Collège Français des Anesthésistes Réanimateurs

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Transcription:

Le REGISTRE RECO Emmanuel MARRET 1, 4, Vincent PIRIOU 2, 4, Pierre ALBALADEJO 3, 4 1. Département d anesthésie-réanimation, Hôpital Tenon 4 rue de la Chine. 75020 PARIS 2. Université Claude Bernard Lyon1, EA 1896. Service d anesthésie Réanimation; Centre Hospitalier Lyon Sud. 69495 PIERRE- BENITE 3. Pôle Anesthésie Réanimation, CHU de Grenoble, F-38043 Grenoble Cedex 9 4. Membre de la commission scientifique du Collège Français des Anesthésiste- Réanimateurs Introduction L évaluation des pratiques professionnelles (EPP) est devenue une réalité pour les médecins. La loi n 2004-810 du 13 août 2004 de réforme de l'assurance Maladie et le décret n 2006-653 du 14 avril 2005 soumettent tous les praticiens à une obligation d'évaluation de leurs pratiques professionnelles. Au delà de ces dispositions légales, l EPP a notamment pour but d amener le médecin anesthésisteréanimateur à améliorer régulièrement sa pratique, quelle soit clinique ou institutionnelle, par rapport à un référentiel professionnel dans le but d engager une dynamique d amélioration. Les modalités de mise en œuvre par le praticien d une EPP peuvent être nombreuses et variées passant par le chemin clinique, l audit clinique ou la revue morbi-mortalité mais aussi bien par la participation à des registres, observatoires ou bases de données. En effet, toute démarche mettant en relation les pratiques et les références correspondantes avec une appréciation des résultats obtenus peut être considérée comme une démarche EPP si un enjeu d amélioration est identifié. 1. le registre : une démarche EPP

2 Le registre consiste à colliger des données issues de certains patients dans le cadre d un thème prédéfini. Il comporte une composante scientifique, permettant de connaître par exemple l incidence de certaines complications, ainsi que d étudier des facteurs favorisants. Dans certaines conditions, il peut s intégrer dans un programme de bonnes pratiques dans le but d améliorer les pratiques. Ceci suppose que les praticiens aient modifié leurs pratiques grâce à l adhésion à un registre. La participation à un registre est acceptée, par la Haute Autorité de Santé (HAS), comme une démarche d amélioration de la qualité des soins pouvant s inscrire dans un programme d EPP (www.has-sante.fr). Cependant, cette démarche doit être structurée en 4 étapes : 1. S engager à titre individuelle auprès d une structure professionnelle agrée pour valider et proposant des programmes EPP. 2. participer au registre. Le praticien doit collecter des données issues de sa pratique du médecin sur un thème donné. Certaines conditions pour la participation au registre, comme le nombre de cas à inclure, les items à colliger ainsi que les modalités d inclusion et de délais doivent définies précisément. Ces données doivent permettre de définir des indicateurs permettant d être suivis. 3. Prendre connaissance du retour d informations qui sont délivrées à intervalles réguliers. Il s agit des résultats et de l analyse des données enregistrées, et des indicateurs de suivis. Ces informations peuvent être complétées par une lettre d information, le rappel des recommandations à mettre en œuvre ainsi des situations cliniques analysées et commentées par des experts ou tout autre message. 4. mettre en œuvre des actions d amélioration de la qualité de ses pratiques. Cette partie nécessite la participation à des sessions de formation et à la mise en œuvre d actions d amélioration (mise en place ou actualisation des protocoles, de chemins cliniques, organisation de réunion de prise en charge, staff multidisciplinaire, etc ) La participation aux différents points doit permettre aux praticiens incluant des malades, comme pour toute démarche EPP, d entrer dans le modèle d amélioration de la qualité (figure 1). Dans le cadre d un registre, d un observatoire ou d une base de données, il existe un partenariat entre les professionnels de santé et la structure professionnelle responsable du registre (figure 2). Le professionnel de santé doit

