toutefois être envisagées. L Union des Villes et Communes de Wallonie fait le point sur ce dossier.



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Transcription:

Les normes SEC 95 et la trajectoire budgétaire Évolutions récentes KATLYN VAN OVERMEIRE CONSEILLER La méthode comptable dite "SEC 95" est le standard de référence pour évaluer les objectifs budgétaires qui ont été fixés entre la Commission européenne et les Etats membres, en ce qui concerne les comptes des pouvoirs publics. Sur cette base, est ainsi évaluée la situation financière des différents niveaux de pouvoir composant notre Etat fédéral, dont les pouvoirs locaux. D APRÈS CETTE NORME, LES performances de ces derniers ne seraient pas brillantes Mais les données utilisées sont-elles le reflet de la réalité? La question fait débat. Quoi qu il en soit, il demeure que ces normes restent difficilement compatibles avec la politique d investissement des pouvoirs locaux. Des pistes de solution pourraient toutefois être envisagées. L Union des Villes et Communes de Wallonie fait le point sur ce dossier. Les soldes de financement pour la période 2006-2010 Les critères de convergence, plus connus sous le nom de critères de Maastricht, exigent que les pays membres de la zone euro aient un déficit public annuel inférieur à 3 % du PIB et que leur dette publique ne dépasse pas les 60 % du PIB. Afin de mieux visualiser le partage et le suivi des efforts budgétaires des pouvoirs publics, l Union européenne classe le secteur des "Administrations publiques" en quatre catégories : sécurité sociale, niveau Fédéral, Communautés et Régions et administrations locales. En Belgique, ces quatre catégories ont été regroupées en deux entités : l entité I, qui regroupe l Etat fédéral et la Sécurité sociale, et l entité II, qui reprend, d une part, les Communautés et les Régions et, d autre part, les pouvoirs locaux. Les résultats financiers de ces différentes entités sont régulièrement évalués par le JUIN-JUILLET 2011 N 859 MOUVEMENT COMMUNAL 25

Les données utilisées par SEC 95 sont-elles le reflet de la réalité? Conseil supérieur des Finances (CSF), sur base des données fournies notamment par l Institut des Comptes nationaux 1. Ces résultats sont calculés et exprimés selon les normes comptables SEC 95 évoquées plus haut. Le tableau ci-dessous reprend les soldes de financement et le taux d endettement pour les années 2006 à 2010 pour les quatre catégories, et ce tels qu ils ont été publiés par le CSF début mars 2011 : Soldes de financement et taux d endettement En % du PIB 2006 2007 2008 2009 2010 Solde de financement 0,2-0,3-1,3-6,0-4,6 Entité I 0,2-0,6-1,2-5,0-3,4 Etat fédéral 0,0-1,1-1,6-4,2-3,3 Sécurité sociale 0,2 0,5 0,4-0,8-0,2 Entité II 0,0 0,3-0,1-1,0-1,1 Entités fédérées 0,2 0,4 0,0-0,8-0,8 Pouvoirs locaux -0,2-0,1-0,1-0,2-0,4 Dette brute (Maastricht) 88,1 84,2 89,6 96,2 97,5 Source : Conseil supérieur des Finances, début mars 2011 Il est à noter que les chiffres 2010 publiés alors étaient encore provisoires. Quelques semaines plus tard, l Institut des Comptes nationaux (ICN) a revu ces estimations. Il a ainsi annoncé que le solde de financement des pouvoirs locaux était de -0,2 % au lieu des -0,4 % précédemment annoncé. Quant au solde de financement pour l ensemble des pouvoirs publics, il a désormais été évalué à -4,1 % pour l année 2010. La trajectoire budgétaire à l horizon 2015 Par ailleurs, le Conseil supérieur des Finances formule chaque année des objectifs budgétaires pour les différents pouvoirs publics. Ces avis constituent le point de départ des accords qui sont conclus entre le pouvoir fédéral et les Communautés et Régions concernant la répartition de l effort entre les entités à la réalisation de l objectif de solde de l ensemble des pouvoirs publics. Dans son Programme de Stabilité 2009-2012 arrêté début 2010, le Gouvernement belge a défini une trajectoire budgétaire qui se résume par les objectifs suivants de soldes budgétaires pour les différentes entités. Depuis lors, le Gouvernement fédéral a annoncé, lors de la confection de son budget en mars 2011, qu il prévoyait un solde global de financement de l ordre de -3,6 % du PIB pour cette année au lieu des -4,1 % déterminés dans le programme de stabilité. Pour les années 2012 et suivantes, le Conseil supérieur des Finances a récemment recommandé à la Belgique de suivre une trajectoire budgétaire ayant pour objectif de ramener le déficit belge sous la barre des 2,8 % du PIB en 2012 et d atteindre un surplus de 0,2 % du PIB en 2015. Le Gouvernement fédéral a décidé en avril dernier de reprendre cette trajectoire, mais il n existe pas à ce stade d accord politique quant à la répartition des objectifs des soldes de financement entre les différentes entités. Programme de stabilité 2009-2012 de 2010 : objectifs de soldes de financements En % du PIB 2009 2010 2011 2012 Ensemble des pouvoirs publics -5,9-4,8-4,1-3,0 Entité I -5,1-3,8-3,6-2,6 Etat fédéral -4,3-3,3-3,3-2,6 Sécurité sociale -0,8-0,5-0,3 0,0 Entité II -0,8-1,0-0,5-0,4 Entités fédérées -0,6-0,6-0,3-0,2 Pouvoirs locaux -0,2-0,4-0,2-0,2 Source : Conseil supérieur des Finances, début mars 2011 26 MOUVEMENT COMMUNAL N 859 JUIN-JUILLET 2011

