Le VIH en 2011 Pourquoi faut-il se dépister?

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Transcription:

Le VIH en 2011 Pourquoi faut-il se dépister? Luc PARIS Consultation des maladies infectieuses, parasitaires et tropicales Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris, France

Epidémiologie du VIH Sang Toxicomanie Transfusion Exposition accidentelle Sexe Relation sexuelles Mère-enfant Grossesse Accouchement Allaitement

La maladie VIH Commence dès la primo-infection Longtemps asymptomatique Le SIDA en est l expression ultime.

Histoire naturelle de la maladie VIH Anticorps spécifiques anti VIH CD4+ Plasma HIV RNA Virémie cellulaire Mois Années Primoinfection Maladie Sida asymptomatique

Complications cliniques majeures au cours du sida 400 Tuberculose candidose, HSV Lymphome CD4/mm 3 200 Infections bactériennes, candidose oesophagienne 100 Amaigrissement Toxoplasmose, Pneumocystose Désordres neurologiques (HIV) 50 CMV, MAIC, LEMP Temps

Pourquoi traiter l infection VIH

Evolution actuelle de l infection VIH avec les traitements combinés antirétroviraux 600 SIDA HAART CD4 / µl 200 ARN VIH / ml 4 8 ans Sous traitement : baisse de la charge virale et restauration immunitaire

Incidence des nouveaux cas de SIDA et décès Incidence pour 1000 personnes-années 140.0 120.0 100.0 80.0 60.0 40.0 20.0 0.0 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003- s1 2003- s2 2004- s1 2004- s2 2005- s1 * 2005- s2 * 2006- s1 * SIDA Décès 2006- s2 * * Données corrigées du délai de déclaration

Traiter tôt réduit la mortalité Taux de décès à 4 ans de la découverte du VIH 13.9% si découverte au stade SIDA ou CD4 < 200/mm3 3 % si prise en charge plus précoce

Changes in the risk of death after HIV seroconversion compared with mortality in the general population (K. Bhaskaren et al, JAMA, 2008) 16 534 patients avec un suivi médian de 6,4 ans [1-24] Entre la période pré-1996 et 2004 2006 : diminution de la surmortalité de 94% Mortalité équivalente entre population générale et patients séropositifs dans les 5 ans qui suivent la séroconversion Augmentation de la mortalité dans la période supérieure à 5 ans

3 Mortalité des patients VIH+ avec CD4 > 500/mm 3 sous ARV 80 642 adultes VIH+ ayant débuté ARV après 1998, suivi médian de 3,5 ans Population étudiée : 70 % d hommes, contamination hétérosexuelle = 42 %, homosexuelle = 33 %, par toxicomanie i.v. = 16 % A l initiation du traitement ARV, âge médian = 37 ans, CD4 médian = 225/mm 3 Au cours du suivi, survenue de 3 813 décès (hommes = 2 979, femmes = 834) Pour l analyse, prise en compte de la dernière valeur connue de CD4. Résultats : Les hommes avec CD4 > 500/mm 3 depuis au moins 3 ans ont une mortalité similaire aux hommes de la population générale. Les femmes avec CD4 > 500/mm 3 ont une mortalité qui reste supérieure à celle des femmes de la population générale même après 5 ans au dessus de cette valeur de CD4 Les toxicomanes i.v. gardent une surmortalité même après plusieurs années avec un taux de CD4 > 500/mm 3 Lewden C, CROI 2010, Abs. 527

4 Mortalité des patients VIH+ avec CD4 > 500/mm 3 sous ARV Ratio standardisé de mortalité selon le temps passé avec CD4 > 500/mm 3 Hommes Temps consécutif passé avec CD4 > 500/mm 3 CD4 actuels Après 1 an Après 2 ans Ensemble population 1,4 (1,3-1,6) Non toxicomanes i.v. Toxicomanes i.v. Après 3 ans Après 4 ans 1,1 (0,8-1,3) Après 5 ans 1,1 (0,8-1,7) Femmes CD4 actuels Après 1 an 0 1 2 3 2,2 (1,7-2,9) 0 1 2 3 0 1 2 3 4 5 6 Après 2 ans Après 3 ans Après 4 ans Après 5 ans 0 1 2 3 0 1 2 3 0 1 2 3 4 5 6 Lewden C, CROI 2010, Abs. 527

