Réponse de la FFSA aux questions posées par M. Jean-François Mattei, ministre de la Santé, de la Famille et des Personnes Handicapées



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Transcription:

Réponse de la FFSA aux questions posées par M. Jean-François Mattei, ministre de la Santé, de la Famille et des Personnes Handicapées

La part des assureurs dans le financement de l ensemble des dépenses de soins et de biens médicaux peut paraître modeste puisqu elle s établit à 2,4 %. Toutefois, si l on raisonnait en part de prestations remboursées, hors dépenses hospitalières, pour lesquelles l assurance complémentaire n intervient quasiment pas, elle atteindrait 4,7 %. Les assureurs ont été entravés dans leur développement, en particulier du fait qu ils étaient les seuls organismes à ne pas être exonérés de la taxe d assurance. Ils n ont jamais, par ailleurs, été associés à la mise en œuvre de la politique de santé publique, en particulier au niveau des instances de la Cnamts. Pour répondre aux attentes de leurs assurés, ils ont développé des plates-formes de conseils et de services. Celles-ci constituent aujourd hui une base solide dans quelques domaines (optique et dentaire tout particulièrement), pour mener une véritable gestion de la santé publique, basée sur les bonnes pratiques, le meilleur rapport coût/prestations et la prévention. Dans d autres domaines, certains d entre eux ont su mener des expérimentations innovantes, faisant valoir ce que le métier d assureur peut apporter lorsqu il s applique au risque santé, malgré les spécificités de celui-ci. Le moment est venu pour les assureurs de passer du stade de «payeur aveugle» à celui d assureur responsable dans certains domaines et pour certaines prestations, de coresponsable avec les régimes obligatoires pour d autres. La présente note fait part des propositions de la FFSA, en réponse aux deux questions posées par le Ministre. Il faut souligner que ces questions s inscrivent dans un champ particulièrement vaste et complexe. Les propositions formulées doivent donc l être avec la plus grande modestie. La FFSA n a évidemment pas l ambition, dans ces quelques pages, d apporter «la» solution à ces questions. Elle estime cependant qu elle peut contribuer utilement à la réflexion, compte tenu de l expérience de ses membres dans la gestion des risques, y compris dans le domaine de la santé. 2

Sommaire 1 - Comment remédier aux imperfections persistantes du fonctionnement institutionnel de l assurance maladie?... p. 5 A Propositions organisationnelles... p. 5 Ne pas remettre globalement en cause le rôle des Pouvoirs publics et des régimes d assurance maladie. Dans le but de valider les objectifs de santé publique : création d un «Conseil des Sages» renforçant le rôle de la Conférence Nationale de Santé, dont la mission serait de conseiller le ministre en matière de politique de santé publique. Dans le but de proposer une répartition des interventions des régimes obligatoires et des assureurs complémentaires : création d une «agence de coordination» rattachée au «Conseil des Sages». Dans le but de mieux allouer les ressources : création d un «Conseil National» des Agences Régionales de Santé (ARS), au rôle essentiellement budgétaire, qui affecterait les ressources aux ARS et leur fixerait des objectifs. Organiser plutôt inter régionalement les ARS et diffuser très largement leurs résultats pour établir une certaine émulation. B Propositions techniques... p. 7 Introduire une véritable «culture de résultat» en mettant en place une gestion administrative rapprochant recettes et dépenses au niveau de chaque acteur et une véritable gestion du risque. Passer à une gestion analytique en agissant non seulement sur le niveau des remboursements mais aussi sur les charges de gestion. Concentrer les efforts des régimes obligatoires sur les affections de longue durée (ALD) Revoir le mode de rémunération des professionnels de santé et de financement des hôpitaux : - tarification à la pathologie pour les hôpitaux et cliniques ; - introduire une part variable, fonction des résultats, dans la rémunération des professionnels de santé. Débattre avec ceux-ci des critères de résultats en particulier concernant la qualité des soins, qui pourraient être retenus ; - poursuivre la logique des tarifs forfaitaires de responsabilité et l examen du service médical rendu pour les médicaments. 2 - Comment mieux garantir l affectation des ressources publiques de l assurance maladie, qui sont comptées, à l exercice de la solidarité nationale?... p. 9 A Faire davantage appel à l assurance volontaire... p. 9 La presque totalité des contrats complémentaires commercialisés aujourd hui sont des contrats solidaires et les garanties sont accordées immédiatement de façon viagère. Dans ces conditions le rôle des assureurs complémentaires peut être accru mais il faudra notamment : - lisser dans le temps les transferts qui seront opérés - les faire participer aux instances de régulation et de contrôle - leur donner accès aux données de santé détaillées 3

