SEMEIOLOGIE CARDIO-VASCULAIRE Acrosyndromes



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SEMEIOLOGIE CARDIO-VASCULAIRE Acrosyndromes Plan de cours I- Physiopathologie... 2 I.1- Rappel anatomique et physiologique... 2 I.2- Les troubles de la vasomotricité... 2 I.3- Mécanismes des acrosyndromes... 2 II- Acrosyndromes vasculaires... 3 II.1- Enquête... 3 II.2- Troubles paroxystiques Phénomène de Raynaud... 3 II.3- Erythermalgie (érythromélalgie)... 5 II.4- Troubles permanents... 5 III- Acrosyndromes non vasculaires... 5 III.1- Algodystrophie... 6 III.2- Syndromes canalaires Syndrome du canal carpien... 6

Tableaux cliniques caractérisés par des manifestations intéressant les extrémités des membres. La plupart sont dus à un trouble paroxystique ou permanent de la vasomotricité. I- Physiopathologie I.1- Rappel anatomique et physiologique 1) Anatomie Dans de nombreux territoires, notamment les extrémités des membres, l anse capillaire est protégée dans le cadre d une unité microcirculatoire par un sphincter dit précapillaire. Selon l ouverture ou non de ce sphincter, le sang emprunte l anse capillaire, ou est court-circuité par un shunt constitué par la métartériole. 2) Régulation La circulation capillaire est régulée par la sommation d influences contraires : a) L autorégulation. La variation de la concentration locale de médiateurs chimiques spécifiques, de nature différente d un organe à l autre, entraîne une vasodilatation ou au contraire une vasoconstriction des artérioles de chaque tissu. Cette régulation prend naissance sur place. Elle a pour objet de répondre aux besoins métaboliques locaux (exemple : besoins nutritifs ou en oxygène). b) La régulation nerveuse. Elle superpose son influence sur la régulation précédente. Elle peut la contrecarrer, et au besoin la submerger.1 c) Mise en jeu. Il en résulte que, selon les exigences, la vasoconstriction ou la vasodilatation prédomine dans les capillaires cutanés des extrémités. - Une vasoconstriction de vigilance, due à la prédominance de l orthosympathique, contribue à l état de base au maintien de la pression artérielle. - Un renforcement de la vasoconstriction superficielle survient en cas d environnement froid, et contribue au maintien de la température centrale. Il peut se traduire par l onglée, manifestation douloureuse et désagréable, mais brève et banale, et restant physiologique. - Des phénomènes comme la chaleur, l effort physique, la digestion, l émotion induisent au contraire une vasodilatation des vaisseaux des extrémités. I.2- Les troubles de la vasomotricité Une vasodilatation excessive, plus ou moins durable accompagne certains états pathologiques.2 Une vasoconstriction artériolaire permanente et diffuse constitue l anomalie fondamentale de l hypertension artérielle (HTA). La peau participe à ce désordre. Un trouble vasomoteur spécifique de l unité microcirculatoire des artérioles des extrémités caractérise les acrosyndromes. I.3- Mécanismes des acrosyndromes Les acrosyndromes ont les caractéristiques suivantes : - Ils sont dus aux mêmes phénomènes que ceux de la régulation physiologique, mais exacerbés, et leur mise en jeu n obéit plus aux conditions normales de cette régulation ; - Ils affectent électivement les extrémités, en particulier les membres supérieurs, ce qu explique la richesse toute particulière, à la fois vasculaire et nerveuse, de la microcirculation digitale ; - Ils sont paroxystiques et volontiers répétitifs, ou bien permanents ; - Ils peuvent traduire une atteinte organique (lésions anatomiques) ou purement fonctionnelle. 1 Le parasympathique a un effet vasodilatateur, par libération d acétylcholine dans la fente synaptique. L ortho-sympathique a un effet vasoconstricteur par action de l adrénaline et de la noradrénaline sur les récepteurs du muscle lisse artériolaire. L adrénaline agit également par l intermédiaire de récepteurs ß pour induire une vasodilatation. 2 Exemples : Fièvre; Inflammation locale (rougeur et chaleur définissent, avec la tuméfaction et la douleur, les signes cardinaux de l inflammation); Hyperthyroïdie (effet de l autorégulation, en réponse à l élévation du métabolisme tissulaire due à l hormone thyroïdienne).

