École Nationale des Ponts et Chaussées Année scolaire 2007-2008 Mécanique des sols et des roches Contrôle des connaissances 2 (Séance du 18 février 2008) CORRIGÉ Exercice 1. Résistance au cisaillement et stabilité d un mur de soutènement 1. Les valeurs maximales des efforts de traction des trois séries d essais sont rassemblées dans le tableau 1. Les déplacements des demi-boîtes sont de l ordre de 0,6 cm à la rupture. Il faut donc corriger la pression normale σ et la contrainte tangentielle τ d un facteur 0,9. La contrainte de cisaillement est calculée en divisant T par 90% de la surface de la boîte. Les points correspondant à la rupture sont reportés sur la figure 1. Tableau 1. Valeurs des contraintes normale σ et de cisaillement τ à la rupture Série Série 1 Série 2 Série 3 Essai 1 (σ, τ) (56, 62) (56, 68) (56, 68) Essai 2 (σ, τ) (111, 105) (111, 105) (111, 105) Essai 3 (σ, τ) (222, 176) (222, 176) (222, 179) 200 contrainte de cisaillement τ (kpa) 150 100 50 τ = 0,664 σ + 29,835 0 0 50 100 150 200 250 contrainte normale σ (kpa) Figure 1. Détermination de la droite de Mohr-Coulomb La cohésion et l angle de frottement interne valent : - c = 29,8 kpa - tan ϕ = 0,664 d où ϕ = 33,6 degrés Si l on part d une contrainte isotrope de σ 3 = 200 kpa, un chargement de compression drainée à l appareil triaxial conduit l éprouvette à un état de rupture où les contraintes valent : - σ 3 = 200 kpa, - σ 1 = σ 3 tan 2 (π/4+ϕ/2) + 2ctan(π/4+ϕ/2) = 200.3,48 + 59,6.1,865 = 807 kpa. 2. Les hypothèses du calcul du mur de soutènement sont rappelées sur la figure 2. 1
0,5 m Sable argileux γ = 18 kn/m 3 c = 10 kpa ϕ = 33,6 degrés 3,5 m 1m Béton γ = 24 kn/m 3 Butée nulle 0,5 m Figure 2. Géométrie du mur de soutènement Pour calculer la résistance du sol sous le mur, il faut connaître l inclinaison de la charge, c'est-à-dire de la somme de la poussée du sol derrière le mur et du poids du mur : - calcul de la poussée du sol derrière le mur σ h = K a σ v -2c K a En surface (haut du mur) : σ v = 0 et σ h = -20tan28,2 = -10,7 kpa. En bas du mur : σ v = 63 kpa et σ h = 63tan 2 28,2 10,7 = 7,4 kpa. La poussée est nulle à la profondeur : z = 3,5.10,7/18,1 = 2,07 m. On néglige les forces négatives dans la partie supérieure du mur. Il reste une distribution de pression triangulaire variant de 0 kpa à 1,53m de hauteur au dessus du bas du mur à 7,4 kpa en bas du mur. Cette distribution de pression est équivalente à une force horizontale appliquée à 0,51m au dessus du pied du mur et d intensité : 0,5.1,53.7,4 = 5,355 kn/m. - calcul du poids du mur On décompose le mur en trois parties (la troisième direction est supposée infinie): P 1 = 3,5.0,5.24 = 42 kn/m, appliquée à 0,25m de l angle arrière du mur, P 1 P2 = 0,5.0,5.3.24 = 18 kn/m, appliquée à 0,66m de l angle du mur, P 2 P 3 P3 = 0,5.0,5.24 = 6 kn/m, appliquée à 0,75m de l angle du mur. Le poids du mur est donc une force d intensité P = 66 kn, appliquée à une distance d = (42.0,25+18.0,66+6.0,75)/66 de l angle arrière du mur, soit d = 0,41 m. La somme du poids du mur et de la poussée du sol derrière le mur est une force inclinée et excentrée, telle que : L intensité de la résultante est égale à (66 2 +5,4 2 ) = 66,2 kn/m. H = 5,4 kn/m 0,51m 0,41m P = 66 kn/m L inclinaison α de cette résultante est égale à α = arctan (5,4/66) = 4,7 degrés. L excentrement (compté par rapport au centre de la surface d appui du mur) reste voisin de 9 cm, côté sol soutenu par le mur). Plus précisément il vaut : 9 51tan4,7 = 8,6 cm 2
