Affiliation sociale et imposition Tout change en 2016 pour les petits exploitants De grands changements fiscaux et sociaux vont impacter les petites exploitations à partir de 2016. Le forfait agricole disparaît, remplacé (progressivement!) par le micro-ba. A cela s'ajoute une profonde réforme des règles d'affiliation MSA, qui touchera surtout les petits exploitants. Pour appréhender ces changements et s'y préparer, le Service juridique et fiscal du Syndicat Général des Vignerons a organisé en janvier plusieurs réunions d'information en Champagne. Nous publions dans ces pages un résumé de ces réunions en trois parties. Les second et troisième volet seront publiés dans les prochains numéros. Première partie MSA : Les cotisants solidaires dont le forfait 2013 excède 7 688 sont affiliés au régime des exploitants Important : Cette règle ne s'applique pas aux personnes exploitant moins de 18 ares 75 de vigne ; aux personnes ayant fait valoir leurs droits à retraite. Un nouveau critère d'affiliation entraîne, à partir de 2016, l'affiliation au régime social des exploitants agricoles de certains exploitants «solidaires» mettant en valeur une surface inférieure à 75 ares de vigne. Pas de cotisation en-dessous de 18 ares 75 Si vous exploitez moins de 18 ares 75 (vigne) vous ne versez aucune cotisation à la MSA pour votre activité d'exploitation. Les revenus tirés de votre activité viticole sont alors assimilés à des revenus patrimoniaux, en principe assujettis aux contributions sociales majorées dont le taux global est de 15,5 % recouvrées en même temps que l'impôt sur le revenu. Jusqu'ici, les exploitants au forfait échappaient au paiement de ces contributions du fait qu'ils ne déclaraient pas eux-mêmes leurs bénéfices, fixés directement par
l'administration fiscale. Cette situation changera avec la réforme du forfait agricole (voir deuxième partie). Si vous exploitez plus de 18 ares 75 vous cotisez à la MSA soit en qualité de cotisant solidaire soit en qualité de chef d'exploitation si l'importance de l'exploitation dépasse le seuil d'affiliation. La réforme concerne le seuil d'affiliation au régime des chefs d'exploitation. Jusqu'ici, pour les viticulteurs, ce seuil s'appréciait uniquement en fonction de la surface exploitée. Il était fixé à 75 ares pour la vigne. Désormais, le seuil sera plus complexe, car d'autres critères seront pris en compte. Un critère temps La surface exploitée pourra être complétée par un indicateur du temps consacré à une activité agricole qui n'utilise pas de surface. Sont notamment visées les activités de prestations de services agricoles, les activités de transformation et de commercialisation des produits de l'exploitation, ou encore les activités agrotouristiques telles que l'exploitation d'un gîte rural à la ferme. Ces activités étant moins répandues chez les petits exploitants, nous ne développerons pas ce point. Mais les personnes concernées doivent déclarer à la MSA le nombre d'heures de travail consacrées à ces activités annexes, Un critère revenu D'autre part, un nouveau critère est instauré : le revenu procuré par l'activité. Même si la surface exploitée est inférieure à 75 ares, l'exploitant sera affilié au régime des chefs d'exploitation si son activité lui procure un revenu imposable supérieur à 800 fois le montant horaire du SMIC. Pour un SMIC à 9,61 /heure en 2015, le seuil est de7 688. En 2016 il passe à 7736. Cette nouvelle règle ne s'applique ni aux personnes mettant en valeur une surface inférieure à 18 ares 75, ni aux retraités (quel que soit le régime de retraite). Pour l'appréciation du seuil de revenu, c'est le dernier bénéfice fiscal connu qui est pris en compte.
Ainsi, pour apprécier le seuil au 1 er janvier 2016, on retiendra le bénéfice forfaitaire de l'année 2013, qui est le dernier à avoir été notifié par l'administration fiscale. En revanche, pour les exploitants au réel, c'est le revenu professionnel 2014 qui est pris en compte. Selon le Ministère de l'agriculture, l'affiliation au régime prend effet dès que l'exploitant notifie à la MSA un revenu professionnel supérieur à 800 SMIC. Toutefois, en raison du principe d'annualité des cotisations, celles-ci ne seront dues que pour l'année suivante, sauf pour la cotisation accident (ATEXA) qui est immédiatement due au prorata du temps restant à courir jusqu'à la fin de l'année. Exemple : Un exploitant de 60 ares de vigne déclare à la MSA, en juin 2015, son bénéfice forfaitaire 2013, qu'il vient de recevoir, et qui s'élève à 8 520 (avant majoration de 25 % appliquée par l'administration fiscale pour le calcul de l'impôt). Ce montant est supérieur à 800 fois le SMIC (à cette date, le SMIC était de 9,61 /heure, et 800 SMIC = 7 688 ). Donc l'exploitant se voit affilier au régime des chefs d'exploitation dans lequel il paiera des cotisations à compter de l'année civile suivante, soit 2016. Important : Afin d'assurer une certaine stabilité de l'affiliation, les exploitants qui sont affiliés en raison de revenus supérieurs à 800 SMIC, resteront affiliés tant que leurs revenus ne s'abaisse pas en dessous de 640 SMIC. Commentaire : La réforme fiscale du bénéfice forfaitaire va fortement limiter, en pratique, l'impact de ce nouveau seuil, car il sera très rare que l'exploitation d'une surface inférieure à 75 ares génère un «micro-ba» supérieur à 800 SMIC (voir ci-dessous). En conséquence, la mauvaise synchronisation des réformes va entraîner de nombreux allers-retours avec des passages du régime solidaire au régime des exploitants en 2016 et retour au régime solidaire en 2018 ou 2019.