3 s engager activement en colligeant les données et en mettant en place des actions d améliorations des pratiques. La structure professionnelle est responsable du thème, de la conception de la démarche, de la qualité des données recueillis, de l analyse et de l exploitation de celles-ci. Les données enregistrées doivent être en conformité avec les dispositions réglementaires de la loi relative à l informatique, aux fichiers et aux libertés. 2. le registre RECO La prise en charge d un patient coronarien porteur de stent(s) est une réalité quotidienne en anesthésie qui pose notamment le problème de la gestion d un double risque, thrombotique et hémorragique. Le Collège Français des Anesthésistes-Réanimateurs (www.cfar.org) Réanimation a validé la participation au Registre des patients porteurs d Endoprothèses Coronaires, Opérés de chirurgie non cardiaque (RECO) comme une démarche d EPP. 2.1 Justification du registre RECO De nombreux patients coronariens et porteurs d endoprothèse(s) coronaire(s) (EC) sont opérés chaque année pour une chirurgie non cardiaque. La mise en place d une EC nécessite un traitement par agents antiplaquettaires (AAP) au long cours. La période périopératoire représente une situation avec deux risques théoriques : un risque thrombotique en cas d arrêt des AAP, un risque hémorragique en cas de maintien. Pour les EC métalliques (stent métallique nu), le risque thrombotique parait important dans les 2 mois qui suivent la pose d une EC lorsqu une intervention chirurgicale est programmée [1-3]. Après le deuxième mois, le risque thrombotique d une chirurgie apparait moins clair. En effet, plusieurs séries de cas ont rapporté la survenue d un infarctus du myocarde plusieurs mois après la pose d une EC du fait d un arrêt des AAP pour une chirurgie [4,5]. En 2000, plus de 70 000 patients ont bénéficié de la mise en place d une ou plusieurs EC (en moyenne 1,32) en France [6]. Le nombre de patients porteurs d EC nécessitant une intervention chirurgicale est donc potentiellement important d autant plus que les patients porteurs d EC ont un terrain qui favorisent les pathologies chirurgicales (cancer, maladie

4 artérielle extra-cardiaque). Schouten et coll. ont publié le devenir des patients ayant la pose d EC pour syndrome coronarien aigu (SCA) entre les années 1999-2005 et ayant eu une chirurgie non cardiaque dans les 2 ans qui suivait cet épisode aigu. Cent quatre-vingt douze malades sur les 574 procédures réalisées pendant ces 6 années ont pu être analysés. Le risque d avoir une chirurgie non cardiaque après un SCA est donc non négligeable, proche de 30%. Dans ce contexte, la survenue d une complication cardiaque majeure dans les 30 jours suivant l acte opératoire s élevait à 2,6% [7]. Le type d EC posée a récemment été modifié en évoluant de la pose d EC nue (stent métallique nu) vers la pose d EC pharmacoactives (stent actif). Ces dernières EC présentent l avantage de diminuer le risque de resténose. Cependant, elles sont associées à une augmentation du risque de thrombose à l arrêt des antiagrégants du fait d une réendothélialisation plus tardive [8]. L arrêt des AAP chez les patients porteurs d EC est motivé principalement par la nécessité d une intervention chirurgicale dans la majorité des cas [9]. Cependant, la fréquence des thromboses d EC est actuellement imparfaitement connue et n apparaît que par l intermédiaire de la publication de cas cliniques ou de courtes séries voire de cas cliniques [10-13]. Il apparaît que les thromboses d EC actives à l arrêt des AAP peuvent survenir tardivement (jusqu à 2 ans après la pose de l EC), dans un court délai après l arrêt complet des AAP [12]. Il semble d autre part que la substitution par des antithrombotiques (HBPM, AINS) ne modifie pas sensiblement la survenue de ces thromboses. D autre part, un certain nombre de patients sont opérés sans présenter de complications cardiaques majeures notamment de thrombose de stent [14]. Deux études de la Mayo Clinic (Rochester, Minesota, USA) se sont récemment focalisées sur la survenue de complications cardiaques chez les patients porteurs de stents nus ou pharmacoactifs. La première série de patients concernait les patients porteurs de stents nu(s) posés dans l année précédente à une chirurgie non cardiaque [3]. Une complication cardiaque majeure (décès, infarctus du myocarde avec et sans onde Q, thrombose de

