BRGM
BUREAU DE RECHERCHES GEOLOGIQUES ET MINIERES DEPARTEMENT GEOLOGIE Service Géologie Appliquée 74j Rue de la Fédération aux Travaux Publics PARIS 15e et aux Substances Utiles OBSERVATIONS GEOLOGIQUES POUR UN PROJET DE GARE SOUTERRAINE DE BANLIEUE, A PARIS - AUSTERLITZ L. FEUGUEUR DS.64.A109 PARIS, le 1er décembre 1964
- 1 - - INTRODUCTION - (Travaux envisagés) Une gare souterraine de banlieue est prévue à PARIS - AUSTERLITZ, pour rendre l'indépendance aux mouvements Grandes Lignes. Actuellement, en effet, les trains express ou rapides partent et arrivent sur le plateau mixte : Banlieue - Grandes Lignes, Les problèmes à résoudre, exploitations et réalisations techniques, sont exposés dans un article paru dans la Revue Générale des Chemins de Fer *, La particularité technique de cette gare souterraine, est qu'elle sera construite sous un faisceau de voies complexes, dans la nappe aquifère, sans interrompre le trafic normal. Les ouvrages devront être étanches, résister aux souspressions, en particulier lors de la remontée du niveau hydros tatique en liaison avec les crues de la Seine, Cependant, nous savons que le réseau métropolitain dans cette région, en particulier la ligne n 10, est construit dans cette nappe et dans des terrains identiques. Il ne semble pas que l'on ait à craindre de graves anomalies de terrains, en raison des expériences acquises par des travaux antérieurs voisins (li gne n 10), et reconnus par une campagne de sondages. *) - Le projet de la gare de banlieue souterraine de Paris - Austerlitz par MM. DAFFA et RABAT - Revue Générale des Chemins de Fer, juillet - août 1964,
- 2 - - GEOLOGIE - STRATIGRAPHIE - (Nature des terrains *) La craie blanche (Campanien) constitue le substratum des terrains tertiaires de Paris. Elle se rencontre à la cote NGF -28 près du P. S. du boulevard de la gare (R. 50YER 1953). Au-dessus, vient le Montien constitué de marnes et calcaires, puis le Sparnacien. essentiellement argilo-ligniteux, avec des bancs de sables intercalés. Le Cuisien sableux n'existe que dans le Nord de Paris. Dans cette région Sud-Est de Paris, le Lutétien repose directement sur les argiles ligniteuses du Sparnacien... Le Lutétien est constitué de calcaires tendres, sableux vers la base. Il devient plus compact au Lutétien moyen pour faire place à des bancs durs alternant avec des marnes et argiles (Luté tien supérieur ou Calcaire à Cérithes), Cet étage se termine par les Marnes et Caillasses (marnes blanchâtres à rognons siliceux). Ces assises seront rencontrées dans les travaux souterrains, sous les alluvions de la Seine (anciennes et modernes). Ces dépsts alluviaux qui recouvrent les assises calcaires et marneuses du Lutétien, débutent par les sables et graviers (alluvions anciennes) et se terminent par des dépots plus fins, argilo-sableux et tourbeux (alluvions modernes). En l'absence des dépôts graveleux de base, les alluvions fines, modernes, peuvent reposer directement sur les marnes du Lutétien terminal. *) Voir la carte géologique 1/50.000 de Paris, et la Géologie de Paris de R. SDYER - 1953, Mémoires pour servir à l'explication de la carte géologique de la France - Paris - Imprimerie Natio nale,
- 3 - - GEOLOGIE - TECTONIQUE - (Structure des terrains) Les assises tertiaires de la gare d'austerlitz sont situées sur le flanc Nord de l'anticlinal de Meudon, Elles sont donc inclinées vers le Nord ou Nord-Est, en direction d'un axe synclinal qui passe à la limite Nord de Paris (Axe synclinal de la Seine ou de Saint-Denis), Le pendage moyen des calcaires à Paris est de 1 ^o (R. SOYER 1953, p. 312). En général, cette pente est beaucoup plus faible (6 à 8 /o. o). La dissolution de niveaux gypseux, la fracturation de certains bancs durs du Lutétien, les phénomènes de décompression sur les pentes pendant les périodes quaternaires, ont provoqué des ondulations secondaires de faible