 12 derniers mois? essentiellement les personnes en grande situation d exclusion ou des anciens travailleurs non salariés qui ne peuvent plus bénéficier des dispositifs de formation qu ils ont financé. On voit mal où se situe l exigence de maintenir une règle qui créé une distorsion de situation. L enfer, paraît-il, est pavé de bonnes intentions. II.2 La prime pour les bénéficiaires du CSP expérimental Les partenaires sociaux ont mis en place, par l ANI du 31 mai 2011, un contrat de sécurisation professionnelle expérimental destiné aux anciens titulaires d un CDD ou contrat d intérim. Or ces salariés peuvent avoir des durées d indemnisation par le régime d assurance-chômage relativement courtes et qui de ce fait peuvent se prolonger au-delà de leurs droits, les faisant basculer dans le régime de solidarité. Pour compenser, au moins en partie, ce risque financier et inciter à entrer dans le dispositif, une prime de 1000 euros sera versée à chaque bénéficiaire au 7 ème mois d indemnisation. III.3 La collecte d offre d emplois par les OPCA pour la POE Sous réserve de l accord des CPNE, pour les OPCA de branche, ou de la CPNAA pour les OPCA interprofessionnels, les OPCA ayant conclu une convention avec POLE EMPLOI sur la préparation opérationnelle à l emploi (POE), pourront proposer aux entreprises qui ont des offres d emploi disponibles d utiliser le dispositif. Cette disposition a pour objet de favoriser le développement des POE individuelles et/ou collectives à l initiative des OPCA. Plutôt de que mener des guerres de tranchée pour savoir si la POE devait être pilotée par POLE EMPLOI ou les OPCA, les partenaires sociaux répondent donc : les deux mon capitaine, ce qui au final recentrera l énergie sur l opérationnalité du dispositif et non sa dimension institutionnelle. 5

III. La mobilité volontaire sécurisée L ANI du 11 janvier 2013 créé, aux fins de développement des compétences, une période de mobilité volontaire qui doit permettre à un salarié de découvrir, à son initiative, un autre emploi dans une autre entreprise. Si la mobilité volontaire est mise en œuvre à l initiative du salarié, elle suppose l accord de l employeur et la conclusion d un avenant au contrat de travail. Il appartient au salarié de décider s il revient ou non dans son entreprise d origine à la fin de la période de mobilité. S il choisit de ne pas réintégrer son entreprise, il est considéré comme démissionnaire sans avoir à s acquitter d un préavis. Si l on comprend le sens d un dispositif de mobilité volontaire, force est de constater que techniquement il est déjà possible, soit par le biais du congé sans solde, soit par celui du congé sabbatique, de suspendre son contrat de travail pour aller exercer une autre activité ailleurs. La mise à disposition, dorénavant entrée dans le Code du travail, fournit également un cadre de nature à permettre une telle mobilité. Tout en reconnaissant la volonté pédagogique, on peut se demander si c est en multipliant les dispositifs spéciaux que l on parviendra à créer des outils juridiques novateurs ou s il ne vaudrait pas mieux limiter le nombre d outils mais en s assurant qu ils peuvent couvrir de multiples situations. Manifestement, les partenaires sociaux ne sont pas des adeptes du couteau Suisse. CONCLUSION L ANI du 11 janvier 2013 comporte trois innovations majeures qui sont le développement d un droit individuel à travers le compte personnel de formation, un lien fort entre GPEC et formation avec l articulation entre la négociation obligatoire et la mise en place du plan de formation et la création d une prestation nouvelle assimilée à la formation qui est le conseil en évolution professionnelle. Ces trois logiques, droit individuel, gestion des compétences et dispositifs d accompagnement sont exactement celles qui ont présidé à l accord du 20 septembre 2003, pierre de touche de la réforme de la formation professionnelle (à l époque : le DIF, la professionnalisation plutôt que la formation et l entretien professionnel). Le nouvel accord s inscrit donc dans la continuité de l accord fondateur de 2003 dont, à l époque, nous avions constaté qu à l instar de celui de 1971 qui avait conditionné plus de trente ans de droit de la formation, il constituait la matrice du développement futur du droit de la formation. L ANI du 11 janvier 2013 vient conforter ce diagnostic et l on peut y voir, plus que dans l accord du 7 janvier 2009, la véritable étape II de la réforme de 2003/2004. 6