LOI NOTRe : Quel impact sur nos maîtres d ouvrage? S i la loi NOTRe ne sera pas le big-bang territorial promis, elle ne comporte pas moins un grand nombre de mesures qui vont rebattre les cartes en matière d exercice de certaines compétences. Etablissant le rôle de coordinateur de la région dans de nombreux domaines, elle accélère également la montée en puissance des intercommunalités. Les délais de mise en place de ces mesures font toutefois craindre un certain attentisme des collectivités territoriales. Les conséquences de la loi NOTRe sur les régions De nouvelles compétences attribuées aux régions La loi NOTRe est la 3 ème étape de l Acte III de décentralisation voulu par l Etat après la loi de modernisation de l action publique et d affirmation des métropoles (loi MAPTAM) et la loi relative à la délimitation des régions aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral. Les compétences des régions prévues par la loi NOTRe Compétences nouvelles ou élargies Autres compétences via convention Développement économique Financement des voies et axes routiers d intérêt régional Politique de la ville et rénovation urbaine Aménagement et entretien de petits aérodromes Logement et amélioration de l habitat appartenant à l Etat Coordination des acteurs de l emploi Transports scolaires réguliers et à la demande Transports non urbains Gares publiques routières de voyageurs Lignes ferroviaires d intérêt local (voyageurs et fret) Aménagement et entretien de ports relevant du département La clause de compétence générale est supprimée pour les départements et les régions. Ces deux échelons sont donc cantonnés à l exercice des compétences attribuées par la loi NOTRe. Malgré tout, des compétences restent partagées entre les différents échelons : culture, sport, tourisme Un rôle important de coordinateur La région sera l échelon coordinateur d un grand nombre de domaines notamment à travers l élaboration de plusieurs schémas obligatoires et prescriptifs. DOSSIERS ECONOMIQUES N 151 15 DECEMBRE 2015
CONJONC- Le Schéma régional de développement économique, d innovation et d internationalisation (SRDEII) Ce schéma définit les orientations en matière d'aides aux entreprises (sous forme de prestations de services, de subventions ou de prêts par exemples), de soutien à l'internationalisation et d'aides à l'investissement immobilier et à l'innovation des entreprises, ainsi que les orientations relatives à l'attractivité du territoire régional. Le Plan régional de prévention et de gestion des déchets qui comprend : Un état des lieux de la prévention et de la gestion des déchets; Une prospective à horizon six ans et douze ans de l'évolution tendancielle des quantités de déchets à traiter; Des objectifs en matière de prévention, de recyclage et de valorisation des déchets ; Une planification de la prévention et de la gestion des déchets à termes de six ans et de douze ans, comportant les installations à créer ou adapter pour atteindre les objectifs fixés; Un plan régional d'action en faveur de l'économie circulaire. La région élabore également un schéma régional d aménagement de développement durable et d égalité des territoires (SRADDET) qui regroupe plusieurs schémas existants : intermodalité, Climat-Air- Energie, Aménagement et Développement du territoire, Infrastructures de transport et éventuellement le schéma d aménagement numérique. Ce nouveau schéma d aménagement régional fixera des objectifs de moyen et long termes en matière : - d'intermodalité et de développement des transports, - de maîtrise et de valorisation de l'énergie, - de prévention et de gestion des déchets. Schéma régional de l intermodalité Schéma régional Climat Air Energie Schéma régional d aménagement et de développement du territoire Schéma régional des infrastructures de transport Schéma directeur territorial d aménagement numérique Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) La région peut également se voir confier un rôle d animation et de concertation dans le domaine de la gestion et de la protection de l eau et des milieux aquatiques quand l état des eaux présente des enjeux sanitaires et environnementaux. L impact de la loi NOTRe sur les intercommunalité s Nouvelle carte intercommunale La carte intercommunale de la France va être profondément remaniée par la loi NOTRe qui fixe le seuil minimum de constitution d un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à 15 000 habitants contre 5 000 actuellement suite à la loi de décembre 2010. Cette mesure comporte toutefois plusieurs exceptions (faible densité, zones de montagne, EPCI de plus de 12 000 habitants issu d une fusion après le 1 er janvier 2012). Le seuil peut dont être revu à la baisse mais cela conduira tout de même à des regroupements. Pour mettre en place ces regroupements, des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) vont être mis en place dès à présent pour une entrée en vigueur au 1 er janvier 2017. Le seuil de création d une Communauté urbaine est à l inverse ramené à 250 000 habitants au lieu de 400 000 habitants. La décision de passer sous ce statut doit être prise avant le 1 er janvier 2020. DOSSIERS ECONOMIQUES N 151 16 DECEMBRE 2015
