KF/TG/AE REPUBLIQUE DE CÔTE D IVOIRE ------------------- COUR D APPEL D ABIDJAN --------------- TRIBUNAL DE COMMERCE D ABIDJAN --------------- RG N 1067/2016 -------- JUGEMENT CONTRADICTOIRE du 12/05/2016 ------------ Affaire : La Caisse Nationale des Caisses d Epargne dite CNCE (M e Jean Luc VARLET) Contre Maître KARIDJA TOURE BALLO (M e KOFFI Anne Dominique KOUASSI) ---------------- DECISION : ---- Contradictoire ---- Rejette l exception d incompétence soulevée ; Se déclare compétent pour connaître du présent litige ; Déclare la CNCE recevable en son action ; Constate la non conciliation des parties ; L y dit bien fondée ; Condamne Madame Karidja TOURE-BALLO notaire exerçant sous la dénomination «ETUDE DE MAITRE KARIDJA TOURE- BALLO, à lui payer la somme de deux cent soixante-sept millions quatre cent trente-cinq mille deux cent quatre-vingt-deux (267.435.282) francs CFA au titre de sa créance et les intérêts de droit qui ont couru depuis le 19 septembre 2013 jusqu au prononcé de la décision ; Condamne la défenderesse aux dépens. AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 12 MAI 2016 Le Tribunal de Commerce d Abidjan, en son audience publique ordinaire du jeudi douze mai de l an deux mil seize tenue au siège dudit Tribunal, à laquelle siégeaient : Docteur François KOMOIN, Président du Tribunal ; Madame ESSO Milie Blanche épouse ABANET, Messieurs KACOU Bredoumou NIAMKEY K. Paul, SILUE Daoda, N GUESSAN Gilbert et ALLAH-KOUAME Jean Marie, Assesseurs ; Avec l assistance de Maître KONE Songui Adama, Greffier ; A rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause entre : CAISSE NATIONALE DES CAISSES D EPARGNE DITE CNCE, Société d Etat au capital de 35.000.000.000 de F CFA, immatriculée au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier sous le n CI-ABJ-1998-B-233922, dont le siège social est à Abidjan-Plateau, immeuble SMGL, 14 ème étage, 11 Avenue Joseph ANOMA, rue des banques, 01 BP 6889 Abidjan 01, Tél. : 20.25.00.20 / 20.25.53.01, Fax. : 20.25.53.08, prise en la personne de son représentant légal, Monsieur YEO CASSAIGNAN Antoine, en ses bureaux ; Demanderesse ayant pour conseil, Maître Jean Luc VARLET, Avocat à la Cour d Appel d Abidjan, y demeurant 29, Boulevard Clozel, Immeuble TF, 2 ème étage, porte à droite, 25 BP 7 Abidjan 25, Tél. : 20.33.40.61/20.21.67.64, email : cabjldvarlet@yahoo.fr ; d une part ; Et 1
MAÎTRE KARIDJA TOURE-BALLO, Notaire à Abidjan, Mariée, née le 5 mai 1962 à Abidjan-Treichville, CNI 0029 4053 05, exerçant sous la dénomination «ETUDE DE MAÎTRE KARIDJA TOURE-BALLO», sise à Abidjan Cocody, II Plateaux Saint-Jacques, Rue J22, Villa 46, BP 52 Post Entreprises, Abidjan Cedex 1, Tél. : 22.40.90.80 / 07.01.81.47 ; Défenderesse ayant pour conseil, Maître KOFFI Anne Dominique Kouassi, Avocat à la Cour d Appel d Abidjan ; D autre part ; Enrôlée pour l audience du 11 mars 2016, le dossier a été appelé avant d être renvoyé au 17 mars 2016 pour conciliation et attribution à la première chambre ; A cette évocation, le tribunal ayant constaté la non conciliation des parties a ordonné une instruction soldée par une ordonnance de clôture N 654/2016 sous la responsabilité du juge ESSO Milie Blanche épouse ABANET et renvoyé le dossier au 14 avril 2016 en audience publique ; A cette dernière évocation, le dossier a été mis en délibéré au 12 mai 2016 ; Advenue cette audience, le Tribunal a vidé son délibéré ainsi qu il suit : LE TRIBUNAL Vu les pièces du dossier ; Ouï les parties en leurs moyens et prétentions ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ; FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES Suivant exploit d huissier du 03 mars 2016, la Caisse Nationale des Caisses d Epargne dite CNCE a assigné Madame Karidja TOURE-BALLO Notaire exerçant sous la dénomination «ETUDE DE MAITRE KARIDJA TOURE- 2
BALLO», à comparaître devant le Tribunal de Commerce d Abidjan le 11 mars 2016 pour s entendre : - condamner à lui payer la somme de deux cent soixantesept millions quatre cent trente-cinq mille deux cent quatre-vingt-deux (267.435.282) francs CFA outre les intérêts de droit qui ont couru du 19 septembre 2013 au prononcé de la décision ; - condamner à payer les intérêts qui ont couru depuis le 19 septembre 2013 jusqu au prononcé de la décision ; - condamner aux entiers dépens de l instance. La CNCE expose que dans la période allant de 2009 à 2010 elle a accordé plusieurs concours financiers d un montant total de cent vingt-trois millions neuf cent soixante-deux mille trois cent neuf (123.962.309) francs CFA à Madame Karidja