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Transcription:

CFP 037M C.P. Rapport D Amours Mémoire sur l'avenir des régimes de retraite

Table des matières Sommaire... 3 Introduction... 4 Présentation du RJCCQ... 5 Nos définitions... 6 Constats et contexte... 6 Nos enjeux... 9 Recommandations... 11 Conclusion... 13 Bibliographie... 14 2

Sommaire Le rapport D Amours accuse quelques lacunes si l on espère vraiment réformer et pérenniser le système des retraites québécoises. Entre autres, il n offre pas de solution aux problèmes de la sous- capitalisation et du déficit important des régimes de retraite privés et publics. Il omet aussi un règlement clair au sujet de l âge des retraites et des clauses orphelines. Ces sujets font partis des grands enjeux qui intéressent particulièrement le RJCCQ, soit : l équité intergénérationnelle, l élaboration d un plan de recapitalisation des régimes de retraite et l importance de l épargne. C est dans ce contexte que le RJCCQ recommande qu une future réforme du système de retraite québécois encourage l abolissement des clauses orphelines et s inspire de la réussite du système de retraite hollandais afin de réorienter les régimes à prestations déterminées vers des régimes à prestations cibles. 3

Introduction Dans le contexte économique et social actuel, les régimes de retraite québécois ne pourront offrir infiniment la sécurité financière qu ils promettaient aux retraités. Pour un système qui, dans l ensemble est gravement sous- capitalisé, le choc que causera le départ à la retraite massive des baby- boomers et le vieillissement de la population en général risque fort bien de mener à l effondrement d un système déjà bancal. C'est que la promesse de sécurité financière faite aux québécois pour leur retraite a souvent été bien au delà de ce qu'elle pouvait offrir et ce, principalement pour les régimes à prestations déterminées offerts dans le secteur public. Sans compter les montants insuffisants cotisés par les travailleurs ainsi que le faible rendement des fonds d'investissements. Cette tendance implique un fardeau important à long terme pour les québécois, surtout les jeunes, qui cotiseront tout au long de leur vie active dans différents fonds de retraite obligatoires et volontaires dont le futur est incertain. Ce futur incertain pourrait vouloir dire que les régimes publics ne seraient plus en mesure de verser les prestations promises aux retraités, ou que certains régimes privés pourraient être totalement abandonnés. 1 C est dans ce contexte que le rapport D Amours était présenté aux québécois cette année, afin de faire la lumière sur l état de nos régimes de retraite. Pour le Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec (RJCCQ), le rapport informe surtout les québécois qu il est temps de repenser le financement de nos retraites. Pourtant, il omet d adresser concrètement certains des aspects les plus importants du problème, soit l âge du départ à la retraite et une véritable équité intergénérationnelle qui tiendrait compte des clauses orphelines et de la sous- capitalisation chronique de plusieurs régimes. 1 François Pouliot, «Retraite: doit- on s'inspirer du modèle hollandais de Claude Lamoureux?» Les Affaires, 11 juin 2013, www.lesaffaires.com 4

Ces grands enjeux devront inévitablement faire partie du nouveau système de retraite innovant que le gouvernement devra mettre en place. C est dans ce contexte que le RJCCQ fera trois recommandations : en premier lieu, encourager l épargne personnelle et les régimes d épargne volontaires comme alternative privilégiée aux régimes d épargnes obligatoires, dont la rente de longévité, qui risquent de se traduire en une taxe additionnelle sur la masse salariale et, par le fait même, d affecter la croissance économique de la province. Deuxièmement, le RJCCQ joint sa voix à celle de plusieurs autres organismes en recommandant fortement l abandon de l utilisation des clauses orphelines dans les régimes de retraite complémentaires privés qui représentent une iniquité flagrante entre les générations. Finalement, nous recommandons au gouvernement du Québec d orienter le système de retraite québécois vers un modèle à prestation cible similaire à celui en place aux Pays- Bas. Présentation du RJCCQ Depuis maintenant 20 ans, le Regroupement des jeunes chambres de commerce (RJCCQ) soutient un réseau de jeunes chambres de commerce et d'ailes jeunesse à travers le Québec, représentant plus de 7 000 jeunes professionnels, cadres, travailleurs autonomes et entrepreneurs âgés de 18 à 40 ans. En plus d'avoir une grande étendue géographique, le RJCCQ compte parmi ses rangs huit organisations issues de communautés culturelles, ce qui le rend unique. Il est le seul représentant national de la relève d'affaires au Québec. 5

