le DOSSIER m agriculture et domaines skiables



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Transcription:

Magazine d information des opérateurs de remontées mécaniques et domaines skiables n 0 26 / Février 2011 La montagne en mouvement Alpes ı Jura ı Massif Central ı Pyrénées ı Vosges le DOSSIER m agriculture et domaines skiables page 14 à 21 FORmatIOn Conducteur d engin de damage, le premier CQP page 3 et 4 pisteur SEcOuRIStE Un métier hautement qualifié page 7 à 11 DSF n 26

édito Les domaines skiables sont un formidable atout pour les territoires de montagne. Source d emploi pour les hommes, source d attractivité pour les territoires, source de recettes fiscales pour les collectivités. Les 3 700 remontées mécaniques françaises (le plus grand parc du monde) ont permis d amortir les effets de la crise dans de nombreux départements de montagne, grâce à deux bonnes années 2009 et 2010. À l heure où des menaces économiques pèsent sur l équilibre de nos entreprises et sur l investissement, il nous paraît important de rappeler que l activité touristique hivernale est fondamentale. Son dynamisme doit être le souci de tous. Sur nos territoires, c est l hiver qui donne des moyens pour développer la pluriactivité et le tourisme tout au long de l année. Domaines Skiables de France s emploie à créer les conditions d un développement harmonieux. La loi sur la Nouvelle Organisation du Marché de l Électricité nous en apporte une nouvelle preuve. Cette loi fixe, pour les entreprises qui sont au tarif réglementé, le cadre d évolution de ces tarifs qui doivent disparaître d ici 2015. Elle définit également les conditions d accès des fournisseurs alternatifs à l électricité nucléaire, pour les entreprises qui sont sur des offres de marché. Vu la part qu occupe l énergie dans nos budgets, nous nous sommes intéressés très tôt aux effets de cette loi, et nous avons constaté que notre consommation saisonnière nous privait d un accès à l énergie la moins chère. Depuis plusieurs mois, plusieurs Sénateurs, Députés et Maires n ont pas ménagé leur peine pour nous garantir cet accès. Je veux rendre hommage à leur engagement dans ce dossier et les remercier d avoir été, une nouvelle fois, à nos côtés pour assurer la défense de notre économie. Pierre Lestas Président de Domaines Skiables de France Sommaire CQP, un outil au service de la professionnalisation pages 3-4 Dialogue social : Serre-Chevalier mise sur l anticipation pages 5-6 Zoom Métier : Pisteur-Secouriste, un métier hautement qualifié pages 7-11 Entretien : Gilles Chabert, Président du SNMSF pages 12-13 DOSSIER : Agriculture et domaines skiables pages 14-21 Environnement : le tétras-lyre cherche sa place pages 22-23 Juridique : Master 2 Droit de la Montagne page 24 Juridique : les nouveautés pages 25-26 Annecy 2018 page 27 Congrès 2011 de l OITAF au Brésil pages 28-29 DOMAINES SKIABLES DE FRANCE N 26 Magazine d information de Domaines Skiables de France, Chambre syndicale des opérateurs de remontées mécaniques et domaines skiables DOMAINES SKIABLES DE FRANCE Alpespace Bâtiment Annapurna 24 rue Saint-Exupéry - 73800 Françin Tél. : 04 79 26 60 70 - Fax : 04 79 96 08 71 info@domaines-skiables.fr Directeur de la publication Laurent Reynaud Coordination et rédaction AXIUBA Communication / Catherine Claude Tél. : 09 77 65 07 23 06 77 65 07 23 www.axiuba.com Graphisme / Mise en page Originell / Fleur Henno Tél. : 04 56 40 21 32 06 81 90 06 06 Crédits Photos Agence Zoom, ANENA, Aftalp, AXIUBA/Domaines Skiables de France, L Atelier Sylvain MADELON, SEA 74, Stefcande.com, Shutterstock, X, droits réservés. Autour de nous : les brèves pages 30-31 2 DSF n 26

FORmatIOn k CQP, un OuTIl Au SErvICE DE la PrOFESSIONNAlISATION LES ExAMENS PrOFESSiONNELS DE NOTrE PrOFESSiON AVAiENT BESOiN D ÉVOLuEr POur NE PLuS être uniquement DES ExAMENS ThÉOriquES. C EST EN regardant CE qui SE FAiSAiT DANS D AuTrES BrANChES PrOFESSiONNELLES que LE ChOix DES CqP (CErTiFiCATS DE qualification PrOFESSiONNELLE) A ÉTÉ FAiT PAr DOMAiNES SkiABLES DE FrANCE ET LES SyNDiCATS DE SALAriÉS DE LA BrANChE. Un accord paritaire a été signé le 16 juin 2010 avec l ObjEctIF DE développer et structurer la formation professionnelle, et améliorer la reconnaissance des connaissances et des compétences acquises lors de sessions de formation et/ ou par le biais de l expérience professionnelle. HIStORIquE Les examens de la profession existent depuis plus de 30 ans et plus de 2 000 candidats sont présentés chaque année. (*) À ce jour, les différents examens concernent les agents d exploitation, les agents affectés à la conduite de téléski, de télésiège à pinces fixes, de téléporté débrayable, de téléphérique et de funiculaire, les conducteurs d engin de damage et les nivoculteurs. il n y a pas de hiérarchie entre ces différents examens. Seul, l examen d agent d exploitation, qui constitue le niveau de base, doit être présenté et réussi, avant toute présentation à un autre examen. En cas de réussite aux examens, Domaines Skiables de France délivre aux candidats des attestations professionnelles. Ces attestations sont reconnues par l ensemble de la profession et par le Ministère des Transports. Pour autant il s agit bien d attestations d aptitude professionnelle ; en aucun cas de permis de conduire donnant un «droit» de conduite. En effet, une expérience préalable en entreprise (d une saison d une durée significative d au moins 3 mois) sur le poste considéré, est obligatoire pour pouvoir être présenté à l examen correspondant. Cela constitue même un pré requis. Jusqu à présent, ces examens étaient essentiellement basés sur la théorie. une évolution InDISpEnSablE Compte tenu des évolutions technologiques de nos machines et appareils, des exigences en terme d accueil de la clientèle, des impératifs en matière de sécurité des personnels et des usagers, et des questions de responsabilité, il est paru indispensable de faire évoluer l organisation de ces examens. Domaines Skiables de France s est donc rapproché des autres branches afin d avoir connaissance de ce qui pouvait être organisé dans d autres professions. C est ainsi que, tout naturellement, le choix du CqP a été retenu. À titre d exemple, près de 400 CqP différents existent dans la Métallurgie. La mise en place de CqP dans une branche professionnelle est une démarche paritaire. un accord paritaire cadrant l organisation globale de ces CqP a donc été signé le 16 juin 2010 avec l ensemble des syndicats de salariés de la branche : FO, CGT et CFDT. DSF n 26 3

