Le mouvement Brownien en tant que processus de Markov

Documents pareils
3. Conditionnement P (B)

Filtrage stochastique non linéaire par la théorie de représentation des martingales

Processus et martingales en temps continu

Espérance conditionnelle

4. Martingales à temps discret

Cours de Calcul stochastique Master 2IF EVRY. Monique Jeanblanc

Calcul fonctionnel holomorphe dans les algèbres de Banach

Chapitre 7 : Intégration sur un intervalle quelconque

Probabilités III Introduction à l évaluation d options

Calcul Stochastique pour la finance. Romuald ELIE

Image d un intervalle par une fonction continue

Intégration et probabilités TD1 Espaces mesurés

Le modèle de Black et Scholes

Théorie de la Mesure et Intégration

Équation de Langevin avec petites perturbations browniennes ou

Exercices - Fonctions de plusieurs variables : corrigé. Pour commencer

Moments des variables aléatoires réelles

Master Modélisation Aléatoire Paris VII, Cours Méthodes de Monte Carlo en nance et C++, TP n 2.

Intégration et probabilités TD1 Espaces mesurés Corrigé

Théorème du point fixe - Théorème de l inversion locale

Chapitre 2 Le problème de l unicité des solutions

Limites finies en un point

Chapitre 7. Statistique des échantillons gaussiens. 7.1 Projection de vecteurs gaussiens

MESURE ET INTÉGRATION EN UNE DIMENSION. Notes de cours

I. Polynômes de Tchebychev

Tests non-paramétriques de non-effet et d adéquation pour des covariables fonctionnelles

* très facile ** facile *** difficulté moyenne **** difficile ***** très difficile I : Incontournable T : pour travailler et mémoriser le cours

PROBABILITÉS: COURS DE LICENCE DE MATHÉMATIQUES APPLIQUÉES LM 390

ÉTUDE ASYMPTOTIQUE D UNE MARCHE ALÉATOIRE CENTRIFUGE

Le théorème de Perron-Frobenius, les chaines de Markov et un célèbre moteur de recherche


Séminaire TEST. 1 Présentation du sujet. October 18th, 2013

Amphi 3: Espaces complets - Applications linéaires continues

MA6.06 : Mesure et Probabilités

Programmes des classes préparatoires aux Grandes Ecoles

Intégrale de Lebesgue

Continuité en un point

Suites numériques 3. 1 Convergence et limite d une suite

Continuité d une fonction de plusieurs variables

Modélisation de séries financières par un modèle multifractal. Céline Azizieh

Optimisation non linéaire Irène Charon, Olivier Hudry École nationale supérieure des télécommunications

Texte Agrégation limitée par diffusion interne

aux différences est appelé équation aux différences d ordre n en forme normale.

Dualité dans les espaces de Lebesgue et mesures de Radon finies

Université Paris-Dauphine DUMI2E 1ère année, Applications

4 Distributions particulières de probabilités

Modèles et Méthodes de Réservation

L E Ç O N. Marches aléatoires. Niveau : Terminale S Prérequis : aucun

Processus aléatoires avec application en finance

Décomposition de Föllmer-Schweizer. explicite d un passif d assurance vie. au moyen du calcul de Malliavin

Chapitre 3. Quelques fonctions usuelles. 1 Fonctions logarithme et exponentielle. 1.1 La fonction logarithme

Sur certaines séries entières particulières

Souad EL Bernoussi. Groupe d Analyse Numérique et Optimisation Rabat http ://

Variables Aléatoires. Chapitre 2

Mesures gaussiennes et espaces de Fock

Mesure et Intégration (Notes de cours de L3)

Mesures et Intégration

DIPLOME D'ETUDES APPROFONDIES EN ECONOMIE ET FINANCE THEORIE DES MARCHES FINANCIERS. Semestre d hiver

n N = u N u N+1 1 u pour u 1. f ( uv 1) v N+1 v N v t

CCP PSI Mathématiques 1 : un corrigé

Chp. 4. Minimisation d une fonction d une variable

Master IMEA 1 Calcul Stochastique et Finance Feuille de T.D. n o 1

Méthodes de quadrature. Polytech Paris-UPMC. - p. 1/48

Exercice autour de densité, fonction de répatition, espérance et variance de variables quelconques.

