Les cohabitants et l immobilier 3Des cohabitants non mariés achetant ensemble un terrain à bâtir ou une habitation acquièrent ce bien en copropriété. Cela veut dire que le terrain ou l habitation appartient à chacun d eux. L on se trouve en présence d un cas d indivision : le bien n est bien entendu pas divisé de manière visible mais il appartient à deux (voire éventuellement à plusieurs) personnes. 37
Acheter ensemble un bien immobilier Qu en est-il de la police habitation? Dans le cas d une copropriété, la question qui nous vient d emblée à l esprit est de savoir comment sont répartis les droits de propriété. Les deux partenaires peuvent en décider librement. Ils peuvent par exemple opter pour une répartition 50/50, 75/25 etc. Attention : si rien n est convenu, ils sont chacun propriétaire de la moitié. Il est conseillé que chaque copropriétaire assure sa part du bien commun. Dans la pratique, une seule police sera établie dans laquelle les deux partenaires sont désignés comme preneurs d assurance. Il va de soi que cette police est souscrite par les deux partenaires. Quelle clé de répartition est à conseiller? Lorsque le bien immobilier est acquis en contractant un prêt, certains préfèrent partager la propriété en fonction du revenu de chacun. Le revenu détermine en effet la capacité financière des partenaires au remboursement du prêt. Si le bien est acquis en totalité ou en partie avec les ressources propres, l on peut également tenir compte de l apport en espèces de chacun des partenaires. Mieux vaut dans ce cas faire état de cette division de la propriété dans le contrat de vente de gré à gré. Cette mention devra en tout cas figurer dans l acte d achat notarié, faute de quoi chaque partenaire est supposé en être propriétaire pour la moitié. Qui décide de ce qu il adviendra du bien? Un bien acquis en copropriété par deux personnes est géré conjointement par ces deux personnes. Autrement dit : l accord des deux personnes est nécessaire pour vendre la maison, la mettre en location ou la grever d une hypothèque. 38
3 Evitez les droits de succession élevés Que se passe-t-il lorsque des cohabitants non mariés achètent une habitation et qu un des partenaires vient à décéder? Les cohabitants non mariés ne peuvent hériter l un de l autre que s ils ont rédigé un testament l un en faveur de l autre. A défaut, les droits de propriété du partenaire décédé passent à ses héritiers (par exemple parents, enfants). Un testament peut être rédigé et modifié à tout moment. En cas de modifications, ce sera toujours le testament portant la date la plus récente qui sera valable. Remarque 1 : si vous rédigez un autre testament, il se peut que seules soient supprimées du testament précédent les dispositions qui sont contraires ou incompatibles avec les nouvelles dispositions testamentaires. Pour l éviter, vous pouvez reprendre cette formule dans la nouvelle version du testament : Par la présente, je révoque tous les testaments que j ai rédigés avant les présentes dispositions testamentaires, qui constituent la seule expression de mes dernières volontés. Remarque 2 : si le partenaire décédé a des héritiers réservataires des héritiers qui revendiquent une réserve (par exemple conjoint, enfants, parents), l ensemble des biens ne peut pas être légué par testament au partenaire cohabitant. A combien peuvent s élever les droits de succession? Les droits de succession dont sont redevables les cohabitants lorsqu ils ont rédigé un testament l un en faveur de l autre varient en fonction de la Région dans laquelle ils ont leur résidence (Bruxelles, Wallonie ou Flandre) et d une série de conditions. A Bruxelles, un nouveau régime est d application depuis le 1 er janvier 2003 (Ordonnance du 20 décembre 2002, Moniteur belge du 31 décembre 2002). Pour les cohabitants légaux, le tarif varie entre 3% et 30% de la valeur de la succession, en fonction du montant. En ligne directe, entre époux et entre cohabitants légaux, un tarif réduit est également appliqué à la transmission successorale d une habitation familiale : si, au moment de son décès, le défunt avait sa résidence principale depuis au moins cinq ans à l habitation, le tarif normal est réduit d un tiers. Le montant de l habitation familiale pouvant bénéficier de ce tarif réduit est toutefois limité à 250 000 euros. A