2.2. Capacité portance du sol sous le mur On fait le calcul de la portance avec les hypothèses suivantes : - le sol est sous le toit de la nappe, donc on calcule une capacité portante en contraintes effectives, - on fait le calcul du côté défavorable, donc avec une pression latérale q correspondant à 0,5m de sol (soit q = 9 kn/m) ; - les paramètres de résistance du sol sont c = 10 kpa et ϕ = 33,6 degrés ; - le poids volumique déjaugé du sol est égal à 8 kn/m 3 ; - la charge est excentrée de 0,09 m et inclinée de 5 degrés. On calcule la portance sous une semelle filante de largeur réduite à B = B(1-2e) = 0,82m. La formule de calcul s écrit q max = 0,5 γ' B i γ N γ (ϕ ) + c i c N c (ϕ ) + q i q N q (ϕ ) avec γ = 8 kn/m 3 B = 0,82 m 5, 4 iγ = 1 = 66 + 0, 82. 10.cot 33, 6 ϕ = 33,6 degrés N ϕ' = 33, 6 = 2 28, 05 1 tan 33, 6 = 35, γ ( ) ( ) 94 3 3 ( 1 0, 069) = 0, 81 c = 10 kpa 1 0, 87 i c = 0, 87 tan 33, 6 = 0, 87 0, 002 = 0, 87 40, 71 N c ϕ ' = 33, 6 = 28, 05 1 cot 33, 6 = 27, 05. 1505, = 40, q = 9 kpa i ( ) ( ) 71 2 q =, 5, 4 = 1 66 + 0, 82. 10.cot 33, 6 2 ( 1 0, 069) = 0 87 2 π 33, 6 Nq ( ϕ ' = 33, 6) = exp( πtan 33, 6) tan + = 8, 06. 3, 48 = 28, 05 4 2 On obtient : q max = 0,5.8.0,82.0,81.35,94 + 10.0,87.40,71 + 9.0,87.28,05 q max = 95,5 + 354,2 + 223,2 = 673,9 kpa La composante verticale de la charge inclinée apportée au sol par le mur doit donc être inférieure à Q max = 673,9.0,82 = 552,6 kn/m. 2.3. La stabilité du mur doit être regardée de trois points de vue : - renversement ; - glissement sur la base, - poinçonnement du sol. La vérification au renversement doit être analysée par rapport à un mécanisme de renversement où le mur pivote par rapport au point O de la figure. Cette condition est manifestement remplie. Renversement 0,41m H = 5,4 kn/m 0,51m P = 66 kn/m O Pour le glissement sur la base, on doit comparer la force H = 5,4 kn/m à la résistance H max : H max = 10.1 + 66 tan33,6 = 54 kn/m. La stabilité est nettement assurée. 3
Enfin, la stabilité vis-à-vis du poinçonnement est également assurée, puisque la charge vaut 66 kn/m et la portance 553 kn/m. Le mur est donc stable. Si l on devait améliorer sa stabilité, on pourrait augmenter la surface de contact du bas du mur avec le sol ou l encastrer plus profondément. 2.4. Si le niveau de la nappe était au niveau du terrain naturel, un écoulement s établira sous le mur entre le massif de terrain en place et l excavation. Il faudra tenir compte de cet écoulement dans le calcul des forces de poussée sur le mur, qui seront fortement augmentées à cause de la pression de l eau à partir du sommet du mur. La position de la résultante de la poussée sera plus défavorable et la force appliquée au sol sous la semelle sera plus inclinée. Exercice 2. Équilibre d un rideau de palplanches a. Les valeurs des contraintes de poussée et de butée aux points indiqués sur la figure 3 sont calculées dans le tableau 2. A 4m Remblai γ=20 kn/m 3 c =0 ϕ =37degrés B 5m Sable naturel γ=18 kn/m 3 c =0 ϕ =34degrés C F 7m Argile γ=17kn/m 3 c =0 ϕ =28degrés c u = 100 kpa D E Argile γ=17kn/m 3 c =0 ϕ =28degrés c u = 100 kpa Figure 3. Schéma du rideau étudié et positions des points de calcul des contraintes Tableau 2. Contraintes de poussée et de butée le long du rideau de la figure 3 Point z (m) σ v (kpa) u (kpa) σ' v (kpa) K a /K p σ' h (kpa) σ h (kpa) CT :σ h (kpa) A 0 0 0 0 0,249 0 0 0 B r 4 80 0 80 0,249 19,9 19,9 19,9 B s 4 80 0 80 0,283 22,6 22,6 22,6 C s 9 170 0 170 0,283 48,1 48,1 48,1 C a 9 170 0 170 0,361 61,4 61,4-30 D 16 289 70 219 0,361 79,1 149,1 89 E 7 119 70 49 2,77 135,7 205,7 200 F 0 0 0 0 2,77 0 0 319 Ces pressions définissent le diagramme de poussée et de butée de la figure 4. Les forces identifiées sur cette figure sont calculées dans le tableau 3. 4
