Régime social et fiscal des primes d intéressement Les primes d intéressement constituent pour le salarié un complément de rémunération. Cependant, afin de favoriser la mise en place d un régime d intéressement au sein des entreprises, le législateur a instauré un régime d exonération sociale en faveur de cet élément de rémunération dès lors que certaines conditions sont réunies. Pour ce qui est du régime fiscal, les avantages sont différents selon que les primes d intéressement sont transférées ou non sur un plan d épargne. Régime social En application de l article L. 3312-4 du Code du travail, l intéressement versé aux salariés est exonéré de cotisations sociales tant patronales que salariales, à l exception de la CSG-CRDS et du forfait social. Pour bénéficier de ces exonérations, différentes conditions doivent être réunies. Conditions d exonération en matière sociale Les exonérations sociales sont conditionnées au respect de plusieurs conditions cumulatives. Le non respect de ces conditions fait seulement disparaître le régime d exonération sociale. Les salariés conservent, cependant, leur droit à la prime d intéressement. page 1
Respect du formalisme Tout d abord, l accord d intéressement doit être mis en place selon l une des modalités prévues aux articles L. 3312-5 et L. 3312-8 du Code du travail : en application d un accord de branche ; par accord d entreprise ; par accord entre l'employeur et les représentants d'organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ; par accord conclu au sein du comité d'entreprise ; à la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d'un projet d'accord proposé par l'employeur. L accord d intéressement doit être conclu avant le premier jour de la deuxième moitié de la période de calcul suivant la date de sa prise d effet. Exemple - Pour un exercice civil : conclusion de l accord avant le 1 er juillet de l année N - Pour un exercice 1 er avril de l année N au 31 mars de l année N+1 : conclusion de l accord avant le 1 er octobre de l année N - Pour un exercice 1 er octobre de l année N au 31 mars de l année N+1 : conclusion de l accord avant le 1 er janvier de l année N+1 A titre exceptionnel, dans le cadre de la négociation d un accord d intéressement annuel (dispositif expérimental instauré par la loi de financement rectificative de la Sécurité Sociale pour 2011, n 2011-894 du 28 juillet 2011), l accord peut, pour l année 2011, être conclu jusqu au 31 octobre 2011 lorsque la période de calcul de l intéressement correspond à l exercice civil. L accord d intéressement doit être déposé à la DIRECCTE dans le délai fixé par l article D. 3313-1 du Code du travail. Ainsi, pour ouvrir droit aux exonérations sociales, l accord doit être déposé au plus tard dans les 15 jours suivant sa date limite de conclusion, si aucun délai d opposition ne s applique. Si, au contraire, l accord est soumis pour sa validité à la règle de la nonopposition majoritaire, le délai de 15 jours ne court qu à compter de la fin du délai d opposition. Respect du caractère aléatoire et collectif de l intéressement L accord d intéressement, pour ouvrir droit aux exonérations sociales, doit instituer un intéressement résultant d une formule de calcul liée aux résultats ou aux performances de l entreprise et présentant un caractère aléatoire. page 2
En aucun cas, la formule retenue ne doit garantir aux salariés le versement, chaque année, d une prime d intéressement. L accord d intéressement doit bénéficier à l ensemble des salariés, au sens du Code du travail, de l entreprise. Seule une condition d ancienneté limitée à 3 mois peut exclure des salariés. Par contre, il est admis que l intéressement soit réparti de façon différente entre les salariés. Les critères de répartition sont limitativement énumérés à l article L. 3314-5 du Code du travail : Uniformément ; Proportionnellement aux salaires ; Proportionnellement à la durée de présence dans l entreprise au cours de l exercice de référence ; Sur la base d une prise en compte conjointe de plusieurs de ces critères. Respect du principe de non-substitution Les primes d intéressement ne doivent pas se substituer à un élément de rémunération obligatoire ou en vigueur dans l entreprise. Cependant, la règle de non-substitution ne peut avoir pour effet de remettre en cause les exonérations dès lors qu un délai de 12 mois, entre le dernier versement de l élément de rémunération supprimé et la date d effet de l accord d intéressement, s est écoulé. Respect