Les facteurs de risque vasculaire. Facteurs non modifiables Vieillissement. Il est responsable d un athérome progressif dit physiologique, avec rigidité artérielle croissante. Sexe. La prépondérance masculine est due à l effet des androgènes. Facteurs modifiables. Ce sont ceux dont un traitement peut prévenir les conséquences. Hypertension artérielle. Sa survenue accélère l apparition des lésions. Elle peut être considérée comme entraînant un vieillissement prématuré des artères. Diabète sucré. Le renforcement de l athérome se surajoute à la microangiopathie. Hypercholestérolémie. Tabagisme. Classification des acrosyndromes Acrosyndromes vasculaires. On désigne ainsi des troubles au cours desquels l anomalie semble être un déréglement local de la microcirculation.3 Acrosyndromes non vasculaires. On désigne ainsi des troubles au cours desquels l anomalie semble siéger à distance, et être de nature neurologique.4 Cette distinction traduit en fait la prédominance, selon le cas, des signes vasculaires ou neurologiques. En réalité, la plupart des formes sont mixtes. II- Acrosyndromes vasculaires II.1- Enquête Les troubles intéressent les mains ou, plus rarement, les pieds. 1) Examen clinique L interrogatoire recherche des circonstances déclenchantes, un rythme saisonnier. Il authentifie l acrosyndrome, en faisant préciser des symptômes souvent paroxystiques : sensation de chaleur (cuisson, brûlure) ou de froid, paresthésies, véritable douleur. Les signes objectifs d examen sont observables en cas de trouble permanent, ou d examen en cours de crise : troubles de la coloration cutanée, modifications de la température superficielle, troubles trophiques. 2) Exploration Manœuvre d Allen. Elle explore la perméabilité des artères radiale et cubitale. Après une interruption du flux sanguin, la main se recolore normalement en 5 secondes. Un retard indique l existence d un trouble. EchoDoppler ; Capillaroscopie. II.2- Troubles paroxystiques Phénomène de Raynaud Bien que de durée brève, ils induisent, du fait de leur caractère répétitif, une gêne fonctionnelle et sociale importante. 1) Phénomène de Raynaud Ischémie paroxystique des extrémités, portant surtout sur un membre supérieur, parfois les deux. Ce trouble affecte principalement les femmes. Fréquence estimée : 5 à 20% de la population. 3 Une vasoconstriction anormale est mise en évidence dans la plupart des cas. Elle n est pas due à l augmentation du tonus orthosympathique, mais à l augmentation de la réactivité du muscle lisse artériolaire à un tonus normal. Elle s accompagne de la libération accrue d agents vasoconstricteurs (endothéline 1) et de la diminution de celle des médiateurs de la vasodilatation. 4 Dans ce cas, le facteur prédominant paraît être au contraire un renforcement du tonus orthosympathique.

a) Etude clinique. Localisation à la main, ou parcellaire à un ou plusieurs doigts. Déclenchement. Favorisé par le froid (l hiver), l humidité, parfois l émotion (mais peut survenir spontanément). Phase syncopale. Vasoconstriction avec occlusion du sphincter précapillaire. Main blanche, sensation de doigts morts, avec souvent anesthésie superficielle. Durée : quelques minutes. Phase asphyxique (ou cyanique). Stagnation veineuse, avec main noire par cyanose. De quelques minutes à une heure. Phase érythermalgique. Vasodilatation réactionnelle avec réouverture du sphincter, d où un flux sanguin excessif dans les boucles capillaires. Recoloration, tuméfaction, douleur intense à type de cuisson (comme dans un œdème inflammatoire). Rétrocession progressive des signes. b) Autres localisations. Plus rarement aux pieds, au nez, aux oreilles. c) Etiologie. Peut rester sans explication. Mais rechercher de principe les formes secondaires : Formes unilatérales : chercher une cause locorégionale : Syndrome du défilé thoracobrachial. Compression de l artère sousclavière dans certaines positions. Diminution du pouls et souffle sousclavier audible lors de certaines manœuvres. Syndrome du marteau hypothénar. Secondaire à la percussion itérative de cette zone. Décrit chez les sportifs. Maladie des vibrations. Succède à des microtraumatismes répétés (perceuse, scie électrique, tronçonneuse). Formes bilatérales : chercher une cause générale : Evoquer en premier la prise de médicaments vasoconstricteurs : - antihypertenseurs (bêtabloqueurs, clonidine : vasoconstriction paradoxale de certains lits) ; - dérivés de l ergot de seigle ( ergotisme ).5 Connectivites.6 Vascularites.7 Hémopathies engendrant une hyperviscosité sanguine : polyglobulie, hyperplaquettose, hypergammaglobulinémie. Artériopathies oblitérantes : - origine athéromateuse, - artériopathie