Pathologies respiratoires du sommeil



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Pneumologie fondée sur les preuves : actualisations SPLF Séminaire n 5 Pathologies respiratoires du sommeil Sommaire Pathologies respiratoires du sommeil Les apnées centrales P. Escourrou (Expert), J.C. Meurice (Rapporteur) Troubles respiratoires non apnéïques du sommeil R. Kessler (Expert), J.C. Meurice (Rapporteur) Le syndrome d apnées obstructives du sommeil F. Gagnadoux (Expert), J.C. Meurice (Rapporteur) Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 665-76 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 665

Les apnées centrales P. Escourrou 1 (Expert), J.C. Meurice 2 (Rapporteur) Les différents types de syndrome d apnées centrales dans la 2 e classification internationale des troubles du sommeil (ICSD2) Le syndrome d apnées centrales (SAC) du sommeil primaire ou idiopathique Définition Il se définit par la survenue d apnées sans effort respiratoire. Critères diagnostiques a) Survenue d apnées sans effort respiratoire plus de 5 fois par heure de sommeil. b) Chez un patient qui se plaint soit de somnolence diurne excessive (SDE), soit d éveils fréquents ou d insomnies, soit d éveils avec sensation d étouffement. c) Pas d autre explication au trouble. La respiration périodique de type Cheyne-Stokes 1 Hôpital A Béclère, Laboratoire du Sommeil, Clamart, France. 2 Service de Pneumologie, CHU Poitiers, France. Correspondance : P. Escourrou 157 rue de la Porte Trivaux, 92140 Clamart Cedex. pierre.escourrou@abc.aphp.fr Définition Survenue récurrente d apnées et/ou d hypopnées alternant avec des passages d hyperpnée au cours desquelles le volume courant augmente et diminue graduellement suivant un pattern crescendo decrescendo. Critères diagnostiques a) La polysomnographie objective au moins 10 apnéeshypopnées centrales par heure de sommeil avec le pattern caractéristique accompagné d éveils fréquents ou de modification de la structure du sommeil. b) Bien que souvent rapportés : la SDE, les éveils nocturnes fréquents, la plainte d insomnie ou des éveils avec étouffements ne sont pas nécessaires au diagnostic. c) Ce trouble survient en même temps qu un trouble médical sévère : insuffisance cardiaque, accident vasculaire cérébral ou insuffisance rénale. 666 Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 666-8 Doi : 10.1019/200720065

Les apnées centrales Le syndrome d apnées centrales dû à des conditions médicales sans respiration de Cheyne-Stokes Ce sont le plus souvent des apnées centrales secondaires à des lésions du tronc cérébral : accident vasculaire, lésion de myélinisation néoplasique, dégénération ou traumatisme, parfois trouble cardiaque ou rénal. La respiration périodique d altitude Elle peut survenir au cours d ascension récente au-delà de 3 000/4 000 mètres. C est une adaptation normale à l altitude pouvant s accompagner d éveils fréquents et de sensations de fatigue. Le syndrome d apnées centrales du sommeil lié à la prise de drogues Ou de substances opioïdes : morphine, méthadone. Le diagnostic Nécessite la réalisation d une polysomnographie enregistrant les états de vigilance (EEG, EOG, EMG). Le mécanisme central des événements respiratoires doit être affirmé par une des techniques suivantes : sonde œsophagienne : technique de référence montrant l absence de dépression intrathoracique inspiratoire (2 bandes) ; pléthysmographie d induction correctement positionnée au niveau du thorax et de l abdomen montrant l absence de décalage de phase entre les mouvements thoraciques et abdominaux ; le temps de transit du pouls montre l absence de variation significative ; l EMG diaphragmatique : absence d activité inspiratoire phasique ; sons trachéaux : pression médiastinale constante. La distinction des hypopnées centrales vs obstructives est souvent difficile, il faut donc utiliser une ou plusieurs des techniques ci-dessus. Épidémiologie Le syndrome d apnées centrales idiopathique Sa prévalence est inconnue dans la population générale. Certaines données en laboratoire de sommeil citent une prévalence pouvant atteindre 10 % des malades apnéïques explorés (4). La respiration périodique de Cheyne-Stokes et