Approximation diophantienne uniforme et dimension de Hausdorff

3 Approximation de solutions d équations

Comparaison de fonctions Développements limités. Chapitre 10

Suites numériques 4. 1 Autres recettes pour calculer les limites

Continuité et dérivabilité d une fonction

TP1 Méthodes de Monte Carlo et techniques de réduction de variance, application au pricing d options

Construction de l'intégrale de Lebesgue

Fonctions holomorphes

Logique. Plan du chapitre

Résolution d équations non linéaires

Proposition. Si G est un groupe simple d ordre 60 alors G est isomorphe à A 5.

Fonctions de plusieurs variables. Sébastien Tordeux

Théorie de la Mesure et Intégration

Cours d Analyse 3 Fonctions de plusieurs variables

Cours d analyse numérique SMI-S4

Commun à tous les candidats

Loi d une variable discrète

Licence MASS (Re-)Mise à niveau en Probabilités. Feuilles de 1 à 7

Théorèmes du Point Fixe et Applications aux Equations Diérentielles

Modèles à Événements Discrets. Réseaux de Petri Stochastiques

Condition de stabilité d'un réseau de les d'attente à deux stations et N classes de clients 1

EXERCICE 4 (7 points ) (Commun à tous les candidats)

De même, le périmètre P d un cercle de rayon 1 vaut P = 2π (par définition de π). Mais, on peut démontrer (difficilement!) que

Calcul différentiel. Chapitre Différentiabilité

Chaînes de Markov au lycée

rf( 1 f(x)x dx = O. ) U concours externe de recrutement de professeurs agreg6s composition d analyse

Chapitre VI - Méthodes de factorisation

Intégration sur des espaces produits

MARTINGALES POUR LA FINANCE

Simulation de variables aléatoires

Produits de crédit en portefeuille

Chapitre 3. Mesures stationnaires. et théorèmes de convergence

Le produit semi-direct

MATHS FINANCIERES. Projet OMEGA

Théorie de la mesure. S. Nicolay

Différentiabilité ; Fonctions de plusieurs variables réelles

Transcription:

Chapitre 2 Le mouvement Brownien en tant que processus de Markov On définit tout d abord la notion de filtration : Définition 0.5 Une filtration sur un espace mesurable (Ω, F) est une famille (F t ) t 0 de soustibus telle que s t, F s F t. Une filtration (F t ) t 0 est IP-complète pour une certaine mesure de probabilité IP, si F 0 contient tous les événements de mesure nulle, i.e. N = {N F tel que IP(N) = 0}. Une filtration (F t ) t 0 est continue à droite si t 0, F t = F t + où F t + = ε>0 F t+ε = n>0 F t+ 1 n. Soit (F t ) t 0 une filtration alors (G t ) t 0 définie par G t = F cpl t mesure IP, G t = σ(f t, N )) est une filtration complète pour IP. (complétion par rapport à la On dit qu une filtration (F t ) t 0 satisfait les conditions habituelles si elle est continue à droite et complète. 1 Premières propriétés du mouvement brownien Propriété 1.1 Soit B un mouvement brownien. Alors - Symétrie : B est un mouvement brownien, - Propriété de scaling : soit k > 0, ( 1 k B kt, t 0) est un mouvement brownien, - Inversion du temps : (tb 1, t 0) est un mouvement brownien. t Preuve. Il est facile de vérifier que ces processus sont gaussiens, centrés, continus et de covariance t s. Pour montrer la continuité de (tb 1, t 0) en 0, de remarquer que le processus B, avec t B t = tb 1 et B ont même loi et sont continus sur ]0, + [. Par conséquent, comme B est continu t en zéro IP( B t 0) = IP( B t 1 t 0 n ) n 1 p 1 t ]0,1/p] Q = IP( B t 1 n ) = IP(B t 0) = 1. t 0 n 1 p 1 t ]0,1/p] Q 17