L assurance complémentaire, dont la souscription par les plus démunis peut être aidée, doit relever uniquement d organismes relevant des directives d assurance et sa tarification doit être libre. B Ce qui relève de l assurance volontaire :... p. 11 B 1 Domaines complets... p. 11 Le domaine de l appareillage (optique, audioprothèses, dentaire et produits et prestations remboursables) ainsi que les soins dentaires pourraient être confiés aux assureurs complémentaires. B 2 Prestations ou médicaments qui pourraient être pris en charge par les assureurs complémentaires seuls... p 12 Tests diagnostiques, dispositifs médicaux dont ceux en attente de remboursement (défibrillateurs, stents ), médicaments prescrits qui ne seraient plus remboursés, indications non prises en charge, vaccins, prophylaxie B 3 Accidents de la route et accidents du travail... p. 13 A plus long terme, les assureurs pourraient gérer des domaines médicaux où ils disposent d importants savoir-faire que sont la traumatologie et la rééducation des accidents de la route et des accidents du travail. Conclusion... p. 14 En approfondissant les propositions formulées, une véritable réforme de l assurance maladie pourrait être mise en œuvre. Les assureurs de la FFSA sont prêts à accompagner et soutenir les Pouvoirs publics. 4

Les propositions qui suivent s inscrivent dans le prolongement des contributions de la FFSA aux rapports de Madame Rolande Ruellan et Monsieur Jean-François Chadelat. Certaines positions exposées dans cette contribution ne sont donc pas reprises (ou elles le sont mais de façon moins développée) dans le présent document. Elles s attachent à apporter quelques idées en réponse aux deux grandes questions soulevées par le Ministre : - comment remédier aux imperfections persistantes du fonctionnement institutionnel de l assurance maladie? - comment mieux garantir l affectation des ressources publiques de l assurance maladie, qui sont comptées, à l exercice de la solidarité nationale? 1 - Comment remédier aux imperfections persistantes du fonctionnement institutionnel de l assurance maladie? Pour répondre à cette première question, les propositions sont formulées tout d abord au plan organisationnel, puis en matière technique. A PROPOSITIONS ORGANISATIONNELLES Il n y a pas lieu, globalement, de remettre en cause les rôles des Pouvoirs publics et des régimes obligatoires d assurance maladie, dès lors qu ils restent en dehors du champ de l assurance complémentaire. L Etat doit conserver ses missions de souveraineté essentielles : politique de santé publique, budgets nécessaires, accès effectif de chaque citoyen au système de soins. L Etat ne doit ni être un opérateur, ni un gestionnaire, il doit être le garant. Il appartient donc aux Pouvoirs publics de définir le cahier des charges de la politique de santé publique, les règles de l assurance maladie et de fixer l ONDAM. Les régimes d assurance maladie, gérés paritairement, doivent être contraints par le cahier des charges et par l ONDAM. Leur mission est notamment de conclure des conventions «cadre» avec les professionnels de santé. Cependant, il convient : 1) d une part, de mieux définir et valider les objectifs de santé publique et de proposer la répartition des interventions des régimes obligatoires et de l assurance complémentaire ; 2) d autre part, de mieux allouer les ressources et assurer une meilleure coordination des actions, le pilotage de celles-ci devant s effectuer de façon plus décentralisée. Dans ce but, il paraît indispensable de créer, en les dotant de moyens existants et en évitant les «doublons», deux structures de natures très différentes. 1) Pour répondre au premier objectif, il est proposé de créer : un «Conseil des Sages», renforçant le rôle dévolu à la Conférence nationale de santé, constitué d experts indépendants. 5