Nos définitions Équité intergénérationnelle: Distribution équitable dans le temps des coûts et des bénéfices associés aux décisions collectives d une société. Prestation cible: Un régime à prestations cibles comprend des cotisations fixes, un niveau cible de prestations déterminées et une politique en matière de prestations et de capitalisation qui prescrit les méthodes de variation des prestations en fonction de la capacité financière du régime, selon des niveaux de réserve rétablis et un ordre prédéterminé de rajustement des prestations. 2 Clauses orphelines : Dispositions législatives ou réglementaires qui assujettissent les nouveaux employés à des conditions de travail différentes de celles des autres salariés du même employeur. 3 Constats et contexte I- Solvabilité Des facteurs externes et internes expliquent les déboires que les régimes de retraite québécois connaissent aujourd hui. D une part, il est vrai que le vieillissement de la population et l augmentation de l espérance de vie requièrent que l on trouve de nouvelles façons innovantes pour financer des retraites plus nombreuses et plus longues. Il est aussi vrai que la crise économique de 2008 a grandement affecté les caisses de retraite québécoises comme elle a affecté l ensemble du système financier mondial. Ces facteurs externes viennent aggraver les problèmes structurels qui accablent déjà les régimes de retraite québécois depuis des années. Par exemple, une crise économique pourra pousser plusieurs compagnies à chercher des congés de cotisations aux régimes de retraite de leurs employés afin de ne pas avoir à geler les salaires ou arrêter l embauche. On estime qu entre le début des années 2000 et 2011, les employés du secteur public québécois avaient obtenu des congés de cotisation à leurs régimes de retraite atteignant près de 2 G$. 4 Ce genre des facteurs externes et internes sont évidemment difficile à contrôler, et il faut donc chercher à développer et à maintenir le fragile équilibre qui permettra aux régimes de retraite québécois de se 2 Aon Hewitt, «Régimes à prestations cibles : l avenir des régimes de retraite viables» 2012, www.aon.ca 3 Assemblée Nationale du Québec, www.assnat.qc.ca 4 «Régime de retraite: près de 2G$ en congés de cotisation» TVA Argent, 29 décembre 2011, www.argent.canoe.ca 6

stabiliser à long terme tout en offrant aux villes et aux entreprises québécoises la flexibilité dont ils ont besoin pour absorber les différents chocs du marché. Dans l absence d une solution immédiate, il faut garder en tête que comme l indique le rapport D Amours, en 2008, 75 % des régimes de retraite à prestations déterminées québécois avaient un indice de solvabilité inférieur à 80 %. En 2011, ce pourcentage se maintenait à 72 %. 5 II Les prestations déterminées Les régimes à prestations déterminées sont privilégiés depuis longtemps par les québécois à cause de la sécurité financière qu ils promettent, en théorie, aux retraités. De plus en plus de voix s expriment maintenant contre ce système trop rigide qui met énormément de pression sur le capital des fonds de retraite en temps de crise économique. III Épargne personnelle D'une part, les québécois qui cotisent à des régimes de retraites privés ou publics sont à risque si leurs régimes de retraite demeurent sous- capitalisés et d'autre part, le nombre de retraités augment. Il reste malgré tout 2,4 millions de québécois sans régime de retraite d'un employeur. Ceux- ci dépendent donc de leur épargne personnelle, dans des REER ou ailleurs, pour le financement de leur retraite. Or, ce type d initiatives d épargne personnelle n offre ces jours- ci que de faibles rendements. IV Équité Privé- Public Alors que le financement d une retraite dans le contexte économique actuel semble précaire, peu importe la façon dont chacun choisi d épargner en raison des faibles taux de croissance, la réflexion se pose quant à l équité des opportunités d épargne disponibles pour les travailleurs du secteur public, du secteur privé, et pour les travailleurs autonomes ou qui n ont pas accès à un régime de retraite avec leur employeur. Dans le cas des régimes de retraite à prestations déterminées dont 35 % des travailleurs québécois bénéficient, et dont les deux tiers proviennent du secteur public, les promesses sont généreuses; prenons par exemple l indexation des rentes au coût de la vie. Ce sont ces mêmes régimes qui accusent des déficits de solvabilité monstre, atteignant 9 milliards dans le secteur municipal. 6 De tels déficits, s ils ne sont pas résolus, représentent un risque et un fardeau important pour l ensemble de la société 5 Alban D Amours, «Innover pour pérenniser le système de retraite» Avril 2013, www.rrq.gouv.qc.ca 6 Annick Poitras, «Le rapport D Amours transformera- t- il votre retraite?» Protégez- vous, 25 avril 2013, www.protégez- vous.ca 7

