AMBASSADE DE FRANCE SERVICES ECONOMIQUES AU CANADA SERVICE ECONOMIQUE RÉGIONAL Rédigée par Pierre Monigard Ottawa, le 5 février 2016 Validée par Philippe Huberdeau NOTE Objet : Stratégie du Canada en matière de politique énergétique Attirer l investissement nécessaire au développement des ressources énergétiques ou construire l infrastructure pour acheminer l énergie jusqu aux marchés implique que le Canada mette de l ordre dans son dossier environnemental et que ses citoyens souscrivent à cette approche. Le gouvernement canadien s est ainsi fixé la priorité de restaurer la crédibilité des évaluations environnementales et des processus réglementaires pour que le secteur énergétique demeure une source d emplois, de prospérité et ouvre de nouvelles perspectives tout en opérant la transition vers une économie plus sobre en carbone. Kim RUDD, secrétaire parlementaire du Ministre des Ressources naturelles du gouvernement du Canada, Jim Carr, a livré lors d une intervention en ouverture du Congrès annuel du Conseil canadien de l énergie la vision du gouvernement fédéral sur l évolution du secteur énergétique du pays. Je retiens de cette intervention les éléments suivants : Le message délivré par Mme Rudd se veut en premier lieu d un optimisme prudent au regard des difficultés rencontrées par le secteur des hydrocarbures, notamment la faiblesse des prix du pétrole et ses conséquences néfastes sur les entreprises, l emploi et la société. Elle a ensuite exprimé la volonté du gouvernement de faire en sorte que le secteur énergétique canadien demeure une source d emplois, de prospérité et ouvre de nouvelles perspectives tout en opérant la transition vers une économie plus sobre en carbone. Le gouvernement s est engagé à montrer la voie en collaborant avec les communautés autochtones, les provinces, les territoires, l industrie et autres acteurs en vue d accroitre la résilience et la viabilité environnementale du secteur et pour atteindre un futur meilleur. Cet avenir se déclinerait autour de la dynamique suivante : - Le développement d infrastructures plus durables pour transporter l énergie vers les marchés domestique et étranger - La plus grande utilisation de sources d énergie renouvelables où l efficacité énergétique joue un rôle plus important
- Le recours à l innovation et la capacité des acteurs à s adapter aux évolutions en investissant dans des technologies plus propres pour l exploitation des combustibles fossiles et dans des infrastructures plus écologiques. Attirer l investissement nécessaire au développement des ressources énergétiques ou construire l infrastructure pour acheminer l énergie jusqu aux marchés implique que le Canada mette de l ordre dans son dossier environnemental et que ses citoyens souscrivent à cette approche. Le gouvernement s est ainsi fixé la priorité de restaurer la crédibilité des évaluations environnementales et des processus réglementaires. En effet, un grand nombre de Canadiens ont perdu confiance dans le mode d évaluation des grands projets énergétiques car ils sont confortés dans leur sentiment que leur avis n est pas pris en compte et pas entendu. Le gouvernement s est engagé dans d importantes modifications du système d évaluation environnementale en instaurant de nouvelles procédures pour garantir que les décisions concernant les grands projets liés aux ressources s appuient sur des données scientifiques probantes et servent réellement l intérêt public. Ces efforts s articulent autour de la modernisation de l Office National de l Énergie de façon à ce que sa composition reflète les attentes régionales et que l institution soit porteuse d une expertise dans des domaines tels que la science environnementale, le développement communautaire ou le savoir traditionnel autochtone. L adhésion au savoir autochtone est importante. Honorer les obligations nationales envers les communautés autochtones et ouvrir des consultations approfondies avec ces dernières sont des souhaits partagés par une majorité de Canadiens. Pour répondre à cette attente, le gouvernement vient d adopter une approche provisoire fondée sur cinq principes pour guider la prise de décisions à l égard des grands projets dans le domaine des ressources naturelles. L objectif de cette initiative est d arriver à un meilleur arbitrage entre impératifs économiques et écologiques tout en cadrant le pouvoir discrétionnaire du gouvernement fédéral en matière d évaluation de projets, notamment lors de l examen du volet environnemental. Les Ministres Jim Carr et Catherine McKenna, chargée de l environnement et du changement climatique, ont annoncé récemment ces cinq principes : 1/ aucun promoteur de projet n aura à retourner à la «case départ». Les examens de projet se poursuivront dans le cadre législatif actuel et conformément aux dispositions des traités. 