18/03/14 BOURDILLON Marjane L2 Revêtement cutané Dr. Jean-Phillipe Dales jean-phillipe.dales@ap-hm.fr 12 pages Relecteur n 3 Analyse d'un compte rendu anatomo-pathologique en dermato-pathologie Plan A. Introduction B. Définitions C. Les différents profils lésionnels : diagnostic en pathologie inflammatoire cutanée I. Dermatoses eczématiformes (spongiotiques) II. Dermatoses psoriasiformes III. Dermatoses Lichénoïdes IV. Dermatoses (vésiculo)pustuleuses V. Dermatoses bulleuses VI. Vascularites cutanées VII. Lupus érythémateux VIII. Hypodermites et panniculites D. Conclusion A. Introduction Le compte-rendu est un document (papier) qui constitue un échange d'informations entre le clinicien et l'anatomo-pathologiste. Dans ce document, l'anapath fait état de ce qu'il a observé en microscopie optique après coloration des tissus. Le plus souvent, il travaille sur des biopsies cutanées. L'objectif est de parvenir au diagnostic. Il nécessite de transmettre la biopsie avec les données utiles à l'interprétation histologique. Il doit répondre aux questions posées par le clinicien et confirmer ou pas le diagnostic proposé par celui-ci. Il y a donc, dans ce compte-rendu, des informations (cliniques, biologiques) et des hypothèses cliniques. Il décrit des lésions élémentaires. La description des lésions se termine par une synthèse décrivant un cadre lésionnel. La conclusion comprend : Une ou plusieurs propositions diagnostiques Eventuellement un commentaire et la réponse aux questions du clinicien. Il y a 4 grands types de conclusions possibles dans ces comptes-rendus : Aspect observé par l'anapath caractéristique et en accord avec la clinique Aspect observé évocateur mais atypique ou incomplet par rapport au diagnostic proposé par le clinicien Aspect non spécifique Résultat ne s'accordant pas avec la clinique (= discordance anatomo-clinique) 1/12
B. Définitions Histologie de la peau normale L'épiderme est fait d'une juxtaposition d'assises cellulaires, depuis la profondeur vers la superficie : l'assise basale : faite de kératinocytes (K) basaux avec noyaux volumineux et un cytoplasme peu abondant. C'est à ce niveau que se fait le renouvellement cellulaire. le corps muqueux : structure pluristratifiée faite de K dont le cytoplasme est de plus en plus abondant de la profondeur vers la superficie. La taille des noyaux diminue. On parle de gradient de maturation. La couche granuleuse : couche pluristratifiée faite K à cytoplasme abondant avec des grains de kératohyaline. Leur noyau est petit. La couche cornée : la couche la plus superficielle qui est faite uniquement de K anucléés! En pathologie, ils sont nucléés. Le derme contient des vaisseaux lymphatiques et sanguins de diamètre plus important vers la profondeur. Il y a des cellules de l'inflammation autour des vaisseaux. On a aussi des terminaisons nerveuses. Les annexes cutanées sont : les glandes sudorales (ou sudoripares) et les follicules pilo-sébacés. Définitions des lésions élémentaires Acanthose : épaississement du corps muqueux et donc de l'épiderme dans son ensemble. Acantholyse : A l'origine des dermatoses bulleuses. Elle se fait dans l'épaisseur de l'épiderme. Il y a perte de cohésion des K entre eux en raison de la rupture des ponts d'union intercellulaires (les desmosomes). Exocytose : migration de cellules inflammatoires dans l'épiderme en provenance du derme Hyperkératose : épaississement de la couche cornée Papillomatose : accentuation du dessin des papilles dermiques et des crêtes interpapillaires / épidermiques. En surface ce n'est pas beaucoup modifié Pustule : spongiose avec regroupement de polynucléaires neutrophiles et/ou éosinophiles sous la couche cornée ou dans la couche cornée Spongiose : oedème intercellulaire entre les K par afflux de liquide interstitiel (exosérose) Vésicule : cavité formée par la confluence de zones spongiotiques avec exocytose de cellules mononucléées (<1cm) Bulle : accumulation liquidienne intra-épidermique ou sous-épidermique (>1cm) Infiltrats cellulaires : regroupement de cellules inflammatoires dans le derme Oedème dermique : pâleur du derme liée à un liquide interstitiel abondant À partir de ces définitions on va voir les différentes lésions qui comportent ces éléments, il est donc nécessaire de les connaître. 2/12