DÉCEMBRE 2010 Les supports pédagogiques de Domaines Skiables de France Conducteur d engin de damage Support pédagogique à l usage des candidats à l examen CQP de CONDUITE D ENGIN DE DAMAGE En collaboration avec ADSP conducteur D EngIn DE DamagE : le premier cqp Depuis deux ans, nous travaillons avec l ADSP à la création du CqP «Engin de damage». Un groupe de travail composé de techniciens et des constructeurs a donc travaillé sur ce projet de mise en place d un CqP de Conducteur d engin de damage. Trois référentiels ont été élaborés : m un référentiel métier m un référentiel de certification m un référentiel formation. Le référentiel métier, décline avec le plus d exhaustivité possible, le métier de conducteur d engin de damage et les compétences associées. Le référentiel de certification précise de quelle façon l examen permettant la délivrance du CqP sera organisé. Le référentiel de formation définit un cursus de formation dispensée soit en interne, dans les entreprises, soit via des organismes de formation labellisés par la profession. il permettra d acquérir les bases du métier en vue de la présentation ultérieure au CqP. Les premiers examens permettant la délivrance de CqP de conducteurs d engin de damage pourront être organisés à la fin de cette saison. Les principaux autres métiers des entreprises de la profession seront ensuite déclinés selon le même mode opératoire : m hôte(sses) de caisse, m Conducteurs d appareils, m Nivoculteurs Formation et CQP Comme aujourd hui, les candidats seront présentés par leur employeur ; le cas échéant et selon certaines modalités, par des organismes de formation, tels que les lycées professionnels. La réussite de l examen Agent d exploitation ne sera plus obligatoire pour présenter le CqP de Conducteur d engin de damage, puisque les notions relatives à l Agent d exploitation ont été intégrées dans un support pédagogique global (AE + CED). À noter : il convient de bien distinguer formation et CQP. m La formation est organisée par l employeur, pour tout nouveau salarié, en interne ou en externe. m Le CqP est présenté par le candidat, à l initiative de l employeur, à l issue d au moins une saison de pratique sur l appareil ou l engin. technicien d Exploitation et de Maintenance de Remontées Mécaniques L AFPA de Savoie organise une formation de Technicien d Exploitation et de Maintenance de remontées Mécaniques du 02 mai au 16 décembre 2011 (un mois de période d application en entreprise incluse). Cette formation, sanctionnée par un titre de niveau iv (équivalent Bac) se découpe en deux missions : Qu en est-il des salariés déjà en poste? ils peuvent suivre toutes les formations dans le cadre de leur vie professionnelle et être présenté à tout examen. Tout comme pour les examens actuels, la présentation au CqP n est pas obligatoire mais vivement conseillée. Que se passe-t-il pour les salariés ayant passé et réussi un autre examen? (celui de DSF, celui de l ADSP, parfois les deux) Attention, dans notre profession comme dans les autres, aucune équivalence n est envisageable. En revanche les anciennes attestations professionnelles de Domaines Skiables de France et les anciens examens de l ADSP obtenus restent valables ; libre à chaque employeur, en concertation avec les candidats concernés, de les présenter, en complément, ou non au CqP. 1. Assurer l exploitation et la gestion d installations de remontées mécaniques. 2. Assurer l installation et la maintenance d équipements mécaniques de remontées mécaniques. Contacts : Roland Degeselle - 04 79 62 63 61 Nadia Piati - 04 50 46 19 46 Régis Coulomb - 04 79 62 94 97 Lydie Cuisset - 04 79 62 08 65 (*) Les Brevets Nationaux de Pisteur-Secouriste sont traités page 8 4 DSF n 26

DIalOguE SOcIal Et management k SErrE-ChEvAlIEr MISE Sur l anticipation AVEC un EFFECTiF PErMANENT DE 170 PErSONNES ET DE 420 EN SAiSON, SErrE-ChEVALiEr (COMPAGNiE DES ALPES) EST Au Cœur DES PrOBLÉMATiquES DE MANAGEMENT ET DE TrAVAiL SAiSONNiEr. LES ENJEux DE PErFOrMANCE ÉCONOMiquE CONCENTrÉS Sur une COurTE PÉriODE ET LA GESTiON DES ressources humaines D un PErSONNEL SAiSONNiEr NÉCESSiTENT LA MiSE EN PLACE D une POLiTiquE SOCiALE ADAPTÉE. Avec une question centrale pour le management : comment anticiper les risques de décalage entre les salariés et l entreprise? C est tout l enjeu du travail engagé par la Direction générale qui a lancé une démarche de prévention des risques, notamment des risques psychosociaux. OBjECtIF : mieux connaître les raisons et le niveau du stress chez les salariés afin de mettre en place des réponses adaptées. état DES lieux Adressé à tous les salariés, notamment les saisonniers, un questionnaire d évaluation des risques psychosociaux a permis de récupérer un maximum d informations sur le terrain. Élaborés par l inserm (sur la base du système de mesure du stress professionnel élaboré par r.karasek), ces questionnaires ont été retournés directement à la médecine du travail chargée du traitement des informations. Le taux de retour, pour la station de Serre-Chevalier s est élevé à 63 %. les RéSultatS DE l EnquêtE Les premiers résultats ont fait apparaître des situations de stress lors de la préparation de la saison («coup de feu» avant l ouverture) et pendant la saison, des situations de violence au travail avec les usagers des remontées, et des difficultés relationnelles entre la hiérarchie directe et les salariés. L émergence des points forts et de faiblesses de l entreprise a permis de tirer les premiers enseignements de cette démarche. DSF n 26 5

apprendre à écouter, c ESt apprendre à RépOnDRE À la lecture des résultats de cette enquête, la nécessité d améliorer le dialogue entre le management et les salariés est apparue clairement. Avec un potentiel d amélioration du travail d écoute incontestable. En matière de politique sociale, le management est en effet toujours en première ligne. À condition de savoir écouter. Dans cet esprit, le personnel d encadrement, les managers, la direction et les membres du ChSCT ont participé à des formations spécifiques dans le but de développer une approche par l écoute sur la base méthodologique de la CrAM Sud Est. OBjECtIF : faire en sorte que puissent s instaurer un échange constructif pendant les entretiens entre les managers et leurs équipes, individuellement ou en groupe. Et qu aucun sujet lié aux risques professionnels ne soit tabou, y compris les risques psychosociaux (charge mentale, stress, mal-être, etc.). Cette action s est conduite sur 10 mois à raison de 5 jours de formation par managers (47 personnes au total). Le travail d écoute sur le terrain s est déroulé pendant l exploitation, auprès des personnels saisonniers. il a largement impliqué les instances représentatives du personnel (ChSCT, CE) qui étaient placées dans un rôle d observateurs et d auditeurs pouvant faire remonter les dysfonctionnements observés sur le terrain. 80 % des salariés ont été écoutés. 150 actions immédiates ont été traitées. 200 actions sont en cours d évaluation de priorisation et de traitement. un processus de mise en place de plans d actions immédiats et d intégration au plan annuel de prévention selon le type de problèmes a été mis en place. mieux-être au travail : l ObjEctIF FInal La démarche qui avait suscité au départ de la méfiance est désormais source d amélioration. Elle reste exemplaire et devrait se déployer dans d autres stations de La Compagnie des Alpes. quelques chiffres Les enquêtes périodiques «conditions de travail» de la DArES (cf. www.travailsolidarite.gouv.fr) donnent des indications portant sur les facteurs de stress au travail : m plus d 1/2 des travailleurs travaille dans l urgence ; m plus 1/3 des travailleurs reçoit des ordres ou des indications contradictoires ; m 1/3 des travailleurs déclare vivre des situations de tension dans leurs rapports avec leurs collègues ou leur hiérarchie. L agence européenne pour la sécurité et la santé au travail a montré, en 2002, que le coût du stress d origine professionnelle représentait environ 20 milliards d euros par an. Selon le BiT, le coût du stress dans les pays industrialisés s élève entre 3 et 4 % du PiB. Source : www.travailler-mieux.gouv.fr 6 DSF n 26

