en toute légalité le montant du loyer octobre 2012 edition 3 www.bdo.ch Editorial 1



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Transcription:

octobre 2012 edition 3 www.bdo.ch en toute légalité le montant du loyer I. introduction Notre système juridique distingue fondamentalement trois catégories de loyers: a) Les loyers absolument libres b) Les loyers relativement libres c) Les loyers contrôlés Nous consacrerons notre exposé essentiellement à cette seconde catégorie, dont relève la grande majorité des loyers dans notre pays, tout en délimitant le champ d application des dispositions protectrices. Ainsi seront essentiellement citées des dispositions légales issues du Code des obligations suisse (CO) et de l Ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme d habitations et de locaux commerciaux (OBLF). II. Critères de fixation du loyer Sont en vigueur à ce jour deux types de critères de fixation des loyers antinomiques conformément aux art. 269 et 269a CO, soit, le groupe des loyers fondés sur les coûts et celui des loyers usuels du quartier; critères qu a peaufinés la jurisprudence au travers de ses arrêts. Ainsi sont nées la méthode relative et la méthode absolue de fixation de loyers. En vertu de cette première méthode, seules des modifications du loyer en cours du bail entre les parties sont prises en compte alors que la deuxième, surtout applicable pour la fixation du loyer initial, permet d apprécier le loyer pour lui-même sans référence à l accord antérieur entre les parties, au regard soit du rendement de la chose louée soit des loyers usuels du quartier. Editorial 1 A priori, le bailleur est libre de fixer le montant du loyer afférent à la chose louée. Cependant, par souci de protection de la partie faible, le locataire en l espèce, le législateur a introduit des mécanismes propres à combattre les abus, notamment des critères de fixation du loyer, à l aune desquels, on peut mesurer la conformité du loyer. Depuis le 1er juillet 1990, notre ordre juridique consacre donc un système de surveillance par opposition à celui du contrôle des loyers. Isabelle van den Berg Master of Law Juriste Junior Lausanne, BDO SA isabelle.vandenberg@bdo.ch 1 Lachat David, Commentaire Romand CO I, Intro art. 269-270e CO N 1-2

2 Les loyers fondés sur les coûts La ratio legis des loyers fondés sur les coûts est d éviter que le bailleur retire un rendement excessif de son investissement au détriment du locataire. Ces critères sont concrétisés aux art. 269 et 269a let. b, c, d et e CO, à savoir rendement net de la chose louée (art. 269 CO), hausse des coûts et prestations supplémentaires du bailleur (art. 269a let. b CO), rendement brut (art. 269a let. c CO), plan de hausse de loyer (art. 269a let. d CO) et compensation du renchérissement art. 269a let. e CO. L on met ainsi en relation le rendement net que procure le bien immobilier loué au bailleur avec toutes ses dépenses et charges liées avec ledit bien loué. Les loyers usuels du marché Les loyers du marché tendent à fixer le loyer de manière objective (partiellement concrétisé à l art. 269a let. a). Ils dépendent de l offre et de la demande, jeu qui détermine la valeur marchande de l objet loué. Selon la conjoncture, le bailleur, respectivement le locataire, préférera certains critères. En basse conjoncture, le locataire a intérêt à ce que les prix soient fixés selon la loi du marché. En revanche, lorsque sévit la pénurie de logements et que la demande surpasse l offre, le locataire préférera un loyer exclusivement fondé sur les coûts supportés par le bailleur; la situation étant inverse pour le bailleur 2. Mais lesdits critères sont-ils réellement antinomiques? En réalité, ces critères sont souvent largement imbriqués dans leur application car pour déterminer le prix d achat admissible d un bien immobilier (charge du bailleur), le juge va le comparer au prix du marché (art. 10 OBLF). C est en se basant sur les loyers comparatifs, qu il apprécie le prix de revient des immeubles anciens servant au calcul du rendement (coût). Le taux hypothécaire dont il va tenir compte pour déterminer une hausse de coûts du bailleur est également celui du marché (art. 1a et 13 OBLF) et non pas celui qui figure dans le contrat de prêt entre le bailleur et la banque. La jurisprudence a en réalité opéré une objectivisation ou standardisation des coûts en se référant à des moyennes. Cette interprétation, soit un certain alignement des deux critères, a