C. Les différents profils lésionnels : diagnostic en pathologie inflammatoire cutanée I. Dermatoses eczématiformes (spongiotiques) C'est l'exemple typique de l'eczéma Elle associent une ou plusieurs lésions élémentaires de l'eczéma aigu : Spongiose qui peut donner des vésicules si elle est très abondante Parakératose focale compacte : épaississement de la couche cornée avec une rétention des noyaux à la surface (donc ici les K de la cornée ont gardé leur noyau, ce qui n'est pas le cas normalement) Exocytose de lymphocytes dans les zones de spongiose Sur les photos, on voit un épaississement de l'épiderme et particulièrement de la cornée ainsi qu'une clarté entre les K. Ils s'écartent sans se détacher. Les contours cellulaires sont visibles. C'est dû à l'oedème. Cet oedème peut produire une cavité aboutissant à une vésicule. Sur cette image, on voit un spongiose avec un fort grossissement Ces descriptions histologiques vont pouvoir s'inscrire dans différentes situations cliniques et vont coïncider avec différents diagnostics étiologiques parmi lesquels : Eczéma (atopique, de contact) Toxidermie Dermite séborrhéique Pityriasis rosé de Gibert Mycose superficielle (candidose, dermatophytose) Causées par des champignons Photodermatoses II. Dermatoses psoriasiformes Ces lésions associent une ou plusieurs lésions élémentaires de la plaque typique de psoriasis : Hyperkératose parakératosique lamellaire (feuilletée, sèche) étendue Hyperplasie régulière de l'épiderme consécutive à une acanthose (épaississement du corps muqueux) et à une papillomatose (accentuation du dessin), allongement sélectif et parallèle des crêtes épidermiques en «massue», amincissement des zones supra-papillaires, couche granuleuse amincie Exocytose de polynucléaires neutrophiles sous la couche cornée (qui peuvent être à l'origine d'un microabcès qui sont des amas de polynucléaires neutrophiles, un peu comme une pustule) 3/12
La couche cornée est considérablement épaissie Sur cette photo, on voit un acanthose (épaississement du corps muqueux) associé à un parakératose (épaississement de la couche cornée). Les papilles dermiques montent haut dans l'épiderme. Ici c'est une papillomatose : les crêtes épidermiques descendent très bas dans le derme. Il y a aussi une hyperkératose feuilletée et diffuse, des spongioses, une exocytose de PnN sous la cornée et une inflammation das le derme. Listes des dermatoses pouvant être à l'origine de ces lésions : Psoriasis Eczéma lichénifié : eczéma chronique Toxidermie psoriasiforme Pityriasis rosé de Gibert Dermite séborrhéique Mycose superficielle Prurigo : lésions dues au grattage III. Dermatoses Lichénoïdes On les appelle lichénoïdes car elles ressemblent à du lichen. Les dermatoses lichénoïdes ou dermatoses de l'interface dermo-épidermique sont des affections associant une ou plusieurs lésions élémentaires de la papule de lichen plan : Vacuolisation des cellules basales, nécroses kératinocytaires appelées aussi corps cytoïdes Incontinence pigmentaire : le pigment mélanique normalement localisé dans l'épiderme, migre dans le derme à cause de l'inflammation Inflammation Lichénoïde : Infiltrat lymphocytaire en bande sous épidermique pénétrant dans les couches basales de l'épiderme. L'inflammation ne va pas en profondeur. Elle reste collée à la basale. L'adjectif lichénoïde désigne l'ensemble de ces 3 lésions élémentaires. En noir, on voit des regroupements de lymphocytes qui sont en bande superficielle. On a également une vacuolisation kératinocytaire au niveau de la basale épidermique. On ne voit pas très bien la jonction dermo-épidermique à cause de l'inflammation importante. Plus fort grossissement, on peut voir une nécrose kératinocytaire. C'est une image typique des dermatoses lichénoïdes. 4/12
Les dermatoses lichénoïdes sont observées dans différentes étiologies : Lichen Toxidermie : inflammation de la peau due à un médicament Lupus érythémateux chronique Erythème polymorphe Dermatomyosite Erythème pigmenté fixe Pityriasis lichénoïdes (parapsoriasis en goutte) Lymphome lichénoïde (mycosis fongoïde) IV. Dermatoses (vésiculo)pustuleuses Les pustules sont retrouvées dans la couche cornée ou sous la couche cornée. On les observe dans différentes étiologies : Viroses à tropisme cutané avec effet cytopathogène (herpès, varicelle, primo-infection CMV, variole, nodule d'orf) Psoriasis pustuleux Toxidermie (PEAG) Impétigo (infection à streptocoque) Folliculite infectieuse (staphylocoques aureus, mycose) Dermatophytose (pied d'athlète, teigne) Acné Eczéma Image 1 : Infection d'un poil à cause d'un champignon = folliculite infectieuse. Débris de poils avec des filaments de champignons. Image 2 : Accumulation de sérosité et de PnN au niveau du corps muqueux et jusque sous la cornée. Illustration classique de la pustule. Image 3 : Lésion vésiculo-pustuleuse de varicelle. (on peut observer des noyaux polylobés) 5/12