ZOOm métier k Pisteur secouriste, un MéTIEr hautement QuAlIFIé EN FrANCE, LES DOMAiNES SkiABLES représentent 25 000 hectares DE PiSTES BALiSÉES ET ENTrETENuES. GArANTir LA SÉCuriTÉ ET LA qualité DE CES ESPACES DANS L OBJECTiF DE SATiSFAirE LES PrATiquANTS, EST un ChALLENGE quotidien relevé PAr PrèS DE 2 300 PiSTEurS-SECOuriSTES BrEVETÉS. À la base de ces missions, une organisation parfaitement rôdée intégrée aux services des pistes des stations de sports d hiver et une formation complète et rigoureuse en pleine évolution. Avec une particularité qui en fait sa force : elle est assurée par des professionnels en exercice qui transmettent leurs savoirs et savoir-faire. la FORmatIOn Le pisteur-secouriste est titulaire d un brevet national à trois degrés. Chaque degré fait l objet d une formation et d un examen dont la réussite est sanctionnée par la délivrance d un diplôme signé par le préfet représentant de l État dans son département. Durant toute sa formation, il bénéficie du transfert de compétence de professionnels. Formateurs, membres des jurys d examens, la plupart sont en poste dans les stations au plus près des réalités opérationnelles. un engagement soutenu largement par les entreprises. La mobilisation de la taxe d apprentissage de certaines stations est d ailleurs utilisée pour l achat du matériel pédagogique. Ainsi, Châtel, l Alpe-d huez, La Clusaz et Mont-Ventoux ont ouvert la voie en dédiant plus de 10 000 euros de leur taxe d apprentissage qui ont permis d acheter notamment des barquettes et des traîneaux pour les formations 1 er degré. Ce volet formation est mené conjointement, dans un esprit de coopération, par l Association des Directeurs de Pistes et de la Sécurité des stations de sport d hiver et Domaines Skiables de France qui disposent tous les deux d un agrément national. Serge riveill, Chargé de Mission Pistes tient à souligner l engagement que représente la formation annuelle de nouveaux pisteurs-secouristes. Après avoir réussi le test de qualification technique, ils intègrent des cycles de formation de 4 semaines pour le 1 er degré, 3 semaines (2 e degré) et 10 jours pour le 3 e degré. Une nouvelle fédération voit le jour C est le 10 septembre 2010 qu est née la Fédération Nationale de la Sécurité et des Secours sur les Domaines Skiables (FNSSDS), avec à sa présidence, André Plaisance, maire de la commune de Saint-Martin-de-Belleville (Val Thorens/ Les Ménuires, 73 Savoie). Elle est née à l initiative des 5 acteurs majeurs de l organisation de la sécurité et des secours sur les domaines skiables : l Association Nationale des Maires des Stations de Montagne (ANMSM), l Association Nationale des Directeurs de Pistes et de la Sécurité des Stations de Sports d hiver (ADSP), Nordique France, l Association Nationale pour l Étude de la Neige et des Avalanches (ANENA) et Domaines Skiables de France. La Fédération a vocation à devenir un interlocuteur privilégié des Pouvoirs publics et une instance de concertation sur toutes les questions de sécurité et de secours sur les domaines skiables. DSF n 26 7

m ZOOm métier «On forme ainsi en moyenne chaque année cent quatre-vingts PS 1 er degré, soixante 2 e degré et vingt 3 e degré. À titre d exemple, une formation 1 er degré mobilise à chaque session plus d une dizaine de formateurs : maîtres-pisteurs, médecins, nivo-météorologues, professionnels du service des pistes, CARSAT, etc. et une douzaine de membres de jury». Chaque année tous les pisteurs-secouristes sont astreints à suivre une formation continue sur la partie secourisme. Cet engagement de la profession est aussi remarquable dans le cadre des spécialisations «artificier» et «maître-chien d avalanche». il est à noter que l architecture de ces formations repose sur un fort engagement des entreprises qui mettent à disposition non seulement formateurs et membres de jury, mais aussi des lieux de stages, des équipements et du temps passé pour la rédaction des programmes et des référentiels de formation. INtItULé FORMAtION AgRéMENt ORgANISME SUPPORt PS 1 er degré ADSP ou DSF GrETA Montagne PS 2 e degré ENSA ENSA PS 3 e degré ENSA ENSA Artificier ANENA Maître-chien d avalanche ANENA ANENA Pisteur secouriste : des missions et des qualifications complémentaires variées m Pisteur secouriste Avec un brevet national à 3 degrés permettant d assurer les missions de sécurité et de secours, d accueil, d information dans un souci permanent de qualité des pistes. m Artificier Formation neige et avalanches et déclenchement préventif des avalanches. m Nivo-météorologiste Formation à l observation et aux relevés météo et nivologie. m Maître-chien d avalanche Formation à la recherche de victime d avalanches avec l intervention d un chien. Cette sollicitation est particulièrement importante à l automne, période à laquelle est organisé le plus grand nombre de formations. Les bonnes volontés sont toujours les bienvenues pour garantir l efficacité et la pérennité du système par une répartition équitable des moyens humains et matériels mis à disposition. Les dispositifs de formation actuels permettent d adapter les contenus aux besoins des entreprises et d en maîtriser les coûts. Maîtres-pisteurs, la clé de voûte du système La réglementation prévoit que les formations PS 1 er degré soient assurées par des maîtres pisteurs-secouristes qualifiés. Cet automne 2010, quatre nouveaux maîtres-pisteurs ont été formés, venant ainsi renforcer l équipe nationale constituée d une douzaine de professionnels. 8 DSF n 26

Un brevet national consolidé «À faire et à défaire, on n est pas à rien faire!» Jacques Comparat, Directeur des sites de Margériaz et des Aillons, est chargé de suivre le dossier relatif à la professionnalisation des formations PS au sein de Domaines Skiables de France. il fait le point sur la situation actuelle de la formation. «La formation des pisteurs secouristes est en pleine refonte depuis plusieurs années, suite à la loi sur la modernisation de la sécurité civile de 2004 et les nombreux textes sortis depuis. Actuellement, en étroite collaboration avec nos partenaires, nous en sommes dans la rédaction (que nous espérons finale) du décret pisteur-secouriste et de ses arrêtés d application pour les différentes filières 1 er, 2 e et 3 e degré. Nous travaillons sur la formation des PS1 (pisteurs secouristes 1er degré). C est ainsi que tout un chacun s implique fortement, d une part sur les mises à jour du référentiel de formation et du guide national de référence pisteur-secouriste (GNRPiSec), et d autre part sur le contenu des épreuves d entrée en formation (évolution du test de qualification technique). C est pour nous un axe stratégique essentiel dans le processus de professionnalisation des salariés de nos entreprises. Nous travaillons également sur la formation des MPS (Maître Pisteur Secouriste), qui sont les formateurs des pisteurs. L effectif d une douzaine de MPS en exercice est en pleine mutation par suite d évolutions professionnelles. C est pourquoi, après appels à candidature auprès des entreprises de domaines skiables, une nouvelle promotion de quatre candidats a été sélectionnée, dont deux ont fini leur cursus complet à l entrée de l hiver et les deux autres le finiront avec les stages PS1 du printemps 2011. Il est possible qu on fasse appel à une nouvelle promotion en 2011 pour avoir une équipe suffisante de MPS en activité. Merci donc aux exploitants de réfléchir à des candidats potentiels en fin de saison (prérequis : PS2 depuis plus de 2 saisons et si possible moniteur de secourisme PAE1).» Enfin, la nouvelle fédération nationale de la sécurité et des secours sur les domaines skiables (FNSSDS) représente pour nous la solution pour parler tous d une seule voix. Nous espérons qu elle sera rapidement l unique interlocutrice avec les pouvoirs publics en matière de sécurité et de secours sur les domaines skiables. Tout ce travail n a été et ne sera possible que grâce à l efficace participation de tous, le tout mené sous la houlette administrative et technique redoutable de Serge riveill notre chargé de mission pistes. jacques COMPARAt À l initiative conjointe de l ADSP et de Domaines Skiables de France, avec le soutien de l ANMSM et le portage des parlementaires de montagne, une disposition législative vient conforter le rattachement des opérateurs de remontées mécaniques et de domaines skiables à l article 2 de la loi de modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004. La loi de finances rectificative pour 2010 n 2010-1658 du 29 décembre 2010 (*) prévoit que nos entreprises «concourent à l accomplissement des missions de la sécurité civile». Ce point était régulièrement contesté par l administration. Désormais, nos missions sont solidement ancrées dans la sécurité civile. Le Brevet National de Pisteur Secourisme le sera à son tour, dès que le décret révisant celui de 92 sera publié. (*) Cf. en page 25, Redevances Radiofréquence DSF n 26 9