Trajectoire budgétaire recommandée pour les années 2012-2015 2012 2013 2014 2015-2,8 % -1,8 % -0,8 % 0,2 % En ce qui concerne les pouvoirs locaux, l accord du 31 janvier 2010 entre le Gouvernement fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Région wallonne, la Région de Bruxelles-Capitale et la Commission communautaire française relatif aux objectifs budgétaires pour la période 2011-2012 prévoit que : "Article 8. 1 Les parties au présent accord s engagent, en tant que gouvernements de tutelle respectifs des pouvoirs locaux, à veiller à la stricte observance des normes SEC-95. Une période de transition semble nécessaire et la période 2012-2013 semble raisonnable. D ailleurs, l application de la réglementation SEC-95 doit se faire sur base pluriannuelle (une législature communale) afin de tenir compte du cycle d investissement des pouvoirs locaux. 2 Un groupe de travail sera mis sur pied en vue de déterminer les modalités et le calendrier pour l application de la réglementation SEC-95 au niveau des pouvoirs locaux. L application des normes SEC-95 sera soumise à un accord préalable des parties concernées. Le groupe de travail fournira un rapport pour la première fois sur l évolution de l avancement des travaux le 19 mars 2010. 3 Si une région reprend la dette pour le compte des communes, cette opération ne détériorera pas le solde de la région et n améliorera pas le solde des communes". Le solde de financement des pouvoirs locaux Si les pouvoirs locaux dégageaient un solde positif depuis le milieu des années 80, leur situation budgétaire s est toutefois détériorée à partir de l an 2000. Ainsi, à une situation structurelle de capacité de financement a succédé une situation où, structurellement, les pouvoirs locaux ont présenté un besoin de financement de 0,2 % à 0,3 % du PIB. Selon les chiffres de l ICN, les pouvoirs locaux ont connu en 2010 une détérioration de leur solde de l ordre de -0,2 % du PIB. Le Conseil supérieur des Finances Source : Conseil supérieur des Finances, mars 2011 estime cependant que, à politique inchangée, le solde des pouvoirs locaux continuera à se dégrader dans les années à venir. Ainsi, selon lui, leur déficit atteindrait 0,6 % en 2012 pour se résorber légèrement par la suite (et ce, dû au cycle des investissements), et atteindre 0,4 % en 2015. C est donc sur base de ce constat que le Premier Ministre, Yves Leterme, a annoncé au printemps dernier que, pour 2011, les pouvoirs locaux seraient confrontés à un besoin de financement de -0,6 % du PIB (2 milliards d euros), en dérapage de 0,4 % du PIB (1,2 milliard d euros) par rapport à l objectif de déficit maximum de -0,2 % du PIB. La méthodologie de calcul utilisée On peut cependant se demander si les chiffres avancés par le Conseil supérieur des Finances sont réellement pertinents. En effet, il faut savoir qu à l heure actuelle, l Institut des Comptes nationaux travaille toujours sur base d extrapolations des comptes issus de la période 1997 pour les CPAS et de la période 2001/2002/2003 pour les communes, et ce sans faire de distinction entre les trois Régions. Eurostat a soulevé de vives critiques à l égard de cette façon de travailler et a demandé à ce que l Etat remédie à cette situation le plus rapidement possible. Du côté de l Etat fédéral, on indique que l ICN doit disposer des comptes des communes, des provinces, des zones de police locales et des CPAS, qui devraient être fournis sous une forme électronique, individuelle et uniformisée pour pouvoir établir des statistiques plus correctes pour les autorités locales. Mais à ce jour, l ICN ne disposerait pas de systèmes de données digitales pour les autorités locales, à l exception des données relatives aux communes flamandes. Selon l Etat fédéral, c est aux Régions de régler le problème. Du côté de la Région wallonne, on ne partage pas l avis de l Etat fédéral quant à la situation financière des pouvoirs locaux. La Région wallonne a procédé à des estimations sur base des comptes 2009 dont elle dispose et, selon ses calculs, en traduisant ces données