UN DOSSIER SPÉCIAL DE Haute-Normandie Une ambition ferroviaire
DOSSIER SPÉCIAL Histoire d une ambition La Région Haute-Normandie a construit sa politique des transports sur des investissements conséquents en matériel, sur un système de billettique innovant et sur une tarification incitative. Revue de détails de plus de dix ans d action. Sommaire Une ambition ferroviaire Histoire d une ambition Un «plan gare» à l horizon 2015 Comme pour toutes les Régions de France, le transfert par l Etat de la compétence transport, effectif en 2002, a été un tournant majeur pour la Haute-Normandie. Il a fallu prendre à bras-le-corps un secteur, tout en composant avec les partenaires historiques, notamment dans le ferroviaire : SNCF, pour la billettique et le matériel, et Réseau ferré de France (RFF), pour les voies. A cela s ajoutait une réalité complexe, géographique et socio-économique : bien que plus longue (200 km de Verneuil-sur-Avre au Tréport) que large (165 km de Gisors au Havre), la Haute- Normandie est un territoire structuré transversalement par la Seine. L axe Paris - Rouen - Le Havre est, de plus, le premier complexe portuaire de France, générant un flux ininterrompu, entre terre, fleuve et fer, de camions, de barges et de trains de marchandises. Et cela va s amplifier puisque le trafic de conteneurs du port du Havre devrait doubler voire tripler dans les prochaines années, grâce aux installations de Port 2000. Au cœur de ce réseau dense, Rouen est une sorte de «hub» vers lequel tout converge et tout diverge, en étoile. La métropole s est transformée au fil des décennies en un nœud de déplacements particulièrement inextricable, que seul le projet de Ligne nouvelle Paris - Normandie (LNPN) saura délier. Avant de voir enfin la LNPN sur de bons rails (voir p. VI), la priorité de la Région, durant les dix dernières années, a été de rénover et de renouveler le matériel vieillissant. Elle a investi 400 millions d euros dans ce programme ambitieux et, depuis 2010, 100 % Entretien avec Nicolas Mayer-Rossignol, président de la Région : p. II p. III «La Haute-Normandie sera au rendez-vous» p. IV LNPN : Retour à la ligne p. VI Atoumod, chronique d un succès p. VI Une nouvelle gare à Rouen p. VIII des trains sont neufs ou modernisés. Seize rames TER à 2 niveaux de nouvelle génération, confortables et de grande capacité, ont été acquises, pour la ligne Rouen - Paris. La Région est même allée au-delà de ses compétences, circonscrites aux TER, en modernisant la moitié des voitures Corail de la ligne Paris - Rouen - Le Havre, la SNCF prenant en charge l autre moitié. Depuis 2004, 33 automoteurs de grande capacité (24 rames électriques et 9 rames bimode-bicourant) ont aussi été mis en service, contribuant à réduire le temps de trajet sur les tronçons Rouen - Le Havre, Rouen - Serqueux - Amiens et Rouen - Vernon - Mantes. Dix autorails X 73500 de 80 places sont venus compléter l offre sur des axes moins fréquentés, Bréauté - Fécamp ou la Lézard Express Régionale (LER), qui relie Le Havre - Montivilliers - Rolleville. D ici à la fin 2015, dix rames Régiolis, trains de nouvelle génération cousins des trains à grande vitesse, ont enfin été commandées, pour une facture de 74 millions d euros. Atoumod et H N Go Mais toute la politique des transports de la Région ne se résume pas à du matériel. En décembre 2008, elle a été l une des premières Régions de France, après Rhône-Alpes et le sud de la Bourgogne, à procéder au cadencement de ses TER, en partenariat avec SNCF. C est l un des éléments qui ont permis d augmenter de 14 % le nombre de voyageurs entre 2010 et 2012 pour atteindre 184 000 par semaine. Les VR&T COMMUNICATION Directrice générale adjointe Delphine CHÊNE : 01 49 70 12 79 delphine.chene@laviedurail.com Directeur de la publicité ferroviaire Patrick MUZOLF : 01 53 80 74 05 patrick.muzolf@laviedurail.com Directrice de clientèle pôle Mobilités Sabine HORSIN : 01 53 80 74 02 sabine.horsin@laviedurail.com Responsable technique Marie-Line RENAUD : 01 49 70 73 03 maryline.renaud@laviedurail.com Dossier réalisé par Stéphane Méjanès Ce dossier a été écrit et réalisé de manière autonome. Il n a fait l objet d aucune validation. II novembre 2013