justement pour but de, premièrement, maintenir une cohérence entre la méthode relative, qui se fonde surtout sur des coûts standardisés, et la méthode absolue, qui tient d ordinaire compte des coûts réels; et deuxièmement, d appliquer un raisonnement uniforme à l ensemble des locataires. Cela étant, l antinomie persiste quand même dans certains cas, où la partie qui se prévaut de l un ou autre critère devra bel et bien choisir son camp. Prenons l exemple du bailleur qui veut majorer son loyer en invoquant les loyers usuels. Celui-ci devra renoncer à se prévaloir d autres critères fondés sur les coûts, sous réserve, bien sûr, d une motivation principale et subsidiaire 3. Il sied ici de relever que le critère fondé sur les coûts constitue la règle primant dans un cas d espèce celui des loyers usuels 4. Dans ce même sens, la marge de manœuvre du défendeur est limitée notamment par la méthode choisie par le demandeur. Ainsi si le bailleur se prévaut valablement de la méthode absolue pour majorer le loyer, le locataire n est pas en mesure de lui opposer la méthode relative; l inverse étant en revanche admis! La distinction entre les loyers du marché et les loyers fondés sur les coûts, d une part, et les critères absolus et relatifs, d autre part, ne se recoupe pas forcément; les critères fondés sur les coûts pouvant être relatifs dans le cas où le bailleur se prévaut d une hausse de coûts et prestations supplémentaires selon l art. 269a let b CO ou du renchérissement de la vie (let e), ou alors absolus si le locataire invoque un rendement excessif de la chose louée selon les art. 269 et 269a let c. 2 Lachat David, Le bail à loyer, Lausanne 2008, S. 524 ff. 3 ATF 121 III 6c.3c 4 Lachat David, Le bail à loyer, Lausanne 2008, p. 523-527

3 III. la Méthode absolue et la méthode relative IV. application de la méthode relative et absolue En toute logique, les critères absolus conduisent à l application de la méthode absolue, et les critères relatifs à l application de la méthode relative. La méthode absolue s applique à l objet loué en tant que tel alors que la méthode relative prend en considération le contrat de bail liant les parties. La méthode relative impose au bailleur de justifier une hausse de loyer car le locataire s est, en emménageant dans ses locaux, fié aux termes du contrat de bail. Ainsi le bailleur n est autorisé à modifier le loyer contractuel que si les critères de fixation ont évolué à la hausse. Il en va de même, inversement, pour le locataire qui entend solliciter une baisse de loyer (cf. principe de confiance). La méthode relative interdit au bailleur de faire valoir des motifs de hausse intervenus avant la dernière fixation du loyer, sauf s il a expressément formulé une réserve à cet effet. Une telle clause doit, pour être valide, être rédigée sans équivoque de manière à ce que le locataire sache pertinemment que le bailleur pourra exiger une hausse de loyer fondée sur des critères expressément élucidés et préalablement communiqués à celui-ci. En outre, le montant réservé doit être chiffré. Ces réserves ne sont pas objet à contestation, mais une formule générale, selon laquelle une hausse partielle du loyer demeure réservée, n est pas opposable au locataire. Dans tous les cas, le locataire ne peut saisir l autorité de conciliation qu au moment de notification de hausse du loyer (art. 270b CO). Ces réserves ne valent en outre qu entre les parties au contrat, sous réserve du reprenant dans le cadre d un transfert de bail commercial ou reprise de bail. Le bailleur doit d ailleurs réactualiser les réserves à l occasion de la fixation suivante du loyer s il ne les fait pas valoir. Valablement formulée, une réserve de hausse ne permet au bailleur que de remonter à la fixation précédente du loyer. Or, l art. 13 al. 4 OBLF permet au bailleur de remonter au-delà de la fixation du loyer quant à une hausse de loyer justifiée par une variation du taux hypothécaire. D autre part, l OBLF ne prévoit pas la possibilité d une réserve de baisse en faveur du locataire. Illustrons cette théorie par un cas pratique: Le bailleur loue pour la première fois un appartement, dont il fixe le loyer en fonction du rendement brut de la chose afin de couvrir ses frais (art. 269a let. c CO; critère de couverture des coûts). En vertu de ce critère, le loyer annuel admissible est de CHF 650 000.- (prix de revient) x 5.5 % (taux hypothécaire contractuel) = CHF 35 750.