Sa mission serait de conseiller le Ministre chargé de la santé en matière de politique de santé publique. Le Conseil assurerait la pérennité dans le temps de la politique menée, garantirait l équité dans l accès aux soins et la solidarité. Il participerait à la définition du panier de biens et services pris en charge par l assurance maladie et estimerait la quote part du PIB qui pourrait être consacrée à la santé. Il pourrait en outre être chargé de faire des propositions au Ministre sur des questions comme l orientation des malades, le dossier de santé, etc. une «Agence de coordination» chargée de la répartition des interventions de l assurance maladie obligatoire et de l assurance maladie complémentaire. Cette Agence, rattachée au Conseil des Sages proposerait la répartition des interventions des régimes obligatoires et de l assurance complémentaire en fonction d objectifs de santé publique et de critères de solidarité nationale que ce Conseil définirait. Elle veillerait également à la coordination des interventions des deux partenaires, dans un objectif de corégulation. Les propositions qui figurent plus loin, notamment la mise en place d une gestion analytique et la définition de ce qui relève de l assurance volontaire sont de nature à éclairer la façon dont cette corégulation pourrait être mise en œuvre. La nécessaire participation de l assurance complémentaire aux différentes instances d enregistrement d évaluation et de fixation des prix, ainsi que l accès de celle-ci aux données de santé, sont indispensables pour que cette corégulation devienne effective. Cette agence serait composée de représentants du ministère de la santé, de l assurance maladie obligatoire et des différentes fédérations d assureurs complémentaires (mutuelles, institutions de prévoyance et entreprises d assurances). Les propositions de l Agence seraient soumises au Conseil des Sages, qui les modifierait ou les validerait avant transmission au Ministre. 2) Pour répondre au second objectif, un «Conseil national» des Agences Régionales de Santé serait créé. Sa mission serait de les coordonner, dans le cadre d une ambitieuse politique de décentralisation, appliquée au domaine de la santé. Ce Conseil national des ARS n aurait pas de rôle politique, mais un rôle essentiellement budgétaire. Il ventilerait et affecterait les ressources aux ARS, leur fixerait des objectifs et assurerait le contrôle et le suivi des réalisations. Il veillerait à la nécessaire évolution de l offre de soins, gage d une meilleure maîtrise médicalisée et budgétaire. Progressivement, les moyens mis en œuvre seraient fonction de la démographie des assurés dans les régions. Il est injuste que certains citoyens aient droit à deux ou trois fois plus de médecins, généralistes ou spécialistes ou de lits d hôpitaux publics ou privés, que d autres. Dans cet esprit, il conviendrait, en particulier, d accélérer la réforme de la carte hospitalière, en réorientant et hiérarchisant les missions des établissements et en ouvrant certaines structures de proximité à la médecine de ville. Il examinerait toutes les initiatives locales, en particulier en termes de réseaux de soins et fixerait aux ARS des objectifs de développement des meilleures initiatives. 6

