Les nouveaux défis de la Conformité : cadre réglementaire, responsabilités et organisation Des responsabilités toujours renforcée & des sanctions alourdies JÉRÉMIE DUHAMEL Jeudi 28 mai 2015
Un contexte difficile Etat des lieux des sanctions subies par les établissements financiers Places Financières Années Montant total des sanctions pécuniaires Luxembourg 2011 330 875 Suite à la crise financière, constat général de la multiplication des litiges financiers dans le monde pour dissuader des comportements répréhensibles des établissements financiers En France, 2014 est l année qui a enregistré le montant cumulé le plus important de sanctions financières : 2012 562 375 2013 667 650 2014 722 000 Irlande 2011 5 050 000 2012 8 500 000 AMF : 24 décisions ont prononcé environ 33 millions d euros ACPR : 7 décisions totalisent plus de 102 millions d euros 2013 6 350 000 Espagne 2011 15 406 000 2012 24 404 000 L amende la plus lourde prononcée par la Commission des sanctions de l AMF : 8 000 000 (SAN 05/04/2014 Elliot Advisors UK Ltd et Elliot Management Corporation) L amende la plus lourde prononcée par la Commission des sanctions de l ACPR : 50 000 000 contre Allianz Vie (secteur assurance) 2013 4 150 000 Italie 2011 7 800 000 2012 10 000 000 2013 32 500 000 France 2011 8 505 000 Constat d une augmentation du nombre d accords de composition administrative homologués en 2014 : 9 contre 3 en 2013 qui est un outil permettant d échapper aux sanctions lourdes prononcées par la Commission des sanctions de l AMF. 2012 18 719 000 2013 46 260 000 2014 134 993 500 Royaume-Uni 2011 91 359 251 2012 430 277 142 2013 655 266 493 2014 2 031 311 599 2
Un contexte difficile Etat des lieux de la «pénalisation» des activités bancaires et financières Elargissement des personnes répréhensibles Condamnation quasi-systématique du dirigeant devant l AMF en cas de manquement et mise en cause fréquente du système de contrôle interne Renforcement de moyens de poursuite Création du Parquet National Financier (en 2013), intensification des travaux de l AMF et de l ACPR, Extension du domaine des infractions bancaires et financières en corrélation avec les nouvelles obligations issues des directives et règlements européens AIFM, MIF II, EMIR, UCITS V, Solvabilité II, Bale II & III Augmentation du nombre de sanctions et alourdissement de leur quantum Des chiffres en progression constante et des plafonds de sanction régulièrement relevés 3
1. Les dispositifs de contrôle et de conformité au cœur des commissions des sanctions de l AMF et de l ACPR Condamnation récurrente des établissements financiers par l ACPR ou l AMF pour défaillance ou insuffisance du dispositif de contrôle interne ou de conformité. (CS ACPR, 26 janvier 2015 Société Bank of Africa, CS ACPR 11 avril 2014 Société Générale et CS AMF, 12 janvier 2015, Société Raymond James Asset Management International) Constat sur la période 2014-2015 de la jurisprudence AMF : l AMF retient quasi systématiquement une carence ou une insuffisance du dispositif de contrôle interne et de conformité en cas de manquements aux obligations professionnelles retenus (CS AMF, 12 janvier 2015, Société RJAMI, sanctions 110 000 contre la SGP, 25 000 contre le PDG et 60 000 contre le salarié) Imputabilité des manquements Aux institutions financières devant l ACPR et de l AMF en raison des manquements commis par ses préposés et collaborateurs Présomption simple : l établissement financier peut s exonérer de sa responsabilité en démontrant qu il a «adopté et effectivement mise en œuvre des modes de fonctionnement et d organisation de nature à prévenir et à détecter les manquements professionnels de ses préposés» Il appartient alors à l établissement de démontrer qu il a mis en place une organisation répondant aux obligations mises à sa charge par la réglementation et que son préposé n a délibérément pas respecté ces procédures, en sortant du cadre de ses fonctions. L imputabilité du manquement au dirigeant devant l AMF : Constat d une condamnation systématique des dirigeants par la commission des sanctions de l AMF (blâme, avertissement, sanction pécuniaire) 4
1. Les dispositifs de contrôle et de conformité au cœur des commissions des sanctions de l AMF et de l ACPR Rappel de la définition (très large) du manquement devant l ACPR et devant l AMF (Art. L.621-14 à L.621-15 et L.612-39 à L.612-40 du CMF) : «Toute infraction ou tout manquement à leurs obligations professionnelles issues des dispositions européennes, législatives, règlementaires, aux codes de conduites professionnels, du non respect des conditions particulières ou des engagements pris lors de la demande d agrément Etat des lieux sur la période 2014-2015, les manquements retenus par l ACPR : Défaillance du dispositif de contrôle et insuffisance des moyens pour la réalisation du contrôle périodique (CS ACPR, 11 avril 2014, Société Générale, une sanction de 2 000 000 et un blâme c/ la banque) Lacunes dans l organisation du dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (lacunes dans la classification des risques, défaut d actualisation des procédures internes etc ) (CS ACPR 26 janvier 2015, Société Cards Off SA sanction de 100 000 et un avertissement c/ l établissement de crédit) Insuffisance des moyens dédiés au contrôle permanent de la conformité, de la filière risques et du dispositif de LCB-FT (CS ACPR, 11 février 2015, State Bank of India, une sanction de 300 000 et un blâme c/ la banque) 5
