Encéphalites: attitude pratique. Pr Brigitte CHABROL Service de Neurologie Pédiatrique CHU Timone, Marseille, France

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Transcription:

Encéphalites: attitude pratique Pr Brigitte CHABROL Service de Neurologie Pédiatrique CHU Timone, Marseille, France

Encéphalites Problème fréquent 10-13 /100 000 enfants /an HSV: 1/ 250 à 500.000 enfants/ an Urgence diagnostique et thérapeutique ++++

Encéphalites aiguës Encéphalite : lésions cérébrales inflammatoires Encéphalite avec réplication virale : action directe du virus qui a pénétré dans le cerveau, se multiplie et provoque des destructions cellulaires Les plus sévères dans l immédiat Encéphalite post infectieuse ou encéphalite periveineuse réponse immune, générée à l occasion de l infection virale, responsable des lésions = ADEM (Acute disseminated encephalomyelitis)

Orientation diagnostique devant un tableau d encéphalite Age de l enfant : ADEM: 4-5 ans Encéphalite herpétique: nourrisson et adolescent Intensité de la fièvre: très élevée dans l encéphalite herpétique Mode d installation explosif dans les ADEM plus progressif dans l encéphalite herpétique, Nature et fréquence des crises convulsives

Signes cliniques Début : fièvre, troubles du comportement, céphalées Hyperthermie variable Troubles de la conscience : obnubilation, confusion, fluctuation de CS, coma Crises d'épilepsie partielles ou généralisées, isolées ou récidivantes Signes neurologiquesde focalisation ou neurovégétatifs inconstants En général, symptômes PEU SPECIFIQUES

Evaluation Clinique : Niveau de conscience? Crises épileptiques, focales, état de mal? Eruptions cutanées, morsures de tiques, signes généraux? Notion de contage? Retour de voyage, environnement? Terrain immunodeprimé

Ponction lombaire: LE PLUS TOT POSSIBLE CONTRE INDICATION A LA PONCTION LOMBAIRE : Troubles de la coagulation Troubles hémodynamiques Nécessité de TDM injectée (signes de focalisation+++) Si la PL n est pas réalisable immédiatement (nécessité de scanner, troubles hémodynamiques, anomalies de la coagulation) NE PAS RETARDER LA PRISE EN CHARGE INFECTIEUSE => débuter un TRT par Zovirax ou Claforan en URGENCE (les PCR sur LCR seront faites ultérieurement

Neuroradiologie: En urgence: Scanner si signes de focalisation Dans les 48 1eres heures: IRM

EEG Pas d indication sytématique Crises epileptiques Tracés lents non spécifiques la plupart du temps Signes spécifiques : encéphalite herpetique Ne pas attendre pour débuter traitement

Encéphalites avec réplication virale Encéphalite herpétique à début néonatal: Virus herpétique type 2 Début entre J1 et J15: somnolence, vomissements,anorexie, Hypotonie, clonies hémiface, membre supérieur Troubles ++++ de la conscience, coma Lésions du cuir chevelu, cavité buccale Diagnostic EEG: complexes lents périodiques LCR: lymphocytes, protéinorachie Scanner/IRM: lésions hétérogènes Recherche d ADN viral par PCR au niveau du LCR Évolution: sévère +++: 70 % des décès, sinon séquelles graves

Encéphalites avec réplication virale Encéphalite herpétique chez le nourrisson: Signes de début: Hyperthermie et troubles digestifs Phase d état: crises partielles: face et membre supérieur Déficit moteur localisé Diagnostic EEG: signes focalisés Scanner/ IRM: atteinte lobes temporaux PL : lymphocytes, protéinorachie Recherche d ADN viral par PCR Evolution: sévère

Encéphalites avec réplication virale Encéphalite herpétique chez l enfant de plus de 5 ans: Signes de début: Troubles confusionnels, désorientation temporospatiale, Troubles du langage Crises épileptiques localisées Évolution : sévère

Rechutes: Réapparition des symptômes Mouvements anormaux Mécanisme: Phénomène immunoallergique? Reprise de la replication virale? Prévention : précocité du traitement ++++

Traitement antiviral Débuter TRT par Acyclovir (Zovirax) 500 mg/m² x 3/jour, Intraveineuse lente sur 1 heure Dilution maximale de 5 mg/ml de sérum physiologique Sur VVP dédiée Vérification de la perfusion toutes les 5 mn (risque de nécrose cutanée en cas d extravasation) Jamais sur VVP épicrânienne ou sur pied. A continuer si PCR positive ++++, arrêt si PCR négative, ou autres virus Durée du traitement: 21 jours PL de contrôle: si PCR négative: arrêt, si positive, continuer Acyclovir jusqu à négativation

Encéphalites aiguës virales: Traitement Symptomatique: Anticonvulsivants si crises épileptiques, prise en charge Etat de mal Antipyrétiques Prise en charge en Réanimation

ADEM 5 à 10 fois plus fréquentes que les encéphalites avec réplication virale en France Pathogénie: infiltration lymphoplasmocytaire périveineuse, puis réaction histiocytaire et gliale, et foyers de démyélinisation plus ou moins étendus. Lésions plus importantes dans la substance blanche que dans la substance grise

ADEM Début clinique brutal Troubles de la conscience sévères, parfois Coma Fièvre, céphalées Crises convulsives Signes pyramidaux, extrapyramidaux Rarement déficit localisé Troubles sphinctériens et troubles du tronc cérébral dans 10 % des cas

Scanner/ IRM normal lésions substance blanche cortico sous corticales ADEM LCR: hyper lymphocytose modérée (10 à 150 éléments) protéinorachie normale, pas d hypoglycorachie EEG: rythme de fond lents Évolution favorable

Formes topographiques Cérébellites: virus de la varicelle ++++ 2 à 5 jours après l éruption parfois troubles du comportement associés Évolution favorable Hémiplégies aiguës: virus varicelle (6 j /48 mois) En fait vascularites Encéphalites du tronc cérébral: rhombencéphalites Atteintes paires crânienne ( VI éme et VII éme ++++) Atteinte cérébelleuse et pyramidale Troubles de la déglutition et respiratoires Évolution sévère

ADEM: etiologie Rougeole ++++ 1 cas sur 1000 rougeoles Sinon virus de la varicelle, virus Epstein Barr, parainfluenzae,.. Autres agents infectieux: Mycoplasma pneumoniae

ADEM: Traitement Symptomatique: Anticonvulsivants si crises épileptiques, prise en charge Etat de mal Antipyrétiques Prise en charge en Réanimation Corticothérapie

ADEM versus SEP

ADEM versus SEP 1 er épisode = aigu, clinique sévère 8,5 % = SEP 1 er épisode = syndrome clinique isolé 40 % = SEP