le SAC secondaire à des accidents vasculaires cérébraux La prévalence semble importante au moment de la phase aiguë de l AVC : 30 % des patients. Sa fréquence diminue à distance de l AVC (3.4). La respiration périodique de Cheyne-Stokes et le SAC associé à l insuffisance cardiaque (IC) Les publications antérieures à 2004 chez des IC traités par les médicaments vasodilatateurs donnent des valeurs de : 40 à 80 % pour les SAC isolés (4) ; 20 à 60 % pour la respiration de CS (4). La prévalence chez les IC traités par les bêtabloquants est encore inconnue. Pronostic Les apnées centrales liées à l insuffisance cardiaque ont un impact négatif sur l évolution de la maladie cardiaque : la mortalité est supérieure dans le groupe de patients avec CS (2), la surmortalité existe lorsque l IAH central est supérieur à 30/h (2), le risque d extrasystoles ventriculaires et de tachycardie ventriculaire non soutenue est augmenté (4). Traitement La pression positive diminue la mortalité sur une période moyenne de suivi de 2,2 ans dans certains groupes de patients (2). La pression positive continue incomplètement efficace entraîne une surmortalité en comparaison au traitement médical au cours de la première année (2). La ventilation auto-asservie améliore la fraction d éjection et la qualité de vie sur 6 mois plus efficacement que la PPC (2). La stimulation ventilatoire par l acétazolamide améliore la qualité du sommeil et la fatigue après un traitement de 7 jours (2). L oxygénothérapie nocturne pendant 12 semaines améliore la fraction d éjection et la qualité de vie (2). L augmentation de la pression alvéolaire de CO 2 par l utilisation d un espace mort inspiratoire pendant une nuit améliore l index d apnées-hypopnées et la qualité du sommeil (4). Questions non résolues Prévalence des apnées centrales et de la respiration de Cheyne-Stokes chez les insuffisants cardiaques traités par les nouveaux bêtabloquants. Caractéristiques des patients insuffisants cardiaques bons candidats pour la PPC. Effets à long terme de la ventilation auto-asservie sur la morbidité et la mortalité des insuffisants cardiaques. 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 667

P. Escourrou Les syndromes d hypoventilation hypoxémie L hypoventilation alvéolaire non obstructive idiopathique au cours du sommeil Signes cliniques Sommeil de mauvaise qualité : insomnie, cauchemars, éveils fréquents ; fatigue diurne, somnolence, perte d énergie ; baisse des performances intellectuelles. Critères diagnostiques La PSG : épisodes d hypoventilation de plus de 10 secondes associés à des désaturations en O 2 et à des éveils fréquents, secondaires aux troubles respiratoires ou à une bradycardie ; les signes cliniques fréquents : SDE, éveils nocturnes, plaintes d insomnie ne sont pas obligatoires ; il n y a pas de maladie pulmonaire, de malformation squelettique, de pathologie neuromusculaire susceptible d altérer la fonction pulmonaire. Le syndrome d hypoventilation alvéolaire centrale congénital (anciennement syndrome d Ondine) Il est lié à une perte du contrôle central automatique de la respiration au cours du sommeil mais parfois aussi dans la veille en l absence de maladie pulmonaire ou d atteinte des muscles respiratoires, débutant à la naissance ou tôt dans la vie. Critères diagnostiques Périodes d hypoventilation, cyanose ou apnée à début périnatal ; hypoventilation plus importante pendant le sommeil que pendant la veille ; la réponse ventilatoire à l hypoxie ou l hypercapnie est diminuée ou absente ; la PSG montre des hypercapnies et des hypoxies sévères, le plus souvent sans apnées. L hypoventilation-hypoxémie au cours du sommeil due à une pathologie du parenchyme pulmonaire ou à une pathologie vasculaire pulmonaire Diagnostic Aux EFR et bilan radiologique (pathologie du parenchyme) ou échographie et cathétérisme (maladie vasculaire pulmonaire). Hypoxémie prolongée en l absence d apnées, d hypopnées, de limitations de débit ou ronflement. Critères diagnostiques Maladie du parenchyme (maladie interstitielle) ou hypertension artérielle pulmonaire primitive ou secondaire. Polysomnographie : a) SpO 2 < 90 % pendant plus de 5 minutes avec un nadir de 85 % ou