-. Or au regard du marché local, un tel loyer serait qualifié d abusif, raison pour laquelle le bailleur l a réduit à CHF 30 000.- par an, en insérant une clause de réserve de majoration de CHF 5 750.- l an, correspondant au montant manquant afin de lui procurer un rendement brut qui couvrirait ses frais au sens de l art. 269a let. c CO. En présence d une législation qui n indique pas quand il convient d appliquer les loyers fondés sur les coûts ou des loyers du marché, la méthode absolue ou relative, il revient aux juges de concrétiser l application du droit. C est ainsi, qu ont été distinguées les trois situations suivantes: 1. La contestation du loyer initial (art. 270 CO): Application de la méthode absolue. Ainsi, il convient encore de résoudre le rapport entre les deux critères, rendement de la chose louée et les loyers du quartier. S il est démontré simultanément que le rendement de la chose louée excède la norme et que le loyer est supérieur au prix du quartier, le loyer initial est déclaré abusif et doit être réduit au montant admissible. Or, si le loyer dépasse seulement les prix usuels du quartier, le bailleur est encore en mesure d invoquer l insuffisance du rendement net des fonds propres. En effet, dans la hiérarchie des critères de fixation du loyer, le rendement de la chose louée constitue la règle alors que les loyers comparatifs ne représentent qu une présomption réfragable. A noter qu en l état de la jurisprudence, le locataire dispose encore de la possibilité, face à un loyer correspondant aux loyers du quartier, de requérir l examen d un rendement excessif de la chose louée, ce uniquement en présence d indices d abus.

4 2. La majoration du loyer (art. 269d CO): En principe le bailleur doit se fonder sur la méthode relative pour fonder une majoration unilatérale du loyer. Cela étant, il est admis que le bailleur puisse se prévaloir de critères absolus de hausse dans les cas suivants: si les circonstances se sont modifiées depuis la dernière fixation du loyer (soit le rendement est devenu insuffisant, soit les loyers du quartier ont augmenté), s il en a fait une réserve de hausse expresse dans le contrat de bail, s il s agit de fixer un loyer suite à la sortie de l immeuble du contrôle administratif des loyers si l immeuble est vendu en cours de bail ou encore dans le cas où le bailleur a épuisé toutes les facultés y relatives. L application de cette dernière exception dépend cependant de la durée du bail. En ce sens la méthode absolue sert à soupeser et corriger les résultats obtenus sur la base de la méthode relative 5. A noter cependant que si le bailleur justifie la hausse par un rendement insuffisant de l immeuble (relativisé ou pas), le locataire ne dispose pas de moyen de contestation au vu de la hiérarchie de ce critère imposée par l art 269 CO. Face à des arguments relatifs du bailleur, le locataire peut opposer d autres facteurs relatifs. Il peut en ce sens aussi lui opposer un rendement abusif de la chose louée en démontrant des indices d abus (269, 269a let c) 6. 3. La demande de baisse de loyer (270a): Pour juger d une demande de baisse de loyer le locataire se fondera sur des motifs relatifs (baisse du taux hypothécaire, baisse des frais, diminution des prestations du bailleur); les preuves y relatives lui incombant. Le bailleur peut alors invoquer la compensation de la baisse du taux hypothécaire par l augmentation de l indice suisse des prix à la consommation (IPC) et/ou par l augmentation des charges de l immeuble (13 al. 1 in fine OBLF). En outre, même que controversé, le TF admet que le bailleur est libre de contrer les arguments relatifs par des facteurs absolus du rendement de la chose louée. En l occurrence la méthode absolue pose ici des limites à la méthode relative car si le principe de confiance, à l origine de la méthode relative, protège le locataire contre une modification défavorable, celle-ci n a pas pour but de lui garantir une évolution favorable du loyer 7. V. rendement du bailleur 8 Au sens de l art. 269 CO, un loyer est caractérisé comme abusif lorsqu il procure au bailleur un rendement net excessif, calculé sur les fonds investis dans la chose louée. Le rendement se calcule sur la chose louée, et non pas sur l immeuble en entier. Les fonds propres investis par le bailleur correspondent au coût de revient initial de la chose louée (prix d achat, prix de construction, y compris les frais annexes, tels que frais de démolition, notaire, droits de mutation, etc., déduction