18 1.1 Propriéte de Markov simple Définition 1.2 Soit B un mouvement brownien. On appelle filtration brownienne la filtration définie pour tout t 0 par F B t = σ(b s, 0 s t) cpl. Proposition 1.3 Propriété de Markov simple. On fixe t 0 et on définit B par : s 0, Bs = B t+s B t. Comme les accroissements du brownien sont indépendants et stationnaires, le processus B est indépendant de F B t et a la même loi que B. On peut réécrire la propriété de Markov du mouvement brownien dans le cadre classique de la théorie des processus de Markov : indépendance du futur et du passé conditionnellement un présent. Notons IP x pour x IR (ou IR d ) la loi du mouvement brownien issu de x, i.e. la loi de x + B où B est un mouvement brownien. Proposition 1.4 Propriété de Markov simple, 2ème version. Soit t 0 fixé. On pose B s = B t+s, s 0. Conditionnellement à B t = x, le processus B est indépendant de F B t et a pour loi IP x. Preuve. On remarque que B s = B t+s B t +B t, où B s = B t+s B t est un mouvement brownien indépendant de F B t et B t est une variable F B t -mesurable. D où le résultat. Propriété 1.5 La filtration brownienne (F B t ) t 0 est continue à droite. Exemple 1.6 Voici un exemple de filtration non continue à droite. On considère le processus X défini par : X t = tε où ε est une variable de Bernoulli : IP(ε = 1) = IP(ε = 1) = 1/2. On a F 0 est la tribu triviale et F t = σ(ε) pour t > 0. Par contre, F 0 + = σ(ε) F 0. Corollaire 1.7 Loi du 0-1 de Blumenthal. La tribu F B 0 + est triviale : i.e. IP(Λ) = 0 ou 1 pour tout Λ F B 0 +. Conséquence 1.8 On définit S le processus : t 0 S t = sup B s. 0 s t La mesurabilité de S t est assurée par la continuité du mouvement brownien. Alors IP(S t > 0, t > 0) = 1. Le brownien prend des valeurs > 0 p.s. De même, si on note I t = inf 0 s t B s, en utilisant la propriété de symétrie, on a IP(I t < 0, t > 0) = 1. Comme les trajectoires de B sont continues, on a par conséquent que p.s. l ensemble {t 0 : B t = 0} admet 0 comme point d accumulation. Preuve. on remarque que {S t > 0, t > 0} F B 0 +, car S t F B t pour tout t 0 et {S t > 0, t > 0} = n>0 {S 1 > 0} F B n 0 + (intersection décroissante). D après le loi de Blumenthal, on a donc IP(S t > 0, t > 0) = 0 ou 1. Par ailleurs IP(S t > 0) IP(B t > 0) = 1/2, donc IP(S t > 0, t > 0) = 1. Preuve de la continuité à droite de la filtration brownienne. i) Montrons que F B 0 + est la tibu triviale.

Le mouvement Brownien en tant que processus de Markov 19 On considère le processus X n défini sur [0, 2 n ] : X n = (B 2 n +t B 2 n, 0 t 2 n ). La suite (X n ) n IN est une suite de variables indépendantes. On remarque que l on peut retrouver la trajectoire du brownien à partir des variables X k, k n : Par conséquent, B 2 n +t = X n (t) + X n+k (2 n k ). k=1 F 2 n = σ(x n+1,..., X n+k,...) et comme F 0 + = n 0 F 2 n, F 0 + est la tribu asymptotique engendrée par les processus indépendants X n. D après la loi du 0-1 de Kolmogorov, F0 B est triviale. + ii) Montrons que (F B t ) t 0 est continue à droite. soit C un ensemble de fonctions stable par multiplication. Si C E, alors E contient toutes les fonctions σ(c)-mesurables. Soit t 0 et ε > 0. On considère la tribu G t = σ(b t+s B t, s 0) Montrons que G t est indépendante de Ft B. + Par construction, G t+ε est indépendante de F B et donc indépendante de Ft B = + ε>0 Ft+ε. B La famille (G t+ε ) ε est croissante, de limite ε>0 G t+ε. Par ailleurs, par continuité des trajectoires browniennes, s 0 B t+s B t = lim B t+s+ε B t+ε, ε 0 donc B t+s B t est mesurable par rapport à ε>0 G t+ε, d où G t = ε>0 G t+ε et donc G t est indépendante de Ft B. + Soit des variables bornées telles que X soit Ft B -mesurable, Y Ft B -mesurable et Z G + t -mesurable. Alors E[XZY ] = E[XY ]E[Z] car F B t + et G t indépendantes = E[XZE[Y F B t ]] = E[XE[Y F B t ]]E[Z] Considérons l e.v. des variables bornées W telles que E[W Y ] = E[W E[Y Ft B ]]. Cet espace contient les variables de la forme XZ avec X L (F t B ) et Z L (G t ). L espace vectoriel W contient toutes les v.a. mesurables par rapport à G t F B t = F B où F B est la tribu engendrée par tout le mouvement brownien. Conclusion : E[W Y ] = E[W E[Y Ft B ]] pour tout W L (F B ), d où Y = E[Y Ft B ] p.s. Comme la tribu est complète, Y coïncide avec une variable Ft B -mesurable. Remarque 1.9 En fait, la filtration brownienne (Ft B ) t 0 est aussi continue à gauche : i.e. Ft B = ε>0 F t ε. B Dans la suite seule la continuité à droite nous intéressera. 1.2 Semi-groupe associé au mouvement brownien Soit B un mouvement brownien. Soit f une fonction mesurable bornée, on définit pour tout x IR, E x [f(b t )] = E[f(x + B t )]. Définition-Proposition 1.10 Soit f une fonction mesurable positive (ou bornée). On définit pour t 0 P t (f) = E x [f(b t )]. Alors

