ABREGE D HEPATO-GASTRO-ETROLOGIE- 2ème édition - Partie «Connaissances» - Octobre 2012 par la CDU-HGE - Editions Elsevier-Masson



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Chapitre 36 : Item 308 Dysphagie I. Définition II. Deux types de dysphagie III. Démarche diagnostique en cas de dysphagie œsophagienne IV. Dysphagies lésionnelles V. Dysphagies fonctionnelles OBJECTIF PEDAGOGIQUE Devant une dysphagie, argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents I Définition La dysphagie est une sensation de gêne ou d'obstacle à la progression du bol alimentaire survenant au cours de la déglutition. Elle doit être différenciée de : l'odynophagie (douleur ressentie lors de la progression des aliments dans l'œsophage mais sans sensation de blocage de l'alimentation) ; la sensation de striction cervicale liée à l'anxiété, qualifiée de «globus hystericus» ; l'anorexie (perte d'appétit), surtout lorsqu'elle porte de façon élective sur certains aliments (viande) ; la satiété précoce. II Deux types de dysphagie L'interrogatoire permet de distinguer deux types de dysphagie : la dysphagie oro-pharyngée se traduit par une difficulté à initier la déglutition et à propulser le bol alimentaire dans l'œsophage. Le patient localise nettement sa gêne ou sa sensation de blocage dans la région cervicale. Ce type de dysphagie relève essentiellement de causes ORL ou neurologiques ; la dysphagie œsophagienne est ressentie comme une sensation de blocage ou une gêne à la progression du bol alimentaire localisée au niveau de la région rétro-sternale. On distingue aussi, selon le mécanisme en cause, la dysphagie lésionnelle due à un obstacle mécanique, le plus souvent dans la paroi œsophagienne (ex : tumeur maligne) et la dysphagie fonctionnelle due à un trouble moteur (ex : achalasie). III Démarche diagnostique en cas de dysphagie œsophagienne A Étape 1 : recherche d'éléments d'orientation par l'interrogatoire

L'interrogatoire précise : la localisation rétro-sternale de la gêne et son niveau ; l'électivité éventuelle pour les solides (dysphagie «sélective» des sténoses organiques) ou l'association avec une dysphagie pour les liquides qui peut prédominer (dysphagie non sélective voire paradoxale) ; le mode de début (brutal ou non) ; l'évolution (progression plus ou moins rapide, intermittence) ; le terrain : âge, intoxication alcoolo-tabagique, exposition à des agents irritants pour l'œsophage (médicaments, caustiques, radiations), affection maligne ou maladie générale (sclérodermie, diabète) ; les symptômes associés : signes de reflux gastro-œsophagien (RGO) et leur relation chronologique avec la dysphagie, signes ORL et/ou respiratoires, hoquet, hypersialorrhée, fausses-routes ; l'existence d'une altération de l'état général (anorexie, amaigrissement). B Étape 2 : recherche prioritaire d'une lésion organique de l'œsophage 1 Endoscopie œso-gastro-duodénale Examen clé à faire en premier lieu devant toute dysphagie. C'est la méthode la plus performante pour le diagnostic des tumeurs de l'œsophage et des œsophagites. Elle permet à la fois l'étude précise de la muqueuse et la réalisation de biopsies. Les zones qui sont particulièrement à biopsier peuvent être plus facilement décelées en ayant recours à des colorants vaporisés en spray sur la muqueuse (lugol, acide acétique). Même en cas de muqueuse normale, des biopsies muqueuses doivent être systématiquement réalisées pour rechercher une œsophagite à éosinophiles. 2 Autres examens morphologiques Lorsque l'endoscopie œso-gastro-duodénale n'est pas contributive (sténose œsophagienne infranchissable ou aspect de compression extrinsèque avec muqueuse normale), la réalisation d'autres examens se discute. Le scanner thoracique permet de chercher une lésion médiastinale et apprécie l'extension pariétale, médiastinale et ganglionnaire des cancers. L'écho-endoscopie est l'examen qui explore le plus précisément la paroi œsophagienne en cas de tumeur d'apparence superficielle en documentant l'atteinte des différentes couches, et des structures péri-œsophagiennes (fig. 36.1). Elle apprécie l'extension pariétale des tumeurs, détecte les adénopathies métastatiques et différencie les lésions sous-muqueuses intramurales (dans la paroi) des compressions extrinsèques. L'existence d'une sténose en limite les performances. Fig. 36.1 Aspect normal de la paroi œsophagienne en échoendoscopie.