québécoise qui devra s acquitter du manque à combler si les départs à la retraite dans le secteur public viennent mettre trop de pression sur ces régimes déficitaires. V Équité intergénérationnelle De la même façon, la question se pose quant au manque d équité intergénérationnelle qui risque de résulter des faiblesses du régime de retraite québécois. Alors qu on tend à penser au concept «d équité intergénérationnelle» dans le contexte des retraites en termes de sécurité financière pour les retraités et les aînés en général, le RJCCQ souligne l importance d y inclure aussi la sécurité des jeunes travailleurs et des conditions dont ils bénéficieront à long terme dans le financement de leur retraite. C est dans ce contexte que la RJCCQ tient à mettre en valeur et à rendre centrale la notion du «partage de risque» entre les générations. Avec les nombreux départs à la retraite prévus dans les prochaines années, les jeunes travailleurs québécois risquent d être confrontés à un scénario où ils seraient tout d un coup beaucoup moins à cotiser pour beaucoup plus de retraités vivant désormais de leurs rentes. Selon les prévisions de l'institut de la statistique du Québec, en 2030, le ratio de travailleurs pour le nombre de retraités ne sera plus que de 2,1, une diminution notable si on considère le ratio de 7,8 qui valait en 1971. Si une réforme ambitieuse du régime de retraite québécois n est donc pas mise en place rapidement, au mieux les jeunes travailleurs pourront s attendre à des hausses de cotisations tout au long de leur carrière afin de combler le déficit des régimes et assurer les rentes des retraités. Au pire, les jeunes assisteront à une crise fiscale en matière de retraite dont ils devront absorber les coûts. VI Le Rapport d Amours «Innover pour pérenniser les systèmes de retraite» était le mot d ordre du rapport paru en avril 2013. Alors qu il dresse bien le portrait de l ensemble du problème qui afflige le système de retraite québécois, ces recommandations sont limitées. Outre la rente de longévité, le rapport ne propose pas de solutions aux grands enjeux qu il expose. La plupart des groupes ayant été amenés à commenter le rapport D Amours, notaient principalement l absence de recommandations quant à un plan d action pour la recapitalisation des fonds de retraite, ou l âge du départ à la retraite si des nouvelles mesures d épargne obligatoire comme la rente de longévité étaient adoptées. Considérant que la pérennité du système de retraite à long terme dépendra ultimement d un financement approprié, prêt à affronter le choc démographique du départ à la retraite des baby- boomers et du rétrécissement de la population active, le rapport D Amours est donc une première étape importante vers un remaniement majeur du système de retraite québécois dans son ensemble. 8

