CONTRAT OBSEQUES ET TUTELLE : UN ARRET* PRECISE LES MODALITES D APPLICATION



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Transcription:

JURISPRUDENCE JURISPRUDENCE JURISPRUDENCE JURISPRUDENCE JURISPRUDENCE JURISPRUDENCE CONTRAT OBSEQUES ET TUTELLE : UN ARRET* PRECISE LES MODALITES D APPLICATION La Cour d appel de Douai a rendu le 16 Juin 2011 un arrêt dans une situation où elle reconnaît que «la convention obsèques litigieuse n est pas prohibée par l article L.132-3 alinéa 1, du code des assurances et elle n est pas contraire à l intérêt du majeur protégé.» Les faits : Un père, tuteur de son fils handicapé, a requis l autorisation du Juge des tutelles pour souscrire un contrat d assurance obsèques au nom de celui-ci. Une ordonnance de refus a été rendue, sur le fondement de l article L.132-3 du code des assurances. Le tuteur a fait appel de la décision. La société commercialisant le contrat est intervenue volontairement Analyse de la convention obsèques litigieuse : La Cour d appel s est référée aux documents transmis par la compagnie : le document d information, la note d information valant proposition de contrat et le «mandat dernières volontés». «La question litigieuse est de savoir si la convention obsèques que le tuteur souhaite conclure pour le compte de son fils sous tutelle tombe ou non dans le champ de l assurance en cas de décès sur la tête d un majeur en tutelle posée par l article L.132-3 du code des assurances.» La Cour continue en indiquant que «le seul but de cette prohibition est d éviter qu il soit spéculé sur la mort des personnes vulnérables en donnant un intérêt quelconque au bénéficiaire à favoriser voire à provoquer un tel décès.» Or, dans le cas d un contrat obsèques, l entreprise de pompes funèbres bénéficiaire du contrat ne perçoit pas une libéralité à titre gratuit mais «serait simplement payée pour l exécution d une prestation de services onéreuse dont le contenu a été déterminé à l avance». Pour finir son analyse, la Cour indique que le contrat est en réalité un contrat d assurance sur la vie particulier, en ce sens que le premier bénéficiaire est nécessairement l entreprise de pompes funèbres déterminée lors de la conclusion du contrat, avec un contrat de prestations de services lié décrivant de manière précise les conditions des funérailles. En outre, la Cour relève que les sommes versées ne sont pas indisponibles car le contrat permet le rachat des sommes investies. Enfin, la Cour indique que le bénéficiaire de second rang devra être «les héritiers légaux». Conclusion : La souscription du contrat de convention obsèques pour un majeur en tutelle est possible si : - il contient l organisation des funérailles - le premier bénéficiaire est la compagnie de pompes funèbres - les bénéficiaires en second rang seront «les héritiers légaux». *(CA Douai du 16 Juin 2011. N RG 11/01985)

COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE DE LA PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS ET DES MINEURS N RG : 11/01985 ARRÊT DU 16 JUIN 2011 MINUTE N 191/11 APPELANT : Monsieur Alphonse S. INTERVENANTE VOLONTAIRE SAS FAPE OBSEQUES 7, Place de Coubertin 59730 RONCHIN représentée par Mmes XX COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE Thierry VERHEYDE, Conseiller délégué à la protection des majeurs, faisant fonction de Président, désigné suivant ordonnance du Premier Président de la Cour d'appel de DOUAI en date du 15 décembre 2010 Marie-Charlotte DALLE, Bénédicte ROBIN, Conseillers, Philippe LEMOINE, Greffier présent aux débats et au prononcé de l arrêt, Les débats ont eu lieu en Chambre du Conseil à l'audience du 9 juin 2011, au cours de laquelle Thierry VERHEYDE a été entendu en son rapport. Le dossier a été communiqué avant l'audience des débats au ministère public près la Cour d'appel de DOUAI, qui a également été avisé de la date de cette audience, à laquelle il n'a pas comparu. A l issue des débats, le président a avisé les parties présentes que l arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe de la Cour d appel de Douai à la date du 16 juin 2011. NOTIFICATION de l'arrêt aux parties par lettre recommandée avec avis de réception adressée le : ARRÊT CONTRADICTOIRE, prononcé hors la présence du public par sa mise à disposition au greffe de la Cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES Par ordonnance en date du 22 février 2011, le juge des tutelles du tribunal d instance de VILLE a rejeté la requête de M. Alphonse S. par laquelle ce dernier, agissant en sa qualité de tuteur de son fils M. Christophe S., sollicitait l autorisation de souscrire un contrat d assurance obsèques au nom de celui-ci. Le contrat en question est un contrat PROTECTION OBSÈQUES II dans lequel l assureur est la Compagnie GENERALI VIE. Il est commercialisé par la SAS FAPE Obsèques. L entreprise de pompes funèbres prestataire de service est l entreprise T. à F. mars 2011. L ordonnance de refus d autorisation a été notifiée à M. Alphonse S. le 12 Par courrier expédié le 16 mars 2011, M. Alphonse S. a fait appel de cette ordonnance. Dans ce courrier, M. Alphonse S. communiquait au juge des tutelles différents documents pouvant vous aider à accepter ma requête et précisait que sa démarche n avait aucun but lucratif et n était faite que pour garantir les funérailles de son fils après son propre décès. L ordonnance de rejet était fondée sur l article L. 132-3 du code des assurances, sur l article R. 2223-33 du code général des collectivités territoriales et sur la réponse du ministre de la justice à une question parlementaire publiée au Journal Officiel du 23 novembre 2010, le juge des tutelles ayant considéré que le contrat en question tombait sous le coup de la prohibition de l article L. 132-3 du code des assurances, le risque assuré étant constitué par le décès qui n est pas une simple éventualité mais dont seule la date est aléatoire. Le ministère public a eu communication du dossier de l affaire et a conclu à la confirmation de l ordonnance frappée d appel. A l audience des débats devant la Cour, M. Alphonse S. a demandé l infirmation de l ordonnance frappée d appel et a maintenu sa demande d autorisation de souscrire un contrat d assurance obsèques au nom de son fils, en précisant qu il verserait une prime unique. Il a exposé que son fils était gravement handicapé et totalement incapable d exprimer sa volonté, y compris sur l organisation de ses funérailles, qu il avait toujours son fils à charge, qu il avait 80 ans, et que son seul souci était d organiser à l avance les conditions des funérailles de son fils et d assurer leur prise en charge financière après son propre décès. La société FAPE Obsèques est intervenue volontairement à l instance pour soutenir la demande d autorisation faite par M. Alphonse S.. Elle a précisé que c était elle qui commercialisait le contrat obsèques litigieux, dont elle considère qu il n est pas un contrat d assurance en cas de décès mais seulement un contrat de prévoyance conclu avec une Compagnie d assurance-vie et adossé à un contrat de prestations de service passé avec une entreprises de pompes funèbres, si bien que ce contrat n est pas prohibé par l article L. 132-3 du code des assurances. Elle a précisé que les prestations funéraires peuvent toujours être modifiées, de même que le choix de l entreprise de pompes funèbres, ce qui règle selon elle la question d une éventuelle disparition ou mise en liquidation de l entreprise initialement choisie. Elle a également précisé que le capital placé peut toujours être racheté. MOTIFS DE LA DÉCISION I.- La législation pertinente : er 1 ) Article L. 132-3 al. 1 du code des assurances : Il est défendu à toute personne de contracter une assurance en cas de décès sur la tête d'un mineur âgé de moins de douze ans, d'un majeur en tutelle, d'une personne placée dans un établissement psychiatrique d'hospitalisation.

