Les ententes de jumelage agricole



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Transcription:

Automne 2012 Les ententes de jumelage agricole Guide à l intention des propriétaires et des agriculteurs MRC Brome-Missisquoi

Table des matières Remerciements... 2 Présentation... 3 Un outil d accompagnement... 3 Parcours suggéré... 4 1. Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie... 4 1.1 Les besoins des agriculteurs... 5 1.2 Les besoins des propriétaires... 11 2. Valider sur le terrain la faisabilité du projet... 16 2.1 L initiative de la validation repose d abord sur l agriculteur... 16 2.2 Au tour du propriétaire de valider son intérêt... 17 3. S entendre sur les conditions importantes... 18 3.1 Durée, renouvellement et conditions de résiliation... 19 3.2 Le prix... 21 3.3 Les investissements immobiliers... 21 4. Choisir le type d entente appropriée au projet... 24 4.1 Privilégier le bail ou le prêt, dans toute la mesure du possible... 24 4.2 Bail ou prêt?... 25 4.3 Doit-on envisager une autre forme de contrat que le bail et le prêt?... 27 4.4 Survol d autres formes de contrats : bail emphytéotique et propriété superficiaire... 31 4.4.1 Le bail emphytéotique... 31 4.4.2 La propriété superficiaire... 33 5. Rédiger l entente... 35 Un outil d accompagnement 1

Remerciements Ce document n aurait pu être disponible sans le travail de rédaction de Pierre Vinet. Nous tenons également à remercier Pascale Bertrand de la MRC Brome-Missisquoi, Patricia Lefebvre du GRAPP ainsi que la Clinique Juripop pour son ouvrage en matière de contrat agricole. Et finalement Leslie Carbonneau pour la mise en page du document. Un outil d accompagnement 2

Présentation Les ententes de jumelage agricole MRC Brome-Missisquoi Un outil d accompagnement Le présent document d information a pour objectif d aider les propriétaires et les agriculteurs à cheminer vers la conclusion d une entente appropriée à leurs besoins. Le GRAPP tiendra à l occasion du démarrage du projet une ou plusieurs séances d information afin d aider les agriculteurs et les propriétaires à comprendre la démarche qui leur sera nécessaire d accomplir pour en arriver à une telle entente. Les chances de succès seront d autant plus grandes que chaque partie comprendra bien la nature des besoins de l autre partie ainsi que le genre d entente qu elle aura éventuellement à conclure. En plus du présent document et des séances d information, la MRC met gratuitement à la disposition des parties, pendant la phase de démarrage du projet, les services d une personne qui a l expérience de ce type de contrats agricoles et qui pourra aider agriculteurs et propriétaires à bien orienter leurs démarches et à rédiger un projet d entente. Les services de cette personne peuvent être obtenus en s adressant au GRAPP. Finalement, lorsque les parties auront élaboré une entente qui leur convient, elles pourront passer à l étape finale de la faire valider par un notaire afin d assurer à tous la meilleure protection possible puis de la signer. Les coûts de ces actes notariés seront d autant plus faibles que les parties auront élaboré avec soin le projet d entente. Suite à l élaboration de son Plan de développement de la zone agricole (PDZA), la MRC de Brome-Missisquoi a décidé de prendre un ensemble de mesures pour dynamiser sa zone agricole. L une de ces mesures, le projet «Banque de terres», vise à la fois à augmenter l accessibilité des terres au profit de la relève agricole et à accroître l utilisation de terres agricoles qui sont souvent laissées en friche. Ce projet est confié par la MRC à un organisme à but non lucratif, le Groupe de réflexion sur les paysages et le patrimoine (GRAPP). Les propriétaires de terres agricoles intéressés par le projet sont ainsi recensés par le GRAPP qui décrit leur offre dans une banque d informations qui est accessible aux agriculteurs. Les agriculteurs y décrivent également leur projet, ce qui permet aux propriétaires d identifier les personnes et les projets qu ils souhaitent encourager. Un outil d accompagnement 3