amplitude, Ce sont ces ondulations secondaires qui se rencontrent fréquemment dans les travaux car elles sont à l'échelle des excavations. Ces déformations dans une série très litée et hétérogène, provoquent des f racturations dans les bancs calcaires et des la minages, ou épaississements, dans les assises tendres (marnes ou argiles ), Le plongement des assises tertiaires vers le Nord - Nord- Est, donc des argiles sparnaciennes, détermine un écoulement de la nappe aquifère du Lutétien, dans cette direction, - HYDROGEOLOGIE - Le niveau de la Seine, en période d'étiage, se tient à la cote NGF 26,40, Pendant les périodes de crues, le niveau de la Seine peut atteindre la cote NGF 30, exceptionnellement les
-4- cotes NGF 32 et 33. La crue de 1910 a même atteint la cote NGF 34,10, Pendant les essais de pompage dans la nappe au droit du puits D, à la gare d'austerlitz (période du 16 au 20 juillet 1963), le niveau de la Seine a varié entre les cotes NGF 26,57 et 26,41 (Pont d'austerlitz *). La nappe aquifère a été rencontrée, pour l'ensemble des projets, entre les cotes NGF 27,30 et 27,70. Des essais de pompage ont été effectués dans les sables et graviers des alluvions ancien nes et dans la série des marnes et calcaires du Lutétien supérieur* Dans la zone des sables et graviers le niveau dynamique s'est stabilisé à 12,50 m de profondeur pour un débit de 47 m3/heure (cote NGF 21,12), Dans les piézomètres, le niveau n'était pas encore stabilisé à l'arrêt du pompage (puits A), Dans les trois piézomè tres, les plus près du puits A, le niveau dynamique, après 48 heu res de pompage à 47 m3/heure, était à la cote moyenne NGF de 26,15. Ces piézomètres étaient situés respectivement à 2,29m - 3,B5m et 6,48m du puits A, Des essais ont été effectués également dans les calcaires lités du Lutétien supérieur, zone des travaux en souterrains (puits D), La nappe phréatique a été repérée à 6,46m de profondeur (sous le niveau du quai), c'est-à-dire environ à la cote NGF 27.00 * Un rabattement de 6,5üm s'est établi très rapidement en début de pompage (cote NGF 20,5) pour un débit moyen de 50 m3/heure. Ce niveau est ensuite remonté rapidement en quelques heures pour se maintenir entre les cotes NGF 22,70 et 22,30. * - Mesures effectuées par la Sté Etudes et Travaux de Fondations. ** - Rapport: Etudes Travaux et Fondations du 5 septembre 1963, p. 5.
-5- (rabattement de 4,30m à 4,70m), Il faut toutefois remarquer que le niveau dynamique ne s'est jamais stabilisé correctement même en fin de pompage *, Dès l'arrêt des pompages, la remontée s'est faite en une heure pour une hauteur d'eau légèrement supérieure à 4m, l'équilibre avec le niveau hydrostatique s'est fait ensuite en 15 heures pour la dernière tranche supérieure de D,20m, de la nappe phréatique. Les pointes irrégulières que l'on constate dans la courbe de rabattement montrent bien le caractère irrégulier des venues d'eau dans les calcaires lutétiens. Ce fait est bien net dans la remontée de 1,80m environ obtenue après 24 heures de pompages (cote NGF 20,50 à 22,30). Cette brusque remontée et les fluctuations autour d'une ligne idéale, peuvent être attribuées à un décolmatage des fissures, ou fractures ouvertes, pendant les pompages. La vitesse de remontée d'eau, après l'arrêt des pompes et le faible abaissement du plan d'eau dans les piézomètres, montrent que cette nappe du Lutétien est bien alimentée. L'eau de la nappe des alluvions sera généralement chargée en sulfate de calcium (0,800 gr. par litre) elle peut atteindre 1,164 et même 2,52agi:^*. Cette eau minéralisée nécessitera l'utili sation de ciments spéciaux. La nappe du Lutétien s'écoule du Sud vers le Nord, est drai née par la Seine et sera influencée par la hauteur du niveau d'eau du fleuve, en période de crue. Selon les expériences acquises, il y a un décalage non mesuré dans le temps, entre la décrue et la baisse de la nappe phréatique. Les techniciens en ont tenu compte pour le calcul des souspressions dans les études de construction de la gare souterraine. * - voir courbes de rabattement et de remontée dans le puits D du plan E.T.F./ BE. 931. ** - R, SOYER - Géologie de Paris - 1953, p. 362