20 - P t : L (IR) L (IR), - P t est un opérateur de convolution P t f(x) = 1 2π IR y f(x + 2 y)e 2t dy. Comme pour f bornée, E[f(B t+s ) F t ] = E Bt [f(b s )], on peut exprimer la propriété de Markov simple de la façon suivante : Y F t -mesurable bornée, E[Y f(b t+s )] = E[Y P s f(b t )]. Propriété 1.11 (P t ) t 0 est un semi-groupe : - P 0 = id, - P t+s = P t P s pour tout t, s 0. En fait, c est même un semi-groupe de Feller. Définition 1.12 On note C 0 (E) est l ensemble des fonctions sur E qui tendent vers 0 à l infini. Une famille d opérateurs (P t ) t 0 est un semi-groupe de Feller si t 0 P t est un opérateur linéaire de C 0 (E) dans C 0 (E) tel que - P 0 = id et P t 1 pour tout t 0, - P t+s = P t P s pour tout t, s 0, - pour tout f C(E), P t f t 0 f au sens de la norme uniforme. Preuve. Soit t, s 0 et f mesurable bornée, P t+s f(x) = E x [f(b t+s )] = E x [f(b t+s B t + B t )] = E x [E x [f(b t+s B t + B t ) F t ]] = E x [P s f(b t )] = P t (P s f)(x) d après la propriété de Markov. Si f C 0 (IR), alors f et bornée qui converge vers 0 à l infini d après le théorème de convergence dominée, donc P t (f) C 0 (IR). Soit f C 0 (IR), par conséquent f est uniformément continue. Soit ε > 0, alors η > 0 tel que pour tout x, y IR : x y < η, on a f(x) f(y) < ε. Par conséquent, P t f(x) f(x) E[ f(x + B t ) f(x) ] ε IP( B t < η) + E[(f(x + B t ) f(x)) I Bt η] Par ailleurs, B t proba t 0 ε + 2 f IP( B t η) 0, donc il existe t η tel que t t η, IP( B t η) ε. Par conséquent, ε > 0, alors t η > 0 tel que t t η, x IR P t f(x) f(x) ε(1 + 2 f ). D où la convergence uniforme. 2 Propriété de Markov forte et applications 2.1 Notion de temps d arrêt Définition 2.1 Soit (F t ) t 0 une filtration. On dit qu une variable aléatoire T à valeurs dans [0, + ] est un (F t ) t 0 -temps d arrêt si t 0, {T t} F t.

Le mouvement Brownien en tant que processus de Markov 21 Propriété 2.2 Soient T et S deux (F t ) t 0 -temps d arrêt, alors T S et T S sont des (F t ) t 0 - temps d arrêt. Si (T n ) n 0 une suite monotone de (F t ) t 0 -temps d arrêt, alors T = lim T n est un (F t ) t 0 -temps d arrêt. Remarque 2.3 Si (F t ) t 0 est une filtration continue à droite, alors T est un (F t ) t 0 -temps d arrêt ssi t 0, {T < t} F B t. C est notamment le cas de la filtration brownienne. Preuve. En effet, si T vérifie cette propriété, on a {T t} = ε>0{t < t + ε} F t + = F t. Exemple 2.4 Soit O un ouvert et F un fermé, alors sont des (F B t ) t 0 -temps d arrêt. T O = inf{t 0 : B t O} et T F = inf{t 0 : B t F } Preuve. Soit O un ouvert. Soit t 0, on a {T O < t} = { s < t : B s O} = { s [0, t[ Q : B s O} par continuité des trajectoires = {B s O} s [0,t[ Q Comme {B s O} F s, on a bien que {T O < t} F t. Donc T O est un (F B t ) t 0 -temps d arrêt. Soit F un fermé et t 0. {T F t} = {ω Ω : inf 0 s t d(b s(ω), F ) = 0} = {ω Ω : inf s [0,t] Q d(b s(ω), F ) = 0} car B est continu et donc la distance aussi. Par ailleurs, un inf dénombrable de fonctions mesurables est mesurable. Par conséquent, {T T t} F t et donc T F est un (Ft B ) t 0 -temps d arrêt. Définition 2.5 Soit T un (F t ) t 0 -temps d arrêt. On dit que T est un temps d arrêt simple si l ensemble des valeurs prises par T est au plus dénombrable, i.e. il existe une suite (t n ) de temps positifs dans IR telle que IP(T = t n ) = 1. n=0 Proposition 2.6 Soit T un (F t ) t 0 -temps d arrêt. Alors il existe une suite décroissante (T n ) n IN de (F t ) t 0 -temps d arrêt simples telle que p.s. lim T n = T. n + Preuve. On pose T n = ([T 2 n ] + 1)2 n sur {T < }, i.e. T n = (j + 1)2 n sur l événement {T [j2 n, (j + 1)2 n [} et T n = sur {T = }.