Plan D intervention ET DE DéClenChement DES avalanches (PIDA) La gestion de la sécurité sur les domaines skiables nécessite la mise en œuvre de différentes actions de prévention. Parmi ces dernières, le déclenchement artificiel des avalanches est un savoir-faire incontournable qui associe une parfaite connaissance du terrain à des techniques spécifiques au milieu de la montagne. «Le PIDA consiste à purger systématiquement les zones de départ où s est accumulée la neige dès l atteinte d une valeur seuil de hauteur du manteau neigeux. Ce type de moyen de prévention permet d éviter les départs spontanés de grande ampleur en provoquant des coulées de faible importance et de choisir le moment de l écoulement avalancheux, ce qui permet alors de prendre les mesures de sécurité nécessaires.» (www.anena.org) une attention permanente portée à la FORmatIOn Louis Cometto, Président de la Commission Pistes et Environnement à Domaines Skiables de France, est largement investi dans le travail d amélioration du PiDA en considérant la sécurité des personnels qui le mettent en œuvre. «Cette pratique existe depuis l origine des domaines skiables. Depuis le déclenchement à skis, elle a beaucoup évolué avec l utilisation de techniques de tir à distance de plus en plus sophistiquées (Catex, Gazex, Daisybell ). Pour autant, dans les pentes fortes, l intervention de l homme, l artificier dans notre profession, est indispensable. Ces professionnels expérimentés rejoignent des pas de tir situés en amont des pentes à déclencher en suivant des itinéraires précis, ils amorcent puis lancent ou placent des charges explosives sur des points de tir déterminés, et enfin ils rendent compte des résultats obtenus en indiquant l importance de la coulée avalancheuse provoquée, éventuellement l absence de coulée. Nous sommes très attentifs à la sécurité et à la formation des artificiers. Cette mission ne représente que 20 à 25 jours de travail sur une moyenne de 120 jours par saison. Il faut donc impérativement que les entreprises insistent sur le recyclage permanent du personnel. La pratique n étant pas continue, il faut maintenir les connaissances des procédures et la prise en compte de la sécurité à son plus haut niveau.» échanges D ExpéRIEncE Le tragique accident qui s est produit l hiver dernier lors d une opération de déclenchement préventif des avalanches a conduit l ensemble des acteurs de la sécurité sur les domaines skiables qui rédigent et mettent en œuvre un PiDA à se mobiliser pour reconsidérer l ensemble des aspects relatifs à ce savoir-faire et étudier toutes les pistes d amélioration. Ainsi 3 journées thématiques, réunissant plus de 135 professionnels, ont été organisées en automne 2010 à Albertville, Gap et Bagnères de Luchon. Après un tour d horizon complet assuré par des experts du PiDA, la parole a été donnée aux différents acteurs de la sécurité sur les domaines skiables. Tous ont partagé expérience, bonnes pratiques et difficultés rencontrées. Cadre juridique, évolutions techniques, caractéristiques des produits explosifs utilisés, formation initiale et recyclage, procédures d intervention ces différents sujets ont été préparés et présentés par les professionnels concernés. Les retours d expérience de chaque intervenant dans des domaines de compétence variés et complémentaires relatifs au PiDA ont été riches d enseignement. Par ailleurs, l accent a été mis sur l importance d organiser en interne au niveau des entreprises une formation ou un recyclage, pour tous les artificiers, portant sur la mise en œuvre pratique du PiDA propre à chaque station. Devront notamment être rappelés au cours de la formation ou du recyclage : m les itinéraires empruntés, m les règles et consignes de sécurité relatives aux techniques de tir utilisées par la station, m l ensemble des procédures internes relatives à l exécution du PiDA. Au premier semestre 2011 les travaux vont se poursuivre au sein du Groupe de travail PiDA avec une réflexion particulière consacrée aux produits mis en œuvre. Cette réflexion sera conduite en relation avec le SFEPA (Syndicat des fabricants de produits explosifs). En savoir plus Vous trouverez tous les supports utilisés au cours de ces journées sur l Extranet de Domaines Skiables de France www.domaines-skiables.fr. Vous pouvez les utiliser pour renforcer votre documentation servant de support à vos recyclages et formations. 10 DSF n 26

ZOOm métier k PISTEurS «globe-trotter» DEPuiS PLuSiEurS ANNÉES, DES PiSTEurS DE LA rosière PArTiCiPENT À DES ÉChANGES PrOFESSiONNELS EN AMÉriquE Du NOrD. Cet hiver, c est «Le Massif de Charlevoix» au québec qui accueille Marion Auberger. Son collègue Jean-François Bourdon est quant à lui arrivé dans la station de Tarentaise en novembre. Des échanges d expérience que Thierry Vignes, le Directeur des pistes de la rosière, encourage, d autant que généralement les professionnels qui acceptent de découvrir d autres façons de travailler sont hypermotivés. Née à Gap et ayant grandi à Chamonix et dans les hautes-alpes, tout prédestinait Marion Auberger à choisir un métier de la montagne. Passionnée par les sports de montagne, elle est naturellement devenue pisteur-secouriste. «J apprécie le travail en équipe et le contact avec la clientèle, mais j aime aussi les moments ou l on doit être plus autonome. Je suis très attirée par le secourisme qui nécessite à la fois d anticiper et de savoir réagir vite. Et je n aime pas être enfermée!» À ces passions montagnardes, Marion ajoute celle de la rencontre avec d autres cultures, d autres façons de faire ou de voir. «J ai travaillé dans différentes stations en France, et déjà la méthode de travail et le regard diffèrent de l une à l autre Alors je voulais voir ce que ça donne dans un autre pays! Avec mon conjoint Sébastien, lui aussi pisteur, nous avons proposé à La Rosière de faire un échange avec le Canada.» Après des prospections dans l ouest Canadien et au québec, c est finalement Julie Vézina, chef des pistes de la station «Le Massif de Charlevoix» au québec qui a été la plus intéressée. «C était parti pour un échange professionnel et culturel! Mon collègue québécois, Jean-François Bourdon, est arrivé à La Rosière avec son amie et sa petite fille de 18 mois! L échange dure toute la saison, nous avons tous les deux commencé au 1 er décembre, nous finirons à la fermeture de la station.» Dès le début de la saison, Marion a noté beaucoup de différences d un côté à l autre de l Atlantique! «C est moins systématique qu en France. Les pistes sont sécurisées en fonction des remarques des patrouilleurs. Il y a également beaucoup moins de signalisation. Juste des panneaux directionnels aux croisements, indiquant le nom de la piste et la difficulté. Pas de jalon ni de balise... Mais il ne faut pas oublier que les pistes sont taillées dans la forêt... Il est donc difficile de se perdre, même par grand brouillard! On peut travailler en ski, telemark ou «planche à neige» (snowboard). Et la plupart des pisteurs portent un casque! Nous sommes environ 15 salariés, à temps plein ou occasionnel et il y a 45 bénévoles!» Dans son pays d origine, Jean-François Bourdon, est Guide de rivière en été et «patrouilleur» en hiver. un nom différent pour un même métier, celui de pisteursecouriste, à quelques différences près. Ce qui l a frappé dès son arrivée, ce sont les pratiques héritées de la haute-montagne à l image de l utilisation fréquente de l hélico dans les secours. «Chez nous, il n y a pas de réseau de sauvetage comme ici. Nous n intervenons que par voie terrestre puisque le terrain s y prête. Ce qui rend nos interventions bien efficaces. L hélico est réservé aux terrains très isolés.» La configuration des lieux est différente et les pistes passent par les forêts et les sous-bois. «La pratique du hors-piste en est seulement à ses débuts et nous en sommes encore à défricher la forêt pour y faire des passages!» S il devait exporter une bonne pratique vers le québec, ce serait celle des PiDA. «Nous avons peu d avalanches en raison des pentes moins fortes qu ici. Mais il y en a quand même. L approche météo et le déclenchement des avalanches par les artificiers, leurs techniques de déplacement, sont impressionnants. Les procédures sont rigoureuses et ce serait vraiment utile pour nous d appliquer et d adapter ce modèle.» Au final, ces échanges professionnels s enrichissent d expériences culturelles et humaines. Des deux côtés de l océan, Marion, la «pisteur» et Jeff «le patrouilleur» ont été admirablement bien accueillis par leurs collègues. Et sont bien décidés, en vrais explorateurs, à entamer un tour des stations pendant leurs loisirs! DSF n 26 11