juvénile (maladie de Léo Burger), - embolies intraartérielles. En cas de recherche infructueuse : on conclut à un syndrome de Raynaud primitif, qu on qualifie de Maladie de Raynaud. Surtout la femme jeune, manifestation souvent familiale (prédisposition génétique restant à découvrir). d) Evolution. Handicap variable, lié à : - l intensité de la douleur ; - le caractère volontiers récidivant ; - l apparition possible de nécrose des doigts (ulcérations de la pulpe, hémorragies sousunguéales) en cas de vascularite associée. e) Traitement. Essentiellement préventif : - Protection contre le froid (gants, moufles) ; - Arrêt des médicaments potentiellement vasoconstricteurs ; - Traitement vasodilatateur ; - Interruption impérative de tout tabagisme. Outre son action sur l athérome, le tabagisme renforce le risque de vasoconstriction. 5 Déjà au Moyen-Age, on décrivait le Mal des ardents dû à la prise de seigle contaminé par un champignon parasite, l ergot de seigle. 6 Vous apprendrez plus tard ce que sont le lupus, le syndrome des antiphospholipides, la sclérodermie, la polyarthrite rhumatoïde, le syndrome de Gougerot-Sjögren. 7 Idem pour les cryoglobulinémies et la périartérite noueuse. L hépatite C s accompagne souvent de manifestations viscérales diverses, dont les troubles vasomoteurs. La maladie de Horton est une artériopathie inflammatoire fréquente, dont les localisations sont très diverses.

II.3- Erythermalgie (érythromélalgie)8 Il s agit au contraire d une vasodilatation déclenchée par la chaleur, ce qui constitue une réponse physiologique, mais excessive. a) Etude clinique. - Extrémités devenant chaudes et rouge vif ; - Hyperpulsatilité ; - Brûlure intense, intolérable ; - Durée : crises allant de quelques minutes à quelques heures. b) Etiologie. Décrit au cours des hyperplaquettoses. c) Engelures Trouble très localisé de la pulpe du bout des doigts, survenant lors d une exposition au froid. Compte tenu de la durée de l évolution, il ne s agit pas strictement d un trouble paroxysytique. Manifestations initiales : œdème, puis prurit. Lorsque le réchauffement survient : érythème réactionnel, formation de papules cuisantes, puis apparition de phlycthènes qui évoluent vers la rupture. Plaie à type de crevasse douloureuse, qui cicatrise en 2 à 3 semaines.9 II.4- Troubles permanents 1) Acrocyanose a) Etude clinique. Etat cyanotique permanent des extrémités (du rouge sombre au bleu foncé). Intéresse les mains, les pieds, le nez, les oreilles. Survenue surtout l hiver, au froid, à l humidité, avec renforcement si la ou les mains sont maintenues déclives, immobiles. Rôle favorisant des émotions. Habituellement indolore, avec engourdissement des extrémités, petits élancements. Hyperhidrose palmaire associée. La cyanose s efface à la vitropression (diagnostic différentiel avec un purpura). La recoloration pulpaire survient à la longue, très retardée ; le réchauffement l accélère. b) Mécanisme. Même phénomène de base que dans le syndrome de Raynaud, mais avec spasme conduisant à une stase permanente, sans passage à la phase de vasodilatation. 2) Livedo Aspect cyanosé de la peau, affectant une disposition en réseau, en mailles de filet (réticulée). Surtout autour des genoux, des coudes. Interprété comme une hypersensibilité au froid, mais est aussi présent au cours de certaines maladies générales, et au cours des tableaux de choc. 3) Hyperhidrose palmoplantaire Moiteur permanente des téguments des extrémités (surtout les paumes, les plantes des pieds), par transpiration excessive et permanente, souvent intense, sans liaison avec les conditions atmosphériques. Gêne sociale importante. A l examen : fréquence des troubles vasomoteurs associés : mains rouges et chaudes, ou au contraire décolorées et glacées. Traitement difficile, souvent aléatoire (ionisation) ; le talcage atténue la gêne. III- Acrosyndromes non vasculaires Ils se distinguent des acrosyndromes vasculaires par des troubles trophiques plus importants et le caractère inconstant des signes vasomoteurs.10 8 Erythermalgie : rougeur chaude et douloureuse. Erythromélalgie : douleur et rougeur des extrémités. 9 Les gelures sont quant à elles des lésions souvent graves, de survenue accidentelle, non récidivante, frappant souvent les extrémités (alpinisme, pied de tranchée), plus ou moins étendues et plus ou moins profondes. Elles peuvent aller jusqu à la gangrène. 10 Le caractère artificiel de cette distinction a été indiqué plus haut. Il existe un continuum entre ces diverses expressions. Un syndrome du défilé cervico-thoraco-brachial peut ainsi s exprimer par des signes neurologiques, ou par un authentique syndrome de Raynaud.