V. Dermatoses bulleuses Bulle : résulte toujours d'un décollement (clivage) qui se fait soit dans l'épiderme soit à la jonction dermoépidermique. C'est une accumulation liquidienne intra ou sous-épidermique. Le mécanisme de la bulle est variable : On peut avoir une acantholyse (quand le clivage est intra-épidermique), une nécrose épidermique, un clivage intra-épidermique, une spongiose, un clivage de la jonction dermo-épidermique. Lors de son analyse, l'anapath a recours à l'immunofluorescence directe qui lui permet de mettre en évidence des dépôts d'immunoglobulines (IgG, A, M) et des fractions du complément. On décrit deux types de dermatoses bulleuses : Dermatoses bulleuses auto-immunes Intra-épidermique (acantholyse) Sous-épidermique Dermatoses bulleuses non auto-immunes. 1. Dermatoses bulleuses auto-immunes a) Dermatoses bulleuses auto-immunes intra-épidermiques = Pemphigus Elles sont consécutives à un clivage à l'intérieur, dans l'épaisseur de l'épiderme. C'est le groupe des Pemphigus, parmi lesquels, on a : Pemphigus superficiel Pemphigus profond Pemphigus paranéoplasiques Pemphigus à IgA Pemphigus Herpétiforme Pemphigus médicamenteux NE pas retenir ces exemples. La photo ci-contre illustre l'acantholyse : la partie profonde de l'épiderme est disloquée (au niveau de la basale). Il y a une perte de cohésion des K qui entraîne un clivage dans l'épiderme et l'apparition de bulles. C'est une maladie auto-immune qui s'attaque à une protéine impliquée dans la cohésion des K. Quand l'anapath suspecte un pemphigus, il va réaliser une immunofluorescence directe. Elle révèle des dépôts d'ig, des fragments du complément qui prennent un aspect en résille (image du ci-contre). On observe un marquage vert jaune (que vous ne verrez pas du coup ^^) à la jonction des K. Important : le marquage est en résille. 6/12
Ce tableau n'est pas à savoir, le prof est passé très vite passé dessus. «Il permet simplement de mieux comprendre le mécanisme». b) Dermatoses bulleuses auto-immunes sous-épidermiques Le clivage se fait sans acantholyse. «Une bulle est sous-épidermique car elle n'est pas intra-épidermique car il n'y a pas d'acantholyse.» Le clivage se situe plus en profondeur à la jonction derme/épiderme. Il peut s'agir de pathologies diverses parmi les plus fréquentes : les pemphigoïdes bulleuses gravidiques (herpès gestationis) cicatricielles Lichen pemphigoïde l'épidermolyse bulleuse acquise la dermatite herpétiforme la dermatose à IgA linéaire Sur l'image ci-contre, on voit une bulle : une cavité avec un toit et un plancher. Le toit est représenté par l'épiderme complet et le plancher par le derme. Dans la cavité on trouve un liquide composé de cellules de l'inflammation. 7/12
La même chose en plus fort grossissement. Enfin ici avec un grossissement encore plus fort, on peut voir de quoi est constitué l'infiltrat dermique : PnN (noyau polylobé, seule manière de les distinguer des lymphocytes). En immunofluorescence, on voit un fil vert à la jonction dermoépidermique, là où s'effectue le clivage. Fin marquage à la jonction. Le tableau n'est pas à savoir 2. Dermatoses bulleuses non auto-immunes Toxidermies bulleuses : nécrolyse «épidermique toxique» et syndrome de Stevens-Johnson. Erythème pigmenté fixe bulleux Erythème polymorphe Dermatoses bulleuses héréditaires et congénitales : épidermolyse bulleuse héréditaire et dermatoses acantholytiques, pemphigus familial et maladie de Darier Dermatoses bulleuses d'origine infectieuse : Impétigo bulleux et épidermolyse staphylococcique aiguë Dermatoses bulleuses métaboliques : porphyries cutanées tardives et pseudoporphyries 8/12