5 stent ou revascularisation) touchait 5,2% des malades avec un risque majoré en cas de chirurgie réalisée peu de temps après la pose du stent(s) (incidence de 10,6% si chirurgie moins de 30 jours après la pose du stent). La survenue de complications hémorragiques (définies par la présence d une transfusion) était de 4,8%, incidence très proche des complications cardiaques. Pour les patients opérés avec une EC pharmacoactive, le risque de complications cardiaques majeures était proche aussi de ceux ayant un stent nu (5,4%) mais sans que les auteurs démontrent un effet du délai entre la pose de l EC pharmacoactive et la chirurgie non cardiaque sur les complications cardiaques majeures [15]. Les données sur les patients porteurs de stents coronaires restent peu nombreuses, contradictoires et souvent issues de patients provenant d un seul et même centre. 2.2 Objectifs du registre RECO Le registre RECO a 2 objectifs. Tout d abord, sont but est de colliger le maximum de patients porteurs de stents coronaires pris en charge par les anesthésistes, et ce quel que soit le geste réalisé (toutes les chirurgies, endoscopies, gestes invasifs, en dehors de la chirurgie cardiaque). L'objectif de ce registre est d'avoir le maximum d'information sur le devenir des patients porteurs de stents et proposés à une chirurgie c'est-à-dire connaître la fréquence de ces patients, le nombre de patients reportés, la gestion périopératoire des agents antiplaquettaires, et surtout les complications pré, per et postopératoires associées à l'arrêt ou au maintien des agents antiplaquettaires pour réaliser ces gestes. Le registre RECO permet aussi de valider une démarche EPP individuelle pour ceux qui le souhaitent. Ce registre a été élaboré en collaboration avec le. Pour valider cette démarche EPP, un nombre minimum de patients doit être inclus et des actions d amélioration des pratiques doivent mise en place. Le nombre de patients à inclure pour valider une démarche EPP est de 10. Les indicateurs de suivi retenus pour RECO, dans le cadre de l EPP, étaient basés sur 3 éléments : (1) la présence d une discussion pluridisciplinaire ; (2) La présence dans le dossier du malade du relevé de décision de prise en charge du patient et (3) l information au patient des modalités de prise en

6 charge. Les actions d améliorations des pratiques à mettre en place dans l institution (réunion pluridisciplinaire, rédaction de protocole de prise en charge, etc ) étaient laissées au libre de choix du professionnel. Les praticiens peuvent de plus s appuyer sur des recommandations récentes portant sur la gestion des patients porteurs d endoprothèses coronaires [16]. A titre individuel, la participation à 2 cas cliniques commentés et la lecture des recommandations (disponibles sur le site du CFAR) étaient nécessaires pour valider une démarche EPP. Tous les participants au registre RECO ont reçu plusieurs lettres d information afin de les tenir alertés des événements rapportés dans le registre. 2.3. Le registre RECO en pratique Le registre a été ouvert en avril 2007. newsletter 2.3.1 Octobre 2007. Les premières informations sous la forme d une Pendant les cinq premiers mois, plus de 250 patients porteurs de stents coronaires devant bénéficier d un geste invasif ont été inclus dans la base. Les patients étaient majoritairement des hommes (75%) âgés de 69 ans en moyenne, classés ASA 3 pour la plupart, hypertendus (62%), assez souvent diabétiques (26%). Ces 250 patients étaient porteurs de 410 stents. Dans 41 % des cas il s agit de stents nus, dans 30% des cas, de stents actifs. Dans 29% des cas, l information n est pas disponible (figure 3). Aucun des patients n avait de carte de liaison, lors de la consultation d anesthésie. L âge des stents est un facteur important dans les stratégies à mettre en œuvre. Les patients étaient traités majoritairement par de l aspirine (70%), du clopidogrel (63%), les 2 (40%) ou aucun agent antiplaquettaire dans 7% des cas. La gestion périopératoire de ces patients n a donné lieu à une discussion pluridisciplinaire que dans 57% des cas, dans 48% des cas avec le cardiologue, dans 25% des cas avec le chirurgien. Cette discussion était plus fréquente quand le stent était connu pour être actif (Figure 4). Quand une discussion a eu lieu, les