faite des fonds étrangers (emprunts). En outre, pour tenir compte du coût de la vie (cf art. 269a CO), les fonds propres sont, jusqu à 40 % de la valeur de la chose louée, réévalués de la totalité de l évolution de l indice suisse des prix à la consommation (IPC) depuis la date d achèvement des travaux de construction ou depuis l acquisition du bien en question. Les travaux de plus-value sont comptés dans les fonds-propres dans la mesure où ils sont autofinancés, de même que les amortissements des emprunts contractés par le bailleur. Une fois la valeur des fonds propres (réévalués) arrêtée, ils sont rentés à un taux n excédent pas 0.5 % le taux de l intérêt hypothécaire de premier rang pratiqué pour les anciennes hypothèques par la banque cantonale du lieu de situation de l immeuble, lorsqu elle tient une part significative du marché, soit par exemple un taux de rendement de 4.5 % pour un taux hypothécaire du marché de 4 %. Afin de chiffrer le loyer admissible, il convient d ajouter au montant nécessaire à renter équitablement les fonds propres: Les charges financières (intérêts hypothécaires) pour autant que leur taux ne soit pas surfait, Les charges courantes (frais d exploitation) non facturées au locataire sous la forme de frais accessoires, notamment les impôts fonciers, les primes d assurance liées à l immeuble, les honoraires de gérance, Les frais d entretien exécutés et payés (en l état actuel la jurisprudence n admet pas les provisions pour travaux périodiques, leur affectation ne pouvant pas suffisamment être vérifiée). Retenons encore que seul le montant effectif des frais d entretien et charges courantes est pris en compte pour le calcul du loyer admissible. Partant, il est fait une moyenne calculée sur 3 à 5 ans lorsqu ils sont fluctuants. En aucun cas, ceux-ci peuvent être facturés sous forme de forfaits. Au vu de ce qui précède la comparaison entre le loyer admissible (montant rentabilisant équitablement les fonds propres, plus charge financières, courantes et d entretien) et le loyer réel permet de déterminer si, et dans quelle mesure, une majoration ou réduction du loyer est justifiée. 5 Lachat David, Le bail à loyer, Lausanne 2008, p. 538 6 Lachat David, Commentaire Romand CO I, Intro art. 269-270e CO N 5. 8 Lachat David, Commentaire Romand CO I, art. 269 OR N 1-7. 7 SJ 1996 p.137 c.6

5 Le calcul du rendement s avère fastidieux lorsque la chose louée a été acquise il y a longtemps. Le montant économique retenu est alors souvent sans significative économique. Or, la jurisprudence exclut à ce jour le recours à la valeur vénale, fiscale, d assurance ou intrinsèque (valeur de construction actuelle déduit de la vétusté). Dans ce cas, il est alors recommandé d appliquer le critère des loyers comparatifs, soit directement, soit pour en déduire par capitalisation la valeur de la chose louée. VI. calcul des loyers usuels Ne sont en revanche pas pris en considération: Les loyers des appartements sis dans l immeuble en cause ou propriétaire du bailleur concerné Les loyers résultant d une position dominante que le bailleur ou un groupe de bailleurs occupe sur le marché Les loyers artificiellement réduits par des subventions étatiques Si les loyers comparatifs ne sont pas eux-mêmes suffisamment homogènes, on examinera s ils ne sont eux-mêmes pas abusifs Selon l art. 269a let a CO et 11 OBLF, n est en règle générale pas abusif le loyer qui se situe dans les limites des loyers usuels dans la localité ou le quartier. Comme nous l avons vu préalablement, ce critère est absolu et, en principe, non cumulable avec les autres éléments de fixation du loyer. b) Soit en se référant à des statistiques pour autant qu elles soient officielles et suffisamment détaillées pour prendre en compte les critères de l art. 11 OBLF al. 1 (cités ci-dessus) 9. La tendance des loyers du quartier ou de la localité peut être démontrée sous deux volets: a) Soit en produisant un nombre suffisant d exemples (au moins 5) comparables quant à l emplacement (situation analogue dans la même localité ou le même quartier dans des immeubles appartenant à des propriétaires différents), la dimension (nombre de pièces, surface, volume), l équipement (impression d ensemble avec des installations similaires et un confort analogue), l état d entretien et l année de construction (époque de construction ou de la rénovation intégrale) (art. 11 OBLF). 9 Lachat David, Commentaire Romand CO I, art. 269a CO N 1-3.