2/ les décisions seront fondées sur les données scientifiques, les connaissances traditionnelles des peuples autochtones et autres éléments probants. 3/ l avis du public et des collectivités touchées sera sollicité et pris en compte. 4/ les populations autochtones seront consultées de façon significative et, le cas échéant, des mesures d atténuation de l impact des projets sur leurs droits et leurs intérêts seront adoptées. 5/ les émissions, directes et en amont, de gaz à effet de serre associées aux projets faisant l objet d un examen seront évaluées. Deux grands projets, bien connus au Canada, l extension du réseau Trans Mountain d Edmonton à Burnaby, en Colombie-Britannique et le projet d oléoduc Énergie Est, vont être soumis sans tarder à ce dispositif transitoire. 2
Dans le cas du réseau Trans Mountain, le processus réglementaire est déjà passablement avancé et l Office National de l Énergie devrait remettre ses recommandations au gouvernement en mai prochain. Conformément aux cinq principes adoptés, le gouvernement entend mener des consultations supplémentaires auprès des peuples autochtones et nommer un porte-parole ministériel qui rencontrera les collectivités situées le long du tracé proposé pour que leurs vues soient dûment prises en compte. Un financement additionnel sera offert aux peuples autochtones pour faciliter leur participation à ces consultations. L évaluation des émissions de gaz à effet de serre en amont du projet contribuera à guider l élaboration du plan national de lutte contre le changement climatique avec les provinces et les territoires. Une prolongation de quatre mois du délai prescrit par la loi pour la décision finale du gouvernement, donnant à ce dernier jusqu en décembre 2016 pour déterminer s il est dans l intérêt national de réaliser le projet, doit être adoptée. Dans le cas du projet d oléoduc Énergie Est, qui transporterait du pétrole de l Alberta et du Saskatchewan jusqu à Saint John, au Nouveau-Brunswick, il est prévu de procéder de manière identique. Le gouvernement du Canada entend collaborer davantage avec les peuples autochtones pour forger une relation qui jettera les bases de consultations fructueuses, nommer temporairement trois nouveaux commissaires à l Office National de l Énergie pour nouer un dialogue avec les collectivités et les groupes autochtones le long du tracé proposé et, enfin, évaluer les émissions de gaz à effet de serre en amont du projet Énergie Est. Pour ce faire, les délais prescrits par la loi pour l examen de l Office et pour la décision finale du gouvernement canadien doivent être étendus, respectivement, de six et trois mois. Commentaires : Promesse électorale du candidat Trudeau, cette démarche constitue la première étape d une stratégie globale visant à réviser les processus d évaluation environnementale du Canada et à en rétablir la crédibilité. Cette approche, dictée par un souci d équité et de transparence, nécessitera un délai et un effort considérables pour tenir les consultations approfondies annoncées auprès d une multiplicité d acteurs. Le risque sous-jacent de cette stratégie est de générer des échanges interminables. Pour prendre la pleine mesure de ce risque, il suffit de se référer à une édition récente du quotidien «Le Devoir» relatant le chemin de croix de TransCanada pour imposer son projet [Energie Est]. «L Office National de l Energie» aurait en effet ordonné à la pétrolière de revoir sa demande, jugeant trop ardue la compréhension des dizaines de milliers de pages de documents envoyées à l organisation fédérale pour valider le projet». Si une telle dérive se répliquait dans le cadre de la nouvelle approche du gouvernement, l industrie serait maintenue dans une situation difficile faute d accéder, en l absence d infrastructures, aux débouchés commerciaux dont elle a plus que jamais besoin du fait de la faiblesse durable du cours du baril. Mais, dans le cas contraire où les consultations aboutiraient plus rapidement que prévues, elles pourraient enfin offrir à l industrie les infrastructures dont elle a tant besoin pour acheminer sa production vers les marchés. 3
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