inférieur ; ou b) plus de 30 % du sommeil avec SpO 2 <90%, ou PaCO 2 élevée ou augmentée de façon disproportionnée à la valeur de veille. L hypoventilation-hypoxémie au cours du sommeil secondaire à une obstruction des voies aériennes intrathoraciques : BPCO Critères diagnostiques identiques a l hypoventilationhypoxémie au cours du sommeil due à une pathologie du parenchyme pulmonaire ou à une pathologie vasculaire pulmonaire, avec signes d une BPCO aux EFR. Hypoventilation-hypoxémie au cours du sommeil secondaire à des pathologies neuromusculaires ou de la paroi thoracique Liée à une déformation anatomique de la paroi de la cage thoracique, obésité (syndrome de Pickwick) ou à une maladie neuromusculaire affectant la pompe ventilatoire incapable de maintenir la PaCO 2 au-dessous de 45 mmhg. L existence d un SAOS est un facteur aggravant. Critères diagnostiques Pathologie neuromusculaire ou déformation de la cage thoracique qui est la principale cause de l hypoxémie. PSG : critères Soit SPO 2 < 90 % pendant plus de 5 minutes avec nadir de 85 % au moins. Soit SPO 2 < 90 % pendant plus de 30 % du temps de sommeil. Soit PaCO 2 élevée au cours du sommeil ou proportionnellement trop élevée compte tenu des niveaux observés dans la veille. 668 Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 666-8

Troubles respiratoires non apnéïques du sommeil R. Kessler 1 (Expert), J.C. Meurice 2 (Rapporteur) Le sommeil induit chez la personne normale des modifications physiologiques de la respiration. Ces modifications de la ventilation au cours du sommeil peuvent se révéler délétères chez un patient présentant une pathologie respiratoire. À l inverse, les maladies respiratoires peuvent par elles-mêmes affecter la qualité du sommeil par les perturbations qu elles entraînent au cours du sommeil. Les éléments pour comprendre 1 Pneumologie, Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, France. 2 Service de Pneumologie, CHU, Poitiers, France. Correspondance : R. Kessler 1 avenue Molière, 67098 Strasbourg Cedex. romain.kessler@chru-strasbourg.fr Les effets du sommeil sur la respiration. Chez le sujet normal [1], le sommeil lent induit : Une franche augmentation de la résistance des voies aériennes supérieures (X2) ; une diminution de la ventilation alvéolaire (de 0,5 à 1,5 l/ min) ; une majoration des inégalités ventilation/perfusion surtout dans les bases pulmonaires ; une diminution de la PaO 2 (-5 mmhg), de la SaO 2 (- 2 %) et une augmentation de la PaCO 2 (+ 5 mmhg) Ces modifications sont présentes également au cours du sommeil paradoxal, qui de plus, s accompagne d une respiration irrégulière. Enfin, ces modifications de la ventilation peuvent être influencées par de nombreux facteurs comme le sexe, l âge, la grossesse, l altitude et certains médicaments. Dans les circonstances pathologiques, le sommeil peut induire [2] : La survenue d apnées obstructives (SAOS) ou centrales ; une hypoventilation alvéolaire ; une majoration des inégalités ventilation/perfusion. Dans la suite de cet article, nous nous intéresserons exclusivement aux désaturations non apnéïques survenant au cours du sommeil ; le syndrome d apnées du sommeil est traité par ailleurs. Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 669-72 Doi : 10.1019/200720066 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 669

R. Kessler Évolution des troubles respiratoires non apnéïques du sommeil Les troubles respiratoires non apnéïques du sommeil surviennent la plupart du temps au cours de l évolution de maladies chroniques pouvant toucher la fonction respiratoire. L histoire naturelle de la survenue de ces troubles respiratoires est assez bien connue dans le cadre de certaines d entre elles, en particulier les maladies neuromusculaires. Ainsi dans la maladie de Duchenne de Boulogne, le degré d hypoventilation nocturne est bien corrélé avec le degré d atteinte de la fonction respiratoire [3]. La plupart du temps, l hypoventilation nocturne précède l apparition d une insuffisance respiratoire hypercapnique chronique. Les études ont ainsi montré que parallèlement à la dégradation de la fonction respiratoire, on observait la survenue d hypopnées (au cours du