Le présent document d information vise à aider les participants à franchir les 5 étapes du point D du parcours ci-dessous. Il est structuré en fonction de ces cinq étapes. Parcours suggéré A. S inscrire à la Banque de terres B. Participer à une séance d information sur la démarche que propose le GRAPP C. À partir de la Banque de terres et avec l aide du personnel du GRAPP, repérer une possibilité de jumelage entre l offre d un propriétaire et le projet d un agriculteur D. À l aide du présent guide et d un conseiller du GRAPP : 1. Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 2. Valider sur le terrain si le jumelage envisagé est une possibilité réelle 3. Convenir des aspects-clés de l entente 4. Choisir le type d entente approprié au projet des parties (location, prêt, etc.) 5. Rédiger un projet d entente E. Faire valider le projet par un notaire et le signer. Avant d aborder ces étapes, une section introductive traite des besoins des agriculteurs et des propriétaires. Il est en effet important que chaque partie se familiarise avec les besoins de l autre partie afin de ne pas être surprise lorsque le temps viendra de négocier les termes de l entente. 1. Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie Les fiches de la Banque de terres, tant celle du propriétaire que celle de l agriculteur, auront permis à chacun d avoir un aperçu des besoins et projets de l autre partie. Mais il restera beaucoup à valider par des rencontres sur le terrain et par des discussions avant d en arriver à une entente. Une telle entente sera souvent très engageante pour chaque partie et s étendra sur plusieurs années. En conséquence, il convient d être bien préparé. La première chose à faire est de bien documenter par écrit ses besoins et ses préoccupations. Ces besoins et préoccupations seront différents en phase de démarrage, à moyen et à long terme. Il convient donc de les distinguer afin de pouvoir les présenter clairement à l autre partie. Il arrive, et c est normal, que certaines personnes ne soient pas très familières avec les besoins et préoccupations légitimes de l autre partie, que ce soit le propriétaire ou l agriculteur. Ils sont alors surpris et parfois décontenancés lorsque certaines demandes sont formulées. Pour faciliter les échanges, il est donc important qu elles prennent un peu de temps pour se familiariser avec les besoins généraux des agriculteurs ou des propriétaires selon le cas. Le présent chapitre de ce guide vise à la fois à permettre à chacun de mieux documenter ses besoins et de se familiariser avec ceux de l autre. Cette compréhension permettra à chacun d avoir plus d empathie pour les besoins de l autre et de créer un contexte de discussion à la fois plus chaleureux et plus efficace. Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 4

1.1 Les besoins des agriculteurs Si vous êtes un agriculteur, veuillez établir vos besoins à l aide du questionnaire suivant et ajouter vos observations après une première ou seconde rencontre chez le propriétaire. S il manque de place, complétez vos réponses en constituant une annexe. Si vous êtes un propriétaire foncier, faites lecture du questionnaire afin de vous familiariser avec les besoins des agriculteurs. 1) Ai-je un plan d affaires sérieux et validé par un professionnel ou une institution de mon domaine? Puis-je décrire succinctement mon projet au propriétaire de façon à ce qu il puisse visualiser les impacts de la réalisation de ce plan? Est-ce que les conditions précises qui me seraient offertes exigent une mise à jour de mon plan d affaires? 2) De quelle superficie ai-je besoin? La superficie disponible sur la fiche du propriétaire convient-elle à mes besoins prévisibles, du moins pour la durée sur laquelle j aimerais bénéficier de cette terre? Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 5

3) Quels sont mes besoins en matière de drainage? 4) Quels sont mes besoins en matière d eau (irrigation ou eau pour le troupeau)? 5) Aurai-je besoin de bâtiments ou d autres formes d ouvrages? Ceux disponibles peuvent-ils suffire pour la durée envisagée de l exploitation? Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 6

6) S il s agit d un élevage, quels sont mes besoins en matière d absorption de charge de phosphore et d épandage? Le propriétaire a-t-il un Plan agro-environnemental de fertilisation? Quelle est la situation de la terre en matière de charge de phosphore et de possibilité d épandage? 7) Si mon plan d affaires exige des investissements significatifs destinés à rester sur la terre du propriétaire (constructions, ouvrages, plantations pérennes, préparation des sols, etc.), quel serait le montant approximatif de chaque investissement, le calendrier de réalisation et la durée souhaitée de l entente pour les amortir? Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 7