7 conclusions ont été transcrites dans le dossier dans 74% des cas. La fréquence d une discussion collégiale pour ces patients est clairement influencée par le type de stent. Lorsque les patients portent un stent actif, une discussion collégiale a lieu plus fréquemment. En revanche, le fait de ne pas connaître le type de stent ne suscite pas plus la discussion. Les patients étaient exclusivement opérés de chirurgie non cardiaque (critères d inclusion des malades dans RECO). Presque toutes les chirurgies sont représentées (Figure 5). Mais leur proportion n est représentative que de l activité des centres qui recrutent. Il faut noter en particulier que contrairement aux publications habituelles sur les problèmes cardiaques périopératoires, la chirurgie vasculaire n est pas surreprésentée. 2.3.2 Avril 2008. Première analyse des complications Une analyse à 568 patients a été réalisée. Cette analyse porte sur les thromboses de stents notifiées dans RECO, les complications cardiovasculaires au sens large et les complications hémorragiques. 2.3.2.1 Les complications cardiovasculaires Cinq thromboses de stents ont été rapportées. Pour 4 d entre elles, une confirmation angiographique a pu être obtenue. Deux thromboses de stents sont survenues chez des patients porteurs de stents actifs. En dehors des thromboses de stents, des événements cardiovasculaires se sont produits dans plus de 10 % des cas. Dans la grande majorité des cas, il s agit d événements coronariens : ischémie myocardique, dommages myocardiques, infarctus du myocarde, définis sur des critères cliniques, électrocardiographiques ou biologiques (élévation de la troponine). Ces événements sont fréquents, malgré le fait que ces patients sont revascularisés (ils sont tous porteurs de stents coronaires par définition) et correctement traités dans la grande majorité des cas. Les facteurs associés à ces événements sont l urgence, un score de LEE élevé, et la survenue de complications hémorragiques.

8 Ces résultats montrent, qu en dehors d une gestion rigoureuse des antiplaquettaires pour réduire le risque de thrombose de stent, il est important chez ces patients de conduire la prise en charge périopératoire de ces patients en considérant qu ils sont à risque d événements coronariens. Il s agit ici d une information capitale, montrant que ces patients demeurent à risque, malgré la revascularisation par endoprothèse coronaire, risque de thrombose de stent, mais aussi risque de SCA périopératoire, probablement par le fait d une revascularisation incomplète. Ceci va bien dans le sens des études actuelles qui montrent qu une revascularisation prophylactique préopératoire par des EC est pas toujours bénéfique, voire inutile et même néfaste. 2.3.2.2 Les complications hémorragiques. Dans RECO, les complications hémorragiques sont déclaratives. C'est-à-dire que le praticien déclare une complication hémorragique dès lors qu il considère qu un saignement anormal s est produit. Les complications hémorragiques se sont produites dans 14% des cas. Dans la grande majorité des cas, il s agissait de complications hémorragiques postopératoires, au site opératoire, sans complication générale. Les facteurs associés aux complications hémorragiques sont les autres antithrombotiques (en grande majorité, HBPM dans le cadre de la thromboprophylaxie), l insuffisance rénale, et la survenue de complications cardiaques. Conclusion En décembre 2008, 153 centres se sont inscrits dans le registre RECO et ont inclus presque 1200 patients. De plus, ce registre est le premier, dans le cadre de l anesthésie-réanimation, permettant de valider une démarche EPP. Le CFAR, en plus d être un organisme agréé, propose une aide dans cette méthode EPP notamment avec la mise à disposition d un modèle de rapport concernant cette démarche ainsi qu une «hot-line» disponible pouvant répondre aux questions des praticiens aussi sur la méthode EPP ou la gestion des AAP. Certains praticiens ont maintenant validé leur participation au registre RECO comme une démarche EPP.