En partenariat avec RFF / CAPA / Marie Genel (TOMA) autres concernent la billettique et la tarification. Dans ces domaines, la Région a aussi fait preuve d initiatives et d innovations. Initiée dès 2009, la carte sans contact Atoumod est ainsi entrée en service en janvier 2011, grâce à la mobilisation de l ensemble des Autorités organisatrices de transport (AOT) de la Région. Son déploiement devrait être finalisé avant la fin de l année 2014 (voir encadré p. VI). De façon concomitante au lancement d Atoumod, côté tarification, la grande nouveauté fut la création, par la Région et la SNCF, de la gamme H N Go. Elle se décline aujourd hui en différentes offres, à destination des jeunes de moins de 26 ans, pas seulement les étudiants ou les apprentis mais bien tous ceux qui répondent à ce critère d âge, des actifs par exemple, sans qu il soit besoin de demander une attestation à son employeur. Une carte H N Go Tribu est actuellement en expérimentation pour les lycéens et les collégiens. D une manière générale, H N Go offre des réductions allant de 25 à 50 %, sur les TER ou les Bus Région. Il se révèle aussi un bon outil pour favoriser ponctuellement l accès du plus grand nombre à la culture et aux loisirs. La mer à un euro, par exemple, pour les plus défavorisés, ou H N Go loisirs, pour se rendre sur des lieux de concerts ou de grands événements comme l Armada, à Rouen, traditionnel rassemblement des plus beaux et des plus grands voiliers. Mais derrière tout cela, il y a surtout la formidable réussite du dialogue, de tous les dialogues, y compris entre des systèmes informatiques qui étaient censés ne jamais pouvoir se parler, ceux de la Région et de SNCF. Ce n est pas là la moindre réussite d une politique des transports particulièrement volontariste. Un «plan gare» à l horizon 2015 Le nombre de voyageurs dans les TER a augmenté de 14 % entre 2010 et 2012. Elus et techniciens de la Région le disent sans détour, côté gares, ça n a «pas avancé très vite». Depuis le transfert de la compétence transport, en 2002, les efforts se sont en effet concentrés sur le réseau, le matériel et les services. Le «plan gare 2012-2015», adopté en mars par l assemblée régionale, doit rattraper le temps perdu. Difficulté : la Région n est pas maître d ouvrage. SNCF, RFF et collectivités locales, doivent se mettre d accord. En apportant 75 % du financement des travaux, la Région sait se montrer persuasive. Mailler le territoire est un enjeu qui le vaut bien. D ores et déjà, sur 70 gares et haltes ferroviaires, 18 ont bénéficié d équipements légers, notamment en faveur des personnes à mobilité réduite (PMR), avec des places de stationnement dédiées, des bandes d éveil vigilance sur les quais et des manchons en braille et relief sur les rampes. Des afficheurs d informations voyageurs et des abris à vélo sécurisés font aussi partie du programme, pour lequel la Région débloque 320 000 euros par projet. Une coopération avec la Picardie est aussi en cours pour six gares empruntées par des usagers des deux Régions. Pour les aménagements plus importants, des études sont en cours. Elles concernent 11 sites identifiés pour leur caractère stratégique en termes d aménagement du territoire : Barentin/Pavilly, Auffay, Yvetot, Fécamp, Serqueux, Gournay-Ferrières, Conches-en-Ouche, Blangy-sur-Bresle, Eu, Bréauté-Beuzeville, et Elbeuf-Saint-Aubin. novembre 2013 III