8)Toujours dans le cas où mon plan d affaires exige des investissements significatifs devant rester sur la terre, comment est-ce que je souhaiterais régler avec le propriétaire la question de leur valeur résiduelle en cas de départ prématuré : a) suite à ma décision ou b) suite à la sienne? (voir plus loin les besoins du propriétaire avant de répondre à cette question) 9) Ai-je droit aux subventions et autres formes d aide à la relève agricole? Si oui, quelle durée le bail ou le prêt de la terre doit avoir pour me qualifier (normalement 5 ans)? 10) Comment pourrai-je me loger? Si c est impossible sur la terre offerte, y a-t-il des possibilités intéressantes à proximité? Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 8

11) Si les lieux conviennent et l entente est bonne, est-ce que je pourrai étendre la durée initiale de l entente de façon à réduire ma précarité et à envisager un établissement de plus longue durée? 12) Le projet exigera-t-il la collaboration des propriétaires? (Obtention de permis de construction, certificats d autorisation environnementale, besoin d emprunter des équipements pour divers travaux, etc.) 13) Le projet suppose-t-il que le propriétaire tolère certains inconvénients (bruit à des heures insolites, achalandage particulier en raison d un kiosque ou d un système d auto cueillette, odeurs, etc.)? Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 9

14) Est-ce que j entends faire des épandages (fertilisation, herbicides, pesticides, etc.) au cours de mon exploitation? Si oui, le propriétaire est en droit de les connaître afin de déterminer si ceux-ci pourraient constituer une nuisance pour ses sols ou pour son environnement. En faire la liste et se préparer à en vulgariser l impact. 15) Si, pendant le cours du bail, le propriétaire souhaite vendre sa terre à un tiers non apparenté, estce que je souhaite avoir l occasion de l acheter en premier? 16) Quel est le scénario que je privilégie lorsque l entente arrivera à son terme? Mes simulations budgétaires ou mon évaluation me permettent-elles d entrevoir que j aurai les ressources suffisantes pour relocaliser mon exploitation? Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 10

1.2 Les besoins des propriétaires Les ententes de jumelage agricole Si vous êtes un propriétaire, veuillez établir vos besoins à l aide du questionnaire suivant et ajouter vos observations après une première ou seconde rencontre avec les agriculteurs. S il manque de place, complétez vos réponses en constituant une annexe. Si vous êtes un agriculteur, faites lecture du questionnaire afin de vous familiariser avec les besoins des propriétaires fonciers. L expérience montre que les besoins des propriétaires qui habitent la terre et sont à proximité des espaces offerts sont plus importants que les besoins de ceux qui n habitent pas la terre. Ils s interrogeront sur la qualité de la cohabitation à venir et pourront avoir des inquiétudes sur la façon dont pourra se régler la situation si cette cohabitation devait s avérer trop pénible pour eux. Les situations diffèrent également selon qu il y a ou non des bâtiments de ferme à louer ou à partager ou encore qu une maison de ferme est ou non disponible pour les agriculteurs. Voici un certain éventail de besoins que les propriétaires fonciers sont susceptibles d exprimer. 1) Je souhaite que la terre, les ouvrages et les bâtiments (s il y en a) que j offre à l agriculteur soient bien entretenus. Je ne souhaite pas être exposé à une dégradation de la valeur de ma propriété. (À titre d exemple : préoccupation à l égard de l épandage de produits indésirables pouvant polluer les sols ou la nappe phréatique; coupe d arbres non autorisée; création de zones d érosion; dégradation des pâturages par une mauvaise gestion des troupeaux ou une densité trop élevée; mauvais entretien des prairies; besoin à l effet que l exploitation de l agriculteur soit certifiée biologique). Notez ici les consignes que vous souhaiteriez voir respecter. Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 11