22 Vérifions que T n est un (F t ) t 0 -temps d arrêt : {T n t} = = Par construction, p.s. p 1 j=0 p 1 j=0 { Tn = (j + 1)2 n} avec p tel que p2 n t < (p + 1)2 n { T [j2 n, (j + 1)2 n [ } = { T [0, p2 n [ } F p2 n F t. lim T n = T. n + Définition 2.7 Soit T un (F t ) t 0 -temps d arrêt. On définit la tribu F T = {Λ F : t 0 Λ {T t} F t }. Remarque 2.8 Si T = t est déterministe, alors F T = F t. Si T et S sont deux (F t ) t 0 -temps d arrêt tels que T S, alors F T F S. Proposition 2.9 Soit T un (F B t ) t 0 -temps d arrêt fini p.s.. Alors T est F T -mesurable. Preuve. Soit s 0, on veut montrer que {T s} F T. Soit t 0, on a {T s} {T t} = {T s t}. Comme T est un temps d arrêt, {T s t} F t, ceci t 0. Donc {T s} F T pour tout s 0 et T est bien F T mesurable. 2.2 Propriété de Markov forte Théorème 2.10 Propriété de Markov forte Soit T un (Ft B ) t 0 -temps d arrêt fini p.s.. On note B le processus : pour s 0 B s = B T +s B T. Alors le processus B est indépendant de FT B et a même loi que B. De façon équivalente, la propriété s énonce : conditionnellement à B T = x, le processus B, définit par B s = B T +s, est indépendant de FT B et a pour loi IP x (loi du mouvement brownien issu de x). Preuve. Soit T un (F B t ) t 0 -temps d arrêt fini p.s. On pose pour s 0, Bs = B T +s B T. i) Si T est déterministe. Le résultat est vrai, c est la propriété de Markov simple. ii) Si T est un temps d arrêt simple. Alors il existe une suite (t n ) de temps positifs telle que n=0 IP(T = t n) = 1. Soient Λ F T et φ : C([0, + [, IR) IR mesurable bornée. Alors, par Fubini E[I Λ φ( B)] = E[I Λ I T =tn φ( B)] n=0 Sur l événement {T = t n }, Bs = B s n où B n est le processus défini par B s n = B tn+s B tn. D après la propriété de Markov simple, Bn est indépendant de F tn et a même loi que B. Comme I λ I T =tn est F tn -mesurable, on a E[I Λ φ( B)] = E[I Λ I T =tn ]E[φ(B)] n=0 = E[I Λ ]E[φ(B)]. Donc la propriété est vraie pour les temps d arrêt simples.