Bruxelles, ceux qui ne cohabitent pas légalement sont taxés au taux entre étrangers, qui varie entre 40% et 80%. Depuis le 29 novembre 2001, la Wallonie applique les mêmes droits de succession aux cohabitants légaux qu aux époux, à condition qu ils aient rédigé un testament au profit l un de l autre et qu ils aient fait la déclaration de cohabitation légale à la Commune. Les cohabitants doivent avoir déposé la déclaration de cohabitation légale plus d un an avant le décès et avoir le même domicile au moment de l ouverture de la succession. Les cohabitants ne peuvent pas non plus être frères et/ou sœurs, oncle et neveu ou nièce, et tante et neveu ou nièce. Les cohabitants de fait n entrent pas en considération pour le tarif préférentiel applicable entre époux, contrairement au régime appliqué en Flandre. En ligne directe, entre époux et entre cohabitants légaux, des tarifs réduits sont appliqués à la transmission successorale d une habitation familiale si, au moment du décès, le défunt détenait (partiellement) l habitation en pleine propriété et qu il y avait sa résidence principale depuis cinq ans au moins. En Wallonie, ceux qui ne cohabitent pas légalement 39
sont taxés au taux entre étrangers, qui varie entre 30% et 90% *. En Flandre, les droits de succession pour cohabitants légaux ou de fait qui se désignent mutuellement comme héritiers dans un testament enregistré sont assimilés depuis le 1 er janvier 2001 à ceux applicables aux époux. On entend par cohabitants de fait la ou les personnes qui, à l ouverture de la succession, habitaient depuis plus d un an sans interruption avec le défunt dont la succession est ouverte. Il ne s agit donc pas uniquement de partenaires non mariés ou homosexuels, mais aussi de frères et sœurs, d un curé et de sa bonne etc. La cohabitation peut être prouvée au moyen d un extrait du registre de la population indiquant que le défunt et le partenaire survivant ont été inscrits à la même adresse pendant toute l année au moins qui a précédé le décès. De même, le survivant doit prouver que pendant tout ce temps, il a fait ménage en commun avec le défunt, ce qui implique notamment qu ils partageaient aussi les frais du ménage. La cohabitation légale n est applicable qu à deux personnes (pas plus!) qui en font le choix explicite. Les conditions applicables sont toutefois que les deux cohabitants doivent déclarer leur volonté de cohabiter légalement; qu aucun des partenaires n est marié ni ne cohabite déjà légalement avec une autre personne et que les deux partenaires aient la capacité de contracter. La déclaration de cohabitation légale doit être enregistrée par écrit par le fonctionnaire de l état civil de la commune où le domicile commun est établi et doit répondre à certaines exigences sur le plan de la forme. Depuis le 1 er janvier 2007, la Flandre applique le taux nul sur la part de l habitation familiale dont hérite le conjoint ou le cohabitant survivant. Le régime s applique exclusivement au bien qui servait d habitation familiale au défunt et à son conjoint/cohabitant au moment du décès. Les cohabitants de fait ne peuvent bénéficier de l exonération que s ils ont habité ensemble pendant trois ans. Les cohabitants légaux ne sont pas soumis à cette restriction concernant le délai de cohabitation. Pour les autres cohabitants, la Flandre applique le taux entre étrangers, qui varie entre 45% et 65%. Qu en est-il des donations? Les cohabitants peuvent se léguer un bien immobilier par acte de donation notarié. Dans ce cas, les droits d enregistrement doivent être payés. A Bruxelles, les taux appliqués aux cohabitants légaux vont de 3% à 30%. En ligne directe, entre conjoints et entre cohabitants légaux, la donation de l habitation familiale est soumise à un taux moins élevé. Si toutes les conditions sont réunies, le tarif normal est réduit d un tiers. Le montant de l habitation familiale pouvant bénéficier de ce tarif réduit est toutefois limité à 250 000 euros. Ceux qui ne cohabitent pas légalement sont soumis à des taux allant de 40% à 80%. En Wallonie, les taux appliqués aux cohabitants légaux vont de 3% à 30%. Des tarifs réduits et des exonérations sont appliqués à la donation d une (partie de l ) habitation familiale si le donateur détenait (partiellement) l habitation en pleine propriété et qu il y avait sa résidence principale depuis cinq ans au moins. D autres payent entre 30% et 90%. En Flandre, la donation d un bien immeuble entre cohabitants légaux et de fait est taxée à des taux variant entre 3% et 30%. D autres payent entre 30% et 80%. * Après un arrêt de la Cour d arbitrage, le taux maximum est de 80% dans la pratique. Le Gouvernement wallon est occupé à modifier la législation. 40