σ ha (kpa) 300 200 100 0 100 200 300 σ hp (kpa) -4m 19,9 22,6 F 2 F 1 Situation à long terme F 3-9m 48,1 61,4 0 0m F 4-16m F 5 149,1 F 6 205,7-7m z (m) Figure 4a. Pressions à long terme sur le rideau σ ha (kpa) 300 200 100 0 100 200 300 σ hp (kpa) F 1-4m 19,9 22,6 Situation à court terme F 2 F 3-9m 1,76m 48,1-30 200 0m F 6 F 7 F 5-16m 89 319-7m z (m) Figure 4b. Pressions à court terme sur le rideau Figure 4. Diagrammes de poussée et de butée sur le rideau Tableau 3. Intensité et point d application des forces de poussée et de butée sur le rideau Court terme Long terme Force Intensité (kn/m) Niveau application* Force Intensité (kn/m) Niveau application* F 1 4.19,9/2 = 39,8 12+4/3 = 13,33 m F 1 4.19,9/2 = 39,8 12+4/3 = 13,33 m F 2 5.22,6 = 113 7+5/2 = 9,5 m F 2 5.22,6 = 113 7+5/2 = 9,5 m F 3 5.25,5/2 = 63,75 7+5/3 = 8,66 m F 3 5.25,5/2=63,75 7+5/3 = 8,66 m F 4 7.61,4 = 429,8 7/2 = 3,5 m F 5 5,24.89/2=233,2 5,24/3 = 1,75 m F 5 7.87,7/2= 307 7/3 = 2,33 m F 6 7.200 = 1400 7/2 = 3,5 m F 6 7.205,7/2 = 720 7/3 = 2,33 m F 7 7.119/2 = 416,5 7/3 = 2,33 m * Altitude au-dessus du pied du rideau La stabilité implique que les forces de butée et leurs moments sont plus grands que les forces de poussée et leurs moments. Vérification des forces : - à court terme : 39,8+113+63,75+233,2 < 1400+416,5 Condition vérifiée 5
- à long terme : 39,8+113+63,75+429,8+307 < 720 Condition non vérifiée Vérification des moments : - à court terme : 39,8.13,33+113.9,5+63,75.8,66+233,2.1,75 < 1400.3,5+416,5.2,33? 530,5 + 1073,5 + 552,1 + 408,1 = 2564,2 < 4900 + 970,4 Vérifié - à long terme : 39,8.13,33+113.9,5+63,75.8,66+429,8.3,5+ 307.2,33 < 720.2,33? 530,5 + 1073,5 + 552,1 + 1504,3 + 309,3 = 3969,7 < 1678 Non vérifié Le rideau est instable à long terme. Exercice 3. Mécanique des roches Les informations concernant l orientation de la paroi de la fouille et les discontinuités du massif rocheux sont résumées sur la figure 5. On observe que la famille de discontinuités n 1 fournit des plans de glissement orientés vers la fouille, tandis que la famille n 2 est constituée de plans verticaux perpendiculaires au bord vertical de la fouille, qui peuvent libérer des blocs susceptibles de glisser vers l excavation. O A NO NNO N α = 34 deg α = 124 deg A E La paroi verticale de la fouille a pour direction 90N34 (la direction α = 34 degrés est perpendiculaire au plan NNO-SSE qui est celui de la coupe de l énoncé). La famille n 1 est donc orientée vers la fouille, avec une pente de 26 degrés. La tangente de 26 degrés vaut : tan26 = 0,49. Par conséquent, la coupe de ces discontinuités par le plan de la figure est constituée par des lignes parallèles à la ligne tracée sur la figure 6. SE La famille n 2 est verticale et parallèle au plan de la coupe. S SSE Figure 5. Orientations des plans de la paroi de la fouille et des discontinuités NNO Bâtiment SSE 20 m 15 m Rue 2 m Plans de discontinuité 26N34 30 m 15 m Excavation Figure 6. Position des discontinuités sur la coupe de la fouille et de l immeuble endommagé 6
