Dr E. Lafeuille AHU Laboratoire de Bactériologie-Hygiène Hôpital de la Pitié-Salpétrière

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Transcription:

Dr E. Lafeuille AHU Laboratoire de Bactériologie-Hygiène Hôpital de la Pitié-Salpétrière

Mécanisme de résistance bactérienne: moyen de lutte mis en œuvre par la bactérie pour empêcher l action de l antibiotique Avantage sélectif: «seuls les mieux adaptés à leur environnement survivent» C. Darwin, De l origine des espèces par voie de sélection naturelle, 1859.

B. Huttner

- Les gènes codant pour la résistance aux antibiotiques préexistent B. Huttner

Colonisation: simple portage d un microorganisme sur un hôte, pas de symptômes pas de traitement Infection: conflit entre un micro-organisme et un hôte aux dépends de l hôte manifestations délétères, signes cliniques traiter l infection

Sante.gouv: les bactéries sont dites multirésistantes aux antibiotiques lorsqu elles ne sont plus sensibles qu à un petit nombre d antibiotiques habituellement actifs en thérapeutique. NB: elles ne sont pas plus virulentes que les bactéries non résistantes de la même espèce. (CTNIN, 1999) La multirésistance peut être le fruit d une accumulation de résistances naturelles ou acquises

BMR Réservoir Mode de transmission Survie dans l environnement SARM: staphylocoque aureus résistant à la méthicilline Commensal Médiane portage: 6-8 mois Humain (patients et soignants) Nez, peau, aisselles, plaie chronique Transmission croisée, par contact direct: manuportage+++ Ou via environnement (fréquent) Bonne capacité: plusieurs semaines, même sur surfaces sèches Entérobactéries -BLSE -EPC Commensal Médiane portage: 6-8 mois Tube digestif de l homme et des animaux, environnement (aliments, eau, surfaces ) Manuportage+++ ou indirecte via l environnement Quelques jours dans l environnement ERV: entérocoques résistants à la vancomycine Tube digestif de l homme et des animaux, eau, Transmission croisée Environnement proche du patient Survie prolongée dans le milieu extérieur

BMR Réservoir Mode de transmission Survie dans l environnement Pseudomonas aeruginosa multirésistant BGN, vit dans l eau, parfois tube digestif/oropharynx de l homme -à partir de l environnement (nébuliseurs, humidificateurs, siphons, robinets, respirateurs, antiseptiques) -transmission croisée à partir de patients colonisés Survie +++ et multiplication sur supports et matériaux humides -quelques jours sur surfaces sèches Acinetobacter baumanii multirésistant Tube digestif, peau, oropharynx des patients Transmission croisée à partir de l environnement et de patients colonisés -> de 1 mois, y compris surfaces sèches

E émergentes Bactéries dont le mécanisme de résistance est nouveau et possède un potentiel épidémique H hautement résistantes Possibilités thérapeutiques extrêmement restreintes Résistance aux dernières lignes d antibiotiques -EPC: entérobactéries productrices de carbapénémases -ERV: entérocoques résistants à la vancomycine

Pas de nouveaux AB permettant de faire face efficacement.. Dissémination massive des mécanismes de multirésistance Passage dans le «communautaire» de ces mécanismes Explosion du nombre d impasses thérapeutiques Convergence virulence/résistance?? Les infections à BMR existent déjà dans le communautaire.

Dépister!

prélèvement Ec nasaux Ec cutanés (axillaires, inguinaux) Ec rectaux BMR cible SARM Pyo MDR Acineto MDR EPC+++ ERV Pyo MDR AcinetoMDR Milieux sélectifs

1) Dédramatiser 2) Délivrer un message clair 3) Pratiques de soin cohérentes Anxiété

- Être porteur d une BMR ne signifie pas forcément être atteint d une infection nosocomiale, et inversement les infections nosocomiales ne sont pas toutes à BMR - Le portage simple peut être sans conséquence pour la santé, et peut s arrêter spontanément. (durée de quelques mois à plus) - Les chances de décolonisation augmentent lorsque l on arrête les antibiotiques et qu on enlève les matériels invasifs. - La transmission en milieu de soin se fait facilement par les mains lors des soins ou via un contact avec l environnement contaminé. - Les mesures prises visent à limiter la diffusion de ces germes. - Les BMR ne sont pas plus virulentes que d autres bactéries, elles peuvent entrainer simplement des infections plus difficiles à traiter.

1. Avant lavage 2a. Savon doux 30 sec 2b. Savon antiseptique 30 sec 2c. PHA 20-30 sec UPMC - Paris 6

La survenue d infections intraitables n est plus une simple menace mais une réalité Protéger notre capital antibiotique ressource limitée Implication +++ - du personnel médical (bon utilisation des AB) - du personnel paramédical (HDM+respect des mesures d isolements) Conjonction du déficit en nouvelles molécules et de l évolution de la résistance bactérienne (hospitalière et communautaire) Trémolières et al, Med. Mal. Infect, 2011, «Sauver les antibiotiques! Que faire pour prévenir un désastre annoncé: propositions pour favoriser le développement de nouveaux antibiotiques.»

Remerciements Dr Eric Grandsire Laboratoire Dynalab

1) faut-il avoir peur quand on est soignant? NON 2) Quel est le niveau de risque de colonisation pour le soignant? FAIBLE La colonisation est transitoire, au niveau des mains, elle disparaît si on applique correctement les recommandations pour l hygiène des mains. Se rappeler. Que la perte de chance en terme médical et affective doit être aussi limitée que possible pour le patient BMR + Bien expliquer meilleure acceptation / moins traumatisant

2) Transmettre des recommandations claires: Précautions pour le patient au domicile: meilleure protection pour le patient et l entourage: lavage des mains après WC, après s être mouché, eternuement, toussé, après manipulation de poche à urine, pansement, linge souillé, avant de préparer les repas, de passer à table les BMR sont détruites par la chaleur et la plupart des produits ménagers douche quotidienne avec savon habituel et linge de toilette personnalisé lavage du linge à 40 min, lessive habituelle, changement quotidien vêtements pas de recommandations particulières pour l entretien de la vaisselle les sanitaires peuvent être particulièrement contaminés, entretient soigneux avec produits habituels pas de mesures particulières pour l entourage (risque de transmission faible, cas particuliers type ID)

3) Avoir des pratiques de soin cohérentes: Eduquer le patient: -dans un contexte de soin, lui apprendre à se signaler comme porteur de BMR aux soignants (IDE, AS, Kiné, médecin, ambulancier, auxilliaire de vie) pour prendre les mesures nécessaires afin d éviter la transmission à un autre patient. Les choses les plus simples, mais bien respectées, sont les plus efficaces HYGIENE DES MAINS: SHA>> lavage eau-savon Protéger sa tenue de travail en cas contact étroit avec le patient Les gants protègent d un contact avec des liquides biologiques mais ne dispensent pas d une HDM après retrait!

Respect des précautions standards Précautions complémentaires: -Ports de gants non nécessaire pour contact avec la peau saine ou l environnement -Chambre individuelle -Signalisationportage BMR -Protection tenue de travail (tablier ou surblouse UU) pour tous les contacts directs avec le patient -petits matériels dédiés au patient