en termes SEC, les pouvoirs locaux wallons sont à l équilibre, voire en surplus. Du côté de la Région flamande, cette dernière a également fait l exercice de convertir en SEC les comptes 2009 réels des communes flamandes et il apparaît que ces communes arrivent à un résultat positif exprimé en SEC de l ordre de 875 millions d euros pour 2009. Il était convenu dans le dernier accord de coopération qu un groupe de travail se pencherait entre autres sur la question des données à utiliser, mais vu la situation politique de ces derniers mois, celui-ci a pris du retard. Les contacts se sont cependant intensifiés au cours de ces derniers mois. Ainsi, suite à l appel du Roi en janvier 2011 appelant le Premier Ministre à préparer le budget 2011 avec comme objectif que le solde de ce budget soit meilleur que celui convenu avec les autorités européennes, des contacts notamment entre la Région wallonne et le Premier Ministre, dans un premier temps, et entre les techniciens de la Région wallonne et de la Banque nationale de Belgique (BNB), dans un second temps, ont eu lieu. Ces rencontres ont débouché sur un constat clair : les méthodes de travail de l ICN et de la BNB souffrent de lacunes importantes et il y a lieu d améliorer la transmission des données communales à l ICN. Par ailleurs, suite à des réunions qui ont eu lieu entre les techniciens de la Banque nationale de Belgique et les Régions, l Institut des Comptes nationaux a revu ses estimations concernant les pouvoirs locaux. Ainsi, il a annoncé en avril 2011 qu il a désormais fixé le solde de financement de ces derniers à -0,2 % au lieu de -0,4 % pour l année 2010. En outre, il a été convenu que les Régions transmettent à l ICN leurs données pour fin avril 2011. Le respect de la trajectoire budgétaire par les pouvoirs locaux A l heure actuelle, si les Régions devaient être amenées à veiller au bon respect de la trajectoire par les pouvoirs locaux, elles sont aujourd hui incapables de le faire pour la bonne et simple raison que l ICN ne publie aucun chiffre séparé par Région. JUIN-JUILLET 2011 N 859 MOUVEMENT COMMUNAL 27

Il existe uniquement, en ce qui concerne les pouvoirs locaux, des chiffres agrégés au niveau belge. Par ailleurs, ajouter aux pouvoirs locaux une contrainte budgétaire supplémentaire en leur imposant les normes SEC semble superflu en ce sens qu une réglementation très stricte et très pointue s impose déjà aux communes en matière budgétaire. Ainsi, les pratiques comptables limitent strictement les conditions d octroi d emprunts pour assainissement et tout autre emprunt ne peut se faire qu en contrepartie d un investissement. En outre, l équilibre budgétaire est une condition incontournable de l approbation des budgets, feu vert indispensable à l engagement de la plupart des dépenses. Les normes comptables SEC 95 et la nouvelle comptabilité communale : comparaison Les normes comptables de la nouvelle comptabilité communale (NCC) et de la méthode SEC 95 diffèrent principalement sur les points suivants : - La comptabilisation des investissements et des emprunts : en SEC 95, les opérations sur emprunts sont des opérations financières sans impact sur le solde, tandis que les investissements ont un impact direct sur le solde indépendamment de la manière dont ils sont financés. - La notion d exercice budgétaire : les droits constatés ne sont pas définis de manière identique dans les deux systèmes comptables. - La référence en matière d équilibre : la nouvelle comptabilité communale distingue un exercice propre et un exercice global, contrairement au SEC95 où seul l exercice annuel constitue une référence. En SEC 95, le solde se réfère au solde de l année calendaire et ne tient pas compte du résultat des exercices antérieurs et des prélèvements. - L enregistrement de l acquisition/la cession d actifs financiers : en SEC 95, les opérations sur actifs financiers sont des opérations financières sans impact sur le solde (= restructuration des avoirs financiers) alors qu en NCC, l enregistrement de la cession ou de l acquisition d actifs financiers est une recette ou une dépense. La table de passage utilisée par la BNB pour convertir le solde ordinaire de l exercice propre en solde de financement SEC 1995 est la suivante : Solde ordinaire de l exercice propre (droits nets/imputations) + recettes extraordinaires de transferts et d investissements - dépenses extraordinaires de transferts et d investissements - recettes ordinaires de remboursement de prêts + dépenses ordinaires de remboursement de la dette + correction due aux différences de moments d enregistrement (ex. : additionnels rôles IPP, PRI