Les Agences Régionales de Santé permettraient de rapprocher les structures de fonctionnement des grandes régions. Elles assureraient le pilotage des actions. Il conviendrait de les organiser plutôt au niveau de 7 ou 8 grandes régions qu au niveau de 22. Plus le pouvoir local est proche, plus, en effet, il y a un risque d arriver à des blocages en ce qui concerne l hôpital. C est à ce niveau régional que devrait être organisée l interface hôpital/médecine de ville. Ces ARS auraient pour mission : d adapter, avec les moyens attribués par le «Conseil national», la politique de santé aux caractéristiques de la région aussi bien en ce qui concerne l hospitalisation que l ambulatoire ; de la mettre en œuvre en développant la contractualisation, les coopérations entre les différents acteurs de santé ; d évaluer les résultats de celle-ci. Il faut souligner qu il convient tout particulièrement de s appuyer sur l assuré, sur le patient acteur clé pour faire évoluer le système et les comportements, pour améliorer l efficacité et la qualité des soins. Il faut également que les usagers assument leurs responsabilités. Il serait nécessaire enfin de diffuser très largement les résultats obtenus par chaque ARS. Il est important, en effet, d établir une certaine émulation (au moins par la publication des résultats) pour revenir à un principe de base d un fonctionnement économique efficace. Il faudra aussi trouver un système de mesure de la performance et d en tirer les conséquences en cas de mauvais résultats. En conclusion, il y aurait simplement, à partir de moyens et d objectifs généraux définis nationalement, une meilleure coordination, notamment des interventions respectives de l assurance maladie obligatoire et des assureurs complémentaires, un meilleur pilotage régional et un meilleur suivi de la politique de santé. Une certaine concurrence, qui s afficherait d abord par la publication des résultats obtenus, apparaîtrait. On parlerait «d émulation», de promotion de la qualité. B PROPOSITIONS TECHNIQUES Il est proposé de mettre en place une gestion analytique, de recentrer les régimes obligatoires sur leur cœur de métier et de revoir les modes de rémunération des professionnels de santé et de financement des hôpitaux. 7

1) Mettre en place une gestion analytique La culture de résultat passe par la mise en place d une gestion analytique sur deux plans : - «gestion administrative» d abord, en rapprochant recettes et dépenses au niveau de chaque acteur, avec par ailleurs un conventionnement des professionnels de santé comportant des volets incitatifs, comme par exemple une incitation à aller dans des régions où telle catégorie de professionnel de santé est peu représentée ; - «gestion du risque» ensuite, étant entendu que celle-ci comprend en particulier la négociation avec les offreurs de soins (bonnes pratiques, rapport qualité/prix des prestations), les actions de prévention et de responsabilisation des assurés. Par exemple, concernant la responsabilisation des assurés, il s agirait d «optimiser» le remboursement en tenant compte de certains comportements à risque. Cette gestion du risque inclut également une certaine «démédicalisation» du système de santé. Certaines des tâches des professionnels de santé relèvent beaucoup plus du social que du médical à proprement parler et pourraient être exécutées par des personnes moins diplômées, mais parfois plus qualifiées pour ces tâches, à un coût sensiblement moins élevé. Ainsi une solution serait aussi apportée à la pénurie de professionnels de santé dans certaines spécialités. De façon générale, il s agit de maîtriser le «ratio combiné» c est-à-dire agir non seulement sur le niveau des remboursements mais aussi sur les charges de gestion. Passer à une telle approche pourrait amener des économies substantielles à court terme, quand il est constaté, par exemple, que certaines hospitalisations sont inutiles ou que la durée de certains séjours est supérieure à ce qu elle pourrait être. Une bonne gestion du risque consiste également à détecter des anomalies de prescriptions, puis à informer prescripteurs et patients et former les premiers pour les corriger. Une action sur la consommation des médicaments est donc à mener. Les ARS joueraient un rôle moteur dans la mise en place de cette gestion analytique. Les résultats des hôpitaux mais aussi ceux des cliniques et sur un plan général, ceux des caisses d assurance maladie seraient suivis en priorité à partir de cet indicateur. 2) Recentrer les régimes obligatoires sur leur cœur de métier Pour entrer dans cette voie de véritables gestionnaires du risque, il est suggéré que les régimes obligatoires recentrent d abord leurs actions sur leur cœur de métier. Dans cet esprit, il est proposé qu ils concentrent leurs efforts sur les affections de longue durée (ALD) qui représentent 50 % des dépenses de santé et où les enjeux de résultats et de qualité des soins sont évidents. Les prévenir, les détecter précocement, engager une stratégie thérapeutique initiale efficace et au meilleur coût, savoir gérer la pathologie dans le long terme (circuit, qualité de vie, prise en charge de sa pathologie par le patient) sont des questions essentielles. Renforcer, dans le traitement de ces affections les relations ville/hôpital, est également très important. 8