sommeil paradoxal), puis à un stade plus avancé, une hypoventilation prolongée au cours du sommeil paradoxal ; cette hypoventilation s étend ensuite au cours des différentes phases du sommeil et devient finalement permanente (Niveau de preuve : 2). Dans les maladies obstructives, comme la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) [4] ou la mucoviscidose [5], les troubles respiratoires au cours du sommeil semblent assez précoces. Les symptômes à type de toux, d encombrement bronchique ou de bronchospasme perturbent la qualité du sommeil. Les désaturations nocturnes sont assez fréquentes, souvent prolongées, même chez des patients dont la PaO 2 diurne est supérieure à 60 mm Hg le jour (Niveau de preuve : 2). Manifestations cliniques en rapport avec les troubles respiratoires non apnéïques du sommeil Ces manifestations cliniques sont principalement en rapport avec les perturbations du sommeil, induites par les évènements respiratoires non apnéïques. Ces manifestations ne sont pas spécifiques. Ces symptômes doivent attirer l attention chez des patients suivis pour une pathologie chronique susceptible d engendrer des troubles respiratoires nocturnes. À titre d exemple, c est sur la recherche de ces symptômes qu est basée en partie la surveillance respiratoire des patients neuromusculaires. Les symptômes sont notamment d ordre neuropsychologiques avec : un sommeil de mauvaise qualité avec de nombreux éveils, des cauchemars, une nycturie ; des sueurs nocturnes; des céphalées au réveil ; une anorexie au petit-déjeuner ; une asthénie, une fatigue, une sensation de lassitude ; une somnolence diurne excessive ; un trouble de l humeur (irritabilité, état dépressif) ; une diminution des performances intellectuelles (troubles de la mémoire et de la concentration) ; Ces symptômes sont également d ordre respiratoire : dyspnée d effort ou aggravation d une dyspnée d effort préexistante ; orthopnée; Ces symptômes peuvent diminuer ou disparaître (Niveau de preuve : 4) avec le traitement des troubles respiratoires non apnéïques [6]. Les moyens d investigations des troubles respiratoires non apnéïques du sommeil Les méthodes objectives Ce sont principalement : L oxymétrie nocturne permet de mettre en évidence les épisodes de désaturation, quel qu en soit le mécanisme. L oxymétrie nocturne est bien adaptée à la mise en évidence des désaturations nocturnes dans la BPCO (Niveau de preuve : 2) [7]. En ce qui concerne les désaturations en rapport avec une hypoventilation alvéolaire, cet outil est peu sensible, car la saturation en oxygène n est pas proportionnelle à la PaO 2, et de plus l hypoxémie est souvent beaucoup plus modérée que celle observée dans les inégalités ventilation/perfusion. En principe, l hypoventilation alvéolaire s accompagne d une désaturation prolongée, souvent de plusieurs minutes. Plusieurs définitions de la désaturation nocturne ont été proposées : une SaO 2 < 90 % pendant au moins 30 % du temps d enregistrement ou une SaO 2 moyenne <90% au cours du sommeil. Cette définition est surtout proposée dans la BPCO ; une désaturation de 3% ou 4% en dessous de la SaO 2 d éveil, quelle que soit sa durée. Cette définition est surtout utile pour le diagnostic du SAOS ; une SaO 2 <88% plus de 5minutes consécutives. Cette définition sert surtout à l indication de la ventilation non invasive nocturne chez les patients restrictifs. Il s agit souvent d hypoventilation au cours du sommeil déjà sévère. La mesure de la PCO 2 transcutanée nocturne est une méthode beaucoup plus adaptée au dépistage d une hypoventilation nocturne, mais l utilisation de cette méthode reste encore limitée du fait d une assez mauvaise précision (Niveau de preuve : 2) de ces appareils [8]. La polysomnographie est l examen de référence pour le diagnostic du syndrome d apnées du sommeil. Cependant, l étude des paramètres ventilatoires peut permettre de visualiser les épisodes d hypoventilation, soit de façon indirecte (par le capteur de pression nasale) ou de façon directe, mais dans ce cas il faut utiliser un pneumotachographe. Les méthodes subjectives sont basées sur des questionnaires Les questionnaires de qualité du sommeil, comme le questionnaire de Pittsburgh ; les questionnaires de somnolence diurne comme le questionnaire d Epworth. 670 Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 669-72