3 Attention : si la donation du bien immobilier est effectuée dans les trois ans précédant le décès, la valeur est prise en compte pour le calcul des droits de succession. Dans ce cas, les droits d enregistrement déjà payés sont bien entendu déduits des droits de succession dus. Si, dans les trois ans qui suivent une donation, un autre bien immeuble fait l objet d une donation, la valeur de la première donation est prise en compte pour fixer le tarif de donation. Dans ce cas, le tarif sera généralement plus élevé et les droits de donation augmenteront. L acte notarié de donation doit être déposé au bureau d enregistrement des impôts. Pour être opposable aux tiers, l acte de donation doit également être transcrit dans les registres du conservateur des hypothèques. Régimes spéciaux : la tontine et la clause d accroissement Dans certains cas, il est plus intéressant pour les cohabitants d acheter un bien immobilier avec application de la tontine ou avec application de la clause d accroissement. Ces solutions consistent à conclure pour l achat commun d un bien immeuble une convention attribuant la part du prémourant au survivant. A ce moment, ce dernier ne paiera pas de droits de succession, mais bien des droits d enregistrement sur la part du défunt. La tontine est un moyen légal que les cohabitants peuvent utiliser pour éviter qu un bien précis revienne aux héritiers ayant droit à une part réservée de l héritage. Il peut s agir de : simples cohabitants qui achètent ensemble un bien immobilier; cohabitants qui sont tous les deux divorcés et qui souhaitent exclure leurs enfants de l héritage d un bien immobilier acheté conjointement avec leur nouveau partenaire; frères et sœurs qui ont acheté ensemble une maison ou un appartement; autres (amis etc.) qui achètent conjointement un bien immobilier. Limites La tontine présente une série de limitations pour lesquelles des solutions peuvent le plus souvent être trouvées. Tout d abord, la clause doit figurer dans l acte d achat notarié. C est encore mieux si vous l avez déjà fait figurer dans le contrat de vente de gré à gré. Si vous avez déjà acheté par le passé un bien immobilier ensemble sans clause de tontine, il est donc trop tard. 41
Vous pouvez éventuellement encore faire adapter cet achat réalisé dans le passé en prévoyant une clause d accroissement, une variante de la tontine. Cette construction est moins sûre que la tontine. Parlez-en dès lors avec votre notaire. Attention : la famille perd tous ses droits En cas de décès, la tontine a pour effet de faire disparaître complètement le bien immobilier du patrimoine de votre famille. Les membres de votre famille ne sont en effet pas des parents de votre partenaire et ils ne pourront ultérieurement faire valoir aucun droit sur votre habitation. Vous pouvez limiter la tontine ou la clause d accroissement à l usufruit. En cas de décès d un des partenaires, l autre peut continuer à occuper l habitation. Il possède en effet sa partie en pleine propriété et hérite de l usufruit de la partie du partenaire décédé. Les enfants issus d un mariage précédent du partenaire décédé héritent la part de leur père ou mère décédé en nuepropriété. Le partenaire survivant peut même continuer à habiter dans l habitation ou la mettre éventuellement en location. Avantage fiscal La tontine limitée à l usufruit offre également un net avantage fiscal. Les droits d enregistrement s appliquent exclusivement à l usufruit transféré. Sa valeur dépend de l âge de l usufruitier. Plus celui-ci est âgé, plus la valeur de l usufruit et, partant, le montant des droits d enregistrement seront faibles. Attention : la tontine de l usufruit n est pas toujours intéressante, par exemple lorsque les biens qui doivent passer au survivant, sont lourdement grevés de dettes et dont le remboursement en cas de décès n est pas assuré par une assurance de solde d emprunt. Autres limitations Des problèmes peuvent également surgir