m EntREtIEn syndicat national DES moniteurs DE ski FrANçAIS : gilles Chabert issu D une FAMiLLE DE LA MONTAGNE qui COMPTE TrOiS GÉNÉrATiONS DE MONiTEurS DE Ski, GiLLES ChABErT A FAiT DE L ENSEiGNEMENT Du Ski ET DE LA DÉFENSE DE LA PrOFESSiON LA BASE DE SON ACTiON. «Il ne faut jamais renoncer à améliorer ce qui marche bien.» Investi depuis 31 ans au Comité de Direction du S.N.M.S.F. et réélu à la présidence en 1998, 2002, 2006 et 2010, il fonde son action sur l unité de la profession et le maintien d un haut niveau de qualification. Sans oublier un objectif majeur de son engagement : développer la pratique du ski. Avec un dynamisme et une volonté à la mesure des enjeux d avenir de la profession. Quels sont les enjeux de votre mission? Nous ne sommes pas très nombreux (16 000 en France), c est-à-dire à peu près autant que les chauffeurs de taxi parisiens. Pour autant, notre image bénéficie d une très forte notoriété et cela tient à la qualité de notre enseignement. C est le résultat du travail de terrain des professionnels mais aussi de notre engagement auprès de ceux qui nous représentent. Et là, nous avons une spécificité de taille : nous gérons notre avenir directement avec les ministres concernés. Avec une ligne de conduite qui nous permet d être proactifs et efficaces qui consiste à être défendus sans se faire plaindre. Car je suis convaincu que le secteur de la montagne se porte bien. C est le message que je ne cesse d apporter en passant la plus grande partie de mon temps entre Paris et Bruxelles. La qualification professionnelle des moniteurs en France est-elle reconnue? Nous sommes leader au plan mondial en matière de formation et de compétences et enviés par les autres pays. Pour autant, nous ne vivons pas sur une île et dans ce cadre, le travail au niveau européen est essentiel. J ai obtenu de la Commission Européenne en juillet 2000 la reconnaissance de la spécificité de la profession de moniteur de ski sur le plan européen en vue de garantir la sécurité des pratiquants. Nous sommes à l origine de la création d une plate-forme européenne unique de formation pour les professionnels de l enseignement du ski afin de valider leurs compétences techniques (Eurotest) et en matière de sécurité (Eurosécurité). Ces deux examens font maintenant partie intégrante des cursus de formation des pays suivants : France, italie, Autriche, Allemagne, royaume uni, Belgique, Danemark, Espagne. un de nos projets est, en nous appuyant sur les initiatives de Michel Barnier au poste de Commissaire européen, de développer une carte européenne de moniteur. La liberté de circuler et d exercer son métier en Europe serait un atout supplémentaire de notre profession. Par ailleurs, il est indispensable de «toiletter» notre formation qui est aujourd hui très lourde. Pas question de baisser en qualité mais plutôt de s adapter aux évolutions de notre métier. L idée serait de réduire la durée tout en conservant l intensité de la formation. L enjeu d une bi-activité réussie fait-il partie de vos objectifs? Beaucoup de nos moniteurs sont bi-qualifiés. il y a bien sûr les métiers sportifs de la montagne mais c est un pourcentage d environ 10 pour 1 000. il vaut mieux se poser la question «de quoi a besoin l économie montagnarde en été?». Nous connaissons la réponse : les métiers du bâtiment, les charpentiers, les maçons il faut impérativement proposer des formations dans les secteurs porteurs. Faute de quoi, nous nous retrouvons avec des problèmes d emploi qui nuisent à toute l économie. En décembre, un rapport national a été remis au gouvernement qui balaie cette question. C est le résultat d une mission parlementaire menée par le député vos- 12 DSF n 26

gien François Vannson en collaboration avec nos organisations professionnelles. Ce travail, lancé en 2009 et qui a permis de recueillir les bonnes pratiques mises en œuvre en matière de saisonnalité sur les massifs répond à la question essentielle : comment faire pour améliorer ce qui marche déjà bien? il permettra de dégager des pistes de travail pertinentes. Quel regard portez-vous sur l évolution de la clientèle? Selon moi, la clientèle française régresse alors que les étrangers sont de plus en plus nombreux. C est ce qui explique que les chiffres d affaires restent bons. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de ce constat ou l expliquer simplement par la baisse du pouvoir d achat en France. C est clair que l envie de venir aux sports d hiver n est plus la même alors que paradoxalement, la montagne et le ski développent un capital sympathie formidable. Je le constate à chaque fois que je rencontre des décideurs. D ailleurs, en tant que co-fondateur de France Montagnes, je suis convaincu de l importance du jeu collectif en matière de promotion. il faut également revenir à des projets de terrain pour redonner aux plus jeunes le goût du ski. Aller à la montagne est enrichissant et la relance des classes de neige, des classes de découverte est un axe essentiel de notre stratégie commune. Nous devons porter ensemble ce projet au niveau national et de la même manière qu il y a eu un plan de développement de l informatique à l école, nous allons proposer un plan d action aux élus. Le thème de la sécurité est aujourd hui partagé par tous les acteurs de la montagne. Comment est-il perçu chez les moniteurs? il en a toujours été question évidemment. Aujourd hui, nous partageons des actions communes qui apportent un enrichissement de notre métier et nous avons inscrit des compléments de formation. La complémentarité entre les remontées mécaniques et les moniteurs ne peut qu être positive pour nous tous, professionnels et clients. C est en tout cas un bon exemple de la route commune que nous traçons. Nous ne sommes pas toujours d accord sur tout mais notre objectif commun d une offre de qualité trouve écho dans les excellentes relations que nous avons eues et que nous poursuivons avec la présidence de Domaines Skiables de France. Nous devons poursuivre sereinement dans cette voie. Les chiffres du SNMSF L enseignement du ski en France se réalise à plus de 90 % sous l enseigne de l École du Ski Français. Fondées en 1945, les Écoles du Ski Français représentent aujourd hui : m 250 écoles de ski, réparties dans tous les massifs français ; m 16 000 moniteurs exerçant sous un statut de travailleur indépendant, un effectif en progression permanente (près de 300 nouveaux membres en 2010) ; m 2,2 millions de clients ; m plus de 240 millions d euros d honoraires annuels ; m le premier système de vente en ligne de prestation d enseignement sportif avec 260 000 semaines de cours vendues en 2009 pour près de 36 millions d euros de CA ; m 1 800 emplois salariés de secrétaires /hôtesses d accueil dans les Écoles de Ski Français ; m 3 481 jeunes intégrés en phase de professionnalisation dans les ESF (en progression de 8 %). DSF n 26 13

