AGRICULTURE 1. Constats et objectifs Quelques chiffres clés : En 30 ans, de 1980 à 2010, la part de l agriculture dans le PIB est passée de 1,1% à 0,5%. Le pays a perdu 63 % de ses exploitations. Le nombre de travailleurs actifs dans le secteur a quasiment été divisé par deux! Dans le même temps, la superficie moyenne par exploitation a plus que doublé, passant en Wallonie de 20,8 ha à 55,6 ha. Pourtant, le nombre de travailleurs agricoles par exploitation est loin d avoir évolué dans de mêmes proportions, passant de 1,6 à 1,9 en 30 ans. Les exploitations externalisent également plus, en recourant plus fréquemment à de la maind œuvre extérieure (20% contre 4% en 1980). Au niveau de la consommation des ménages, les dépenses pour certains produits «frais» (comme la viande) ont diminué de près de 50% depuis 1980, alors que celles portant sur des produits préparés augmentent de manière constante. Selon une étude menée par l Université de Cambridge, la Belgique serait le 3 ème pays du monde où l on mange le moins sainement, juste derrière l Arménie et la Hongrie! D après une autre étude de l OMS, c est en Belgique et en Bulgarie qu on trouvera le plus de femmes en surpoids d ici 2030, avec 89% des femmes de plus de 18 ans présentant un indice de masse corporel (IMC) supérieur à 25! Les exploitations bio en Wallonie ont connu un essor considérable, surtout depuis environ 10 ans : on passe ainsi de 37 exploitations bio pour 583ha en 1987 à 671 exploitations (32.330ha) en 2008 et enfin 1.195 exploitations (57.500ha) en 2013. Le litre de lait payé actuellement aux producteurs wallons tourne en moyenne autour des 25 centimes alors que son coût de production, hors maind'œuvre, est estimé à 33 centimes! L agriculture est avant tout nourricière. Elle est fondamentale tant dans sa composante élevage que culture : elle conditionne l accès à une alimentation de qualité et en suffisance pour tous les êtres humains présents et à venir. C est pourquoi, pour le cdh, l agriculture reste d abord un secteur économique essentiel qui ne peut devenir l objet de spéculations de quelques grands conglomérats par l entremise de technologies, de l accaparement du foncier ou de la pression des industries agroalimentaires. L agriculture doit, au travers d un dialogue et d une concertation structurée, trouver toute sa place comme acteur respecté de la filière alimentaire. Le commerce international des produits agricoles doit en outre être encadré par des normes et par des règles spécifiques qui favorisent l autonomie, la souveraineté alimentaire de chaque région du monde et interdisent les spéculations financières meurtrières. Enfin, l agriculture doit vivre en symbiose avec la nature : elle est un acteur clé de l entretien et de la préservation de notre environnement naturel. Celuici conditionne la pérennité de l agriculture. Réinvestir dans l agriculteur signifie aussi défendre les travailleurs du secteur agricole. Ils ne représentent aujourd hui plus que 2,5 % de la population active. Une diminution forte du coût du travail doit permettre de stabiliser, voire recréer et dynamiser l emploi dans ce secteur, d assurer des revenus décents aux agriculteurs, et de favoriser, en aval 1
de la production agricole, la création de nouveaux emplois. A côté des marchés européens actuels, il faut encourager le développement de circuits courts (notamment par le biais des coopératives et à partir de normes de qualité propres et différenciées) et la diversification de l activité agricole qui permettent de renouer le contact entre les producteurs et les consommateurs au bénéfice des uns comme des autres. Il convient aussi de poursuivre les efforts pour accroître la valeur ajoutée de l industrie agroalimentaire en Fédération WallonieBruxelles, elle aussi génératrice de croissance et d emplois. Le cdh confirme à cet égard son adhésion à tous les objectifs de création de la politique agricole commune (PAC), à savoir : assurer un niveau de vie équitable à la population agricole, notamment par le relèvement du revenu individuel de ceux qui travaillent dans l agriculture ; accroître la productivité de l agriculture en développant le progrès technique ; stabiliser les marchés agricoles ; garantir la sécurité des approvisionnements ; assurer des prix raisonnables aux consommateurs. 2. Réalisations et engagements du cdh Dans la Déclaration de Politique Régionale wallonne, le gouvernement wallon s est engagé à assurer une production agricole en quantité et qualité suffisantes, à des prix abordables pour les consommateurs et rémunérateurs pour les producteurs. Le Gouvernement souhaite à cet égard avoir une attention particulière pour les agriculteurs. Le Gouvernement souhaite également favoriser la première installation et la transmission des entreprises agricoles. Quelques mesures : veiller à une rémunération juste et équitable des agriculteurs dans le cadre de l évolution des régimes d aides, ce qui implique de tenir compte notamment des contraintes spécifiques aux filières d élevage (aides couplées) et des réalités agrogéographiques (indemnités régions défavorisées) ; poursuivre la mise sur pied d un système plus équitable de redistribution des aides directes (PAC) et évaluer l impact de la réforme de ces aides ; soutenir la mise sur pied de groupements d employeurs agricoles au départ d expériences pilotes ; maintenir le cofinancement régional aux mesures incitatives ou compensatoires du deuxième pilier de la PAC décidé par le Gouvernement wallon ; intégrer dans le dispositif législatif wallon, le fonds des calamités agricoles transféré suite à la sixième réforme de l Etat en simplifiant ses règles d intervention, et en déterminant son mécanisme d alimentation ; favoriser les exploitations agricoles qui s orientent vers un renforcement de leur autonomie ou vers une économie de type circulaire à l échelle d un territoire restreint ; demander auprès des autorités fédérales le maintien des mesures de défiscalisation des aides compensatoires PAC ; poursuivre les réformes en matière de politique agricole pour que les jeunes ne doivent plus acheter de droits à produire ; 2