et taxe de circulation enregistrés au moment de la créance fiscale est fixé, transferts en provenance et à destination des autorités supérieures) + correction due aux opérations non financières requalifiées en opérations financières et vice-versa (ex. : superdividendes provenant de produits de vente d actifs ou des gains de réévaluation, prises de participation requalifiées en transferts de capital) = Solde de financement SEC 1995 Source : Banque nationale de Belgique Focus sur les investissements C est toutefois au niveau des investissements que l application de la méthode SEC 95 aux pouvoirs locaux aurait un impact particulièrement important. En méthode SEC 95, l investissement est considéré comme une dépense l année de sa réalisation, seuls les intérêts sont ensuite comptabilisés. Cette dépense doit être équilibrée par des recettes courantes car l emprunt n est pas une recette, mais la conséquence, a posteriori, d un besoin de financement. Il n est aucunement fait de distinction entre un endettement pour investissement et celui qui sert à couvrir un déficit courant. La comptabilité communale considère les investissements à part, dans le volet extraordinaire du budget. L emprunt y est considéré comme une recette et c est la charge annuelle qui en découle (intérêt + capital) qui doit être équilibrée par les recettes. Les remboursements contractuels des emprunts (amortissements du capital), bien qu ayant une nature patrimoniale, ne sont pas considérés comme des dépenses extraordinaires, mais sont imputés au service ordinaire. En cela, la logique suivie par la NCC s approche de celle d un ménage qui achète un bien. Une application pure et simple aux collectivités locales de cette méthode comptable SEC 95 équivaudrait à chaque ménage désireux de devenir propriétaire de couvrir en cash l achat de sa maison quand bien même leurs revenus permettraient aisément de rembourser les mensualités d un emprunt hypothécaire. Si une telle application était de mise, elle pourrait ainsi entraîner une réduction drastique des investissements de la part des pouvoirs locaux, puisqu une telle réduction semble en effet être la voie la plus aisée pour retrouver rapidement l équilibre en SEC 95. Or, les pouvoirs locaux belges concentrent à eux seuls plus de la moitié des investissements publics et ne concentrent qu environ 4,5 % de l endettement public. Par ailleurs, dans les entités les plus petites, il est indispensable de faire ponctuellement des investissements importants, proportionnellement aux recettes, et ce selon une logique temporelle qui dépasse le cycle habituel de six ans. Ces investissements seront-ils encore possibles dans une logique globalement annuelle ou arrêtée à une législature? La Région wallonne est consciente de l impact éventuel de la méthode SEC 95 sur les investissements communaux. Une des pistes serait de proposer de tenir compte des charges de capital en lieu et place de dépenses d investissements dans la détermination du solde SEC 95 des administrations locales. Mais à l heure actuelle, elle considère qu il convient avant tout de se concentrer sur l exactitude des chiffres utilisés par l ICN. A travers une estimation chiffrée réalisée par son Administration, la Région wallonne a cependant pu constater que retravailler de cette manière le solde SEC 95 permettait d améliorer sensiblement le solde des pouvoirs locaux. Le solde SEC ainsi retravaillé est donc un solde au sein duquel le 28 MOUVEMENT COMMUNAL N 859 JUIN-JUILLET 2011

volume des investissements et les recettes hors emprunts du budget extraordinaire ont été remplacés par le volume de remboursement des charges en capital. Le Pacte de Stabilité interne : les mécanismes en vigueur dans l Union européenne Il est intéressant de voir chez nos pays voisins de quelle manière ces derniers gèrent la question du pacte de stabilité interne en ce qui concerne la répartition des efforts budgétaires entre les différentes entités (Etat central, sécurité sociale, entités fédérées et pouvoirs locaux) pour, de manière consolidée, parvenir à respecter les normes budgétaires de Maastricht. Dexia a réalisé récemment cet intéressant exercice. On épinglera ainsi quelques faits marquants de ce tour d horizon. On retiendra que dans certains pays, comme l Italie, l Espagne, l Autriche ou l Allemagne, le Pacte est aujourd hui contraignant pour le secteur local. Par ailleurs, il apparaît que le degré d association du secteur local à la définition du Pacte de Stabilité interne varie selon les pays. Dans certains cas, le Pacte est imposé par les autorités supérieures. Dans d autres, le secteur local est associé