m DOSSIER DéCloisonner les Deux mondes : un TrAvAIl DE «PASSEur» LES rapports ENTrE AGriCuLTurE ET DOMAiNES SkiABLES SONT ANCiENS ET LiÉS À LA NAiSSANCE DES STATiONS. historiquement, AVEC LES PrEMièrES STATiONS-ViLLAGES, LES POPuLATiONS LOCALES SONT À L OriGiNE DES STATiONS DE SPOrTS D hiver. LES PiONNiErS SONT DES AGriCuLTEurS Ou issus DE FAMiLLES D AGriCuLTEurS. il N EST PAS rare DE CrOiSEr DES SALAriÉS DE LA STATiON, ANCiENS AGriCuLTEurS. En revanche, dans le modèle des stations intégrées, des promoteurs privés ou publics, parfois extérieurs au territoire lui-même, sont à l origine de la création des stations. Ces bâtisseurs ne portent pas le même regard sur le partage des terres, ce qui a pu générer des conflits avec le monde paysan. Pour autant, dans tous les cas, agriculture et tourisme en montagne doivent être regardés comme irremplaçables et complémentaires. il faut faire apparaître toutes les synergies entre ces deux secteurs économiques en terme de pluriactivité, de fiscalité (la Taxe Loi Montagne devant être dirigée en partie vers l agriculture), de débouchés pour les produits régionaux, de valeur foncière accrue pour les agriculteurs propriétaires foncier et aussi de migration des techniques agricoles vers la revégétalisation des pistes de ski. 14 DSF n 26

agriculture & DOmaInES SkIablES k le partage D un même territoire Chaque station est un cas particulier, mais globalement aujourd hui, les bases d une cohabitation harmonieuse sont trouvées en station. En hiver, tandis que les stations sont de vastes terrains de sports, l agriculture est en sommeil. En été, l exploitation des pâturages prend le relais et le travail d aménagement des domaines skiables vient s y superposer. Dès lors, il est nécessaire de se concerter de manière à ce que les deux activités cohabitent et que les travaux soient peu pénalisants pour l agriculteur. Coumeille sous la neige (ARIÈGE) Le terrassement des pistes de ski sur les pâturages, de l ordre de quelques hectares par an en fonction des stations, peut avoir des conséquences pour l utilisation des terres. La création de retenues d altitude sur des terres favorables est parfois mal acceptée. Enfin, les agriculteurs s inquiètent des effets de la neige de culture sur le développement des plantes. qu elles soient définitives ou plus souvent ponctuelles dans le temps, ces pertes sont le plus souvent compensées par la mise à disposition d autres surfaces en herbe. Les terrassements peuvent être l occasion d une remise en valeur d alpages et de l aménagement de nouveaux accès. Finalement, agriculteurs comme exploitants de domaine skiable souhaitent disposer de pâturages «propres», autrement dit de pelouses rases, constituées d espèces herbacées, permettant une bonne tenue des sols et de la neige. Coumeille après terrassement une cohabitation DEvEnuE IncOntOuRnablE Dans la plupart des stations, il existe un espace de négociation qui doit être encouragé et renforcé. L agriculteur doit être informé des travaux qui le concernent. Par ailleurs, les opérations de végétalisation suite aux travaux de terrassement des pistes de ski sont devenues systématiques. un savoir-faire a été capitalisé depuis maintenant plusieurs décennies, suite à de nombreux échanges entre les exploitants de domaines skiables, les agriculteurs et l intervention de scientifiques. un des spécialistes de ces questions, Marc- Jérôme hassid, docteur en géographie et sciences de l environnement travaille depuis plus de dix ans sur l impact de ces techniques sur l évolution des paysages. «Les techniques de végétalisation se sont diversifiées, les mélanges de graines améliorés, pour répondre à la demande des agriculteurs et à des exigences environnementales. L agriculteur peut se voir confier l épandage d amendements organiques. Toute cette expertise et ce savoirfaire bénéficient aussi bien au monde agricole qu aux exploitants de domaines skiables.» De nombreux enjeux concernent les deux professions comme par exemple à Châtel le partage de la ressource en eau ou dans d autres stations l accès aux alpages. Des solutions communes doivent être recherchées. ImagInER l avenir La déprise agricole est toujours d actualité si l on considère la montagne française dans son ensemble. L évolution de la politique agricole européenne est une source d inquiétude, Martial Saddier s en ouvrait dans les colonnes de notre dernier numéro. Le tourisme continue de faire connaître les produits issus de l agriculture de montagne. inversement l agriculture de montagne est une vitrine touristique pour certaines stations. Elle joue un rôle important pour l entretien des pistes de ski. Cette dynamique relevée au niveau des stations de sports d hiver doit donc être confortée tout en veillant au respect des milieux naturels. Les échanges entre les deux professions qui sont spontanés dans certaines stations restent à renforcer pour d autres. Le renouvellement des générations peut être une occasion à saisir. il est important de conserver «des passeurs», des personnes qui puissent assurer la liaison entre les deux professions, comme par exemple les agriculteurs qui revêtent la combinaison de moniteur le temps de l hiver. Enfin, la station reste l échelle pertinente de discussion. il semble également intéressant de favoriser les échanges de bonnes pratiques, nombreuses et pas toujours connues, au sein de groupes de travail à l échelle de massifs par exemple. Dans le cadre de la formation de certains métiers liés à l activité des domaines skiables, il pourrait être inséré un volet visant à faire connaître les pratiques agricoles. DSF n 26 15

m DOSSIER Cohabitation : la haute-savoie INNOvE LA SOCiÉTÉ D ÉCONOMiE ALPESTrE DE LA haute-savoie EST LArGEMENT impliquée DANS LES ENJEux DE L AGriCuLTurE DE MONTAGNE ET PLuS PArTiCuLièrEMENT DANS LA GESTiON Du DOMAiNE PASTOrAL. un TErriTOirE PArTAGÉ AVEC D AuTrES ACTEurS DONT LES DOMAiNES SkiABLES ET qui NÉCESSiTE LA MiSE EN PLACE D ACTiONS DE COhABiTATiON. Le sujet est à l ordre du jour des prochains travaux et sa prise en compte devrait participer à l amélioration de la cohabitation sur les alpages. les troupeaux D IntéRêt collectif PIERRE LAChENAL, Directeur de la SEA, y voit un chantier d avenir prometteur d autant que de nombreuses actions ont déjà été mises en route avec des résultats très engageants. Au cœur du dispositif, les échanges des services, les «troupeaux d intérêt collectif» et des projets pour une meilleure connaissance mutuelle. Une démarche globale qui vise à créer des ponts entre deux mondes qui vivent, travaillent et entretiennent un espace commun. Afin d améliorer la cohabitation de tous les acteurs des territoires d altitude et de favoriser la gestion de l eau en montagne, la SEA a, entre autre, lancé une action pilote à partir du bassin-versant de l Arly. un travail qui a permis de faire émerger dix bonnes pratiques de la gestion de l eau en montagne pour la culture de la neige. un premier Cahier technique a été édité en 2010 (*). «C est une amorce pour l indispensable coopération entre tous les acteurs du territoire. C est un document évolutif et nous souhaitons que progressivement les bonnes pratiques touchent également l agropastoralisme. La culture de la neige (damage, préparation des pistes, neige de culture ) est un sujet qui concerne les agriculteurs. Avec ses impacts sur la période de levée de l herbe (par exemple) mais aussi ses services potentiels. On voit aujourd hui déjà émerger spontanément des échanges. Les retenues collinaires peuvent avoir un double emploi et servir à l alimentation des troupeaux comme c est déjà le cas à Megevette.» «Il n y a pas meilleure machine que l animal : par-devant, il entretient l alpage. Parderrière, il sert d épandeur de matières organiques!» Cette boutade de Pierre Lachenal résume bien tout l intérêt qu il y a à déployer des troupeaux ovins, caprins et bovins sur les milieux d altitude. Dans le Vercors, 90 % des pistes de ski sont pâturées. En haute-savoie, la Compagnie du Mont Blanc à Chamonix ne s y est pas trompée. Sur les secteurs de Lognan et de La Pendant, 650 chèvres et 600 moutons travaillent à l entretien des pistes! 16 DSF n 26