favoriser l installation de nouveaux agriculteurs et horticulteurs afin d assurer la relève générationnelle nécessaire en utilisant au maximum les possibilités accordées par l UE pour soutenir les jeunes qui s installent ; réorienter la recherche agronomique et la faire participer davantage à l activité des pôles de compétitivité dans une logique de décloisonnement et de partage d expertise avec les entreprises, les agriculteurs, les universités et autres centres de recherches pour permettre l émergence d innovations et de produits porteurs de valeur ajoutée et d emploi ; encourager les investissements partagés et les structures coopératives, par des incitants pour toutes les formes de mutualisation ; augmenter les débouchés pour les produits locaux auprès des administrations et collectivités publiques (cantines des écoles, hôpitaux, maisons de repos, etc.) ; augmenter le nombre de produits labellisés (AOPIGPSTG) et stimuler la production en assurant une promotion adéquate ; assurer une promotion valorisant la qualité de l agriculture wallonne et le travail des agriculteurs (agriculture liée au sol et sans OGM). A Bruxelles, le Gouvernement entend : ne plus utiliser de pesticides dans les lieux publics mais employer des alternatives non toxiques ou biodégradables de façon concertée ; protéger les espaces agricoles. Un principe de droit de préemption sera prévu au bénéfice de la Région lors de toute vente de terrain agricole afin d'y développer des projets d'agriculture urbaine, de potagers urbains ou de jardins partagés. 3. Les propositions du cdh Réguler les marchés des produits agricoles Il convient de mettre en œuvre des nouvelles règles européennes relatives aux organisations de marchés et de concurrence, notamment afin de faciliter le regroupement des producteurs ; ces organisations doivent être autorisées à définir ellesmêmes des capacités de production sur les moyens et long termes et à négocier collectivement des références de prix de vente avec un poids égal à celui de l agro- industrie. Reconnaître et protéger les ressources génétiques Organiser la reconnaissance du patrimoine génétique et son caractère de bien public, ce qui implique la tenue de registres et la préservation de ce patrimoine (cryobanque, vergers conservatoires, ) et encadrer strictement les droits privatifs sur la sélection des espèces et variétés et garantir l accessibilité à l ensemble des agriculteurs et particuliers des semences et races constituant un «bien public». Interdire les cultures OGM Le cdh plaide pour établir un moratoire sur toute nouvelle demande d autorisation d OGM à l échelle européenne, tant à l importation qu à la mise en culture. Aux niveaux belge et européen, il est nécessaire de modifier les règles de fonctionnement des 3
instances de contrôle des OGM, Comité de Biosécurité et EFSA (Agence fédérale européenne de sécurité alimentaire), pour y intégrer la prise en compte des principes de précaution, l impact économique et les enjeux éthiques des OGM. Enfin, pour Bruxelles et la Wallonie, nous souhaitons poursuivre la politique d interdiction des cultures OGM et le développement de filières alternatives pour une alimentation animale sans OGM. Renforcer le lien entre agriculture et alimentation Il faut poursuivre le plan stratégique Bio, mis en place en Wallonie, en renforçant le développement de la filière de valorisation des produits de l agriculture biologique (en activant les aides économiques prévues dans le 2ème pilier PAC) et instaurer une plus grande transparence de l origine des ingrédients composant les produits alimentaires (par exemple, l origine de la viande dans les plats préparés). Le cdh souhaite aussi la poursuite et le développement des campagnes de sensibilisation et d information, en particulier auprès des plus jeunes, comme les opérations «Lait à l école» ou «Fruits à l école» ou «bon app au camp». Encourager la production de haute qualité Nous souhaitons miser sur l encouragement, dans chaque secteur de production, de labels de qualité afin de développer des produits d excellence, capables de tirer vers le haut l ensemble de la production et de positionner nos produits agroalimentaires sur un rapport qualitéprix élevé ainsi que sur la poursuite du développement et de la promotion des labels «indication géographique protégée» (IGP) et «appellation d origine protégée» (AOP) en Wallonie et à Bruxelles (IGP blancbleubelge, ). Garantir un accès durable aux terres agricoles Il importe de faciliter l accès au foncier pour les jeunes qui s installent et la transmission