2 ) Article R. 2223-33 du code général des collectivités territoriales : Les formules de financement en prévision d'obsèques visées au 2 de l'article L. 2223-20 et proposées par les régies, les entreprises, les associations et leurs établissements habilités conformément à l'article L. 2223-23 sont des contrats dont l'exécution dépend de la durée de la vie humaine au sens du 1 de l'article L. 310-1 du code des assurances. 3 ) Article L. 2223-20 du code général des collectivités territoriales : Le règlement national des pompes funèbres est établi par décret en Conseil d'etat après avis du Conseil national des opérations funéraires. Il définit les modalités d'information des familles et les obligations des régies et des entreprises ou associations habilitées à fournir les prestations énumérées à l'article L. 2223-19. Ce règlement détermine : 1 Les conditions dans lesquelles est assurée l'information des familles, en particulier les mentions que doivent comporter les devis fournis par les prestataires faisant apparaître de façon distincte les prestations obligatoires, et plus généralement les modalités d'application des textes réglementaires pris sur la base de l'article L. 113-3 du code de la consommation ; 2 Les conditions d'application des dispositions du code des assurances aux formules de financement en prévision d'obsèques qui peuvent être proposées ; 3 Les obligations des régies et des entreprises ou associations habilitées en matière de formation professionnelle de leurs dirigeants et de leurs agents ; 4 Les obligations particulières relatives à la gestion et à l'utilisation des chambres funéraires ou mortuaires et des crématoriums. 4 ) Article L. 310-1 du code des assurances : Le contrôle de l'etat s'exerce dans l'intérêt des assurés, souscripteurs et bénéficiaires de contrats d'assurance et de capitalisation. Sont soumises à ce contrôle : 1 les entreprises qui sous forme d'assurance directe contractent des engagements dont l'exécution dépend de la durée de la vie humaine, s'engagent à verser un capital en cas de mariage ou de naissance d'enfants, ou font appel à l'épargne en vue de la capitalisation et contractent à cet effet des engagements déterminés ;... II. - Analyse de la convention obsèques litigieuse 1 ) le document d information du 16 février 2011 : Ce document précise notamment que le contrat proposé, dénommé PROTECTION OBSÈQUES II, est souscrit avec, comme assureur, la Compagnie d assurance GENERALI VIE, que l entreprise de pompes funèbres est l entreprise T. à F., et qu il garantit lors du décès de l assuré le versement d un capital de 3.727,23 à l organisme de pompes funèbres pour l exécution des prestations funéraires décrites dans un devis funéraire. Ce document indique par ailleurs que le souscripteur versera une prime unique de 2.154,50 i et que le capital sera revalorisé chaque année pour tenir compte de l évolution du coût de la vie. Il est également précisé au sujet du capital garanti : ère - en cas de décès par maladie la 1 année : 1/12ème pour chaque mois écoulé et donc en totalité au bout d un an ; - en cas de décès par accident : garantie totale et immédiate ; - dans tous les cas, il sera réglé le montant le plus élevé entre le montant des primes payées et le capital constitué à la date du décès. Il est enfin prévu une cotisation unique de 10 pour une convention

d assistance auprès de EUROP ASSISTANCE et des frais de dossier de 100, sommes payable une fois lors de la souscription. 2 ) La note d information valant proposition de contrat : Le contrat est qualifié de contrat individuel d assurance sur la vie selon la branche 20 de l article R. 321-1 du code des assurances. La durée du contrat est viagère. Le contrat garantit le versement d un capital en cas de décès de l assuré. L article 3 du paragraphe I précise que le bénéficiaire est l organisme de pompes funèbres désigné par le contractant, organisme qui devra prendre en charge et organiser les obsèques à concurrence du capital versé par l assureur à cet effet. Il est précisé plus loin dans ce même article : Aucune des dispositions du présent contrat n a pour effet de conférer un droit particulier à un bénéficiaire acceptant. Dans le cas où le Contractant renoncerait à faire exécuter les prestations funéraires par l organisme désigné il lui appartient d informer par écrit l assureur de la modification de l attribution bénéficiaire au profit du nouvel organisme. S il existe un solde après versement du capital à l entreprise de pompes funèbres, il est prévu que le capital est versé au bénéficiaire de 2 ème rang désigné, et, à défaut, aux héritiers légaux de l assuré. L article 3 du paragraphe II prévoit expressément une faculté de rachat permettant au contractant de choisir le paiement immédiat et définitif de la valeur acquise de son épargne, ce qui met fin au contrat. L article 5 du paragraphe II prévoit une participation aux résultats à hauteur de 90 % des bénéfices techniques et financiers. 3 ) le mandat dernières volontés : Il s agit d un contrat conclu entre l assuré, mandant, et l entreprise de pompes funèbres, mandataire, dans lequel sont décrites les conditions des funérailles. Une précision finale mentionne que le contractant est libre de modifier tant la nature des obsèques, le mode de sépulture, le contenu des prestations, les fournitures que l identité de l organisme de Pompes Funèbres (avec dans ce cas des frais de gestion forfaitaire de 50 i). III. - Position de la Cour : La question litigieuse est de savoir si la convention obsèques que le tuteur souhaite conclure pour le compte de son fils sous tutelle tombe ou non dans le champ de la prohibition de l assurance en cas de décès sur la tête d un majeur en tutelle posée par er l article L. 132-3 al. 1 du code des assurances. Le seul but de cette prohibition est d éviter qu il soit spéculé sur la mort de personnes vulnérables en donnant un intérêt quelconque au bénéficiaire à favoriser voire à provoquer un tel décès. En l espèce, ce risque paraît totalement exclu. En cas de décès du majeur sous tutelle, l entreprise de pompes funèbres bénéficiaire ne percevrait pas une quelconque libéralité à titre gratuit, mais serait simplement payée pour l exécution d une prestation de services onéreuse dont le contenu a été déterminé à l avance. Par ailleurs, la prohibition ci-dessus rappelée ne vise que l assurance en cas de décès. Comme tout texte restrictif de capacité et/ou de liberté, ce texte doit s interpréter strictement.