agriculture & DOmaInES SkIablES k Conduits par un berger très impliqué, ces travaux sont le résultat de la première convention signée entre un domaine skiable et une Association foncière pastorale. un peu plus loin, sur les pentes du Mont Joly à Saint Gervais, c est la même histoire. Le berger sait choisir les bonnes zones à défricher, localiser le parc de nuit où les troupeaux vont déposer la matière organique et favoriser ainsi une herbe de qualité indispensable aux troupeaux et au maintien du manteau neigeux. CqFD Des échanges constructifs qui renvoient à de l histoire ancienne la méfiance réciproque entre agriculteur et domaine skiable. D autant qu aujourd hui, il est de plus en plus fréquent de voir des bergers utiliser les cabanes des remontées mécaniques pour leur séjour en alpage, profitant de l électrification et du confort de ces installations. Pour Pierre Lachenal, ces pratiques, qui relèvent du bon sens et de l usage, devraient faire systématiquement l objet de conventions. FORmatIOnS croisées «Améliorer la connaissance mutuelle, sortir des clivages et des poncifs et retrouver le sens du dialogue.» La bi-activité agriculture-remontées mécaniques est historiquement une pratique établie. Pour autant, chacun occupe son espace du calendrier à tour de rôle sans vraiment chercher à savoir si des améliorations sont possibles. «Nous avons là une belle opportunité de développer une solidarité active. Les agriculteurs de montagne doivent aujourd hui être épaulés par du salariat. Nous pensons qu il serait utile à tous de développer des emplois saisonniers stables avec une bi-activité «berger-pisteur». Même terrain, même identité montagnarde, même compétences, l idée est dans l air du temps. SE connaître pour mieux DIalOguER Comment faire alors pour convaincre l ensemble des interlocuteurs du bien-fondé de ces projets. «Améliorer la connaissance mutuelle, sortir des clivages et des poncifs et retrouver le sens du dialogue.» La réponse de Pierre Lachenal est claire. La transversalité des usages de la montagne implique que chacun en connaisse l existence. «Les plans des pistes devraient être connus des alpagistes. Les plans de pâturage devraient être connus des services des pistes. Les touristes devraient être mieux informés.» une meilleure communication devrait ainsi permettre l émergence d adaptation des usages et des pratiques et la naissance de bonnes idées pour favoriser les pratiques sportives sans nuire au pastoralisme et inversement. De belles pistes à ouvrir dans les années à venir! (*) Pour en savoir plus : www.eauenmontagne.org POrTrAIT Double vie En été, c est à quelques kilomètres du Plateau de la Livraz, au-dessus de Megève qu il faut monter pour rencontrer Gabriel Blanchet. L hiver, vous pouvez le croiser sur les pistes, en train de patiemment apprendre à ses clients à négocier des virages parfaits. Car pour Gabriel, le mélange ski-agriculture, c est un peu une histoire de famille. Son père Jean-Louis travaillait déjà aux remontées mécaniques de Megève tout en s occupant de son alpage du radaz, hérité de son père arrivé du reposoir au début du siècle dernier. En 2001, Gabriel reprend l exploitation : 24 vaches laitières et 83 hectares de terre de montagne et d alpages. «C est un travail difficile mais nous sommes encore une cinquantaine sur la commune.» Seule contrainte de ce partage des métiers : les alpages sont évidemment transformés en pistes de ski l hiver. Conséquence : la montée des troupeaux au printemps est retardée d au moins 3 semaines, la neige tassée fondant beaucoup moins vite. Le ski, Gabriel est tombé dedans petit comme tous les gamins du village. Aujourd hui moniteur de ski, de snowboard et de telemark, il trouve dans ce travail sur les pistes un complément de revenu, une ouverture vers l extérieur et un moyen de partager son amour du pays. «Parfois mes clients m interrogent sur mon métier d agriculteur. Alors, on fait un petit détour par la ferme. Ils découvrent alors une autre facette de Megève et repartent avec le reblochon fait maison! Ce genre d échange crée forcément des liens différents!» DSF n 26 17

m DOSSIER PrODuITS Du TErrOIr : un équilibre À Préserver LE FrOMAGE DE MONTAGNE EST un DES PrODuiTS LES PLuS APPrÉCiÉ DES TOuriSTES. ÉTÉ COMME hiver, LA CONSOMMATiON DES PrODuiTS DE TErrOir EST une DES VALEurS SÛrES DES VACANCES À LA MONTAGNE. une opportunité pour les producteurs qui ont ainsi l occasion d accroître la notoriété et les ventes de leurs produits mais aussi pour les acteurs du tourisme qui s appuient largement sur l image de cette agriculture raisonnée pour promouvoir le côté naturel et authentique des séjours à la montagne. Les producteurs de Beaufort, représentés par le Syndicat de défense du fromage Beaufort, sont bien conscients des enjeux. Caroline Glise, responsable administrative de l interprofession du Beaufort, nous l explique. «Depuis le milieu des années 70, les producteurs ont mis en place des stratégies qui prennent en compte l arrivée massive des vacanciers. Ouverture des ateliers de productions, partenariats avec les ESF pour présenter notre fromage dans les pots d accueil, participations aux évènements, prix compétitifs pour les refuges de montagne toutes les opportunités sont bonnes pour améliorer la notoriété de notre produit. On peut estimer aujourd hui que 20 % des ventes se font en vente directe. Pour autant, la clientèle touristique sur place ne représente qu une petite partie de nos ventes. Le reste se fait partout en France et bénéficie donc de travail d image réalisé pendant les saisons touristiques.» un lien DE terroir à préserver Le revers de la médaille : en 30 ans, plus de 1 000 hectares de fauche ont disparu en Tarentaise. La zone AOC reste stable mais le cahier des charges imposé par Bruxelles est de plus en plus contraignant et il n est plus rare de voir des appellations d origine refusées pour raison de «liens au terroir insuffisant». Or c est justement la qualité des prairies, des alpages, leur localisation, la qualité de l alimentation des troupeaux qui constituent ce lien au terroir. «Nous n avons pas forcément un poids économique important avec un millier d emplois sur la zone Beaufort. Mais notre produit a un rôle à jouer dans l attrait touristique du territoire. Si nous ne pouvons plus garantir la qualité de notre chaîne d alimentation, nous risquons gros. Il faudrait en tenir compte dans le développement montagnard. Apprendre à construire dans la pente, éviter le mitage, revenir aux villages de Tarentaise compacts et solidaires. Et s attacher à conserver et à protéger de l aménagement touristique les hectares stratégiques essentiels pour nous. Bref, réfléchir tous ensemble à un modèle de développement respectueux de tous, agriculteurs, gestionnaires des stations, habitants permanents. Un vrai projet de territoire!» La zone de fabrication du Beaufort couvre les vallées du Beaufortain, de la Tarentaise, de la Maurienne et d une partie du Val d Arly, soit 450 000 hectares sur les 630 000 de la Savoie. Cette zone se caractérise par de vastes surfaces d alpage, comparables à celles de l isère et de la haute-savoie réunies. 18 DSF n 26