Troubles respiratoires non apnéïques du sommeil Les caractéristiques de ces questionnaires sont bien connues dans des pathologies fréquentes comme le syndrome d apnées obstructives du sommeil. Mais leur validité dans la recherche d une hypoventilation nocturne n a pratiquement pas fait l objet d études publiées. Principales étiologies des troubles respiratoires non apnéïques du sommeil (listes non exhaustives!) Les maladies conduisant à un trouble ventilatoire restrictif les maladies neuromusculaires myopathies (dystrophie musculaire de Duchenne, de Steinert, myopathie des ceintures) le syndrome post-poliomyélite la sclérose latérale amyotrophique la paralysie diaphragmatique bilatérale l hypoventilation alvéolaire centrale (syndrome d Ondine) les maladies de la paroi thoracique, de la plèvre et du poumon cyphoscoliose séquelles mutilantes de tuberculose résections chirurgicales pulmonaires étendues le syndrome obésité hypoventilation certaines associations avec le syndrome d apnées obstructives du sommeil sont fréquentes et occupent une place particulière : l association SAOS et BPCO [9] encore connue sous le nom d overlap syndrome ou encore l association SAOS et syndrome obésité hypoventilation. Les maladies avec un trouble ventilatoire obstructif La BPCO La mucoviscidose Les dilatations de bronches Pronostic des troubles respiratoires non apnéïques du sommeil Il n est pas certain que les troubles respiratoires non apnéïques du sommeil affectent le pronostic vital indépendamment de la maladie causale. Dans la BPCO, les désaturations nocturnes sont fréquentes, y compris chez des patients avec des PaO 2 >60mm Hg. Chez des patients BPCO dont le niveau de gravité est identique (en terme d obstruction bronchique), la survenue de désaturations nocturnes ne semble pas avoir d effet sur l hémodynamique pulmonaire ni sur l espérance de vie [10]. (Niveau de preuve : 2). Traitement des troubles respiratoires non apnéïques du sommeil D un point de vue physiopathologique, le traitement des troubles respiratoires non apnéïques du sommeil peut relever soit de l oxygénothérapie, soit de la ventilation assistée nocturne. Le traitement par oxygénothérapie nocturne de la désaturation nocturne dans la BPCO Les études NOTT et MRC des années 1980 ont bien montré que l oxygénothérapie de longue durée à domicile chez les patients insuffisants respiratoires chroniques par BPCO améliore leur pronostic vital (PaO 2 < 55-60 mmhg). Par contre, Chaouat et coll. [11] n ont pas trouvé de bénéfice en terme de pronostic à traiter un patient par oxygénothérapie nocturne lorsqu il présente des désaturations nocturnes isolées avec une PaO 2 diurne > 60 mmhg (Niveau de preuve : 2). Le traitement par ventilation assistée Au cours des deux dernières décennies se sont développées des techniques de ventilation non invasive en pression positive par une interface nasale ou bucco-nasale. Ces techniques de ventilation au long cours à domicile ont amélioré le pronostic vital (Niveau de preuve : 4) de certaines maladies, en particulier celui de certaines maladies neuromusculaires ou le syndrome obésité-hypoventilation [12]. Néanmoins nous ne disposons pas d études randomisées dans ce domaine. Une étude comparant la ventilation précoce à la ventilation de nécessité chez des patients myopathes avait conclu à un effet défavorable (Niveau de preuve : 2) de cette ventilation précoce [13]. Les troubles respiratoires nocturnes non apnéïques sont fréquents et apparaissent souvent au cours de maladies évolutives comme les maladies neuromusculaires et accompagnent généralement les maladies respiratoires chroniques comme la BPCO. Ces troubles respiratoires nocturnes se révèlent par des désaturations nocturnes souvent en rapport avec une hypoventilation nocturne. Ces troubles respiratoires nocturnes ne semblent pas aggraver le pronostic de l insuffisance respiratoire. Références 1 Orem J, Kubin L : Respiratory physiology : central neural control. In Principles and practice of sleep medicine. Kryger MH, Roth T and Dement WC Ed. Elsevier Saunders, 4th ed., 2005, pp213-223. 2 Becker HF, Piper AJ, Flynn WE,. McNamara SG, Grunstein RR, Peter JH, Sullivan CE : Breathing during sleep in patients with nocturnal desaturation. Am J Respir Crit Care Med 1999, 159:112-8. 3 Ragette R, Mellies U, Schwake C, Voit T, Teschler H : Patterns and predictors of sleep disordered breathing in primary myopathies. Thorax 2002 ; 57 : 724-8. 4 Levi-Valensi P, Weitzenblum E, Rida Z, Aubry P, Braghiroli A, Donner C, Aprill M, Zielinski J, Wurtemberger G : Sleep-related 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 671