6 VIi. exception 10 - loyers absolument libres La protection contre les loyers abusifs, abordée ci-dessus, est limitée aux baux d habitation et de locaux commerciaux. Les art. 253a, 253b CO et 2 OBLF excluent de la protection sociale les établissements suivants: appartements et maisons de luxe; appartements de vacances loués pour trois mois ou moins; immeubles qui ne sont ni des maisons d habitation, ni des locaux commerciaux, ni des objets dont l usage est cédé avec une habitation ou un local commercial: terrains nus, places de parc indépendantes, etc. Sont visés les appartements et les maisons sociales d au moins 6 pièces (au minimum 9-12 m 2 ). La cuisine, les salles de bain, les corridors, les réduits, loggias, terrasses ne sont pas compris dans le calcul. En outre, les logements doivent être de luxe afin que la réglementation concernant le montant du loyer admissible ne s applique pas. Il s agit là d une notion qu il faut interpréter de manière restrictive. On évalue le bien-fonds objectivement, dans son ensemble. Un bien-fonds de luxe présuppose un excellent état d entretien, assumé par le bailleur, ainsi qu un confort et raffinement certains, hors du commun. La société se trouvant en constante évolution, la notion de luxe ne peut revêtir qu un caractère relatif. Avec l évolution du progrès, certaines installations, notamment le lavevaisselle, deviennent courantes et ne constituent plus un indice de luxe. Le bailleur d objets immobilier correspondant à la description cidessus, c est-à-dire dont le montant du loyer est librement définissable, dispose, en principe, de la liberté de résilier le contrat en vue d une majoration du loyer 11. Pour toute question ou information complémentaire, nos conseillers juridiques et/ou fiscaux de BDO SA se tiennent à votre disposition et se feront un plaisir de vous répondre. 10 Lachat David, Commentaire Romand CO I, art. 253b N 4-5 et Intro art. 269-270e CO N 9. 11 Lachat David, Le bail à loyer, Lausanne 2008, p. 370. Les principaux arguments en faveur de BDO peuvent être résumés comme suit: les décisions sont prises localement par une équipe motivée qui parle votre langue et s engage pleinement. nos spécialistes sont expérimentés et vous êtes toujours suivi par les mêmes collaborateurs. Nous vous le garantissons. Avez-vous des questions? Contactez votre interlocuteur chez BDO ou Detlef Sommer, BDO SA, Zurich, téléphone 044 444 36 26, detlef.sommer@bdo.ch BDO SA Aarau, Entfelderstrasse 1, Tél. 062 834 91 91, Fax 062 834 91 00 Châtelaine-Genève, Rte de Meyrin 123, Tél. 022 322 24 24, Fax 022 322 24 00 Berne, Hodlerstrasse 5, Tél. 031 327 17 17, Fax 031 327 17 08 Epalinges-Lausanne, Rte de la Corniche 2, Tél. 021 310 23 23, Fax 021 310 23 24 Lucerne, Landenbergstrasse 34, Tél. 041 368 12 12, Fax 041 368 13 13 Soleure, Biberiststrasse 16, Tél. 032 624 62 46, Fax 032 624 66 66 Zurich, Fabrikstrasse 50, Tél. 044 444 35 55, Fax 044 444 35 35 www.bdo.ch Cette publication a pour objectif de donner une vue d ensemble; elle contient des informations de nature générale et ne saurait remplacer une clarification individuelle. Toute responsabilité quant au contenu est exclue. Il convient de noter que des dispositions peuvent diverger du contenu de cette publication. En cas de lien avec une publication précédente (Link), il faut tenir compte de l évolution du droit depuis la parution. Droits d auteur Toute reproduction de cette publication (même partielle) nécessite l autorisation écrite de BDO et la mention de la source.