2) Est-ce que j ai bien identifié les parcelles de terre, ouvrages ou bâtiments (en tout ou en partie) que je suis prêt à offrir? Revoir la fiche remplie lors de l inscription à la Banque de terres. Est-ce que je serais prêt à considérer une extension des superficies à offrir sous certaines conditions? Si oui, lesquelles? Faites ici une description et annexer votre plan afin de pouvoir le présenter aux agriculteurs. 3) Quels sont les usages et pratiques agricoles que je suis prêt à permettre sur ma terre et quels sont ceux que je ne suis pas prêt à autoriser? Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 12

4) Quelles sont les règles de cohabitation que je souhaite voir respecter par les agriculteurs? Notez vos besoins en matière: i. de bruit (utilisation de la machinerie, d appareils bruyants, etc.); ii. iii. iv. d odeur (localisation des amas de fumier, épandages, entretien des bâtiments abritant des animaux); de stationnement, d aires de circulation autorisées et de sécurité (feux, etc.); de maintien de la possibilité de circuler sur les terres louées, dans le respect des activités des agriculteurs; v. d achalandage (voitures, fêtes, auto-cueillette, etc.); vi. de maintien par les agriculteurs d une bonne réputation. Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 13

5) Comme je souhaite accueillir des agriculteurs qui sont sérieux, avec lesquels je crois pouvoir m entendre et qui ont des bonnes chances de mener leur projet à terme sur la terre, j ai besoin de pouvoir vérifier certaines informations. Quelles sont leurs références? Ont-ils un plan d affaires sérieux? (si je n ai pas la compétence pour en juger, est-ce qu une source compétente a validé ce plan d affaires?) Ont-ils les ressources physiques et financières pour mener à bien leur projet? 6) Si je suis d accord avec l idée que l agriculteur fasse des constructions, ouvrages ou plantations qui s attacheront à ma propriété, il faudra établir des règles du jeu afin qu ils s harmonisent avec ma propriété, soient de qualité, bien entretenus et ne me causent pas de soucis financiers. Il faut en particulier être clair sur ce qui arrivera au terme de l entente et même dans le cas d une résiliation avant terme. Ces questions devront être bien détaillées dans l entente. Pour l instant, voici mes réflexions à ce sujet : Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 14

7) Je veux être bien protégé contre toute poursuite pouvant résulter du fait de l activité de l agriculteur. Il devra en conséquence me faire la preuve sur une base annuelle qu il détient une police d assurance adéquate. 8) Si je devais décéder pendant la durée de l entente, est-ce que je souhaiterais que l entente soit maintenue intégralement, ce qui est la règle, ou serait-il souhaitable de prévoir certains changements, auquel cas il faudrait le prévoir dans l entente? 9) Si je devais vendre ma propriété pendant la durée de l entente, est-ce que je souhaite que mon acheteur soit lié par l entente avec l agriculteur ou est-ce qu il faudra envisager de mettre fin à l entente ou d en modifier la durée et dédommager l agriculteur pour les inconvénients causés par cette fin prématurée? Établir ses besoins et se familiariser avec les besoins généraux de l autre partie 15

