CODE CANADIEN DU TRAVAIL PARTIE II SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL



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Décision : 92-005 CODE CANADIEN DU TRAVAIL PARTIE II SÉCURITÉ ET SANTÉ AU TRAVAIL Révision en vertu de l'article 146 de la Partie II du Code canadien du travail, d'une instruction donnée par un agent de sécurité Demandeur : Partie intéressée : Mis-en-cause : Devant : Air Canada Aéroport international Lester B. Pearson Toronto (Ontario) Représenté par : M e Guy Delisle, avocat Syndicat canadien de la fonction publique Division de la santé et de la sécurité Division du transport aérien Représenté par : M e Beverly J. Burns, avocate M. Chris Mattson Agent de sécurité Travail Canada M. Serge Cadieux Agent régional de sécurité Les audiences verbales dans le cas en l'espèce ont été tenues les 23 et 25 janvier 1992 à Toronto. Contexte La question de la rémunération des agents de bord qui sont membres de comités de sécurité et de santé est un sujet bien connu des parties présentes. Elle a fait l'objet de nombreux débats non résolus lors des négociations de leur convention collective de travail. En effet, ces négociations n'ont pas été menées dans un esprit de collaboration et je crois que l'atmosphère est toujours dominée par un sentiment d'antagonisme. Il n'est pas étonnant que les frustrations des employés et de leurs délégués aient atteint un point culminant et se soient soldées par des plaintes auprès de Travail Canada, probablement pour tenter de forcer un règlement de la question. En conséquence, ce problème a donné lieu à un affrontement, le 12 avril 1991, lorsque l'agent de sécurité Chris Mattson a réagi à une plainte déposée par le Syndicat des employés du secteur public (SCFP) au nom de plusieurs employés qui se sentaient lésés, entre autres sur le plan financier, parce qu'ils étaient membres de comités de sécurité et de santé.

- 2 - L'agent de sécurité a préparé, à l'appui de sa décision à ce sujet, un résumé qu'il a présenté à l'audience. Il y décrit deux sujets de préoccupation. Le premier est le suivant : «Air Canada tient parfois des réunions quand les agents de bord, arrivant tout juste d'un vol de dix (10) heures, sont trop fatigués pour y assister. Il arrive également que les réunions soient tenues pendant les jours de congé des agents de bord qui sont membres des comités.» La seconde préoccupation concerne la rémunération des employés qui exercent des fonctions à titre de membres du comité. Le résumé contient la déclaration suivante : «A certains endroits, Air Canada rémunère les agents de bord au tarif de service en vol pour assister aux réunions du comité de sécurité et de santé, tandis qu'ailleurs les agents de bord ne sont payés qu'au tarif de service au sol (le tarif de service au sol est à peu près la moitié du tarif de service en vol).» Le 17 octobre 1991, Air Canada s'est vu remettre une instruction écrite portant sur l'établissement du calendrier des réunions du comité de sécurité et de santé et sur la rémunération des agents de bord membres de ces comités. L'instruction a été émise en vertu de l'article 145 (1) du Code canadien du travail, Partie II, et établit quatre infractions qui seront traitées individuellement dans la présente décision. Témoignages Lors de l'audience, les témoins experts pour les deux parties ont expliqué le processus d'établissement des horaires des agents de bord. Je dois admettre que je ne ferais pas justice à ces experts en tentant de résumer ce processus compliqué et perfectionné. Cependant, comme l'instruction vise un grand nombre de gens, c'est-à-dire l'ensemble des agents de bord qui sont membres de comités de sécurité et de santé, plutôt que des individus mon analyse du présent cas sera surtout axée sur les principes en cause. Lorsque ces principes auront été établis, il devrait être «relativement» facile aux parties de s'entendre sur la façon de procéder dorénavant. Des agents de bord ont attesté avoir connu de sérieuses difficultés à assumer leur rôle de membre du comité de sécurité et de santé. À titre d'exemple, on a beaucoup insisté sur l'établissement du calendrier des réunions par l'employeur pendant les jours de congé, sur l'exercice de fonctions, à titre de membres du comité, comme les inspections périodiques des lieux de travail (les avions) autant pendant les jours de congé que pendant les jours de travail, sur la quantité de temps et de travail requise pour préparer les réunions, y assister et exercer les fonctions du comité définies par la loi en vertu du paragraphe 135 (6) du Code, par exemple recevoir, examiner et de trancher rapidement les plaintes. D'après les témoignages entendus, il paraît évident que les activités du comité ont été menées sans attributions ou procédure pouvant aider le comité à bien remplir son mandat. On m'a aussi informé de la politique de l'employeur relativement à la rémunération des membres de comités de sécurité et de santé. Tout porte à croire qu'air Canada rémunère unilatéralement tous les membres de comités au tarif du service au sol, et ce, au grand mécontentement des employés et de leurs représentants qui demandent le tarif du service en vol. Cette allégation a été niée par le représentant de l'employeur, M. Delisle, qui a déclaré : «...un employé qui est déplacé