III.1- Algodystrophie Secondaire à une atteinte nerveuse. Un stimulus sensitif périphérique induit un influx centripète vers la moëlle. En retour, surviennent des troubles trophiques auxquels s associent des troubles vasomoteurs et ostéoarticulaires.11 a) Etiologie. Essentiellement post-traumatique : - Fracture ; - Après chirurgie ; - Après port d un plâtre. b) Clinique. Signes initiaux. Rougeur, douleur, comme dans un œdème inflammatoire. Sous plâtre, une sensation de striction donne l éveil.12 Evolution : en deux phases sur une durée de 6 à 18 mois. Phase chaude de vasodilatation. Œdème d une région articulaire (coude, poignet, cheville) ou d un membre. Hyperhidrose. Diminution de la mobilité articulaire du fait de l œdème. Phase froide. La peau devient froide, dépilée, atrophique. Rétraction articulaire, avec diminution irréversible de la mobilité. Atteinte des loges musculaires (atrophie). Une déformation du membre en résulte : flessum (ou flexum), doigts en griffe par rétraction des fléchisseurs. c) Explorations. - En phase précoce : scintigraphie : hypervascularisation. - En phase tardive : déminéralisation osseuse. d) Prévention. Prévenir les déformations en luttant contre les raccourcissements (kinésithérapie). III.2- Syndromes canalaires Syndrome du canal carpien a) Etiologie. Compression du nerf médian dans le canal carpien :13 - idiopathique ; - au cours de l hypothyroïdie ; de la grossesse (œdème compressif?) ; - par un dépôt de substance amyloïde qui enserre le nerf dans ce canal non extensible. b) Clinique. Engourdissement ou paresthésies plus ou moins douloureuses intéressant les trois premiers doigts, parfois toute la main. Ressentis surtout la nuit ou au matin, réveillent le sujet. Soulagement immédiat par quelques mouvements de flexion de doigts, de prosupination du poignet. Absence habituelle de signes vasomoteurs. Rarement : syndrome de Raynaud associé. A l examen : rechercher le signe de Tinel : déclenchement de paresthésies par la percussion de la face palmaire du poignet. Exploration : EMG. c) Evolution. Capricieuse. Dans les formes idiopathiques, répétition par périodes ou selon les saisons, correspondant souvent à des efforts inhabituels du membre supérieur et de la main dans la journée qui précède : conduite automobile, couture, golf, bricolage du dimanche (surtout si maniement d une scie, d un engin vibrant, d un outil pesant). En cas d amylose localisée : aggravation, signes fréquents ou permanents, apparition d une atrophie de l éminence thénar. d) Traitement. En cas de gêne marquée : infiltrations, libération chirurgicale du médian. 11 On note une hypervascularisation : - de la synoviale des articulations intéressées, conduisant à la fibrose de la capsule articulaire; - des os, entraînant une fragilisation de ceux-ci. 12 Le syndrome de Volkmann, décrit après fracture du coude, surtout chez l enfant, et favorisé par un plâtre circulaire, correspond à ce phénomène. 13 Un syndrome comparable a été décrit par compression du nerf cubital. Il intéresse les 4 e et 5 e doigts. Une atteinte similaire peut survenir plus rarement aux membres inférieurs (canal tarsien).