Transmission du VIH au sein de couples hétérosexuels séro-différents en Afrique : impact du traitement ARV (1) Questions explorées Effet du traitement ARV sur le risque de transmission du VIH Impact du niveau de lymphocytes CD4 sur le risque de transmission Impact de l'initiation des ARV sur les comportements sexuels Population étudiée - procédures 3 381 couples séro-différents (Afrique de l'est et australe) Femme infectée : 2 284 couples Homme infecté : 1 097 couples Visites trimestrielles avec sérologie VIH Counseling de prévention intensif, préservatifs gratuits Personnes VIH+ Non traitées par ARV à l'inclusion (CD4 > 250/mm 3 ) Adressées pour débuter un traitement ARV selon les recommandations nationales 349 (10 %) ont débuté un traitement ARV en médiane 13 mois après l'inclusion 13 Donnell D, CROI 2010, Abs. 136

Transmission du VIH au sein de couples séro-différents en Afrique impact du traitement ARV (2) 14 Bilan des transmissions du VIH (3 381 couples séro-différents, suivi : 2 ans) 151 contaminations par le VIH 108 transmissions intra-couple (103 analysées) Taux de transmission : 2,1 % par an Transmission du VIH en fonction de l'exposition aux ARV Transmissions intra-couple Annéespatient Taux de transmission (%) IC 95 % Sans ARV 102 4 558 2,24 1,84-2,72 Sous ARV 1 273 0,37 0,09-2,04 Risque relatif ARV vs non ARV : non ajusté = 0,17 (IC 95 % : 0,004-0,94) ; p = 0,037 ajusté sur CD4 et temps de suivi = 0,08 (IC 95 % : 0,002-0,57) ; p = 0,004 Donnell D, CROI 2010, Abs. 136

15 Transmission du VIH au sein de couples séro-différents en Afrique : impact du traitement ARV (3) Après l'initiation des ARV Sans ARV CD4/mm 3 Transmissions Taux (%) Transmissions Annéespatient Annéespatient Taux < 200 0 132 0 8 91 8,79 200-350 1 90 1,11 41 1 467 2,79 350-500 0 30 0 24 1408 1,70 > 500 0 21 0 29 1 592 1,82 (%) Influence du traitement ARV sur le comportement sexuel Pas de modification de la fréquence des rapports Diminution du pourcentage de rapports non protégés Avant ARV : 6,2 % Après ARV : 3,7 % p = 0,03 Donnell D, CROI 2010, Abs. 136

Traitement antirétroviral et diminution du risque de transmission La diminution de la charge virale plasmatique entraine une diminution importante du risque de transmission du VIH 1 Dans certaines études de cohorte prospectives avec des couples hétérosexuels dont le partenaire infecté était mis sous traitement antirétroviral, il a été mis en évidence une diminution du risque de transmission variable selon les conditions de l étude 2 L interprétation de ces données reste difficile car l ensemble des éléments qui peuvent influer sur l évolution de l épidémie ne sont pas toujours pris en compte 2 16 1 Porco TC et al. AIDS, 2004, 18 : 81-88. - 2 Yeni P et al. Prise en charge médicale des personnes infectées par le VIH. Recommandations du groupe d experts. Rapport 2008. Flammarion Médecine-Sciences, Paris, 2008.

Moments de la transmission verticale du VIH 15% 5% 10% grossesse allaitement

Importance de la CV plasmatique à l accouchement sur le risque de transmission verticale du VIH 40 32% % Transmission 30 20 10 1% 6% 11% 21% 0 <400 400-3000- 40000- >100000 3000 40000 100000 ARN VIH plasmatique à l accouchement Blattner W. XIII AIDS Conf, July 2000, Durban S Africa (LBOr4) WITS study, 1990-1999

Transmission verticale du VIH Sans traitement : 18 à 35 % Grossesse prise en charge Risque < 1 % Possibilité d accoucher par voie basse

Pourquoi faut-il se dépister? Parce qu il existe des traitements efficaces L espérance de vie individuelle des patients infectés par le VIH et traités tend à rejoindre celle de la population générale Le traitement est le meilleur outil de prévention de la transmission.