Le transit baryté de l'œsophage peut être fait en deuxième intention, surtout dans les cas d'endoscopie impossible ou incomplète (sténose infranchissable). Il peut également s'avérer utile pour objectiver une compression extrinsèque ainsi que pour préciser la topographie et l'étendue d'un cancer de l'œsophage. C Étape 3 : si l'endoscopie œso-gastro-duodénale est normale, chercher un trouble moteur œsophagien Le transit baryté de l'œsophage et surtout la manométrie œsophagienne sont indiqués pour chercher un trouble moteur lorsqu'un examen endoscopique normal a éliminé une lésion muqueuse œsophagienne ou une compression extrinsèque et que les biopsies muqueuses systématiques, en cas d'aspect normal de la muqueuse, ont écarté une œsophagite à éosinophiles. La manométrie œsophagienne : est l'examen clé pour le diagnostic des troubles moteurs de l'œsophage ; enregistre la pression de repos du sphincter inférieur de l'œsophage (SIO) et sa relaxation lors de la déglutition ; et analyse le péristaltisme au niveau du corps de l'œsophage en réponse à des déglutitions d'eau ou de solides (fig. 36.2). peut être utile pour rattacher à l'œsophage une douleur thoracique d'allure angineuse. Fig. 36.2 Manométrie œsophagienne. Tracé montrant une onde péristaltique bleu propagée (normale) après déglutition. IV Dysphagies lésionnelles Dans ce contexte, la dysphagie : prédomine sur les solides ; s'aggrave progressivement ; et retentit habituellement sur l'état général. L'endoscopie découvre dans la majorité des cas une sténose organique de l'œsophage qui doit être biopsiée à de multiples endroits. En cas de doute diagnostique, ou si les premières ne sont pas contributives, les biopsies doivent être répétées. Principales lésions organiques responsables d'une dysphagie d'origine œsophagienne : sténoses tumorales : cancer épidermoïde (terrain alcoolo-tabagique), plus rarement adénocarcinome soit œsophagien développé sur un endobrachyœsophage, ou cardial étendu vers l'œsophage, exceptionnellement d'autres tumeurs malignes (sarcome et mélanome) ou bénignes (léiomyome) et tumeurs extrinsèques (ganglionnaire, bronchique, médiastinale) ; sténoses non tumorales :

le plus souvent œsophagite peptique (sténose régulière, centrée, souvent à la jonction des 1/3 moyen et inférieur de l'œsophage), parfois œsophagite à éosinophiles, caustique ou radique, rarement, compression extrinsèque (adénopathie, anomalie artérielle) ; œsophagites non sténosantes : d'origine médicamenteuse (doxycycline, aspirine, anti-inflammatoires non stéroïdiens, alendronate, chlorure de potassium). Le symptôme prédominant est l'odynophagie, à éosinophiles, qui touchent surtout l'homme, en association dans 50 % des cas avec des manifestations atopiques (asthme, dermatite atopique ) et qui peuvent être à l'origine d'impactions alimentaires (blocage des aliments dans la lumière), d'origine infectieuse (candida, CMV, herpès) observées le plus souvent dans un contexte immunodéprimé (éventuellement diabète) ; diverticule de Zenker : il siège à la face postérieure de la jonction pharyngoœsophagienne ; la dysphagie est haute et associée à des régurgitations alimentaires parfois déclenchées par une pression cervicale. V Dysphagies fonctionnelles Le trouble moteur peut être primitif ou secondaire. Troubles moteurs primitifs : achalasie (synonyme : cardiospasme) qui peut aboutir au méga-œsophage idiopathique ; maladie des spasmes diffus de l'œsophage ; œsophage «casse-noisettes». Troubles moteurs secondaires : au cours du RGO ; au cours de certaines collagénoses sclérodermie, dermatomyosite, lupus) ; au cours de maladies touchant l'innervation ou la musculature œsophagienne (diabète, amylose, myasthénie). A L'achalasie 1 Définition Il s'agit d'un trouble moteur primitif de l'œsophage de cause inconnue, défini par l'absence complète de péristaltisme dans le corps de l'œsophage (fig. 36.3). Dans la majorité des cas, cet apéristaltisme est associé à une relaxation du SIO absente ou incomplète lors de la déglutition et à une hypertonie de repos du SIO. Fig. 36.3 Aspect manométrique d'achalasie. Tracé d'achalasie avec la survenue de contractions synchrones lors des déglutitions (D) traduisant une disparition du péristaltisme œsophagien.