Le mouvement Brownien en tant que processus de Markov 23 iii) Si T est un temps d arrêt p.s. fini. Il existe une suite (T n ) de temps d arrêt simples telle que p.s. lim T n = T. n + On note B s n = B Tn+s B Tn. On sait que le processus B n est indépendant de F Tn et a même loi que B. Comme T n T, on a F T F Tn, donc B n est indépendant de F T. Par ailleurs, par continuité de B, on a B n B ps. Donc B est indépendant de F T et a même loi que B. n + 2.3 Application : principe de réflexion Théorème 2.11 Principe de réflexion Soit B un mouvement brownien et S t = sup{b s : 0 s t} pour t 0. Soit a 0 et b IR avec b a, on a IP(S t > a, B t < b) = IP(B t > 2a b) En particulier, pour tout t 0 fixé S t Loi = B t. Attention : il n y a pas égalité en loi des processus S et B. En effet, S est un processus croissant et pas B. Preuve. Soit b a. On note T a = inf{t 0 : B t = a}. T a est bien fini p.s. (voir exercices). On remarque que {S t > a} = {T a < t} et donc IP(S t > a, B t < b) = IP(T a < t, B t < b). On note B t := B Ta+t B Ta = B Ta+t a. D après la propriété de Markov forte B est un mouvement brownien indépendant de F Ta. Donc, Par ailleurs, IP(T a < t, B t < b) = IP(T a < t, B t Ta < b a) = = t 0 t 0 IP(T a ds) IP( B t s < b a) IP(T a ds) IP( B t s > a b) par symétrie = IP(T a < t, B t Ta > a b) = IP(T a < t, B t > 2a b) IP(S t > a) = IP(S t > a, B t > a) + IP(S t > a, B t a) = IP(B t > a) + IP(B t > a) par le principe de réflexion = IP( B t > a) par symétrie. Théorème 2.12 Loi du logarithme itéré (Khintchine, 1933) p.s. lim sup t 0 + B t 2t log log 1 t = 1. Remarque 2.13 On peut remplacer B t par B t par symétrie du mouvement brownien. Preuve. i) Majoration.

24 Loi Soit α > 1 et r (0, 1). Par scaling, on a S r n = r n S 1, d où IP(S r n > α 2r n+1 log log(r n )) = IP(S 1 > α 2r log log(r n )) = 2 IP(B 1 > α 2r log log(r n )) 2 exp ( α 2 r log log(r n ) ) 2π cste n α2r. En choisissant r tel que α 2 r > 1, d après le lemme de Borel-Cantelli, p.s. pour n assez grand S r n α 2r n+1 log log(r n ). Pour t assez petit : r n+1 t < r n, alors B t S r n α 2t log log(1/t), alors p.s. lim sup t 0 + B t 2t log log 1 t 1. ii) Minoration. On va utiliser l indépendance des accroissements du brownien. Rappel : Minoration de la queue gaussienne : Soit N N (0, 1), pour β > 1 et x assez grand, En effet, Soit α < 1 et r (0, 1). P (N > x) P (N > x) e x2 β 2 /2. βx x e y2 /2 dy x(β 1)e x2 β 2 /2. IP(B r n B r n+1 > α 1 r 2r n log log(r n )) = IP(N > α 2 log log(r n )) e β2 α 2 log log(r n ) = cste n α2 β 2 pour β > 1 et r assez petit En choisissant β > 1 avec α 2 β 2 1, on reconnaît le terme général d une série divergente. Donc, du fait que les événements sont indépendants (par indépendance des accroissements du mouvements brownien), d après le lemme de Borel-Cantelli, p.s. infiniment souvent, B r n 2rn log log(r n ) > α B 1 r + r n+1 2rn log log(r n ). D après le première partie de la preuve, on a donc p.s. infiniment souvent, α 2r = α 2r n+1 log log(r n ) 2rn log log(r n ) > α 1 r + B r n+1 2rn log log(r n ). Par symétrie du mouvement brownien, B Loi = B, p.s. infiniment souvent, B r n+1 2rn log log(r n ) > α 1 r α 2r. En prenant, α proche de 1 et r aussi petit que l on veut, p.s. lim sup t 0 + B t 2t log log 1 t 1.

Bibliographie [1] Jean-François Le Gall. Introduction au mouvement brownien. Gazette des Mathématiciens, 40, 1989. [2] Dominique Foata et Aimé Fuchs. Processus stochastiques. Dunod, 1998. [3] Daniel Revuz et Marc Yor. Continuous martingales and brownian motion. Springer, 1991. [4] Claude Dellacherie et Paul-André Meyer. Probabilités et potentiels. Hermann, 1975. [5] Ioannis Karatzas et Steven E. Shreve. Springer, 1991. [6] Hui-Hsiung Kuo. Introduction to stochastic integration. Springer, 2006. [7] Edward Nelson. Dynamical theories of Brownian motion. http ://www.math.princeton.edu / nelson/books/bmotion.pdf. [8] Philip Protter. Stochastic integration and differential equations. Springer, 1995. 25

26