Deuxième partie : Forfait fiscal un nouveau visage et un nouveau nom : le micro-ba Le seuil de passage au régime réel est porté de 76 300 TTC actuellement, à 82 200 HT à compter du 1 er janvier 2016. L'ancien seuil se mesurait en moyenne sur deux années. Le nouveau seuil se mesure en moyenne sur trois années. Il s'agit des recettes encaissées au cours de l'année civile, majorées de la valeur des produits prélevés en nature sur l'exploitation pour être attribués aux salariés, ou au bailleur en paiement des fermages en nature. Mais il ne faut pas tenir compte des sommes encaissées correspondant au prix de cession des immobilisations, ou à une indemnité d'assurance couvrant la perte d'une immobilisation, à des intérêts statutaires versés par une coopérative, à des remboursements de charge dans le cadre de l'entraide à des subventions d'équipement Le seuil spécifique de 46000 qui permettait d'opter pour le retour au forfait est supprimé. En conséquence, lorsque le montant des recettes (en moyenne sur trois ans) s'abaisse en dessous du seuil de 82200, le régime du micro-ba redevient applicable, sauf option pour le régime réel. Les règles actuelles applicable en cas de passage du réel au forfait ne sont plus adaptées, mais les décrets d'application du nouveau régime micro-ba n'ont pas encore été publiés à ce jour. Le régime r micro-ba n'est pas applicable aux sociétés, sauf aux GAEC. Le régime micro-ba n'est pas non plus applicable aux contribuables qui exercent une autre activité non salariée à raison de laquelle ils sont imposables selon un régime réel dans la catégorie des BIC (bénéfices industriels et commerciaux) ou des BNC (bénéfices non commerciaux).
Un seuil spécifique pour les GAEC Le régime du micro-ba reste applicable aux GAEC dont le montant des recettes n'excède pas un seuil qui varie en fonction du nombre d'associés : Nombres d'associés du GAEC Seuil de passage au réel (recettes HT) 2 164400 HT 3 246600 HT 4 à 6 328800 HT au-delà 82200 x nombre d'associés x 60 % Dans le régime micro-ba, le bénéfice imposable est égal à 13 % du montant des recettes encaissées. Mais pour tenir compte de la variabilité des revenus agricoles, le législateur a choisi d'appliquer à tous le régime de la moyenne triennale. En conséquence, la base d'imposition sera égale à la moyenne annuelle des recettes de l'année et des 2 années précédentes. Une entrée progressive dans le régime micro-ba Le micro-ba ne s'appliquera qu'à compter de l'année 2016. Les bénéfices 2014 et 2015 restent fixés selon l'ancien régime du forfait. Et du fait de la moyenne triennale, la transition entre l'ancien régime et le nouveau se fera progressivement. Ainsi, le bénéfice imposable de l'année 2016 (payé en 2017) sera égal à la moyenne du bénéfice forfaitaire 2014, du bénéfice forfaitaire 2015 et de 13 % des recettes encaissées en 2016. Au titre de 2017 (impôt payé en 2018), la moyenne se décale d'un an : bénéfice forfaitaire 2015 + 13 % des recettes 2016 + 13 % des recettes 2017, le tout divisé par 3. Ces règles s'appliquent aux contribuables soumis au régime forfaitaire ou micro-ba pour toutes les années prises en référence. Pour les contribuables qui débutent leur activité, la loi a prévu que le bénéfice imposable de la première année est égal à 13 % des recettes de ladite année. Pour la deuxième année, le bénéfice se calcule en moyenne sur les deux années : (recettes N-1 + recettes N) / 2 x 13 %. Pour les contribuables qui ont changé de régime et qui sont passés du réel au micro-ba au cours des années de référence, le législateur n'a rien prévu. Il semblerait donc que les recettes des années imposées au réel doivent être prises en compte dans la moyenne triennale du micro-ba.