des plafonds L exonération sociale des primes d intéressement est soumise au respect d un double plafond : Un plafond collectif : le montant global des primes distribuées est plafonné annuellement à 20 % du total des salaires bruts versés à l ensemble des salariés de l entreprise. Un plafond individuel : la prime d intéressement versée à chaque salarié est plafonnée à la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale (soit 18.186 pour 2012). Le non respect de cette deuxième condition ne prive pas le salarié et l employeur de la totalité des exonérations. Seul le montant excédant le plafond sera réintégré dans l assiette des cotisations sociales. page 3
Exonérations des cotisations sociales Pour les salariés Les primes d intéressement n étant pas assimilées à du salaire, elles bénéficient à ce titre d une exonération de : l ensemble des cotisations de sécurité sociale des cotisations alignées, telles que les cotisations de retraite complémentaire et de chômage. Elle reste cependant soumise à la CSG et CRDS, et ce, depuis le 1 er janvier 2012 sur la totalité du versement 1. Le prélèvement de la CSG-CRDS est effectué par l employeur, au moment de la date de versement. Le salarié perçoit ainsi le montant net de son intéressement. Pour l entreprise Tout comme pour les salariés, l intéressement, n ayant pas le caractère de salaire, l entreprise est exonérée des cotisations patronales de sécurité sociale et des cotisations alignées. Cependant, depuis la loi de financement de sécurité sociale pour 2009, les primes d intéressement sont soumises au forfait social (au taux de 8% pour 2012). De même, l intéressement ne donne pas lieu au paiement de congés payés et n entre pas dans l assiette de la taxe sur les salaires et de toutes les contributions assises sur les salaires. Régime fiscal Dès lors que l intéressement respecte les conditions d exonérations sociales énoncées ci-avant (respect du formalisme, respect du caractère aléatoire et collectif, respect du principe de nonsubstitution, respect des plafonds), il ouvre droit, en outre, à des avantages fiscaux, pour l entreprise comme pour les bénéficiaires. Lorsque l entreprise effectue des versements au-delà du montant prévu par l accord d intéressement, elle bénéficie sous certaines conditions d autres avantages fiscaux. Du point de vue de l entreprise Les avantages fiscaux dont bénéficie l entreprise sont différents selon que l intéressement soit versé à des salariés ou à des non-salariés. 1 L abattement de 3% au titre des frais professionnels a été supprimé par la loi de la Sécurité sociale pour 2012. page 4
Cas général : l intéressement est versé à des salariés ou aux dirigeants dans une société soumise à IS Les sommes versées au titre de l intéressement sont déductibles du résultat imposable de l exercice de calcul de l intéressement (qui peut être différent de l exercice de versement). Exemple L intéressement versé en N, mais calculé en fonction de la croissance du chiffre d'affaires, du résultat, de la satisfaction client de N-1 est déductible des résultats de l exercice N-1. Les mandataires sociaux des sociétés soumises à IS (gérant, président, directeur général, membre du directoire), même non salariés, peuvent également bénéficier de l intéressement dans les entreprises ayant au moins un salarié et au plus 250 salariés, si l accord le prévoit. Les sommes versées à ce titre sont également déductibles du résultat. Cas particulier : une partie de l intéressement est versée à des nonsalariés Dans les entreprises non soumises à IS ayant au moins un salarié et au plus 250 salariés, l accord peut prévoir le versement de l intéressement à des personnes non salariées : Exploitant individuel Conjoint collaborateur ou associé Associé d une société de personnes n ayant pas opté pour l IS. Dans ce cas, les sommes versées à ces personnes ne sont déductibles du résultat imposable qu à condition d être affectées à un plan d épargne salariale, et dans la limite de la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale (quel que soit le nombre de bénéficiaires). Exemple Si le chef d entreprise et son conjoint, non salariés, touchent respectivement 15.000 et 5.000 d intéressement au titre de l année 2011 (soit 20.000 au total) et affectent cette somme à un plan d épargne entreprise, l entreprise ne pourra déduire de son résultat que 17.676 (soit la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale en 2011). page 5