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Le syndrome d apnées obstructives du sommeil F. Gagnadoux 1 (Expert), J.C. Meurice 2 (Rapporteur) Les éléments pour comprendre Physiopathologie Le syndrome d apnées obstructives du sommeil (SAOS) est caractérisé par des symptômes, dominés par la somnolence diurne excessive, en rapport avec la survenue d épisodes répétés d un collapsus pharyngé au cours du sommeil [1] en rapport avec un déséquilibre entre les forces d ouverture et de fermeture du pharynx et/ou une diminution de calibre du pharynx [2] favorisée par la diminution d activité volontaire et réflexe des muscles dilatateurs pharyngés au cours du sommeil [3]. Définitions 1 Département de Pneumologie, CHU d Angers, France. 2 Service de Pneumologie, CHU Poitiers, France. Correspondance : F. Gagnadoux 4 rue Larrey, 49033 Angers Cedex 01. frgagnadoux@chu-angers.fr La définition du SAOS retenue en 1999 par le panel d expert de l American Academy of Sleep Medicine associe une somnolence diurne ou au moins 2 symptômes évocateurs (ronflement bruyant, éveils nocturnes répétés, sommeil non récupérateur, fatigue diurne, troubles de concentration, arrêts respiratoires nocturnes) et plus de cinq évènements respiratoires anormaux par heure de sommeil lors d un enregistrement polysomnographique [4]. Trois types d évènements respiratoires anormaux sont considérés dans cette définition. L apnée est définie par une interruption des débits de plus de 10 secondes. Elle est dite obstructive ou centrale selon qu elle s accompagne d une persistance ou d une interruption des efforts respiratoires. L hypopnée est définie par une diminution du signal de débit de plus de 50 % ou par une diminution de moins de 50 % accompagnée d une désaturation ou d un micro-éveil. Sont également pris en compte les éveils liés à une augmentation de l effort respiratoire définis par une dépression œsophagienne progressivement croissante se terminant par un micro-éveil. Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 673-6 Doi : 10.1019/200720067 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 673

F. Gagnadoux L ampleur du problème Prévalence, facteurs prédisposant et évolution naturelle du SAOS Il est possible d estimer à environ 20 % la prévalence d un index d apnées-hypopnées (IAH) 5 lors d un examen polysomnographique au sein d une population caucasienne [5, 6]. Dans les mêmes études, la prévalence du SAOS défini par l association d un IAH 5 ou 10 et d une plainte de somnolence diurne est comprise entre 1,2 et 3 % chez les femmes et entre 3,4 et 4 % chez les hommes (Niveau de Preuve (NP4)). La prévalence du SAOS est 2 à 3 fois plus élevée chez l homme que chez la femme [6] (NP4). La prévalence des troubles respiratoires au cours du sommeil augmente avec l âge [6] (NP4). Ainsi un IAH 10 est constaté deux fois plus fréquemment au-delà de 65 ans (24 %) que dans la tranche 45-64 ans (12 %). Toutefois, les symptômes de SAOS seraient moins fréquents et la proportion d apnées centrales plus élevée chez les sujets de plus de 65 ans. La prévalence du SAOS passe de 12 % pour un index de masse corporelle (IMC) < 25 à 32 % pour un IMC > 31 kg/m 2 [7] (NP4). Inversement, le pourcentage d obèses passe de 41 % chez les sujets ayant un IAH entre 5 et 15 à 61 % pour des IAH > 30 [8]. Le suivi de cohortes épidémiologiques objective une augmentation spontanée de l IAH au cours du temps (NP2), pouvant atteindre, au sein de la Wisconsin Sleep Cohort Study, une valeur de 2,7 ± 8,2 en 8 ans, cette augmentation naturelle de l IAH étant plus marquée chez les sujets présentant