TOURE-BALLO, Notaire exerçant sous la dénomination «ETUDE DE MAITRE KARIDJA TOURE-BALLO» ; Que devant son incapacité à rembourser sa dette, la défenderesse a sollicité et obtenu la restructuration de celle-ci en crédit à long terme de cent quarante millions (140.000.000) de francs CFA d une durée de douze ans, payable en cent quarante-quatre (144) échéances mensuelles ; La CNCE précise que cette convention de restructuration était assortie de conditions suspensives, à savoir l inscription de deux hypothèques conventionnelles sur des immeubles hérités de ses parents après création des certificats de propriété et la mutation de ces titres à son profit ; Que contre toute attente, Madame Karidja TOURE-BALLO n a ni entrepris les formalités stipulées dans leur convention ni payé une seule échéance ; Que face à cette situation, elle lui a servi une mise en demeure le 19 septembre 2013 et un courrier portant dénonciation des concours financiers avec sommation de payer et clôture de compte en date du 17 décembre 2013 ; Que n ayant à nouveau reçu aucun paiement de sa créance, elle a adressé une sommation de payer à la défenderesse le 23 décembre 2013 et procédé à la clôture du compte le 02 février 2016 ; 3
Elle relève que Madame Karidja TOURE-BALLO lui est redevable de la somme principale de deux cent cinquante-neuf millions six cent quarante-cinq mille neuf cent cinq (259.645.905) francs CFA outre les intérêts et taxes à comptabiliser soit : - impayés sur crédit à long terme : 220.312.414 francs CFA ; - intérêts de retard sur impayés du crédit à long terme : 28.247.651francs CFA ; - solde débiteur du compte courant : 11.075.182 francs CFA ; Qu à ce montant s ajoute la somme de sept millions sept cent quatre-vingt-neuf mille trois cent soixante-dix-sept (7.789.377) francs CFA représentant l indemnité stipulée à l article 9 de la convention de crédit de restructuration d engagements financiers sous conditions suspensives et fixée à 3% de la créance lorsque le recouvrement est fait par la voie judiciaire comme en l espèce ; Qu il s ensuit que sa créance à l égard de Madame Karidja TOURE-BALLO, notaire exerçant sous la dénomination «ETUDE DE MAITRE KARIDJA TOURE-BALLO, s élève à deux cent soixante-sept millions quatre cent trente-cinq mille deux cent quatre-vingt-deux (267.435.282) francs CFA. Madame Karidja TOURE-BALLO, notaire exerçant sous la dénomination «ETUDE DE MAITRE KARIDJA TOURE- BALLO», soulève d abord l incompétence du tribunal de commerce de ce siège au motif que l article 18 alinéa 3 de la convention de crédit de restructuration d engagements financiers sous conditions suspensives du 06 septembre 2011 conclue avec la CNCE donne compétence exclusive au Tribunal de Première Instance d Abidjan Plateau en cas de litige. Subsidiairement, elle argue que son étude traverse depuis 2007 des difficultés et propose de payer sa dette par la vente de son terrain urbain non bâti formant le lot n 220 îlot 33 d une superficie de 500m² sis à Abidjan-Cocody, Deux Plateaux Angré et la délégation des loyers des magasins qu elle possède à Abidjan Yopougon et une partie des honoraires perçus en qualité de notaire de la CNCE ; 4
SUR CE En la forme Sur le caractère de la décision La défenderesse a comparu et conclu. Il convient dans ces conditions de statuer contradictoirement. Sur le taux de ressort L article 8 de la loi organique n 424/14 du 14 Juillet 2014, portant création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce dispose que : «Les Tribunaux de commerce statuent : - en premier ressort sur toutes les demandes dont l intérêt du litige excède un milliard ou est indéterminé. - en premier et dernier ressort sur toutes les demandes dont l intérêt du litige n excède pas un milliard.» L intérêt du litige est de deux cent soixante-sept millions quatre cent trente-cinq mille deux cent quatre-vingt-deux (267.435.282) francs CFA n excède pas 1.000.000.000 de francs CFA. Il convient donc de statuer en premier et dernier ressort. Sur la compétence du Tribunal de Commerce d Abidjan Madame Karidja TOURE-BALLO soulève l incompétence du Tribunal de Commerce de ce siège au motif que l article 18 de leur convention de crédit de restructuration attribue compétence au Tribunal de Première Instance d Abidjan pour le règlement de leur litige. Aux termes de l article 7 de la loi organique n 2014-424 du 14 juillet 2014 portant création organisation et fonctionnement des juridictions de commerce «les juridictions de commerce connaissent : - des contestations relatives aux engagements et transactions entre commerçants au sens de l acte uniforme relatif au droit commercial général ; - des contestations entre associés d une société commerciale ou d un groupement d intérêt économique ; 5