DOSSIER SPÉCIAL Entretien avec Nicolas Mayer-Rossignol, président de la Région Haute-Normandie «La Région Haute-Normandie sera au rendez-vous» Nicolas Mayer-Rossignol vient d être élu président de la Région Haute-Normandie, en remplacement d Alain Le Vern, démissionnaire. Il s est mis aussitôt au travail, notamment sur la question des transports, l un des enjeux majeurs de ce territoire. Entretien. Vous avez succédé à Alain Le Vern à la tête de la Région, qu est-ce que cela change? Nicolas Mayer-Rossignol. Le contrat passé avec les Haut-Normands et qui détermine les politiques de la Région, n a pas été défini le lundi 14 octobre 2013 lors de mon élection, il l a été en mars 2010 au moment de l élection régionale. Ce contrat, c est la feuille de route. Ce n est pas juste une histoire de continuité, c est simplement le respect de la démocratie que de le mettre en œuvre jusqu au bout du mandat. Que pensez-vous du plan d investissement pour les transports présenté le 9 juillet 2013 par Jean-Marc Ayrault, à la suite des travaux de la commission Mobilité 21? N. M.-R. Nous avions été choqués de la façon dont ce sujet avait été instrumentalisé politiquement par le gouvernement précédent, avec un schéma national des infrastructures de David Morganti transports (Snit) à 245 milliards d euros. Après cette «liste au Père Noël», nous sommes passés à quelque chose d adulte, qui n est pas contraire à l ambition mais qui est la condition de l ambition. L action des élus locaux rassemblés a permis que, dans les priorités retenues, la Haute-Normandie figure au premier plan, avec la Ligne nouvelle Paris - Normandie (LNPN), la ligne Serqueux - Gisors, la liaison routière A28-A13. Il faut ajouter à cela la nomination d un délégué interministériel au Développement de la vallée de la Seine, François Philizot. Maintenant, il faut le traduire dans les actes, en passant par la contractualisation, le contrat de projets Etat-Région, et le contrat de projets interrégional Etat-Régions «Vallée de la Seine» que j appelle de mes vœux. La discussion vient de s engager, je ne fais pas de procès d intention, on verra bien. Ce que je peux dire, c est que la Région Haute-Normandie sera au rendez-vous, comme elle l a toujours été durant les 15 ans qui viennent de s écouler. Quelle place tient le transport dans la politique d une Région? N. M.-R. La politique des transports résume la philosophie d une collectivité telle que la Région. C est à la fois le quotidien et l avenir. Le quotidien, c est la ponctualité des trains, la régularité, l intermodalité, la simplicité de la billettique, de l utilisation du service, le confort, la qualité du matériel roulant. L avenir, c est la maintenance de l existant, les investissements pour développer de nouvelles structures utiles, les gares, la LNPN, le développement de la vallée de la Seine au sens large, l interconnexion entre la vallée de la Seine et le réseau haut-normand, au nord vers Dieppe, au sud vers Evreux ou Bernay. J ai dit dans mon premier discours que l horizon stratégique de cette Région, c est de devenir l une des pre- IV novembre 2013
En partenariat avec Hugues-Marie Duclos mières écorégions de France. En matière de transport, c est faire en sorte que le développement de notre réseau, de notre offre de service public de transport, contribue à l activité, à l emploi, et en même temps à la qualité de vie et à l attractivité de la Région. Dans ce cadre, l axe structurant, c est la vallée de la Seine, notre épine dorsale, notre lieu, notre lien, le cœur battant de notre territoire. La priorité, c est de le développer, à la fois pour les voyageurs et pour le fret puisque l axe Paris - Rouen - Le Havre est le premier complexe portuaire de France. Nous sommes aussi l une des toutes premières Régions françaises pour l utilisation des modes ferroviaires et fluviaux dans le transport de marchandises. C est bon pour l écologie, bon pour la planète, bon pour l économie. L enjeu derrière tout cela, c est l emploi. Tout cela coûte beaucoup d argent. Comment faire? N. M.