Calendrier d élaboration des nouveaux SDCI Proposition du projet de SDCI par le préfet avant 15/10/2015 Avis des communes, EPCI et syndicats avant le 15/12/2015 Avis des CDCI avant le 15/03/2016 SDCI transmis pour accord avant le 31/03/2016 SDCI transmis pour accord avant le 15/06/2016 Publication des schémas le 31/12/2016 Des cartes disponibles sur le site du ministère de la décentralisation et de la fonction publique permettent de visualiser l ensemble des intercommunalités par département et notamment celles qui n ont pas encore atteint le seuil des 15 000 habitants. En parallèle de ces nouveaux schémas il existe une volonté forte de limiter le nombre de syndicats intercommunaux et syndicats mixtes notamment dans le domaine de l eau et de l assainissement. Les syndicats qui rassemblent moins de trois EPCI seront automatiquement supprimés. Ces mesures vont avoir un impact direct sur les 25 000 services communaux d eau et d assainissement, les 2300 syndicats qui ont la compétence eau et les 1100 qui ont la compétence assainissement. Avant le 15 juin 2016 il y aura des propositions de dissolution, fusion ou modification de périmètre de syndicats par les préfets et, après des procédures d avis et de consultations, la dissolution, la fusion ou la modification de périmètre des syndicats sera prononcée avant le 31 décembre 2016. Nouvelles compétences pour les communautés Evolution des compétences des communautés de communes (CC) et communautés d agglomération (CA) Compétences obligatoires des CC et CA renforcées Actions de développement économique dans le cadre du SRDEII Compétences obligatoires supplémentaires à court et moyen termes Aires d accueil des gens du voyage Zones d activité économiques Collecte et traitement des déchets ménagers et assimilés (1 er janvier 2017) Politique locale du commerce et soutien aux activités commerciales Promotion du tourisme dont création d offices de tourisme Eau (1 er janvier 2020) Assainissement collectif et non collectif (1 er janvier 2020) GEMAPI (compétence prévue dans la loi MAPTAM, repoussée de 2016 à 2018 par la loi NOTRe) La compétence GEMAPI est transférée de droit aux EPCI à fiscalité propre : communautés de communes, communautés d agglomération, communauté urbaines et métropoles mais les communes et leurs EPCI FP peuvent se regrouper afin d exercer cette compétence à l échelle des bassins versants. Ainsi, la loi prévoit la possibilité de confier cette compétence à : - des syndicats mixtes de rivières «classique», - des établissements publics d aménagement et de gestion des eaux (EPAGE) : structure nouvellement crée par la loi ; - des établissements publics territoriaux de bassin (EPTB). Pour financer cette compétence, Les EPCI peuvent instaurer une taxe de 40 /habitant/an maximum. Nouvelles compétences pour les métropole s Avant le 1 er janvier 2017, la métropole récupère au minimum 3 groupes de compétences (convention passée avec le département) parmi les suivants : - Fonds de solidarité pour le logement, DOSSIERS ECONOMIQUES N 151 17 DECEMBRE 2015
CONJONC- - Service d action sociale, - Programme départemental d insertion, - Aide aux jeunes en difficulté, - Actions de prévention spécialisée, - Personnes âgées et actions sociales sauf prestations légales d aide sociale, - Tourisme, culture et équipements sportifs, - Collèges, - Gestion des routes A défaut de convention avant 2017, la totalité des groupes de compétences sera transférée de plein droit à la métropole (à l exception des collèges). S agissant de la «voirie départementale», le texte organise son transfert de plein droit à la métropole au 1er janvier 2017 (à défaut d une convention organisant les modalités d exercice de cette compétence par le département). Le cas du Grand Paris Nouvelle organisation L organisation territoriale dans le périmètre du Grand Paris est modifiée puisque les EPCI disparaissent au profit d Etablissements Publics Territoriaux (EPT) qui regrouperont l ensemble des communes à partir du 1er janvier 2016. Chaque établissement public territorial devra regrouper au moins 300 000 habitants. Un projet de 12 EPT a été présenté par le préfet et le périmètre de chacun sera arrêté d ici la fin de l année. Les compétences des ETP Les EPT exercent de plein droit les compétences en matière de : - Politique de la ville, - Construction, aménagement, entretien et fonctionnement d'équipements culturels, socioculturels, socio-éducatifs et sportifs d'intérêt territorial - Eau - Assainissement - Gestion des déchets ménagers et assimilés Ils élaborent un plan local d urbanisme intercommunal et un plan climat-air-énergie. Les compétences de la M étropole du Grand Paris (MGP) La Métropole du Grand Paris sera créée au 1 er janvier 2016. Deux blocs de compétences lui seront transférés à cette date : Développement et