2. Valider sur le terrain la faisabilité du projet La fiche du propriétaire et celle de l agriculteur, les échanges faits avec les responsables du GRAPP et une première conversation téléphonique auront permis aux parties de déterminer l opportunité d une première rencontre. Avec cette première rencontre doit s amorcer un travail de validation de part et d autre. 2.1 L initiative de la validation repose d abord sur l agriculteur La balle sera d abord dans le camp de l agriculteur. Il doit d abord déterminer en premier si le lieu lui convient. S il ne convient pas, il ne sert à rien de mobiliser inutilement le temps du propriétaire à lui exposer son projet ou ses inquiétudes. Afin d être précis et exhaustif dans son appréciation, l agriculteur doit élaborer soigneusement sa grille de validation. Une grille bien préparée permettra d éviter des inconvénients aux deux parties. En effet, on peut s imaginer le temps perdu si au bout de deux mois de discussions, l agriculteur se rend compte qu il avait oublié un facteur important et qu il doit en conséquence abandonner le projet. Cette grille doit porter sur les caractéristiques physiques de la terre et des bâtiments ainsi que sur le milieu de vie comme la possibilité de se loger, l accès aux écoles. Cette grille de validation sera établie en fonction du plan d affaires de l agriculteur mais aussi en fonction de ses aspirations personnelles et familiales quant à son lieu de vie. Elle devrait s inspirer de la liste des besoins préparée à la section 1.1 mais pourrait comporter des questions plus pointues comme les suivantes : Les sols sont-ils propices aux cultures et élevages envisagés? Est-il nécessaire de procéder à des analyses plus détaillées? Y a-t-il un plan agro-environnemental de fertilisation disponible? Y a-t-il un historique des intrants qui ont affectés les sols (notamment en culture biologique)? Cet historique convient-il? Le drainage du sol est-il adéquat? Les bâtiments sont-ils adéquats ou susceptibles de le devenir à prix raisonnable? Quelles sont les possibilités de logement sur la terre ou autour? Quelle est la situation des terres avoisinantes? Doit-on craindre des usages nuisibles aux cultures ou élevages envisagés? La terre sera-t-elle partagée avec d autres exploitants agricoles? Ces projets sontils compatibles? Y aura-t-il un accès à des équipements existants qui pourraient diminuer le coût d implantation? Quelle est la liste des investissements supplémentaires qui devront être faits par comparaison avec ceux prévus au plan d affaire de l agriculteur en raison des caractéristiques observables des lieux? Dans un premier temps, l agriculteur se fera une opinion en se basant sur son expérience et sur sa première visite. Bien sûr, des analyses plus poussées pourront devoir être faites mais l objectif 2. Valider sur le terrain la faisabilité du projet 16

premier doit être de pouvoir conclure : «oui, je crois que le lieu possède un potentiel intéressant, éventuellement à confirmer avec certaines analyses» ou encore «non, il est clair que cela ne convient pas». S il y a un potentiel, il conviendra alors d en informer le propriétaire qui pourra alors compléter sa propre validation. 2.2 Au tour du propriétaire de valider son intérêt L objectif du propriétaire sera de cerner les impacts du projet de l agriculteur sur sa terre et sur son milieu de vie. Bien sûr, en pratique, la validation de l agriculteur et celle du propriétaire se dérouleront un peu en parallèle. Mais il est judicieux pour le propriétaire de ne pas trop s investir avant que l agriculteur ne lui confirme un intérêt réel. Le propriétaire doit aussi avoir sa propre grille de validation. Ici aussi, on s intéresse au milieu physique et humain et non aux aspects contractuels. Il sert peu de savoir si l agriculteur acceptera le prix du loyer qu on a en tête si son projet agricole ne nous convient pas. Le propriétaire pourra directement utiliser la liste des besoins de la section 1.2 comme grille de validation, en la complétant au besoin par les questions suivantes : Est-ce que je suis intéressé par le projet de l agriculteur? Ai-je le goût de le soutenir? Ai-je une première impression favorable (aspect humain, agriculteur, associés, famille)? (prudence tout de même avec les premières impressions) Est-ce que je comprends bien les impacts de ce projet sur ma propre qualité de vie (bruit, odeurs, achalandage, etc.)? Aura-t-il des investissements immobiliers significatifs à faire sur ma propriété? Suis-je ouvert à cela? Si j ai indiqué sur la fiche que j ai remplie pour la Banque de terres que je suis prêt à permettre que certains de mes équipements agricoles soient utilisés par l agriculteur, est-ce que je peux être rassuré sur le fait qu il a l expérience et la connaissance du matériel agricole? Pourrai-je avoir des références à l effet qu il prend soin des équipements? 2. Valider sur le terrain la faisabilité du projet 17