-R. Je résume souvent ma philosophie budgétaire d une formule : ambition rime avec bonne gestion. Parfois on oppose les deux, c est absurde et dangereux. Vous ne pouvez pas mener de politique, ni de gauche ni de droite, si vous n avez pas de marge de manœuvre. Et vous n avez pas de marge de manœuvre si vous n êtes pas capable de gérer sérieusement l argent public. Tout le reste, c est de la littérature. C est l un des legs les plus importants que m a laissé mon prédécesseur : la Région est bien gérée. Nous avons une capacité de désendettement inférieure à une année, une capacité d investissement de plusieurs centaines de millions d euros par an, et avons commencé depuis plusieurs années à provisionner de l argent pour la LNPN. Nous nous mettons en situation budgétaire d être politiquement ambitieux. Au moment de remettre votre mandat en jeu, en 2015, qu aimeriez-vous avoir déjà accompli? N. M.-R. J aimerais qu alors, plus de Haut- Normands utilisent des transports en commun, en particulier les TER, que la qualité de ces transports soit encore meilleure, en régularité et en confort, que le plan gare ait pu être mené à bien avec tout ce qui va autour, parkings, transports en commun, accessibilité aux personnes à mobilité réduite. Toute une série de petites choses qui font qu au total, la qualité du service public est au rendez-vous. Moi, ce qui m intéresse, c est d améliorer le quotidien de millions de gens, à la fois en travaillant au présent et en préparant l avenir. Propos recueillis par Stéphane MÉJANÈS La priorité pour la Région : développer l axe structurant, la vallée de la Seine, à la fois pour les voyageurs et le fret. novembre 2013 V
DOSSIER SPÉCIAL LNPN : retour à la ligne Les Haut-Normands ont dû lutter pour garder la Ligne nouvelle Paris - Normandie (LNPN). Elle est aujourd hui une réalité, même s il faudra attendre l horizon 2025 pour l emprunter. Récit. Dans les archives de l hôtel de Région, on garde précieusement cette Une du journal Paris Normandie datant de 1992, et annonçant fièrement l arrivée prochaine d une nouvelle ligne entre Paris et Rouen. Certains esprits malicieux auraient même retrouvé trace d un tel projet vers 1900. Autant dire que, pour beaucoup de Haut-Normands, cette ligne était devenue une sorte de serpent de mer. En 1992, on parlait de Ligne à grande vitesse (LGV). Las, entre 2001 et 2008, il n était plus question que d une liaison rapide Normandie vallée de Seine, qui faisait surtout la part belle à l Ile-de-France. En 2011, coup de théâtre, le gouvernement de l époque lance un grand Schéma national Le projet a été phasé pour le rendre techniquement et budgétairement réalisable des infrastructures de transport (Snit), dont le budget global s élève à 245 milliards d euros. La Ligne nouvelle Paris - Normandie (LNPN) refait surface. Nicolas Sarkozy, alors président de la République, se déplace pour annoncer que Le Havre ne sera plus qu à 1 h 15 de Paris en 2017. «C était l usine à promesses», commente Nicolas Mayer-Rossignol, nouveau président de la Région (voir entretien p. IV). Depuis, la nomination d un délégué interministériel au Développement de la vallée de la Seine, l ancien préfet François Philizot, en avril 2013, a constitué un signe positif. Les travaux de la commission Mobilité 21 (CM21), présidée par Philippe Duron, député-maire de Caen, aussi, en réglant son compte au Snit pharaonique. Mais, Atoumod, chronique d un succès Parmi les outils développés par la Région Haute-Normandie pour améliorer le quotidien en matière de transport, la carte sans contact Atoumod, lancée en janvier 2011, tient une place à part. Un simple morceau de plastique rectangulaire