Ces informations permettent de répondre aux questions posées. 1. L immeuble subit un déplacement différentiel des rangées d appuis 3 et 4 à partir de la rue, d où le système de fissuration représenté sur la figure. Ces mouvements peuvent provenir du glissement du bloc délimité par la discontinuité de la famille 1 qui passe en fond de fouille (comme représenté sur la figure). 2. Le mécanisme de rupture peut avoir la forme représentée sur la figure 6. Pour le frottement d un solide sur un plan, l angle de frottement assure la stabilité quand il est supérieur à la pente. La valeur maximale possible de l angle de frottement sur les discontinuités est donc de 26 degrés. 3. Pour vérifier cette valeur, il faut prélever des morceaux de roche de part et d autre d une discontinuité et faire des essais de cisaillement à la boîte. 4. Pour empêcher la poursuite des mouvements, il faut d abord bloquer le mouvement du bloc qui glisse, ce qui peut être fait par des ancrages sur la paroi de la fouille ou en bloquant le déplacement du bloc au niveau du fond de fouille. Si le mouvement est stoppé, on peut se contenter de réparer l immeuble. Par contre, en cas de poursuite du glissement, il faut envisager de faire évacuer l immeuble, voire le détruire s il n est plus réparable. Exercice 4. Stabilité au glissement d un barrage 1. Efforts appliqués au barrage : - la pression de l eau du réservoir sur l amont du barrage, - le poids du barrage, - la pression de l eau sous le barrage (entre B et C), - la réaction verticale du sol sous le barrage, - la force de frottement au contact du sol et du barrage (sur BC). 2. Calcul des forces appliquées au barrage rivière argile 6m B A F 10m E D C Distances horizontales AF = 2,05m AB = 1,80m FE = 2,55m ED = 3,60m Distances verticales AB = 6,00m EF = 4,60m CD = 1,40m Figure 6. Coupe du barrage dans le lit de la rivière 3.2. Calcul des forces listées en 3.1. - Pression de l eau sur le parement amont du barrage : β P w = 0,5.60.6/sinβ P wh = P w sinβ = 180 kn/m u = 60 kpa P wv P wh P w P wv = P w cosβ = 180/tanβ soit P wv =180.1,8/6 = 54 kn/m 7
- Poids du barrage 1 2 3 4 Surface 1 : 1,8.6/2 = 5,4 m 2 Surface 2 : 2,05.6 = 12,30 m 2 Surface 3 : 2,55.4,6/2 = 5,865 m 2 Surface 4 : 6,15.1,4 = 8,61 m 2 Surface totale : 32,175 m 2 Poids : W = 772,2 kn/m. - Pression de l eau sous le barrage La pression interstitielle diminue linéairement entre 60 kpa en B et 0 kpa en C. Elle a une résultante égale à U = 60.10/2 = 300 kpa. - Réaction verticale du sol Cette force N équilibre les forces verticales transmises au sol par le barrage N = 54+772,2 = 826,2 kn/m. Elle est égale à N = N + U. La force de contact effective vaut donc : N = 526,2 kn/m. - Force de frottement du barrage sur le sol La force T max est calculée en fonction de l angle de frottement interne du sol ϕ = 20 degrés : T max = 526,2 tan26 = 257 kn/m. 3.3. La résistance disponible par frottement est supérieure à la force horizontale appliquée par l eau sur le parement du barrage : P wh = 180 kn/m < T max = 257 kn/m. La stabilité du barrage vis-à-vis du glissement est donc assurée. 3.4. Pour améliorer la stabilité, on peut diminuer les pressions d eau sous la base du barrage en mettant en place dans le sol un écran vertical qui allonge le trajet de l eau et modifie la répartition des charges hydrauliques. On peut aussi, pour un barrage neuf, encastrer le massif de béton dans le sol. 8