3) Revoir les modes de rémunération des professionnels de santé et de financement des hôpitaux La question du mode de rémunération des professionnels de santé et du mode de financement des hôpitaux est également à traiter dans cette même logique de «culture» de résultat. La tarification à la pathologie apparaît une bonne solution pour les hôpitaux et cliniques. Pour les professionnels de santé libéraux, il est suggéré, au moins partiellement, de sortir de la logique de la tarification à l acte et d imaginer une rémunération comportant une part fixe (pour tenir compte du temps à consacrer d une part à la responsabilisation des patients et d autre part, à la formation) et une part variable, fonction des résultats, comme cela se pratique couramment dans les entreprises. Des critères de résultats mesurables pour chaque professionnel de santé, dont feraient partie des objectifs de qualité des soins, paraissent pouvoir être trouvés. En tout état de cause, il y aurait là matière à discussion et concertation avec chaque profession, moins conflictuelle semble-t-il que le débat sur la revalorisation du tarif de l acte. Enfin, concernant le médicament, la voie semble avoir été tracée par les Pouvoirs publics avec la mise en place des tarifs forfaitaires de responsabilité et l examen du SMR. Examiner précisément la distribution et prendre des mesures visant à adapter ses coûts serait également utile. 2 - Comment mieux garantir l affectation des ressources publiques de l assurance maladie, qui sont comptées, à l exercice de la solidarité nationale? Les travaux du Conseil des Sages et de l Agence de coordination permettraient aux Pouvoirs publics de mieux appréhender ce qui relève de la solidarité nationale et de faire davantage appel à l assurance volontaire pour ce qui n en relève pas. A FAIRE DAVANTAGE APPEL A L ASSURANCE VOLONTAIRE 1) Distinction entre solidarité nationale et choix individuels L organisation actuelle a peu changé depuis la création de la Sécurité sociale. Or, une évolution est en cours d un besoin de soins curatifs vers une demande de bonne santé ce qui inclut prévention, bonnes pratiques d hygiène, d alimentation, etc. Un passage d un important besoin collectif et assez uniforme à des situations et des choix beaucoup plus individualisés est également en train de s effectuer. Il faut tenir compte de ces évolutions et bien définir les contours respectifs de ce qui relève de la solidarité nationale et de choix individuels. 9

L assurance complémentaire interviendrait en complément des régimes obligatoires pour ce qui relève de la solidarité nationale (elle deviendrait interlocuteur à part entière des régimes obligatoires pour une véritable co-gestion de la santé) et au 1 er euro pour ce qui ne relève pas de celle-ci. Pour ce qui est du domaine de la solidarité, la situation de «complémentaire» presque systématique en médecine ambulatoire qui fait de la France une exception mondiale n est pas de nature à favoriser les progrès de qualité ni la maîtrise des dépenses. Une réforme en profondeur serait celle qui conduirait les régimes obligatoires à faire le tri entre ce qu ils remboursent à 100 % et ce qu ils ne remboursent pas du tout. La distinction entre solidarité nationale et choix individuels pourrait alors se faire en tenant compte des prestations et/ou des caractéristiques de domaines entiers de soins. Néanmoins les esprits ne sont pas prêts à un tel bouleversement et l assurance complémentaire continuera à intervenir sur le ticket modérateur. 2) Les entreprises d assurances : le rôle plus important qu elles pourraient jouer Les entreprises d assurances sont prêtes à jouer pleinement leur rôle dans les domaines et/ou prestations que les Pouvoirs publics décideraient, en fonction des savoir-faire qu elles ont acquis, de leur confier. Elles demandent simplement à ce qu il soit tenu compte de : - la nécessité de lisser dans le temps les transferts en tenant compte de leur impact sur le montant de la cotisation de l assurance complémentaire ; - la nécessité que l assuré accepte les modifications contractuelles ce qui, compte tenu des millions de personnes assurées à informer et à convaincre, ne milite pas pour des modifications trop fréquentes du périmètre de la complémentaire. La presque totalité des contrats commercialisés aujourd hui sont des contrats dits «solidaires», c est-à-dire sans questionnaire d état de santé, sans tarification en fonction de l état de santé et donc sans possibilité de sélection. Par ailleurs, les garanties de tous les contrats sont accordées immédiatement de façon viagère, ce qui veut dire qu il n y a pas de possibilité de résiliation par l assureur. En outre, les majorations individuelles de cotisation, notamment en fonction de l état de santé, ne sont légalement pas possibles. Dans ces conditions, leur rôle peut être accru, étant entendu qu il faudra donner aux assureurs complémentaires les moyens nécessaires pour remplir ce nouveau rôle. Il s agira, en particulier, de : - les faire participer à toutes les instances d enregistrement, d évaluation et de fixation des prix (AMO, ARS, Médicament, instances de discussion avec les praticiens ) aux côtés des représentants des régimes obligatoires ; 10