Commentaire : La transition entre l'ancien régime du forfait et le micro-ba, même si elle est progressive, entraîne une double prise en compte des récoltes levées avant 2016, mais dont le prix de vente est encaissé après le 1 er janvier 2016. Les contribuables doivent déclarer le montant des recettes imposables : Fini la simple case à cocher sur la déclaration de revenus. Désormais, les exploitants relevant du micro-ba devront déclarer le montant de leurs recettes (HT) sur leur déclaration de revenus. Et puisque le micro-ba est calculé sur une moyenne triennale, il faudra aussi déclarer les recettes des deux années précédentes. Le chiffre à déclarer est le montant total des recettes encaissées hors taxes, majorées de la valeur des produits prélevés sur l'exploitation pour être attribués aux salariés ou au bailleur en paiement du fermage en nature, et à l'exclusion : du prix de cession des immobilisations, des subventions et primes d'équipement, des remboursements de charges dans le cadre de l'entraide, des redevances ayant leur origine dans le droit de propriété Le micro-ba et les plus-values : La plus-value est le profit réalisé lors de la cession d'une immobilisation. Elle est égale à la différence entre le prix de cession et la valeur nette comptable. Cette dernière est égale, en principe, à la valeur d'origine (prix d'achat) diminuée des amortissements. Mais, bien sûr, les exploitants relevant du micro-ba ne comptabilisent pas à proprement parler des amortissements. Néanmoins, ils devront reconstituer une valeur nette comptable en calculant des amortissements selon la méthode linéaire. Exemple : Un exploitant cède un matériel pour un prix de 5 000. Il l'avait acheté 3 ans avant pour 8 000. On considère que ce matériel est amortissable sur 5 ans, soit un amortissement de 1 600 par an. La valeur nette comptable est donc de 3 200 (8 000-1 600x3) et la plus-value de 1 800 (5 000-3 200). Pour limiter la plus-value, il est préférable de retenir des durées d'amortissement longues (dans la limite du raisonnable!)
Cette plus-value doit être déclarée séparément sur la déclaration de revenus, sauf si elle est exonérée. Le régime d'imposition ou d'exonération des plus-values professionnelles est assez complexes. Mais les exploitants en micro-ba seront le plus souvent exonérés dès lors qu'ils exercent leur activité depuis au moins 5 ans. Troisième partie : Le micro-ba et les cotisations sociales Les cotisations sociales sont calculées sur les bénéfices agricoles imposables. Pour les exploitants relevant du micro-ba, c'est donc le micro-ba qui servira d'assiette de calcul. Et puisque le micro-ba est calculé sur une moyenne triennale de recettes, il en sera de même pour les cotisations sociales. Ce principe, d'apparence simple, ne l'est pas tant que cela, et les textes tels qu'ils ont été publiés ne permettent pas de régler toutes les situations. Pendant la période transitoire (2016 à 2018), les règles suivantes devraient s'appliquer, en distinguant les exploitants qui ne changent pas de catégorie d'affiliation (solidaires en 2015 qui restent solidaires au titre des années suivantes, ou chefs d'exploitation en 2015 qui le restent au titre des années suivantes) et ceux qui changent de catégorie en 2016 (solidaires en 2015 qui se voient affiliés au régime des chefs d'exploitation à partir de 2016). 1 Les affiliés iés qui ne changent pas de régime en 2016 : - Cotisations 2016 : calculées comme avant (sur le bénéfice forfaitaire 2015, ou, pour les exploitants à la moyenne triennale, sur la moyenne des bénéfices forfaitaires 2013, 2014 et 2015). - Cotisations 2017 : calculées sur le micro-ba 2016, lui-même égal à la moyenne entre le forfait 2014, le forfait 2015 et 13 % des recettes 2016. - Cotisations 2018 : calculées sur le micro-ba 2017, lui-même égal à la moyenne entre le forfait 2015, 13 % des recettes 2016 et 13 % des recettes 2017. 2 Les solidaires en 2015 qui deviennent chefs d'exploitation en 2016 : - Cotisations 2016 : calculées sur le micro-ba 2016, lui-même égal à la moyenne entre le forfait 2014, le forfait 2015 et 13 % des recettes 2016. - Cotisations 2017 : calculées sur le micro-ba 2016, lui-même égal à la moyenne entre le forfait 2014, le forfait 2015 et 13 % des recettes 2016.
- Cotisations 2018 : calculées sur le micro-ba 2017, lui-même égal à la moyenne entre le forfait 2015, 13 % des recettes 2016 et 13 % des recettes 2017. Commentaire : Dans ce cas, les cotisations 2016 et 2017 ont la même assiette de calcul. Option possible pour une assiette annuelle de cotisations sociales. À compter de 2019, les chefs d'exploitation (mais pas les solidaires) imposés au micro-ba pourront opter pour une base de calcul des cotisations sociales égale à 13 % de leurs recettes de l'année précédente. Commentaire : Curieusement, cette option ne semble pas possible pendant la période transitoire (2016 à 2018). Cette situation n'est pas très logique et sera peut-être corrigée par décret ou instruction ministérielle. La loi prévoit, de toute façon, que les modalités de l'option seront fixées par décret. À ce jour, ce décret n'est pas publié.