-C0NCLU5IDN- Les Marnes et Caillasses et les Calcaires à Cérithes du Lutétien, seront intéressés par les travaux souterrains, près du pont du boulevard de la gare, La gare proprement dite sera ouverte dans les alluvions anciennes et modernes (sables et graviers, sables argileux, tourbes et limons ), Les profils géologiques établis à partir de nombreux sonda ges, interprétés par R. SDYER, sont corrects et aucune modification n'est à apporter. Notons cependant que les assises des calcaires ne seront pas horizontales, certains bancs seront très fracturés. Situés dans la nappe, ils seront très aquifères. Les travaux risquent donc de dégager des fissures primitivement colmatées, au fur et à mesure de l'avancement et d'augmenter le débit des eaux d'exhaure, à éva cuer par pompages. Si les Marnes et Caillasses présentent trop d'irrégularités, par exemple des ondulations de faible amplitude, l'entreprise sera gênée pour la pose des bois de galerie. La base des alluvions n'est pas régulière, les sables et graviers pénètrent parfois, en coin, dans les Marnes et Caillasses sous- jacentes. La rencontre de ces matériaux graveleux aquifères dans la demi-section supérieure du passage souterrain n'est pas exclue. Si de telles indentations sableuses sont rencontrées à proximité des fondations du boulevard de la gare, il faudra prendre des précautions pour éviter des entraînements de sables, Peut-être faudra-t-il conso lider au préalable, par' in j ections, les terrains encaissant les fonda tions des piles, Il serait utile de faire procéder, avant les travaux.
- 7 - à une reconnaissance de ces fondations pour constater l'état de con servation des terrains. Le rabattement de la nappe, par pompage, pourrait provoquer une désagrégation mécanique des assises sableuses ou marneuses. Pour ce qui concerne la gare souterraine proprement dite, une simple objection est à formuler. Lorsqu'on aura atteint les assi ses lutétiennes (niveau de fondation du radier) on ne rencontrera pas un "calcaire" franc, comme le laisse supposer le rapport d'exécu tion de l'entreprise. Le socle lutétien, sous les alluvions, se présen tera plutôt sous l'aspect d'une série d'assiettes empilées et incli nées. C'est donc en partie sur la tranche de ces "assiettes" que sera fondé le radier général horizontal. Il faut savoir également que les bancs de calcaire alternent avec des lits de marnes, et d'argiles. Ces lits argileux ou marneux n'apparaissent pas nettement sur les coupes de sondages. Ceci à cause du mode d'exécution de ces ouvrages; nous savons cependant que cette structure existe par les travaux du métropolitain d'une part et la connaissance que nous avons de cette série, d'autre part, dans les carrières de Paris, D'une manière générale, nous pensons que les travaux sou terrains envisagés pourront être réalisés dans les mêmes conditions que lors du percement de la ligne n 10 du métropolitain. Des venues d'eau plus importantes pourront être rencontrées, mais elles pour raient être neutralisées par des injections. Une augmentation de pom page pendant les travaux n'est pas souhaitable, afin d'éviter d'aug menter la vitesse de circulations d'eau dans les terrains encaissants. Dans certains cas, ces circulations à gros débits pourraient décon solider les assises fracturées et marneuses. Une surveillance géologique paraît nécessaire pendant l'exé cution des travaux. Elle aurait pour but de conseiller l'entreprise pendant le percement, en cas de rencontre d'anomalies géologiques et d'établir un document géotechnique utile, en cas d'incidents ulté- ' rieurs en rapport avec le terrain.