Nos enjeux I - L équité intergénérationnelle et le partage de risque Le débat public actuel sur les recommandations du rapport D Amours devra élargir le champ de vision de la réforme suggérée. Dans son état actuel, la réforme ne prévoit pas de plan d action pour recapitaliser et stabiliser à long terme les différents fonds de retraite québécois et omet plusieurs autres détails, tels que l âge du départ à la retraite et les clauses orphelines. Il est donc primordial de remettre la question de l équité intergénérationnelle et du partage de risque au centre des négociations qui auront lieu au cours des prochains mois et d adopter une vision à plus long terme de la pérennité du système de retraite québécois. II La recapitalisation de la Régie des rentes du Québec et des régimes de retraite québécois Il s agit probablement de l enjeu le plus essentiel afin d assurer la pérennité d un système qui pourrait sinon se retrouver au bord d un gouffre fiscal très rapidement. Toutes les initiatives d épargne additionnelles prévues par le rapport D Amours devront donc se faire en parallèle avec l élaboration d un plan de recapitalisation des fonds de retraite. III L importance de l épargne Encourager l épargne personnelle et une bonne planification de la retraite pour chaque travailleur québécois devront toujours être au premier plan des retraites québécoises. À cet effet, le gouvernement devrait réfléchir à de nouveaux leviers visant à encourager les québécois, principalement les jeunes, à épargner et par le fait même à se responsabiliser face à leur propre plan de retraite. Le régime volontaire d épargne retraite (RVER) offre une avenue intéressante en ce sens. Par contre, le RJCCQ perçoit autrement l introduction de la rente de longévité, telle que proposée dans le rapport D Amours. La rente de longévité, en tant que cotisation obligatoire au même titre que celle de la Régie des rentes du Québec (RRQ), est considérée par beaucoup comme l'imposition d'une taxe additionnelle sur la masse salariale. Le Conseil du patronat du Québec estime d ailleurs qu une telle cotisation obligatoire pourrait occasionner un impact à court terme variant de 0,6 % à 0,8 % du PIB. 7 C est donc dire que si la rente de longévité est adoptée, la ponction supplémentaire de 3,3 % qu elle imposera sur les salaires, 1,6 % à assumer pour les employeurs, et 1,6 % pour les employés, mènera 7 «Rapport D'Amours : qu'en pensent les patrons et les syndicats?» Les Affaires, 17 avril 2013, www.lesaffaires.com 9

sûrement les employeurs à geler les salaires de ses employés ou à rediriger les cotisations d épargne- retraite allant déjà vers d autres fonds de retraite. 8 Dans tous les cas, cela aura nécessairement un impact plus important chez les jeunes. La rentre de longévité créerait donc certainement une sécurité additionnelle pour les retraités québécois, car elle promet de les aider dans le cas où ils survivraient à leur épargne retraite. Pourtant, on voit bien que plusieurs répercussions économiques non- négligeables risqueraient d en découler. Le RJCCQ se demande donc si le gouvernement du Québec peut vraiment se permettre d implanter une telle rente? 8 Annick Poitras, «Le rapport D Amours transformera- t- il votre retraite?» Protégez- vous, 25 avril 2013, www.protégez- vous.ca 10

Recommandations I Abolir les clauses orphelines Ces clauses font en sorte que les derniers employés embauchés par une entreprise peuvent se voir offrir un régime beaucoup moins avantageux que celui de leurs prédécesseurs. Elles représentent ainsi une source d iniquité évidente que permet la législation actuelle des régimes de retraite. Le RJCCQ recommande qu une nouvelle législation interdise l utilisation de telles clauses. II Prendre exemple sur le modèle hollandais : les régimes à prestation cibles D après l OCDE, le système de retraite néerlandais est parmi les plus généreux d Europe et le Québec devrait s en inspirer. Sa principale qualité : «Ce système n offre pas une promesse de rentes proprement dite comme dans les systèmes à prestation déterminée québécois. Le système s adapte plutôt aux fluctuations du marché selon sa performance. De cette manière, si les marchés boursiers sont en forte baisse pendant une certaine période, plutôt que de fragiliser les régimes de retraite qui vivent de ces rendements, ceux- ci seront en mesure de se balancer automatiquement en ajustant les prestations selon les «cibles» de rendement du moment. C est ainsi un modèle à prestation cible plutôt que déterminée. Ainsi, le système pourra résister aux turbulences des marchés, une sécurité dont ne jouit pas le régime québécois.» 9 Similairement au système québécois, le système néerlandais s appuie sur trois piliers : le dispositif public AOW 10, les retraites complémentaires collectives et les retraites individuelles que les personnes contractent elles- mêmes. Ces trois piliers déterminent l ensemble du montant de la retraite. Pour le gouvernement hollandais, le principe des «prestations cibles» représente surtout une mesure de précaution qui assure le partage des risques en cas de difficultés financières. Dans le cas échéant, ce sont les employeurs, les employés, les retraités et le gouvernement qui assumeraient le déficit des régimes. Ainsi on obtient ce que le gouvernement hollandais qualifie de «partage de risque 9 François Pouliot, «Retraite: doit- on s'inspirer du modèle hollandais de Claude Lamoureux?» Les Affaires, 11 juin 2013, www.lesaffaires.com 10 Premier pilier du système, l allocation AOW s appuie sur la répartition et représente une sorte de filet de sécurité. L AOW est l indemnité de base, elle représente entre 50 et 70 % du salaire minimum (environ 1 000 euros bruts/mois). En 2008, environ 2,7 millions de personnes percevaient une AOW pour un montant de 25,2 Mds d euros. Comme dans tout système par répartition, les actifs cotisent pour les retraités. (www.pensioenfederatie.nl) 11