agriculture & DOmaInES SkIablES k PASTOrAlISME ET TOurISME, le modèle ariégois DANS LA STATiON DE MiJANES EN ArièGE, LA JuxTAPOSiTiON Du TOuriSME ET DE L AGriCuLTurE EST ANCiENNE. ici, COMME DANS LES STATiONS VOiSiNES LA COMPLÉMENTAriTÉ ENTrE LE PASTOrALiSME ET LA Bi-ACTiViTÉ EST ANCrÉE DANS LES MœurS. «Perchmen, dameurs ou moniteurs sont bergers en été. Cela représente environ 10 % du personnel Avec pour les domaines skiables, l avantage d avoir du personnel qui connaît aussi bien la montagne que la conduite d engins sur terrains difficiles. Il nous arrive même de faire appel aux engins agricoles de montagne pour certains travaux.» Pour Laurent Barat, Directeur d exploitation de Mijanes, l espace pastoral où évoluent en été moutons, vaches et chevaux est aussi celui des pistes et cela ne pose aucun problème. «Nous essayons toujours que cette complémentarité soit source d amélioration. Ainsi, derrière les terrassements, il y a toujours un programme de réensemencement. Depuis plusieurs années, c est même l occasion d améliorer la qualité des fourrages. Nous utilisons des engrais organiques et des semences spéciales de plantes de montagne qui résistent mieux aux intempéries.» Georges Vigneau, Agent de développement à la Communauté de Communes du Donezan complète la démonstration. Phase décapage de la terre végétale sur environ 20 à 30 cm. (Mijanès) «Depuis plusieurs années, le travail réalisé permet d obtenir des pelouses de grande qualité. Nous réengazonnons à la main, dès que le chantier est terminé. Ainsi, les premières feuilles sont déjà sorties avant la neige qui est elle-même un engrais. Le résultat est que le printemps suivant nous avons des prairies parfaites. Et des fourrages de premier choix pour les troupeaux.» Un travail au déroulement précis quand les troupeaux assurent la SécuRIté Et permettent DE DépEnSER moins un autre avantage des pâturages sur les pistes réside dans la qualité du travail des «vaches brouteuses». En effet, celles-ci contribuent à la création d un terrain ras qui favorise la fixation de la sous-couche de neige. «Sur les estives, on trouve souvent cette grande herbe longue et fine, la gispet, qui, une fois mouillée et couchée, se transforme en véritable plaque de glace dès que le froid arrive. Impossible alors aux premières neiges de se fixer au sol. Si l estive est entretenue par les troupeaux, l herbe est rase et la sécurité garantie.» Georges Vigneau y voit d autres avantages, «on gagne en sécurité mais on peut aussi skier plus tôt avec un minimum de neige, et dépenser moins. Moins de temps passé à damer les pistes, moins de carburant consommé et un avantage certain en termes paysager dès le retour du printemps.» m terrassement m Décapage superficiel de 10 à 20 cm m Stockage de cette terre humifère. m Reprofilage et fin du chantier m Ré-engazonnement en deux temps : avec des espèces, le trèfle alpin, la fétuque ou le raygrass, à croissance rapide qui fixent le sol. régalage de la terre stockée contenant les graines autochtones (chardons, lotier, graminées diverses). Plus lentes à repartir, elles prennent le relais et continuent d agglomérer la terre. m Résultat : le travail conjugué des semences extérieures et des graines locales permet qu en 5 à 6 ans, on retrouve la composition originale du terrain. DSF n 26 19

m DOSSIER CONSErvATOIrE BOTANIQuE NATIONAl DES PyréNéES ET DE MIDI-PyréNéES révégétaliser «local», un vrai Projet De territoire DEPuiS 2000, LE CONSErVATOirE BOTANiquE DES PyrÉNÉES A LANCÉ un PrOGrAMME unique EN SON GENrE. OBJECTiF : AMÉLiOrEr LES PrATiquES DE revégétalisation EN ALTiTuDE EN TENANT COMPTE DE LA SPÉCiFiCiTÉ FLOriSTiquE LOCALE ET qui GArANTiSSE LA PrOTECTiON Du MiLiEu NATurEL. et les responsables de l aménagement du territoire de réfléchir à de nouvelles pratiques, plus durables, plus écologiques. il aura fallu dix ans pour voir émerger une vraie filière de production de semences locales. «Dix ans de collecte de graines et de mise en commun de savoir-faire, sur les crêtes et les sommets des Pyrénées, au bord des télésièges et des talus routiers.» Le Conservatoire botanique des Pyrénées et Midi-Pyrénées, s attache à animer la dynamique pour de meilleures pratiques de revégétalisation en montagne pyrénéenne dans un principe de conservation de la flore et des milieux naturels. En collaboration avec les acteurs du territoire, le programme Ecovars+, qui s inscrit dans une perspective de développement durable, aborde différentes thématiques : la collecte de semences locales, leur production en pépinière et leur utilisation raisonnée dans le milieu après aménagements. Ecovars+ regroupe les actions de coordination au niveau du massif pyrénéen, permet d assurer l adéquation entre les attentes des acteurs de la revégétalisation, les projets locaux et l esprit de la démarche et mutualise moyens et savoir-faire. Sandra Malaval, ingénieur agronome, est chargée de mission en restauration écologique. «Jusqu à maintenant, la revégétalisation se faisait en achetant des plantes du marché mondial. Les semences de montagne viennent d Urugay, des États-Unis, de Nouvelle-Zélande. C est en général une flore de plaine qui nécessite l usage considérable de fertilisants et une densité astronomique. La restauration en altitude se fait sur des sols généralement pauvres. Cette surconsommation de semences et de fertilisants donne de beaux résultats rapidement mais présente un risque : celui de croisement avec des plantes locales et à terme une pollution génétique et la disparition de notre flore endogène.» C est la raison pour laquelle le Conservatoire a choisi, en partenariat avec les stations de ski, l ONF, les Conseils généraux 10 plantes ont été sélectionnées pour leur intérêt productif et leur spécificité locale. De là s est organisée toute une filière, de la collecte à la commercialisation en passant par la multiplication et la traçabilité, pour arriver aujourd hui à la naissance de Pyrégraine, la marque collective, déposée par le Conservatoire botanique en septembre 2010. Les stations de ski pyrénéennes ont immédiatement compris la portée de ce projet au nom d un développement touristique durable. Au-delà des mots, certaines d entre elles se sont déjà engagées dans la démarche. Celles de la Communauté de communes des Vallées d Ax ont commencé par imaginer une interface SiG pour pouvoir planifier la revégétalisation de manière cohérente. En établissant une cartographie de la flore et de la faune du territoire, des habitats naturels, espèces rares ou menacées, elles ont dressé une photographie du patrimoine de leur territoire permettant de planifier une restauration végétale adaptée. il faudra toutefois attendre 2012 pour que les semences soient disponibles sur le marché. 20 DSF n 26