VI.Vascularites cutanées C'est une atteinte inflammatoire de la paroi d'un petit vaisseau (capillaire, veinule, artériole) avec rupture de la continuité endothéliale et anomalie de la paroi. Elles sont classées en fonction de la taille des vaisseaux atteints. On retrouve la présence de cellules inflammatoires (PnN), de dépôts fibrinoïdes dans la paroi vasculaire et autour des vaisseau. (les contours peuvent être flous et la lumière bouchée = thrombose). On peut parfois observer une extravasation d'hématies dans le secteur interstitiel. Le travail de l'anapath consiste à mettre en évidence une pénétration de la paroi vasculaire par les éléments inflammatoires. Image d'une vascularite Photo : Infiltrat inflammatoire autour du vaisseau fait de lymphocytes : vasculite (ou vascularite, c'est la même chose). La lumière peut être obturée par une thrombose. La paroi est envahie par les cellules inflammatoires. Les vaisseaux sont très abîmés par l'inflammation. Sur l'image, on a une nécrose fibrinoïde de la paroi vasculaire L'immunofluorescence directe aide au diagnostic, on verra alors des dépôts vasculaires fluorescents. Les vascularites cutanées sont distinguées en 4 formes : Vascularite leucocytoclasique (médicament, auto-immunité, infections, paranéoplasique). Leucocytoclasie = altération +++ des PnN avec poussière de noyaux des PnN. Vascularite urticarienne Phlébites Périartérite noueuse 9/12
VII. Lupus érythémateux Il en existe 2 formes : le lupus systémique et le lupus cutané. C'est une maladie auto-immune qui peut atteindre différents organes comme le cœur, le SN, les reins ou encore la peau. Le lupus se caractérise par une inflammation dermique péri-vasculaire et péri-annexielle et une altération vacuolaire de la basale épidermique. Lésions engendrées par le lupus érythémateux : Para ou orthokératose (dans la para les K de la cornée ont gardé leur noyau ; dans l'ortho ils ne les ont plus). Bouchons cornés ostiaux Vacuolisation et épaississement de la basale Infiltrat lymphocytaire péri-vasculaire et péri-annexiel du derme superficiel et profond Atrophie pilaire, atrophie épidermique, altération vacuolaire de la basale Sur cette image de biopsie cutanée, on observe un infiltrat lymphocytaire au contact des annexes pilo-sébacées. L'épiderme est souvent épaissit avec épaississement de la couche cornée et de la basale due à des dépôts d'ig. L'épaississement de la basale peut être révélé par une coloration spéciale, la coloration de PAS. L'épaississement apparaîtra sous forme de bande lupique en immunofluorescence (c'est en fait la basale épidermique). VIII. Hypodermites et panniculites C'est une inflammation de la partie la plus profonde de la peau : l'hypoderme (dans lequel on trouve du tissu adipeux, des lobules adipeux, des septas entre les lobules adipeux, vaisseaux, nerfs) On parle de panniculites si l'inflammation touche le lobule adipeux. 10/12
Les étiologies sont : Cytostéatonécrose d'origine pancréatique (cancer du pancréas, pancréatite) Cytostéatonécrose du nouveau-né (traumatisme obstétrical) Maladie de Weber-Christian Panniculites par déficit en alpha1-antitrypsine Panniculites des maladies systémiques (lupus) Image de Panniculites : En blanc, ce sont les lobules adipeux avec un septum conjonctif vascularisé qui les sépare. On parle d'hypodermite quand l'inflammation touche les septums (cloisons entre les lobules adipeux). Les étiologies sont : Hypodermites septales : érythème noueux Atteintes vasculaires hypodermiques : Péri-Artérite Noueuse (affecte les acides aminés de taille moyenne principalement au niveau cutané), Thrombophlébites,Vascularite nodulaire (érythème induré de Bazin) Image d'hypodermite : elle affecte le septum et dissocie les lobules adipeux. 11/12
D. Conclusion La confrontation anatomo-clinique est essentielle L'examen d'une biopsie cutanée peut conduire à : Un seul diagnostic Plusieurs hypothèses diagnostiques Une conclusion non spécifique, en précisant si possible les diagnostics compatibles ou incompatibles. NdCR : J'espère que les images vous conviendront, le prof n'a pas voulu faire passer son diapo a la fin du cours mais il a dit qu'il l'enverrai par mail à ceux qui le demande donc l'adresse est au début du ronéo et je la remet ici jean-phillipe.dales@ap-hm.fr Ceci dit il n'y a pas beaucoup de couleur dans ces images hormis quand c'est l'immunofluorescence où ce qui est plus clair est en fait vert. Mais à chaque fois ce qui est marqué en gras à coté décrit ce que l'on voit. 12/12