- des contestations entre toutes personnes, relatives aux actes de commerce au sens de l acte uniforme relatif au droit commercial général. Toutefois, dans les actes mixtes, la partie non commerçante demanderesse peut saisir les tribunaux de droit commun ; - des procédures collectives d apurement du passif ; Plus généralement des contestations relatives aux actes de commerce accomplis par les commerçants à l occasion de leur commerce et de l ensemble de leurs contestations commerciales comportant même un objet civil ; - des contestations et oppositions relatives aux décisions prises par les juridictions de commerce.». Il est constant qu au sens de l article 3 de l Acte Uniforme relatif au droit commercial général, les opérations de banque ont le caractère d acte de commerce par nature. Il s ensuit que les contestations relatives à de tels actes relèvent de la compétence du tribunal de commerce. Etant donné que l article 9 du code de procédure civile, commerciale et administrative dispose que «les règles de compétence d attribution sont d ordre public. Est nulle toute convention y dérogeant.» ; Il y a lieu de juger que la stipulation contractuelle brandie par Madame Karidja TOURE-BALLO qui donne compétence au Tribunal de Première Instance d Abidjan est nulle, et ne peut pour cela paralyser la saisine de la juridiction de ce siège. En conséquence, le Tribunal de ce siège retient sa compétence. Sur la recevabilité L action de la CNCE est régulièrement introduite. Il y a lieu de la recevoir. Au fond Sur la demande en paiement La CNCE sollicite la condamnation de Madame Karidja TOURE-BALLO à lui payer la somme de deux cent soixantesept millions quatre cent trente-cinq mille deux cent quatrevingt-deux (267.435.282) francs CFA au titre de sa créance et les intérêts de droit qui ont couru depuis le 19 septembre 2013 6
jusqu au prononcé de la décision. Elle produit à l appui de sa demande les pièces justificatives de celle-ci notamment la fiche d ouverture de compte au nom de l étude de Maître Karidja TOURE-BALLO, la convention de crédit de restructuration d engagements financiers sous conditions suspensives du 06 septembre 2011, la lettre de dénonciation des concours financiers et de clôture du compte courant en date du 02 février 2016, qui justifient amplement cette créance. Il est constant que Madame Karidja TOURE-BALLO ne conteste pas devoir la créance réclamée puisqu elle offre de s en acquitter en vendant son terrain urbain non bâti formant le lot n 220 îlot 33 d une superficie de 500m² sis à Abidjan- Cocody, Deux Plateaux Angré et en déléguant les loyers des magasins qu elle possède à Abjdjan Yopougon et une partie des honoraires perçus en qualité de notaire de la CNCE ; Il n est pas établi que la CNCE a accepté d être payée de cette façon de sorte que le tribunal ne peut retenir les modalités de paiement proposées. Dans ces conditions, il y a lieu de faire droit à la demande en paiement de la CNCE. Par ailleurs l article 1153 du code civil disposant que les intérêts de droit «ne sont dus que du jour de la demande», il convient de faire droit à la demande en paiement des intérêts de droit, puisqu il résulte de la lettre du 17 décembre 2013 transmise suivant exploit d huissier du 19 décembre 2013 que la CNCE a, à cette date, sommé la défenderesse de la couvrir de la totalité de sa créance sous un délai de huit jours. Ce qu elle n a pas fait. Sur les dépens Madame Karidja TOURE-BALLO notaire exerçant sous la dénomination «ETUDE DE MAITRE KARIDJA TOURE- BALLO succombant, il y a lieu de la condamner aux dépens de l instance. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement, en premier et dernier ressort ; 7
Rejette l exception d incompétence soulevée ; Se déclare compétent pour connaître du présent litige ; Déclare la CNCE recevable en son action ; Constate la non conciliation des parties ; L y dit bien fondée ; Condamne Madame Karidja TOURE-BALLO notaire exerçant sous la dénomination «ETUDE DE MAITRE KARIDJA TOURE-BALLO, à lui payer la somme de deux cent soixantesept millions quatre cent trente-cinq mille deux cent quatrevingt-deux (267.435.282) francs CFA au titre de sa créance et les intérêts de droit qui ont couru depuis le 19 septembre 2013 jusqu au prononcé de la décision ; Condamne la défenderesse aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus. ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./. 8