aménagement économique, social et culturel Zones d activités industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire et aéroportuaire d intérêt métropolitain. Développement économique d intérêt métropolitain. Construction, aménagement, entretien et fonctionnement de grands équipements culturels et sportifs de dimension internationale ou nationale. Protection et mise en valeur de l environnement et politique du cadre de vie Lutte contre la pollution de l air et les nuisances sonores. Soutien aux actions de maîtrise de la demande d énergie. Elaboration et adoption du plan climat-air-énergie territorial. GEMAPI. La MGP est aussi chargée de la mise en cohérence des réseaux de distribution d électricité, de gaz, de chaleur et de froid. DOSSIERS ECONOMIQUES N 151 18 DECEMBRE 2015
Elle établit, en concertation avec les autorités compétentes intéressées, un schéma directeur des réseaux de distribution d'énergie métropolitains qui a pour objectif de veiller à leur complémentarité. Une commission consultative est créée entre la Métropole du Grand Paris, la commune de Paris, tout syndicat compétent, ainsi que les communes, EPCI et syndicats intercommunaux exerçant la maîtrise d'ouvrage de réseaux de chaleur sur le territoire de la métropole pour coordonner l'action dans le domaine de l'énergie, mettre en cohérence les politiques d'investissement de faciliter l'échange de données. Elle examine le projet de schéma directeur des réseaux de distribution d'énergie avant à son adoption. Ces 2 blocs de compétences seront suivis en 2017 du transfert de 2 autre blocs : Aménagement de l espace métropolitain Elaboration du SCOT (schéma de cohérence territoriale), définition et réalisation d opérations d aménagement d intérêt métropolitain, actions de restructuration urbaine d intérêt métropolitain ; actions de valorisation. Elaboration d un schéma métropolitain d aménagement numérique. Politique locale de l habitat Programme local de l habitat, élaboration du plan métropolitain de l habitat et de l hébergement (PMHH). Politique du logement : aides financières au logement social, actions en faveur du logement social. Amélioration du parc immobilier bâti, réhabilitation et résorption de l habitat insalubre d intérêt métropolitain. Aires d accueil des gens du voyage. L'Etat peut également transférer, à la demande de la Métropole du Grand Paris, la propriété, l'aménagement, l'entretien et la gestion de grands équipements et infrastructures. Quelques mesures financières - CVAE : A partir de 2017, les régions recevront 50% du produit de la CVAE (25% actuellement) pour compenser les transferts de compétences (leadership économique et transports interurbains), cela représente une recette supplémentaire de 3,9 Md. - Pour toute opération exceptionnelle d'investissement dont le montant est supérieur à un seuil fixé par décret, une étude relative à l'impact pluriannuel de cette opération sur les dépenses de fonctionnement devra être présentée. - Règles de compensation de charges transférées : Investissement Fonctionnement Modalités Transferts de compétences à titre définitif de l Etat Moyenne des 5 ans Moyenne des 3 ans Modalités déterminées par décret Transferts entre un département et une autre collectivité (à défaut d accord de la commission locale) Moyenne des 7 ans Moyenne des 3 ans Modalités déterminées en loi de finances - Hors Ile-de-France, les recettes issues des forfaits de post-stationnement seront perçues par la commune, l EPCI ou le syndicat mixte ayant institué la redevance. Cette disposition de la loi MAP- TAM est repoussée de 9 mois par la loi NOTRe et devait entrer en vigueur le 1er octobre 2016 avec des recettes fléchées vers des projets améliorant la circulation et les transports en commun. Toutefois un article du projet de loi de finances pour 2016 reporte cette mesure à 2018. DOSSIERS ECONOMIQUES N 151 19 DECEMBRE 2015
Conclusion CONJONC- Réduites à 13, les régions vont récupérer de nouvelles compétences accompagnées de nouvelles ressources. Le budget moyen des nouvelles régions devrait doubler selon une étude de Standard & Poor s et leur influence va s accroitre avec leur poids économique et démographique. Toutefois, les régions françaises resteront loin des «régions» allemandes, italiennes ou belges. Les intercommunalités montent également en puissance aux dépens des communes : création des métropoles, transfert de compétences, relèvement du seuil vont asseoir définitivement la légitimité des EPCI. Ces derniers deviennent un maître d ouvrage de plus en plus important pour les TP. Ces réformes, en apparence positives, ne doivent pourtant pas faire illusion. La fusion des régions ne devraient pas permettre de réaliser d économies substantielles, et les transferts de compétences, dont certains ont été abandonnés, ne seront que progressifs et entraineront encore des périodes de doute et d attentisme pour les collectivités. Sylvain SIMÉON simeons@fntp.fr Tel : 01-44-13-32-26 DOSSIERS ECONOMIQUES N 151 20 DECEMBRE 2015