- leur donner accès aux données de santé détaillées qui leur sont nécessaires. De ce point de vue, les assureurs souhaitent que toutes les voies d accès évoquées par le rapport de M. Babusiaux restent ouvertes et qu aucune d entre elles ne soit privilégiée. Ceci veut dire notamment que les assureurs souhaitent une transposition de la Directive européenne de 1995 conforme au texte adopté par l Assemblée nationale en première lecture, c est-à-dire maintenant la possibilité du consentement exprès des assurés à la transmission de leurs données. Enfin, la FFSA préconise la mise en place d une aide personnalisée à la santé, dégressive en fonction des revenus et réservée aux plus démunis, dont le but est de permettre la souscription, à titre individuel, d un contrat complémentaire santé. Parallèlement à la mise en place de ce dispositif, il importe de réformer le dispositif légal de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC) : - en révisant son panier de soins (avec une approche en termes d utilité médicale et dans le but d arriver à une équité entre tous les citoyens, notamment ceux qui payent une cotisation et qui peuvent avoir aujourd hui des garanties moindres) ; - et en la réservant aux organismes complémentaires. B CE QUI RELEVE DE L ASSURANCE VOLONTAIRE Les assureurs maladie complémentaires souhaitent intervenir sur l ensemble du panier de soins. Certains domaines et certaines prestations, moins marqués par la solidarité nationale et pour lesquels ils ont démontré un certain savoir-faire, peuvent leur être transférés. B. 1 Domaines complets En raisonnant en termes de domaines, les assureurs complémentaires santé pourraient être dans une première étape rapidement opérationnels et beaucoup mieux utilisés dans des domaines qui présentent les caractéristiques suivantes : - présenter des enjeux de «santé publique» qui ne sont pas vitaux ; - être des domaines où les patients/clients suivent des traitements courants, réguliers et non répétitifs pour lesquels, au moment des soins ils sont capables d exercer pleinement leur rôle de consommateur ; - être des domaines à prix libres pour que la régulation par des relations contractuelles puisse s exercer. Le domaine de l appareillage (optique, audioprothèses, dentaire et produits et prestations remboursables) répond, à l évidence à ces critères. Le domaine des soins dentaires s en approche aussi. Ces domaines pourraient sortir du financement au titre de la solidarité nationale, tout en restant dans le domaine de la santé publique, comme c est le cas dans de nombreux pays européens 11

Dans ces domaines, il peut exister une régulation intelligente par les usagers avec l aide d opérateurs de soins ou d associations. Les expériences de plates-formes et réseaux développés par les assureurs le montrent. Ce sont des domaines où de très nombreux apprentissages peuvent être faits grâce aux complémentaires santé, dont notamment : - le partenariat, par le contrat, avec le professionnel de santé ; - l arbitrage, par le consommateur, en matière «d achat» de soins ; - l arbitrage par le consommateur en matière d achat de contrat d assurance : libre choix ou réseaux de soins, prévention récompensée, etc ; - le lancement dans ces professions de processus de certification qualité indépendants, sous l impulsion des complémentaires. Dans ces domaines de l appareillage et des soins dentaires, des engagements en terme de résultats de santé publique par l assurance complémentaire sont possibles et même indispensables en contrepartie de ce nouveau rôle qui leur serait confié. Une étude est en cours en dentaire et en optique sur ce que pourraient être ces engagements. Dans d autres domaines, l accès aux soins continuerait d être garanti par les régimes obligatoires, et l assurance complémentaire, qu il convient dans ce cas d associer à la gestion du risque (cf. ci-dessus), prendrait en charge, de façon éclairée et non plus aveugle, pour certaines prestations ou médicaments, totalement ou partiellement le «ticket modérateur». Ces prises en charge seraient modulées selon, par exemple, l engagement de l assuré, les options laissées à celui-ci, etc. Cependant, les régimes obligatoires pourraient décider de réduire leur champ et non plus leur pourcentage de prise en charge de certaines prestations ou médicaments. Les assureurs complémentaires se proposent de prendre le relais après concertation et selon les principes directeurs du paragraphe précédent. B. 2 Prestations ou médicaments qui pourraient être pris en charge par les assureurs complémentaires seuls Il convient en préambule de souligner qu il appartient au client de choisir les garanties de son contrat, en fonction des propositions de l assureur. Certaines garanties (et donc certains remboursements) seront optionnelles. D autres feront partie de la base contractuelle minimale et donc tous les assurés en bénéficieront. 12