1. Les dispositifs de contrôle et de conformité au cœur des commissions des sanctions de l AMF et de l ACPR Sur la période 2014-2015, les manquements professionnels récurrents retenus par l AMF : Absence de procédures de contrôle interne et de conformité permettant d exercer ses activités dans le respect de ses obligations professionnelles (CS AMF, 17 octobre 2014, Société MBC, sanction de 250 000 c/ de SGP et 50 000 d amendes et un blâme c/ le dirigeant) Insuffisance des dispositifs de contrôle tirée de l existence des manquements aux obligations professionnelles de la société de gestion (CS AMF, 12 janvier 2015, Société RJAMI, sanctions 110 000 contre la SGP, 25 000 contre le PDG et 60 000 contre le salarié) Absence d utilisation de moyens techniques et humains suffisants afin d assurer des contrôles efficaces (CS AMF, 17 octobre 2014, Société MBC, sanction de 250 000 c/ SGP et 50 000 et un blâme c/ le PDG) Insuffisances en matière de contrôle interne: absence de contrôle des performances des comptes de gestion sous mandat et du service de RTO pour compte de tiers, absence de contrôle des ratios, des contraintes d investissement et des taux de rotation de portefeuille (CS AMF, 23 décembre 2014, Société 2020 Patrimoine, sanction de 150 000 et un blâme c/ la SGP et 75 000 d amende c/ le PDG) 6
Millions 1. Les dispositifs de contrôle et de conformité au cœur des commissions des sanctions de l AMF et de l ACPR Montant cumulé des sanctions pécuniaires prononcées par l ACPR depuis 2011 Synthèse des sanctions prononcées par l AMF depuis 2011 : 35 120000 30 100000 80000 60000 40000 Enmilliers d'euros 25 20 15 10 5 Montant total des sanctions pécuniaires c/ PP Montant total des sanctions pécuniaires c/ PM 20000 0 2011 2012 2013 2014 0 120 2011 2012 2013 2014 100 80 Nombre de compositions administratives 60 40 20 Nombre de sanctions non-pécuniaires prononcées Nombre de sanctions pécuniaires prononcées 0 2011 2012 2013 2014 7
2. Quelles leçons tirer? Quels enjeux pour la conformité de demain? La disparition des frontières dans l appréciation du risque de non-conformité : Risque plus élevé pour les institutions financières internationales. Le concept «Too Big to fail» devient «Too Big to Manage» Les leçons des affaires médiatiques de BNP Paribas en juin 2014 et de Commerzbank en mars 2015 : Manquements reprochés à BNP Paribas: défaillance du dispositif de LCB-FT car violation des sanctions financières américaines (embargos, gel des avoir) vs de l Iran, Cuba et Soudan, non respect des obligations de LCB-FT par BNP Paribas Suisse, BNP Paribas SA (Paris), BNP Paribas NY pour les activités de financement d activités liées aux matières premières, service de compensation des transactions en dollars (règlementlivraison) et l émission d instruments de crédit en dollars ; Critère d extraterritorialité des législations américaines en cause pour sanctionner les établissements basés à Paris et en Suisse : réalisation de transferts interbancaires en dollars obligatoirement par le biais d une chambre de compensation située aux Etats-Unis. Cette opération de compensation sur le sol américain des transactions en dollars permet aux autorités américaines d être compétentes pour connaître des agissements de la BNP et appliquer les législations américaines alors même que les transactions n avaient pas eu lieu sur le territoire des Etats-Unis. La maitrise du risque de non-conformité passe par : Une maitrise parfaite de la réglementation, y compris étrangère ; Un dispositif de procédures complet, régulièrement mis à jour, et mis en œuvre de manière continue ; Des procédures de mise en conformité des carences identifiées et de gestion des crises ; La formation des collaborateurs opérationnels. 8
2. Quelles leçons tirer? Quels enjeux pour la conformité de demain? Le nouveau cadre juridictionnel financier suite à l arrêt Grande Stevens et autres c/ Italie de la CEDH : Rappel sur la portée de l arrêt et son prolongement au niveau de Conseil constitutionnel Les propositions formulées par l AMF pour réformer le cadre juridictionnel et se mettre en conformité avec les exigences européennes Quelques questions sur la «Conformité» de demain : Quelle convergence des sanctions pénales et disciplinaires? les peines d emprisonnement seront-elles plus fréquentes? Le montant des amendes en France atteindra-t-il ce qu on observe au Royaume-Uni? Quelles conséquences cela aurait sur l importance de la fonction conformité au sein des établissements ou sur les polices d assurance? Les personnes en charge du contrôle interne et de la conformité verront-elles leur responsabilité engagée? Quels seront les outils pour limiter et maitriser le risque de sanction? 9
Jérémie DUHAMEL Avocat Associé jduhamel@duhamel-blimbaum.com Tél. : +33 (0)1 82 83 74 50 DUHAMEL BLIMBAUM AARPI 92, rue de Richelieu - 75002 Paris Tél. : +33 (0)1 82 83 74 50 www.duhamel-blimbaum.com