3. S entendre sur les conditions importantes C est à cette étape que s entame le processus de confection d une entente. Avant de se précipiter dans une rédaction détaillée, il convient de s entendre sur les conditions jugées les plus importantes. Une fois cela fait, il sera non seulement plus facile de passer à la rédaction juridique mais il sera plus facile aussi de déterminer le genre de contrat qu on doit signer. Il existe en règle générale un nombre limité de conditions importantes qui font qu une entente se fera ou non. Il y a une hiérarchie de préoccupations dans une entente. À quoi bon s entendre sur le fait que le loyer sera mensuel ou annuel si les parties ne s entendent même pas sur le montant de ce loyer? Il est suggéré que les conditions importantes abordées dans cette section soient d abord résolues avant de s engager dans des discussions plus détaillées. Les conditions les plus importantes de l entente seront les suivantes en générale : la durée (y compris la possibilité de renouvellement et de résiliation); le prix; le traitement des investissements immobiliers s il y en a. Dans certains cas, d autres conditions apparaîtront également essentielles. Il pourra s agir d un droit de premier refus permettant au locataire d être préféré en cas de vente à un tiers. On ajoutera ces conditions majeures à celles qui précèdent. 3. S entendre sur les conditions importantes 18

3.1 Durée, renouvellement et conditions de résiliation La durée sera pour l agriculteur une condition critique dans la majorité des cas. Bien sûr, si l entente ne vise qu à faire les foins sur la terre d un autre, la durée a beaucoup moins d importance. Mais dans la plupart des cas, les agriculteurs voudront une durée longue qui leur permet de récolter les fruits de leur travail sur la terre. Cela prend souvent au moins 5 ans avant d arriver au seuil de rentabilité d un projet agricole. En France, la loi fixe la durée minimale d un bail agricole à 9 ans et le bail est renouvelable pour 9 autres années. Dans certains cas, l investissement immobilier (constructions, ouvrages, cultures pérennes) sera tel qu une durée de 9 ans sera largement insuffisante. Dans tous les cas, s il s agit de jeunes agriculteurs éligibles aux subventions à la relève, ils devront envisager un bail d au moins 5 ans pour qualifier leur entreprise. Face à la perspective de consentir une longue durée, certains propriétaires sont inquiets. Deux formes d inquiétude sont souvent mentionnées : si la cohabitation avec l agriculteur devait tourner au cauchemar, cela pourrait être un très long cauchemar si le bail est de très longue durée. L autre inquiétude est liée à la revente de leur propriété. Est-ce que l existence d un bail de longue durée ne sera pas de nature à nuire à la vente éventuelle de leur propriété? Entre ces besoins légitimes des uns et des autres, quelle attitude faut-il prendre en matière de durée? La position la plus sensée est de fixer la durée en fonction de la nature du projet agricole. Toute autre solution aurait pour effet de rendre non viable le projet et d éloigner les agriculteurs sérieux. La protection du propriétaire contre une situation cauchemardesque doit être prise en considération dans les conditions de réalisation. Ce n est pas la durée réduite d un bail qui peut vraiment soulager le propriétaire malheureux. S il signe un bail de 5 ans au lieu de 10 ans et qu au bout d un an la situation devienne invivable, les 4 années restantes lui apparaîtront une éternité. Mieux vaut avoir un contrat qui protège bien le propriétaire contre les abus éventuels d un agriculteur que d imposer des durées incompatibles avec la nature des activités agricoles. Une clause énumérant les défauts graves de l agriculteur donnant droit à la résiliation sera le moyen de protéger le propriétaire. L agriculteur sait ainsi que son droit n est pas menacé s il respecte son entente et il cela le protégera contre des résiliations arbitraires. Ce droit de résiliation devrait également profiter à l agriculteur en cas de défaut grave du propriétaire et même en cas d échec de son projet agricole ou d autres motifs sérieux. La discussion de ce type de clause est bien sûr désagréable mais nécessaire. Il faudra en outre prévoir si les indemnités sont convenues à l avance ou sont laissées à la discrétion d un arbitre ou d un tribunal en cas de mésentente. 3. S entendre sur les conditions importantes 19