du foncier aux jeunes repreneurs à l instar de la réduction des droits de succession à 0% et de faciliter les réorganisations foncières notamment en recourant aux nouveaux outils du remembrement (aménagement foncier rural). Assurer un revenu équitable aux agriculteurs, notamment pour la filière du lait Dans l attente de la mise en place de véritables écluses sociales et environnementales aux frontières de l Europe, maintenir les aides compensatoires directes aux agriculteurs telles que négociées pour le 1er pilier PAC, y compris les aides couplées au secteur bovin et ovin, en s opposant à toute politique de renationalisation dans les Etats membres. Amplifier et pérenniser le cofinancement régional aux mesures incitatives ou compensatoires du 2ème pilier de la PAC et pérenniser les mesures de défiscalisation des aides compensatoires PAC demandées et obtenues par les Régions auprès de l Autorité fédérale suite à la crise du lait. Un accord a été conclu avec les agriculteurs durant l été 2015 pour que la Région intervienne auprès des agriculteurs afin de compenser le déficit entre le coût de la production (maind œuvre comprise) et le prix de vente. 4
Soutenir les agriculteurs face aux risques et aux crises Orienter une partie importante des moyens affectés à la recherche agricole et au travail des facultés agronomiques à la prévention sur le terrain des risques sanitaires et climatiques ainsi qu à l adaptation des pratiques culturales et techniques d élevage. Prévoir un mécanisme permettant de réalimenter le Fonds des calamités agricoles (régionalisé dans le cadre de la 6ème réforme de l Etat) et faciliter la procédure administrative d intervention du Fonds en utilisant davantage les technologies disponibles. Promouvoir notre terroir Il faut que tous les acteurs publics assurent systématiquement la promotion des produits locaux ou équitables par le biais de leurs outils de communication et dans le cadre des actions et manifestations qu ils organisent, encouragent ou soutiennent. 4. Propositions émises dans le cadre d OPR Demander aux communes de louer un pourcentage de leurs terres aux jeunes agriculteurs : les jeunes agriculteurs ont parfois du mal à trouver des terres à cultiver à proximité de leur exploitation. Pour aider les jeunes agriculteurs, les communes leur loueraient une partie des zones agricoles dont elles disposent. Supprimer la TVA sur les produits alimentaires biologiques et/ou respectueux de l environnement : Actuellement un soda fabriqué à partir de produit chimique par une firme internationale est autant taxée qu'un jus de pomme bio produit par un petit producteur wallon. Supprimons la TVA sur les produits bio ou respectueux de l environnement (par exemple les émissions de CO2 et de particules fines qui vont surtout toucher les produits importés et moins les produits locaux) pour favoriser une agriculture durable et locale. Soutenir le développement de circuits courts : permettre aux consommateurs de plus facilement acheter des aliments produits à proximité, notamment en développant des sites coopératifs de vente en ligne (plusieurs producteurs par site), en créant des points de vente visibles (coopératives, partenariat avec enseignes privées, associations) et en mettant en place un label «produit dans ma commune». Soutenir les petites exploitations à taille «humaine» par la création d un cluster «fermes familiales» : le fonctionnement actuel des marchés favorise le développement de très grosses exploitations, aux dépens des exploitations familiales. Il est urgent d intervenir pour éviter la disparition des fermes à échelle humaine et l hégémonie de sociétés agricoles géantes telles que Monsanto. Il conviendrait de relancer une filière «fermes familiales», par la mise en réseaux des acteurs publics, associatifs et privés. Ce cluster serait chargé de développer un assortiment de solutions (techniques de production, partage des équipements, voire des terres, amélioration de la qualité de la production, coopération dans la vente des produits en ligne ou en point de vente, diversification des activités de la ferme, mutualisation des moyens pour accomplir les démarches administratives, 5
exportation ), de former ou d accompagner les agriculteurs et de jouer le rôle de partenaire des pouvoirs locaux concernés. 5. Quelques thèmes de conférence : Vivre mieux, manger mieux! La santé passe par une production agricole de qualité La filière bio en Wallonie : bilan et perspectives Estil encore possible aujourd hui d être agriculteur dans une petite exploitation? Les jeunes et le métier d agriculteur Le bail à ferme : quelle réforme envisager? Produits du terroir et exportation Le recours aux nouvelles technologies dans l agriculture : opportunités et risques L agriculture urbaine La crise du lait 6. Personnes de contact CEPESS : Jeremy Dagnies (dagnies@cepess.be) Cabinet Collin : José Renard (jose.renard@gov.wallonie.be ou sabine.deleener@gov.wallonie.be) ; Renaud Baiwir (renaud.baiwir@gov.wallonie.be); Jean-François Collin (jean-francois.collin@gov.wallonie.be) Cabinet Fremault : Stéphane Nicolas (snicolas@gov.brussels) Groupe cdh Parlement fédéral : Sophie Habay (habay@lecdh.be) Groupe cdh Parlement wallon : Laurent Marchal (laurent.marchal@lecdh-pw.be) Groupe cdh Parlement bruxellois : Magali Jeumont (mjeumont@parlbru.irisnet.be) 6