Or, le contrat proposé est expressément qualifié d assurance sur la vie. Il s agit non pas comme dans une assurance en cas de décès au sens strict prévoyant, en cas de décès du souscripteur, le versement d un capital et/ou d une rente moyennant le paiement de primes le plus souvent périodiques et progressives en fonction de l âge du souscripteur, mais du placement d une somme pendant la vie du souscripteur avec clause bénéficiaire en cas de décès, cette somme étant uniquement destinée à couvrir les frais liés aux funérailles du souscripteur, étant observé que le montant de la prime unique qui serait versée lors de la conclusion du contrat correspond au montant de ces frais, le mécanisme de l assurance vie permettant de faire fructifier cette somme chaque année pour, comme l indique le document d information ci-dessus rappelé, tenir compte de l évolution du coût de la vie. Il s agit donc en réalité d un contrat d assurance sur la vie particulier, en ce sens que le premier bénéficiaire est nécessairement l entreprise de pompes funèbres déterminée lors de la conclusion du contrat, avec, adossé à ce contrat d assurance sur la vie, un contrat de prestations de services lié, en l espèce le mandat dernières volontés, qui décrit de manière précise les conditions des funérailles. Il résulte par ailleurs des dispositions contractuelles ci-dessus rappelées que l entreprise de pompes funèbres désignée peut toujours être modifiée ultérieurement, ce qui permet notamment de prévenir tout risque lié à la disparition ou à la mise en liquidation judiciaire éventuelle de l entreprise choisie à l origine, ainsi que l a indiqué lors de l audience devant la Cour la SAS FAPE Obsèques. De même, ainsi qu il a été également ci-dessus rappelé, le mandat dernières volontés prévoit expressément une clause permettant au mandant de modifier librement, à tout moment, les conditions des funérailles. Enfin, la somme placée sur ce contrat d assurance vie n est pas indisponible, puisqu il a également été rappelé ci-dessus que le souscripteur peut exercer à tout moment sa faculté de rachat lui permettant, au besoin, de récupérer cette somme et de mettre fin au contrat. Le seul souci de l appelant, qui est âgé de 80 ans, et qui a toujours eu et a encore actuellement la charge effective de son fils gravement handicapé, et totalement incapable d exprimer la moindre volonté, est d organiser à l avance, au cas a priori probable où il décéderait avant son fils, les conditions des funérailles de ce dernier et de s assurer de leur prise en charge financière. La convention obsèques litigieuse n est pas prohibée par l article L. 132-3 er al. 1 du code des assurances et elle n est pas contraire à l intérêt du majeur protégé. Il y a donc lieu de faire droit à la demande de l appelant, sauf à préciser que le bénéficiaire de second rang désigné devra être les héritiers légaux du souscripteur et à rappeler expressément les dispositions de l article L. 2223-34-1 du code général des collectivités territoriales qui dispose que : Toute clause d'un contrat prévoyant des prestations d'obsèques à l'avance sans que le contenu détaillé de ces prestations soit défini est réputée non écrite. Le capital versé par le souscripteur d'un contrat prévoyant des prestations d'obsèques à l'avance produit intérêt à un taux au moins égal au taux légal.

DÉCISION DE LA COUR, statuant en chambre du conseil, par arrêt contradictoire : infirme en toutes ses dispositions l ordonnance frappée d appel et, statuant à nouveau : - autorise M. Alphonse S., en sa qualité de tuteur de son fils M. Christophe S., à conclure un contrat PROTECTION OBSÈQUES II auprès de la Compagnie GENERALI VIE, le contrat étant commercialisé par la SAS FAPE Obsèques, l entreprise de pompes funèbres initialement choisie étant l entreprise T. à F., moyennant le versement d une prime unique de 2.154,50 par prélèvement sur les fonds appartenant à M. Christophe S.; - dit que le bénéficiaire de second rang désigné devra être les héritiers légaux du souscripteur et rappelle expressément les dispositions de l article L. 2223-34-1 du code général des collectivités territoriales qui dispose que : Toute clause d'un contrat prévoyant des prestations d'obsèques à l'avance sans que le contenu détaillé de ces prestations soit défini est réputée non écrite. Le capital versé par le souscripteur d'un contrat prévoyant des prestations d'obsèques à l'avance produit intérêt à un taux au moins égal au taux légal. ; - dit que M. Alphonse S. devra transmettre au juge des tutelles du tribunal d instance de Ville une copie du contrat autorisé selon les conditions décrites dans le présent dispositif dans les 15 jours de sa conclusion éventuelle ; laisse les dépens à la charge du Trésor public. Le greffier, Le président, Philippe LEMOINE Thierry VERHEYDE

LA COUR,