une obésité [9]. Conséquences du SAOS Les conséquences neurocognitives du SAOS sont dominées par la somnolence diurne qui est accompagnée de perturbations de la qualité de vie et de troubles cognitifs [10]. L utilisation de l échelle de somnolence d Epworth (ESE) permet de retrouver un score plus élevé chez les patients porteurs de SAOS que chez des sujets ronfleurs sans SAOS [11] (NP3). Une somnolence diurne excessive est présente chez 35 % des sujets ayant un IAH 30 contre 21 % des sujets ayant un IAH < 5 [12] (NP4). Elle peut également être évaluée par des tests objectifs (tests itératifs de latence d endormissement, tests de maintien d éveil). La principale complication de la somnolence diurne associée au SAOS en terme de santé publique est représentée par les accidents automobiles avec un risque relatif de 6.3 (95 % CI : 2.4-16.2) d accident de voiture [13] (NP3). Le SAOS est associé à une augmentation de la morbidité cardiovasculaire avec une influence du SAOS, et de sa sévérité, sur l existence ou l apparition d une HTA, indépendamment de ces cofacteurs [14] (NP2). et la mise en évidence d une baisse de la pression artérielle sous traitement par pression positive continue [15, 16] (NP2). Il existe une relation statistique indépendante entre l IAH et la présence d une maladie coronarienne, d une insuffisance cardiaque, d une arythmie cardiaque ou d une pathologie cérébrovasculaire [17, 18] (NP4), associé à une augmentation de la mortalité cardiovasculaire [19] (NP2) et du risque de survenu d un décès d origine cardiaque au cours de la nuit [20] (NP3). Le SAOS constitue un facteur de risque indépendant d insulinorésistance [21] (NP4) et il est fréquemment associé à un syndrome métabolique (NP3) susceptible d influer sur le risque vasculaire. Diagnostic Conformément aux recommandations de 1999 [4], le diagnostic de SAOS repose sur des éléments cliniques et des données d enregistrements nocturnes. Éléments cliniques de présomption Le diagnostic de SAOS est évoqué devant l association de symptômes non spécifiques dominés par le ronflement, la somnolence diurne et les apnées constatées par l entourage [22]. Un périmètre cervical élevé (> 48 cm) en rapport avec une obésité à prédominance faciotronculaire est évocateur du diagnostic [23] (NP4). Enregistrements nocturnes Le diagnostic de SAOS repose nécessairement sur un enregistrement nocturne dont le gold standard est représenté par la polysomnographie (PSG) en laboratoire de sommeil. La PSG en laboratoire de sommeil est un examen dont la complexité est inadaptée à la prévalence élevée du SAOS et contribue à un retard diagnostic évalué entre 2 et 60 mois selon les pays [24] (NP4). Confrontée à la PSG en laboratoire, la polygraphie ventilatoire limitée à l enregistrement des débits aériens, des efforts respiratoires et de la saturation oxyhémoglobinée a une sensibilité de 82 à 94 % et une spécificité de 82 à 100 % pour le diagnostic de SAOS (NP2). L oxymétrie seule permet une détection indirecte des apnées et hypopnées à partir des désaturations qu elles occasionnent. En fonction des performances de l oxymètre utilisé, et des seuils d IAH choisis, l oxymétrie à une sensibilité de 36 à 100 % (87,4 ± 3,8 %) et une spécificité de 23 à 99 % (64,9 ± 6,7 %) pour le diagnostic de SAOS (NP2). Elle ne permet pas de différencier les apnées centrales des apnées obstructives [25] (NP2). Traitement Pression positive continue nasale L application au cours du sommeil d une pression positive continue (PPC) par voie nasale ou nasobuccale s oppose au collapsus inspiratoire du pharynx grâce à un effet d «attelle pneumatique» [26]. Une méta-analyse cochrane publiée en 2006 a répertorié 36 études randomisées évaluant l effet de la 674 Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 673-6