2 Arguments cliniques et paracliniques en faveur d'une achalasie La dysphagie est le signe révélateur habituel. Elle peut être très modérée. Elle est évocatrice de l'achalasie quand elle est paradoxale (affectant électivement les liquides) et capricieuse, survenant de façon intermittente et inopinée. Des régurgitations témoignent de la présence d'une stase œsophagienne anormale. Elles peuvent orienter à tort vers un RGO ou un diverticule. En survenant durant la nuit, les régurgitations sont parfois à l'origine de complications respiratoires. Plus rarement, la maladie se révèle par des douleurs rétro-sternales constrictives, pseudo-angineuses mais non liées à l'effort. Elle peut entraîner une dénutrition. Au stade débutant de la maladie, l'endoscopie digestive haute est normale. À un stade plus évolué, la dysphagie perd ses caractères évocateurs d'un trouble moteur. L'endoscopie découvre un œsophage dilaté, atone, contenant des résidus alimentaires parfois abondants, il peut exister une difficulté au passage du cardia. 3 Principales anomalies manométriques œsophagiennes Au cours de l'achalasie, diverses perturbations motrices plus ou moins caractéristiques peuvent être mises en évidence par la manométrie. Absence totale de péristaltisme dans le corps de l'œsophage (absence de contractions œsophagiennes propagées en réponse à des déglutitions d'eau : critère obligatoire du diagnostic). Des contractions non propagées d'amplitude très importante s'observent dans l'achalasie «vigoureuse». Une hypertonie du SIO existe fréquemment ainsi qu'une absence de relaxation ou une relaxation seulement incomplète de ce sphincter. Ces anomalies sphinctériennes peuvent manquer au stade initial. 4 Diagnostic différentiel L'endoscopie doit toujours être réalisée en première intention pour écarter une affection cancéreuse, notamment du cardia. Une tumeur infiltrante du cardia peut être à l'origine de perturbations motrices très voisines de celles observées dans l'achalasie ; on parle alors de pseudo-achalasie néoplasique. Il est nécessaire de la chercher par une écho-endoscopie ou une tomodensitométrie, notamment lorsque l'achalasie se révèle tardivement, après 50 ans, ou lorsque la manométrie œsophagienne met en évidence une importante hyperpression au niveau du SIO. Chez des sujets ayant vécu en Amérique du Sud, une pseudo-achalasie due à une parasitose (Trypanosoma cruzi) doit être cherchée (maladie de Chagas). 5 Principes du traitement Aucun traitement ne peut restaurer un péristaltisme œsophagien. Le traitement a pour objectif de diminuer la pression du SIO par : section musculaire chirurgicale (myotomie extra-muqueuse, réalisable aujourd'hui par cœlioscopie) ; ou dilatation pneumatique sous endoscopie ; ou action pharmacologique (dérivés nitrés par voie sublinguale, infiltration intra-sphinctérienne per-endoscopique de toxine botulique).

La dilatation pneumatique réalisée par voie endoscopique et le traitement chirurgical sont les méthodes principales. Leur efficacité est comparable, jugée excellente ou bonne dans plus de trois quarts des cas. Leurs complications (respectivement la perforation de l'œsophage et l'œsophagite par reflux) sont rares. Leur mortalité est quasi nulle. L'efficacité des traitements pharmacologiques et de la toxine botulique est nettement inférieure à celle de ces 2 techniques. B Autres troubles moteurs de l'œsophage 1 Les troubles moteurs primitifs En dehors de l'achalasie, les troubles moteurs œsophagiens primitifs comprennent la maladie des spasmes diffus de l'œsophage et l'œsophage «casse-noisettes». Dans la maladie des spasmes diffus de l'œsophage, plus de 10 % des ondes enregistrées au niveau du corps de l'œsophage sont anormales, non propagées, amples et répétitives, et alternent avec un péristaltisme normal (fig. 36.4). Fig. 36.4 Aspect radiologique d'achalasie évoluée, parvenue au stage de méga-œsophage. L'œsophage «casse-noisettes» se caractérise par des ondes péristaltiques anormales, prolongées et de très grande amplitude prédominant dans la partie distale de l'œsophage (fig. 36.5). Fig. 36.5 Aspect manométrique de spasmes de l'œsophage. Au cours de ces deux affections, le fonctionnement du SIO est normal. 2 Les troubles moteurs œsophagiens dits «secondaires» Ils peuvent être observés au cours des collagénoses (sclérodermie), du diabète, de l'amylose et de nombreuses affections du système nerveux central ou périphérique. POINTS CLES La dysphagie oro-pharyngée relève essentiellement de causes ORL ou neurologiques. En cas de dysphagie, une endoscopie œso-gastro-duodénale doit être effectuée en première intention pour chercher une lésion organique de l'œsophage. Les principales causes organiques de dysphagie sont des tumeurs œsophagiennes et œsophagites (par reflux notamment).

Le cancer de l'œsophage est à l'origine d'une dysphagie progressive, portant initialement sur les solides, avec amaigrissement rapide. L'endoscopie et les biopsies confirment le diagnostic. L'œsophagite à éosinophiles peut être à l'origine d'impactions alimentaires. Elle s'associe souvent avec des manifestations atopiques (asthme, dermatite atopique ) et une hyperéosinophilie sanguine. Le diagnostic est histologique. En cas de dysphagie avec endoscopie normale, les biopsies muqueuses œsophagiennes doivent être systématiques pour chercher une œsophagite à éosinophiles. La manométrie œsophagienne est l'exploration clé pour l'identification d'un trouble moteur œsophagien. L'achalasie primitive de l'œsophage est le principal trouble moteur œsophagien, responsable au début de son évolution d'une dysphagie intermittente et paradoxale. Son diagnostic est manométrique avec la mise en évidence d'une absence complète de péristaltisme. Une achalasie récente chez un sujet de plus de 50 ans doit faire envisager l'hypothèse d'une achalasie secondaire et réaliser une tomodensitométrie et/ou une écho-endoscopie œsophagienne pour chercher une tumeur sous-muqueuse ou péri-œsophagienne.