Le crédit d impôt intéressement Les accords conclus entre le 4 décembre 2008 et le 31 décembre 2014 ouvrent droit à un crédit d impôt, dont le montant est calculé par rapport au total des primes dues aux salariés. A compter de 2011, le bénéfice du crédit d impôt est réservé aux entreprises employant habituellement moins de 50 salariés et ayant conclu un accord d intéressement. En d autres termes, le bénéfice de ce crédit d impôt est réservé aux entreprises non tenues légalement de conclure un accord de participation. Dès lors, les entreprises employant plus de 50 salariés et ayant signé un accord d intéressement perdent le bénéfice de ce crédit d impôt. A compter du 1 er janvier 2011, la base de calcul résulte de la différence entre : d une part, les primes d intéressement dues au titre de l exercice ; et, d autre part, la moyenne des primes dues au titre de l accord précédent ou, si leur montant est plus élevé, les primes d intéressement dues au titre de l exercice précédent. Le taux du crédit d impôt est de 30% de la base de calcul ainsi déterminé. Pour les entreprises qui mettent en place pour la première fois un accord d intéressement à compter de 2011, le crédit d impôt est égal à 30% des sommes ainsi versées. Par ailleurs, le crédit d'impôt est soumis plafonnement communautaire concernant les aides de minimis de 200.000 sur trois exercices fiscaux. Le crédit d impôt est imputable sur l impôt (IS ou IR) dû au titre de l exercice de calcul de l intéressement. Exemple 1 Une entreprise conclut un accord d intéressement le 1 er janvier 2011 ; elle avait conclu en 2008 un précédent accord, la moyenne des primes dues au titre de cet accord s élevant à 40.000 et le montant dû au titre de 2010 s établissant à 30.000. Si le montant des primes dues au titre de 2011 est égal à 50.000, le crédit d impôt ressort à 3.000, c est-à-dire 30 % de l écart entre 50.000 et 40.000 (moyenne du précédent accord supérieure au montant de l exercice précédent). Exemple 2 Une entreprise conclut pour la première fois un accord d intéressement le 1 er janvier 2011, qui s est traduit par un versement global de 40.000 au titre de 2011. Le crédit d impôt pour cet exercice s établit alors à 12.000 (soit 30% des sommes dues). Pour 2012, si le montant des primes dues s élève à 60.000, le crédit d impôt est égal à 6.000 (soit (60.000 40.000) * 30%). page 6
Du point de vue du bénéficiaire Les avantages fiscaux pour le bénéficiaire sont différents selon que les sommes versées soient affectées ou non à un plan d épargne salariale, et que le bénéficiaire soit salarié ou non salarié. En cas de versement direct à un salarié ou un dirigeant de société soumise à l IS Si les sommes dues au titre de l intéressement sont versées directement au salarié, elles sont considérées comme des salaires, imposées à l impôt sur le revenu (IR) dans les conditions de droit commun. En cas de versement direct à un nonsalarié Les sommes versées à un non salarié (exploitant individuel, conjoint collaborateur ou associé, associé d une société de personnes n ayant pas opté pour l IS) au titre de l intéressement ne sont pas déductibles du résultat imposable en cas de versement direct, elles sont donc soumises à l IR au titre des BIC ou des BNC. En cas d affectation à un plan d épargne salariale Le bénéficiaire de l intéressement (salarié ou non salarié) peut décider d affecter tout ou partie des sommes reçues à un plan d épargne salariale. Les sommes sont alors exonérées d IR, à condition de respecter la durée d indisponibilité propre à chaque plan, et dans la limite de la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale. Les versements complémentaires de l entreprise L entreprise est tenue de verser le montant de l intéressement tel qu il ressort du calcul prévu par l accord. Elle peut également faire des versements complémentaires, qui bénéficient d avantages fiscaux particuliers. Ces versements complémentaires ne peuvent s envisager que lorsque la formule prévue à l accord fait apparaître un intéressement à verser. Le supplément d intéressement L entreprise peut décider d attribuer un supplément d intéressement au titre du dernier exercice clos. Ce supplément d intéressement est réparti selon les mêmes modalités que l accord lui-même, ou par des modalités particulières prévues par l accord (mais en respectant les critères autorisés pour la répartition de l intéressement). page 7