Le syndrome d apnées obstructives du sommeil PPC sur une durée minimale de deux semaines [27]. La PPC diminue les évènements respiratoires au cours du sommeil [27] (NP1), elle améliore la vigilance diurne, la qualité de vie (NP1), les troubles cognitifs et elle entraîne une baisse des pressions artérielles systolique et diastolique [27] (NP2). Elle s accompagne d une diminution de la fréquence des accidents automobiles [28] (NP3) et d une diminution de l incidence des évènements cardiovasculaires [19] (NP3). Le taux de refus initial de la PPC est compris entre 5 et 50 % et 12 à 25 % des patients abandonnent le traitement dans les 3 ans ce d autant qu ils ont peu d évènements respiratoires au cours du sommeil et/ou qu ils sont peu somnolents [29] (NP2). Les phénomènes d intolérance nasale à la PPC sont fréquents et sont améliorés par l humidification chauffante [29] (NP2). La PPC autopilotée est équivalente à la PPC constante en terme d impact sur l IAH et sur l échelle d Epworth et en terme d observance thérapeutique [30] (NP1). Orthèses d avancée mandibulaire L avancée de la mandibule par une orthèse endobuccale permet d augmenter la surface et de diminuer la collabsibilité du pharynx durant le sommeil. Une méta-analyse cochrane publiée en 2006 a répertorié 16 études randomisées évaluant l effet des orthèses d avancée mandibulaires (OAM) [31]. Le traitement par OAM permet de diminuer l IAH, d améliorer la vigilance diurne et la qualité de vie [31] (NP2) et s associe à une diminution de la pression artérielle (NP2). Le sexe féminin, la faible sévérité et le caractère positionnel du SAOS constituent des facteurs prédictifs d efficacité des OAM [32] (NP4). Les OAM sont inférieures à la PPC en terme d impact sur l IAH [31] (NP1) mais bénéficient d une meilleure acceptation initiale (NP2). Les effets secondaires locaux sont fréquents de même que les abandons de traitement [33] (NP2). Leur utilisation prolongée entraîne des modifications de l articulée dentaire [33] (NP2). Chirurgie Le traitement chirurgical du SAOS est insuffisamment évalué par des études randomisées [34]. L uvulo-palato-pharyngoplastie (UPPP) s accompagne d une diminution de l IAH à court terme de 38 % en moyenne, avec un impact sur l IAH inférieur à celui de l OAM [35] (NP2). La deuxième approche, représentée par la chirurgie des bases osseuses (avancée maxillo-mandibulaire) a une efficacité globale sur l IAH comprise entre 75 et 100 % à court terme [36] (NP2). Règles hygiéno-diététiques Les liens étroits qui unissent le SAOS et l obésité militent en faveur d un impact favorable de la réduction pondérale sur les troubles respiratoires au cours du sommeil. Différentes stratégies de prises en charge de l obésité, comportementales, médicamenteuses ou chirurgicales aboutissent à des réductions du poids de 5 à 50 % s accompagnant de diminutions parfois importantes de l IAH, associées à des améliorations du sommeil et de la vigilance [37] (NP2). Plus de 50 % des SAOS sont caractérisés par des évènements survenant préférentiellement en décubitus dorsal (NP4) pouvant être accessible à un traitement positionnel visant à réduire le temps de sommeil en décubitus dorsal s accompagnant d une diminution de l IAH toutefois moins importante que sous PPC [38] (NP2). Les grandes questions non résolues Comment augmenter (et donc simplifier) l offre diagnostique du SAOS dans la population générale et dans les populations à risque (cardiologiques, métaboliques)? Quelle est la part de responsabilité des troubles métaboliques très fréquemment associés au SAOS dans le risque vasculaire lié à cette maladie? Quelles sont les indications et modalités de traitement du SAOS modéré et/ou peu symptomatique? Références 1 Stradling JR, Davies RJ : Obstructive sleep apnoea/hypopnoea syndrome: definitions, epidemiology, and natural history. Thorax 2004 ; 59 : 73-8. 2 Watanabe T, Icono S, Tanaka A, Tanzawa H, Nishino T : Contribution of body habitus and craniofacial characteristics to segmental closing pressures of the passive pharynx in patients with sleep-disordered breathing. Am J Respir Crit Care Med 2002 ; 165 : 260-5. 3 Fogel RB, Malhotra A, White DP : pathophysiology of obstructive sleep apnoea/hypopnoea syndrome. Thorax 2004 ; 59 : 159-63. 4 Sleep-related breathing disorders in adults : recommendations for syndrome definition and measurement techniques in clinical research. The Report of an American Academy of Sleep Medicine Task Force. Sleep 1999 ; 22 : 667-89. 5 Young T, M. Palta, J. Dempsey, J. Skatrud, S. 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