intergénérationnel,» où les besoins immédiats des retraités sont balancés avec ceux des jeunes travailleurs qui doivent avoir droit à un bon retour sur leur investissement au moment de leur retraite. Selon cette façon de faire, en cas de crise fiscale, on pourrait voir : Les cotisations aux régimes de retraite augmentées, ce qui pourrait mener des employeurs à geler les salaires de leurs employés Une limitation de l indexation. Les régimes devraient dès maintenant préciser que l indexation des rentes au coût de la vie est conditionnelle. L indexation devrait être revue chaque année par les administrateurs des fonds de retraite selon la situation économique. Dans des cas extrêmes seulement on pourrait voir les prestations diminuer. 11 Pour plusieurs experts incluant l Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite (ACARR), l adoption des prestations cibles serait une solution incontournable aux problèmes actuels du système de retraite québécois. 12 III Encourager l épargne personnelle Il y a trop peu d'incitatifs fiscaux et financiers pour encourager les québécois à l'épargne personnelle. La RJCCQ suggère donc la mise en place de davantage de leviers et de mesures financières pour encourager les québécois, particulièrement les jeunes, à épargner et par le fait même à se responsabiliser face à leur plan financier pour la retraite. 11 The Dutch Pension System: an overview of the key aspects Dutch Association of Company Pension Funds, www.pensioenfederatie.nl 12 Alexandre Daudelin, Le régime à prestation cible : la solution incontournable?» Avantages, 12 décembre 2011, www.conseiller.ca 12

Conclusion Enfin, si l on n adresse pas rapidement le problème des régimes déficitaires, les contribuables risquent de se retrouver avec une facture énorme à payer. De plus, il serait injuste de demander aux contribuables de couvrir un manque à gagner résultant de promesses trop généreuses faites à des employés du secteur public. Pour plusieurs, dont le maire de la Ville de Québec, Régis Labeaume, il s agit aussi d une histoire d équité intergénérationnelle, lui- même affirmant ne pas vouloir transférer «une facture folle et injustifiée à la prochaine génération.» Il est donc primordial que dans le cadre de ces consultations particulières de la Commission des finances publiques sur le rapport «Innover pour pérenniser le système de retraite» (Rapport D Amours), l élaboration de plans de recapitalisation devienne la priorité numéro un de tous. 13

Bibliographie Alban D Amours, «Innover pour pérenniser le système de retraite» Avril 2013, www.rrq.gouv.qc.ca Alexandre Daudelin, Le régime à prestation cible : la solution incontournable?» Avantages, 12 décembre 2011, www.conseiller.ca Annick Poitras, «Le rapport D Amours transformera- t- il votre retraite?» Protégez- vous, 25 avril 2013, www.protégez- vous.ca Aon Hewitt, «Régimes à prestations cibles : l avenir des régimes de retraite viables» 2012, www.aon.ca Assemblée Nationale du Québec, www.assnat.qc.ca François Pouliot, «Retraite: doit- on s'inspirer du modèle hollandais de Claude Lamoureux?» Les Affaires, 11 juin 2013, www.lesaffaires.com «Les régimes de retraite risquent de ruiner Montréal», dit Régis Labeaume» Les Affaires, 11 juin 2013, www.lesaffaires.com «Rapport D'Amours : qu'en pensent les patrons et les syndicats?» Les Affaires, 17 avril 2013, www.lesaffaires.com «Régime de retraite: près de 2G$ en congés de cotisation» TVA Argent, 29 décembre 2011, www.argent.canoe.ca The Dutch Pension System: an overview of the key aspects Dutch Association of Company Pension Funds, www.pensioenfederatie.nl 14