Examinons maintenant si un bail plus court améliorerait la situation du propriétaire en cas de revente. Sur le plan de la plus-value, il n est pas assuré qu un bail plus long soit nécessairement une cause de moins-value pour la propriété. Un projet agricole bien mené peut au contraire être une source de plus-value de la propriété et permettre d obtenir un meilleur prix de vente que pour une terre en friche par exemple. Le propriétaire suivant pourrait aussi apprécier, tout comme le propriétaire actuel, d avoir un projet agricole sur sa terre s il n a pas lui-même l intention d exploiter la superficie sous bail. Bien sûr, il pourrait y avoir le cas de l acheteur qui aurait besoin de toute la terre immédiatement et qui n achètera que si le bail peut être résilié. Cette situation n est pas si fréquente mais doit être envisagée. Mais un bail plus court ne résout pas la question entièrement. S il reste 3 ans à courir sur un bail de 5 ans, le problème se posera également si l acheteur veut recouvrir l usage des lieux loués dans les meilleurs délais. L inconvénient sera non seulement fonction de la durée du bail mais aussi de l importance relative de la superficie louée par rapport à celle de la propriété toute entière. Si seulement 5% de la propriété est louée, l inconvénient pour le futur acheteur n est pas le même que si c est 80%. Il est donc préférable d analyser la question au cas par cas. Si le propriétaire estime qu il pourrait perdre des acheteurs ou devoir diminuer son prix du fait du bail consenti, alors une clause de résiliation à cet effet doit être prévue et un mode de calcul de l indemnité de l agriculteur ainsi que les conditions et délais de départ doivent être établis. De plus, l agriculteur devrait se voir offrir un droit de préférence pour l achat de la propriété. Finalement, un propriétaire doit avoir le droit de résilier l entente si l agriculteur ne réalise pas le projet prévu. Certains propriétaires offrent une partie de leur terre à des conditions très avantageuses pour aider la relève agricole. Ce n est pas pour la voir inexploitée pendant toute la durée du bail. Quant au renouvellement, il est d ordinaire consensuel. Si les deux parties le souhaitent, elles peuvent bien évidemment renouveler l entente. Par ailleurs, on pourrait donner une option de renouvellement à l agriculteur pour une durée donnée. Ceci aurait l avantage de lui donner une porte de sortie au bout d un premier terme si son projet ne réussit pas comme prévu. C est ce que permet le droit français. 3. S entendre sur les conditions importantes 20

3.2 Le prix Le problème du prix se pose principalement dans le cas du bail. Si la terre est mise gratuitement à la disposition de l agriculteur, il s agira d un prêt. Il est bon par ailleurs d indiquer aux parties que le loyer peut être payé de différentes façons. Par exemple, l agriculteur pourra offrir des services d entretien du reste de la terre du propriétaire (faire les foins) afin de réduire la portion payable en argent. Il pourra aussi offrir une part de sa récolte ou de sa production. Propriétaires et agriculteurs doivent être raisonnablement au courant des prix pratiqués dans les environs. L agriculteur doit en outre être en mesure de simuler l impact du prix proposé sur son plan d affaires. Autre moyen de payer ou réduire un loyer, c est d apporter des améliorations locatives à la terre qui intéressent le propriétaire et de les lui laisser à la fin du bail. La prochaine sous-section traite des améliorations locatives. 3.3 Les investissements immobiliers Il pourra arriver que l exploitation agricole de l agriculteur exige de sa part des investissements immobiliers : construction, drainage souterrain, bassin d irrigation, cultures pérennes. Ces constructions, ouvrages ou plantations seront la propriété du propriétaire, tant pendant le bail qu à la fin. Si ces investissements sont significatifs, cela posera le problème de la durée nécessaire à leur amortissement et d un éventuel partage des coûts s ils ne peuvent être amortis pendant la durée du bail. Dans le cas où ces investissements peuvent être pleinement amortis par l agriculteur pendant la durée de son bail, on pourra ajuster le loyer de telle sorte que l agriculteur ne soit pas perdant. Le loyer réduit est ainsi la contribution du propriétaire à la plus-value des améliorations locatives payées par son locataire si ces améliorations ont une valeur résiduelle significative pour le propriétaire. Mais dans d autres cas, l investissement peut être plus important et la baisse du loyer apparaître insuffisante. 3. S entendre sur les conditions importantes 21