si la relation prend fin. La vente d un bien immeuble nécessite en effet toujours l accord des deux partenaires. Pour qu une clause de tontine entre des cohabitants non mariés (également des parents en ligne directe) soit valable, il faut une certaine égalité dans l espérance de vie et l apport doit être équilibré. C est ainsi que la différence d âge entre le partenaire plus âgé et sa compagne ou son compagnon fixe ou temporaire ne peut pas être trop grande car le fisc risque d aller enquêter pour voir s il ne s agit pas d une donation dissimulée au lieu d une tontine autorisée légalement. Une clause de tontine entre par exemple un homme de 75 ans et une femme de 35 ans est inacceptable pour le fisc à moins que l apport du partenaire plus âgé soit proportionnellement moins élevé que celui de sa compagne plus jeune. Il en va de même s il y a une différence en espérance de vie parce qu un des partenaires est atteint d une maladie grave. Attention : si le contrat est considéré comme une donation, les héritiers réservataires peuvent contester la tontine et le partenaire survivant devra peut-être payer des droits de donation élevés. 42
3 Qu en est-il si vous comptez vous marier par après? Si vous comptez vous marier mais que vous achetez préalablement un bien immobilier, la formule de la tontine n est le plus souvent pas intéressante. Mieux vaut apporter plus tard le bien dans la communauté par le contrat de mariage. Si vous avez acheté un bien immobilier par la formule de la tontine et si, après un certain temps, vous décidez de vous marier, vous pouvez faire supprimer la clause de tontine. L intervention du vendeur est nécessaire toutefois. Conseil : faites insérer dans l acte d achat original une clause irrévocable par laquelle le vendeur vous autorise à modifier ou supprimer la formule de la tontine. Si vous achetez un terrain à bâtir par la voie de la tontine, vous pouvez prévoir que la tontine s appliquera plus tard à l habitation que vous bâtirez sur ce terrain. Si vous avez une préférence pour cette formule, il vaut mieux la faire insérer dans l acte d achat du terrain à bâtir. 43
Cohabitants : L assurance solde d emprunt (voir aussi page 116) Depuis le 1 er janvier 2005, la fiscalité du crédit logement pour la propre et unique habitation et de l assurance vie y afférente a été profondément modifiée (voir aussi chapitre 9). Dans l assurance de solde d emprunt, il convient d indiquer comme bénéficiaires en cas de décès les personnes qui, par suite du décès de l assuré, acquièrent la pleine propriété ou l usufruit de l habitation propre et unique. Il ne faut donc plus indiquer comme bénéficiaire en cas de décès le conjoint, le cohabitant légal ou un parent jusqu au second degré pour pouvoir bénéficier des avantages fiscaux sur les primes. Les cohabitants de fait peuvent aussi bénéficier désormais de l avantage fiscal sur les primes de l assurance vie sans devoir désigner comme bénéficiaire un parent jusqu au second degré. Demandez à votre conseiller CBC si votre assurance solde d emprunt entre en considération pour des avantages fiscaux. Quand la tontine est-elle avantageuse? Vous cohabitez légalement à Bruxelles. Une tontine n est normalement pas intéressante. La tontine sera par contre plus intéressante pour des cohabitants de fait, qui sont soumis à des droits de succession plus élevés. Vous cohabitez en Wallonie. Si vous êtes cohabitant légal, les taux en ligne directe sont applicables et la tontine n a normalement plus d intérêt. La tontine sera par contre plus intéressante pour des cohabitants de fait, qui sont soumis à des droits de succession plus élevés. Vous cohabitez en Flandre et vous envisagez d y rester à long terme. Normalement, vous n avez pas besoin de tontine. Sur la première tranche de 50 000 euros de votre part d héritage en biens immobiliers vous ne paierez que 3% de droits de succession, sur la tranche comprise entre 50 000 euros et 250 000 euros vous paierez 9% et au-delà de 250 000 euros 27%. Sur votre part de l habitation familiale, vous ne payez plus de droits de succession. Vous êtes cohabitants en Flandre mais pour l une ou l autre raison, vous ne souhaitez pas donner un caractère officiel à cette situation. Pour vous, la tontine est la meilleure solution. 44
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