via un processus consultatif ou coopératif en ce qui concerne la répartition des efforts budgétaires et les transferts de charges entre secteurs. Parmi les variables d ajustement ou les leviers d actions utilisés pour s assurer du respect des trajectoires au niveau des pouvoirs locaux, on notera la mise en place de limitation de déficit (Pologne), le plafonnement de la croissance des dépenses (Allemagne, Danemark), le rationnement des recettes (France) ou encore la limitation des investissements ou de l endettement (Espagne, Royaume-Uni). En ce qui concerne les mécanismes mis en place et qui concernent spécifiquement les investissements, on notera que l Espagne, qui limite les investissements, a mis en place une dérogation par rapport à l objectif en ce qui concerne les investissements productifs. Ailleurs, un taux minimal d autofinancement des investissements a été mis en place. Quant aux modalités de répartition des objectifs entre les collectivités locales mêmes, en Espagne, ces objectifs sont répartis entre deux groupes de collectivités : les chefs lieux et les communes de plus de 75 000 habitants, d une part, et les autres communes, d autre part. En Italie, il existe des objectifs distincts selon que les communes sont en excédent ou en déficit. En Autriche, les objectifs sont déterminés par groupes de communes au sein du land, avec une possibilité de cession d excédents entre collectivités. Ces différents éléments peuvent être autant de pistes de réflexion à envisager ou non dans l évolution de la problématique SEC au sein de notre pays. l UVCW veut s assurer que les spécificités des pouvoirs locaux soient prises en compte Nos revendications Depuis plusieurs années, notre association suit avec attention l évolution de ce dossier relatif aux normes SEC 95 et à la trajectoire budgétaire et en particulier toute application éventuelle de ces normes aux pouvoirs locaux. Il convient de noter que l objectif de la trajectoire budgétaire élaboré par l Etat fédéral, en concertation avec les entités fédérées, est d évaluer la situation financière des différentes entités (Etat fédéral, sécurité sociale, entités fédérées, pouvoirs locaux) dans leur ensemble. Il n est donc pas question ici d évaluer la situation des pouvoirs locaux commune par commune, mais bien uniquement de manière agrégée. Nous veillerons d ailleurs à ce que le principe d évaluation de manière agrégée perdure. Nous tenons, en outre, à ce que cette méthode d évaluation macro-économique n impose pas de modification des règles de fonctionnement comptable et budgétaire applicables aux pouvoirs locaux. Nous souhaitons également qu une application éventuelle des normes SEC 95 aux pouvoirs locaux se fasse sur une période globalisée se rapportant à la durée de la mandature communale, et non par exercices propres isolés, et ce afin de tenir compte du cycle d investissement propre aux communes (les investissements étant toujours plus importants en fin de législature). Enfin, nous tenons à ce que l Etat fédéral se concerte avec la Région wallonne quant à la méthode de calcul et aux chiffres utilisés pour déterminer le solde SEC 95 des pouvoirs locaux. Nous plaidons pour qu une concertation à ce sujet ait également lieu entre la Région et notre association, afin notamment de nous assurer que les autorités fédérales tiendront bien compte de la situation bel et bien équilibrée des pouvoirs locaux. Rappelons cependant que de tels équilibres financiers restent extrêmement difficiles à maintenir et ne peuvent se faire qu au prix de douloureux sacrifices, que ce soit en termes d investissement ou de services rendus à la population. Ces difficultés budgétaires sont d ailleurs principalement dues aux reports de charges et aux politiques non assumées par l Etat fédéral envers les pouvoirs locaux Notre association a interpellé à plusieurs reprises les différentes autorités concernées afin de s assurer que les spécificités des pouvoirs locaux soient prises en compte et que la méthode puisse, au besoin, être adaptée en vue de garantir la continuité des investissements sur emprunts. Nous avons bon espoir d avoir été entendus. Nous ne manquerons pas de vous tenir régulièrement informés des différentes avancées qui auront lieu dans ce dossier. 1 L Institut des Comptes nationaux (ICN) associe trois institutions : l Institut national de Statistique, la Banque nationale de Belgique et le Bureau fédéral du Plan. Avec la collaboration de ces dernières mais sous sa responsabilité propre, il est chargé d établir certaines statistiques, analyses et prévisions économiques. JUIN-JUILLET 2011 N 859 MOUVEMENT COMMUNAL 29