mais avec lequel on peut faire beaucoup. La prouesse de ce système de billettique, c est d avoir été mis en place grâce à la collaboration des 15 autorités organisatrices de transport (AOT), la Région elle-même, les deux départements (Eure et Seine-Maritime) et les 12 autres intervenant sur le territoire. Les derniers chiffres connus sont éloquents : 80 000 personnes sont aujourd hui titulaires d une carte Atoumod, pour une population totale de 1,8 million d habitants en Haute-Normandie. Des usagers qui peuvent charger, sur une même carte, des titres de transport pour voyager sur les réseaux TER, les Bus Région, et les transports en commun des communes et des communautés d agglomération. Le déploiement se poursuit à un rythme soutenu. A la rentrée 2013, les lignes scolaires de Seine-Maritime ont été intégrées mais aussi le réseau Astuce de la Communauté de l agglomération Rouen Elbeuf Austreberthe (CREA). On peut donc désormais emprunter le train puis les bus ou le métro entre Elbeuf et Rouen, avec une seule et même carte. Fin Frédéric Carnuccini - Région Haute-Normandie Quinze autorités organisatrices ont collaboré pour lancer la carte à puce sans contact Atoumod, en janvier 2011. 2014, l ensemble des AOT aura été raccordé. En se dotant récemment d un système d information multimodale (www.atoumod.fr), Atoumod a franchi un autre cap. On peut trouver sur ce site Internet l ensemble des trajets réalisables par le biais des transports collectifs de la Région, optimisés à partir d une adresse ou d un nom de lieu. Les prochains défis sont de rendre possible l achat en ligne et de développer les points de vente mutualisés qui permettront à chacun d acheter son titre de transport aux guichets de toutes les AOT. VI novembre 2013
En partenariat avec Projet de ligne nouvelle Paris-Normandie RFF dans son rapport, rendu le 27 juin 2013, au sujet de la LNPN, la CM21 met d abord l accent sur le désengorgement du Mantois. La construction d une nouvelle gare à Rouen et la liaison entre l A28 et l A13, sont alors inscrites dans un scénario secondaire. Déçu, Jean- Léonce Dupont, sénateur du Calvados, rebaptise l affaire LNPM, pour Ligne nouvelle Paris - Mantes. Mais, le 9 juillet, Jean-Marc Ayrault fait taire les oiseaux de mauvais augure. Il présente un nouveau plan d investissements pour la France, à l horizon 2023. Côté transports, bonne surprise, la LNPN figure en très bonne place, avec ses trois piliers. Savoir raison garder Ce dénouement heureux, on le doit à une mobilisation exceptionnelle des élus des trois Régions concernées, Haute-Normandie, bien sûr, mais aussi Basse-Normandie et Ile-de- France, ainsi qu à celle de l ensemble des acteurs concernés, élus et techniciens. Tous ont travaillé en étroite collaboration avec Réseau ferré de France (RFF), qui a piloté l étude réclamée par la CM21. Outre le jeu collectif, c est aussi le style qui a payé. Loin des budgets exorbitants et totalement irréalistes du Snit de 2011, le projet a été phasé de façon à le rendre techniquement et budgétairement réalisable, sans le vider de son sens mais pour «bâtir un territoire exemplaire et durable» tout en «inversant la spirale de la désindustrialisation et d entraîner avec elle la compétitivité des autres Régions françaises», écrivent les élus à Philippe Duron, le 4 juin 2013. La réalité des usages a aussi primé dans la réflexion des promoteurs de cette nouvelle ligne. Des études menées auprès des voyageurs ont fait ressortir que le gain de temps n est pas le souci premier. Confort, sécurité et régularité sont davantage plébiscités. D autant que, malgré les investissements lourds consentis par les Régions, il faut aujourd hui 15 à 30 minutes de plus qu il y a 30 ans pour relier Rouen, Le Havre, Caen ou Cherbourg, à Paris. Exit la grande vitesse, donc, d autant plus inutile que les distances sont relativement courtes. On perd en accélération et en décélération ce que l on a tenté de gagner en roulant à vive allure. novembre 2013 VII