Le montant de ce supplément est libre, mais il ne peut pas dépasser les plafonds suivants : Global : le total de l intéressement et du supplément d intéressement est limité à 20 % des salaires bruts de l'entreprise ; Individuel : pour chaque bénéficiaire, le total de l intéressement et du supplément d intéressement est limité à la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale (soit 18.186 euros pour 2012). Les avantages fiscaux associés au supplément d intéressement sont les mêmes que pour l intéressement lui-même, pour l entreprise comme pour le salarié. L abondement L accord de mise en place d un PEE ou un Perco peut prévoir un abondement des sommes versées dans ces dispositifs. L abondement peut concerner tous les versements effectués ou certains seulement en fonction de leur origine (l intéressement en particulier mais aussi la participation ou les versements volontaires). Pour aller plus loin sur l abondement Ces abondements doivent être limités, pour chaque bénéficiaire, à 8 % du plafond annuel de la sécurité sociale pour un PEE et à 16 % du plafond annuel de la sécurité sociale pour un Perco. Ces plafonds sont relevés si le plan est investi dans des actions de l entreprise ou du groupe. Les abondements ne peuvent pas représenter plus du triple des versements du bénéficiaire, toutes origines confondues. L abondement doit être réparti entre les bénéficiaires selon des critères objectifs (au prorata des sommes affectées, selon la catégorie socioprofessionnelle ). Il ne peut pas être proportionnel au salaire. L abondement de l employeur est déductible du résultat imposable de l entreprise et n est pas imposé à l IR pour les bénéficiaires. Dans les entreprises de moins de 100 salariés, lorsqu un accord a été signé avant le 20 février 2003, les abondements à un PEE ou à un Perco peuvent permettre à l entreprise de constituer une provision pour investissement en franchise d impôt, à hauteur de 50 % de l abondement. La constitution de la provision pour investissement est une charge déductible du résultat imposable. L entreprise dispose de deux ans après la clôture de l exercice au titre duquel la provision pour investissement a été constituée pour acquérir des immobilisations (incorporelles, corporelles ou financières). Si la provision n est pas utilisée à cet effet dans les deux ans, elle doit être reprise, cette reprise constitue alors un produit imposable. Si la provision est utilisée pour acquérir des immobilisations, l exonération d impôt devient définitive et la provision est réintégrée dans les capitaux propres. page 8
Synthèse des avantages sociaux et fiscaux Le tableau suivant compare différents cas de figure pour mettre en évidence les avantages sociaux et fiscaux liés à l intéressement. Hypothèses : intéressement versé en 2012, par une société soumise à l IS, employant moins 50 salariés et ayant mis en place pour la première fois un accord d intéressement). Prime versée au salarié Signature d'un accord d'intéressement à compter du 1 er janvier 2011, intéressement versé directement au salarié Signature d'un nouvel accord d'intéressement à compter du 1 er janvier 2011, intéressement affecté par le salarié à un PEE Versement par l'entreprise : salaire brut OU Intéressement + supplément d'intéressement + abondement (A) 3 000 3 000 3 000 Charges patronales, au taux moyen de 50 % du salaire brut (B) 1 500 - - Crédit / réduction d'impôt (C) - 900 900 Coût pour l'entreprise (A+B-C), hors impact de l IS liée à la déduction de ces charges 4 500 2 100 2 100 Cotisations salariales hors CSG / CRDS, au taux moyen de 10 % (D) 300 - - CSG / CRDS / Forfait social (E) 233 480 480 Impôt sur le revenu, calcul simplifié au taux moyen de 20 % (F) 540 600 - Revenu net après impôt (A-D-E-F) pour le bénéficiaire 1 927 1 920 2 520 NB : ce tableau est une simulation basée sur des hypothèses (taux de charges, taux d impôts), les avantages sociaux et fiscaux réels de l intéressement dépendent de la situation propre de chaque entreprise et de chaque salarié. Les avantages fiscaux dépendent de l année de signature de l accord d intéressement et de la décision d affectation du bénéficiaire. Dans tous les cas, l intéressement apparaît plus intéressant qu une prime classique : pour une rémunération brute de 3.000, une prime coûte 4.500 à l entreprise et le bénéficiaire ne reçoit qu un revenu net de 1.900 environ. Avec un accord d intéressement conclu pour la première fois à partir du 1 er janvier 2011 et une affectation dans un PEE, le revenu net du bénéficiaire ( 2.500 ) est supérieur au coût net pour l entreprise (2.100 ). page 9