La prise en charge de certains médicaments ou procédures diagnostiques non remboursés par les régimes obligatoires nécessite des avis d experts pour légitimer le choix de remboursement par le régime complémentaire. Il ne s agit pas de rembourser des soins ou médicaments inutiles étant précisé qu il ne faut plus appeler «médicament» ce qui est totalement inutile, et ce pour faciliter l adhésion des patients et éviter les incompréhensions. La participation des assureurs complémentaires aux instances d évaluation (Commission de la transparence, Comité des prix, etc) apparaît plus clairement nécessaire encore dans ce contexte. Il en est de même en ce qui concerne leur accès aux données détaillées sur les biens de santé. Les propositions de la FFSA (qui devront être détaillées) concernant la liste des médicaments et prestations non remboursés qu ils pourraient prendre en charge sont les suivantes : - tests diagnostiques ; - dispositifs médicaux pour la lombalgie, l hyperhydrose, etc ; - dispositifs médicaux en attente de remboursement (stents, défibrillateurs, etc) ; - certains des médicaments aujourd hui remboursés qui ne le seraient plus demain ou médicaments prescrits non remboursés, mais qui garderaient l appellation de médicament ; - certains vaccins ; - contraceptifs ; - prophylaxie (prévention, hygiène, antisepsie, asepsie, etc) ; - indications non prises en charge car non prioritaires pour l AMO ; - certaines médecines douces, etc. B. 3 Accidents de la route et du travail A plus long terme, les assureurs pourraient proposer de gérer, dans un cadre de solidarité fixé par les Pouvoirs publics, les domaines médicaux où ils disposent d importants savoir-faire, que sont la traumatologie et la rééducation (accidents de la route, accidents du travail) et de renforcer ainsi leur rôle traditionnel dans la prévention de ces accidents. 13

En cherchant à appliquer les quelques principes qui figurent dans cette note, en approfondissant les propositions formulées puis en les mettant en œuvre, il nous semble que : - la situation financière de l assurance maladie pourrait, à terme (certaines des propositions peuvent avoir des effets immédiats, d autres à plus long terme) être moins préoccupante ; - les Français continueraient à bénéficier de soins de qualité et d une couverture (obligatoire + complémentaire) satisfaisante et même étendue, grâce au dispositif d aide personnalisée à la santé, adapté à la faible part des personnes résidant en France (moins de 5 %) qui n a pas d assurance complémentaire faute de moyens suffisants pour en souscrire une ; - un certain consensus pourrait être obtenu sur la réforme, compte tenu d une part de la mise en place de structures de concertation renouvelées et d autre part de la progressivité possible (et même nécessaire) de mise en œuvre des propositions. En tout état de cause, les assureurs de la FFSA sont prêts à accompagner et soutenir les Pouvoirs publics dans la nécessaire réforme de l assurance maladie dans la mesure où celle-ci donnerait une place officielle aux partenaires qu ils sont et s appuierait sur la qualité pour réguler les dépenses, ce critère étant le seul acceptable par tous les acteurs car incontestable. 14