DOSSIER SPÉCIAL L objectif consiste notamment à améliorer la régularité, accroître la fréquence et créer de nouvelles dessertes. Le scénario retenu par le gouvernement reprend l essentiel des conclusions du rapport présenté par RFF qui proposait, dans une première phase, d ici à 2025 et pour un montant de 5,63 milliards d euros, de répondre aux objectifs les plus prioritaires de traitement des sections saturées. L ensemble du projet avait Nicolas Broquedis Region Haute Noermandie été évalué, à l horizon 2030, à 11,24 milliards d euros. «Ces études optimisées démontrent la faisabilité de ce projet en intégrant le contexte budgétaire national. Le calendrier et les coûts sont aujourd hui conformes aux réalités financières et techniques, et tout à fait acceptables sur la période envisagée», expliquaient alors les élus haut-normands et le président de l Association de promotion de la LNPN, Gérard Lissot. Le tout sans perdre de vue les objectifs principaux : réduire les temps de parcours, accroître la robustesse et donc la régularité du trafic, augmenter la fréquence du nombre de trains, et créer de nouvelles dessertes. Le fret n est pas oublié puisque la LNPN permettra de libérer le trafic sur la ligne historique empruntée par les trains de marchandises, notamment grâce à la rénovation complète de la ligne Serqueux - Gisors, fermée en 2009, dont l achèvement par la Région est prévu en 2017, qui offrira un canal de flux alternatif en provenance du port du Havre. Si la phase d études ne fait que commencer, la LNPN n est aujourd hui plus une Arlésienne en pays haut-normand. Une nouvelle gare à Rouen A tous les étages de l hôtel de Région, on insiste bien : «Ne dites pas la gare de Rouen mais la gare à Rouen». Au-delà des éléments de langage, ce distinguo recouvre une réalité qui dépasse les éventuelles querelles de clochers. Ce dossier, retenu dans le cadre de la Ligne nouvelle Paris - Normandie (LNPN) parmi les priorités annoncées le 9 juillet 2013 par Jean-Marc Ayrault, à la suite du rapport de la commission Mobilité 21, est un projet régional et pas municipal. Pour le comprendre, il suffit de regarder une carte des nœuds ferroviaires de Haute-Normandie pour constater que Rouen est couvert par un gros point noir. La vénérable gare Rouen- Rive-Droite, inaugurée en 1847, magnifiquement rebâtie dans le style Art nouveau entre 1912 et 1924, est saturée. Sans parler de son accessibilité compliquée, via un pont et deux tunnels. Pour accueillir le trafic de la future LNPN, c est un retour aux sources qui se prépare. La gare actuelle ne disparaîtra pas mais une nouvelle sera construite rive gauche, dans le quartier Saint-Sever, là où le premier train arriva de Paris le 9 mai 1843 après 4 h 56 de trajet. Ce nouveau site s est imposé naturellement avec ses friches industrielles qui permettent d assurer une bonne accessibilité et d englober un projet de développement de pôle tertiaire, proche d un autre chantier phare de la ville, l écoquartier Flaubert. Parmi les objectifs, faire rouler des trains plus longs, proposer deux Jim Linwood Saturée et handicapée par un accès compliqué, la gare de Rouen- Rive-Droite n est pas adaptée pour accueillir la LNPN. à quatre trains par heure pour les destinations proches (Elbeuf, Buchy, Barentin, etc.) et un à deux au-delà de 30 km (Le Havre, Vernon, etc.), mais aussi de nouvelles dessertes directes, régionales (Evreux notamment) et nationales, et enfin faire de la place pour les trains de marchandises. Seul petit bémol, le coût, un milliard d euros, alourdi notamment par la nécessité de construire un tunnel sous la Seine. Ouverture prévue entre 2020. VIII novembre 2013