9 Ce registre permet aussi de mieux connaitre la pratique des médecins anesthésiques prenant en charge les patients porteurs d une EC ainsi que le devenir de ces patients, notamment les complications hémorragiques que présentent ces patients porteurs d EC et opérés de chirurgie non cardiaque ; Ces dernières étant souvent moins évaluées que les complications cardio-vasculaires. Remerciement Les auteurs tiennent à remercier les médecins ayant participé au registre RECO. REFERENCES 1. Kaluza GL et al. Catastrophic outcomes of noncardiac surgery soon after coronary stenting. J Am Coll Cardiol. 2000;35:1288-94. 2. Wilson SH et al. Clinical outcome of patients undergoing non-cardiac surgery in the two months following coronary stenting. J Am Coll Cardiol. 2003;42:234-40. 3. Nuttall GA et al. Time and cardiac risk of surgery after bare-metal stent percutaneous coronary intervention. Anesthesiology. 2008;109(4):588-95 4. Collet JP et al. Impact of prior use or recent withdrawal of oral antiplatelet agents on acute coronary syndromes. Circulation 2004;110:2361-7. 5. Ferrari E et al. Coronary syndromes following aspirin withdrawal: a special risk for late stent thrombosis. J Am Coll Cardiol 2005.;45:456-9. 6. Le tourneau I et al. Evolution of interventional cardiology in France during the last decade (1991-2000). Arch Mal Coeur Vaiss 2002;95:1188-94 7. Schouten O et al. Noncardiac Surgery After Coronary Stenting: Early Surgery and Interruption of Antiplatelet Therapy Are Associated With an Increase in Major Adverse Cardiac Events. JACC 2007. 49(1):122 5. 8. Iakovou I et al. Incidence, predictors, and outcome of thrombosis after successful implantation of drug-eluting stents. JAMA 2005;293:2126-30. 9. Marret E et al. Thrombosis after implantation of drug-eluting stents. JAMA 2006; 295:36 10. Fleron MH, et al. Chirurgie générale et endoprothèse coronaire : pensez au sirolimus! Annales françaises d'anesthésie et de Réanimation 2003;22:733-5.

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11 Figure 1. Roue de la qualité développée à partir du modèle décrit par WE Deming

12 Figure 2 : Eléments constitutifs du programme EPP développé à partir des registres, observatoire et bases de données

13 Figure 3 : Histogramme de la date de pose et du type de stents chez les 250 premiers patients inclus. (n) 90 80 70 Non connu actif nu 60 50 40 30 20 10 0 0-12 12-24 24-36 36-48 48-60 >60 Délai entre la pose du stent et l'intervention (mois)

14 Figure 4 : Discussion collégiale et type de stent % 80 70 Discussion pluridisciplinaire Avec le cardiologue Avec l'opérateur P<0,05 Chi2 pour chaque item 60 50 40 30 20 10 0 Stents actifs Stents nus Stents non connus

15 Figure 5 : Répartition des actes sur les premiers patients inclus 30% 25% 20% 15% 10% 5% 0% Digestive Endoscopie digestive Orthopédie Urologie Vasculaire ORL Stomato OPH Thoracique Neurochirurgie Gynécologie Autre