- 3 - de son poste doit être payé pour la valeur la plus grande entre le bloc d'heures et le temps réel. Une personne en réserve, comme l'était M. Angle, obtient sa paie mensuelle garantie. Autrement, dans les deux cas, la règle de base s'applique et est tout à fait conforme à la convention collective.» Dans un cas en particulier, le directeur membre du comité d'un aéroport a recommandé que les membres du comité soient payés «sur l'honneur», ce qui signifie que les employés, c'est-à-dire les agents de bord, n'auraient qu'à soumettre une demande d'honoraire pour un certain nombre d'heures travaillées à titre de membre du comité de sécurité et de santé. Cette demande serait automatiquement traitée par le système et, sans aucune vérification, payée au tarif de service au sol. La situation s'est détérioré à un point tel que, dans un autre cas, un membre de comité s'attend à être payé au tarif maximal de service en vol sous prétexte qu'il aurait peut-être obtenu un cycle 1 ou des heures de vol s'il n'avait pas assisté à la réunion. De toute évidence, la situation actuelle à Air Canada est pour le moins très tendue et confuse. À mon avis, les parties intéressées dans cette révision ont mal compris leur rôle et leurs responsabilités en vertu du Code. Analyse À la lumière de ces renseignements et de l'instruction émise par l'agent de sécurité, nous devons, dans le cas présent, trancher sur trois questions fondamentales, soit : I. L'ÉTABLISSEMENT DU CALENDRIER DES RÉUNIONS II. LA RÉMUNÉRATION DES MEMBRES DU COMITÉ DE SÉCURITÉ ET DE SANTÉ A) pour assister aux réunions du comité de sécurité et de santé; B) pour l'exercice de leurs fonctions à titre de membre du comité. III. L'AUTORITÉ DES AGENTS DE SÉCURITÉ D'ORDONNER UNE RÉMUNÉRATION RÉTROACTIVE. Chaque question sera débattue séparément. Une décision sera émise pour chaque point de l'instruction un peu plus loin dans le document. 1 Un appairage ou un cycle est une période de travail actif au cours de laquelle un employé effectue deux vols ou plus. Les appairages sont d'une durée pouvant aller d'un à cinq jours.

- 4 - I. L'ÉTABLISSEMENT DU CALENDRIER DES RÉUNIONS La question de l'établissement du calendrier des réunions est de toute première importance dans le cas en l'espèce. En effet, c'est l'établissement du calendrier qui détermine le salaire que devraient recevoir les agents de bord qui sont membres du comité de sécurité et de santé, en se fondant sur leur affectation du moment et le salaire qu'ils reçoivent pour le travail qu'ils y accomplissent. En ce qui a trait aux réunions ou à l'établissement du calendrier des réunions des comités de sécurité et de santé, deux des dispositions du Code traitent de cette question. La première de ces dispositions, le paragraphe 135 (8) du Code, stipule, en partie : «(8) Le comité de sécurité et de santé tient au minimum une réunion par mois aux heures ouvrables normales...» la deuxième, le paragraphe 135 (13), stipule : «(13) Sous réserve des règlements d'application du paragraphe (11), le comité de sécurité et de santé peut établir ses propres règles quant à la durée du mandat de ses membres - au maximum de deux ans - à la date, au lieu et à la périodicité de ses réunions et tout autre règle de procédure qu'il estime utile à son fonctionnement.» (Souligné par l'auteur) En vertu du paragraphe 135 (8) du Code, il incombe au comité de se réunir une fois par mois pendant les heures ouvrables normales. Afin d'en faciliter la tenue, le Code établit des paramètres généraux pour ces réunions, c'est-à-dire une fois par mois et pendant les heures ouvrables normales. L'usage du mot «tient» crée une obligation à laquelle le comité doit se conformer. Toute intervention externe visant à contrecarrer cette obligation serait illégale et répréhensible. Je suis d'avis que cette disposition n'autorise pas l'employeur à convoquer les réunions et ne lui donne pas la responsabilité d'en établir le calendrier. La responsabilité d'établir le calendrier des réunions incombe au comité en tant qu'entité et non à l'employeur ou aux membres du comité individuellement. En utilisant le mot peut, le paragraphe 135 (13) du Code donne au comité la prérogative «d'établir ses propres règles quant à... la date, au lieu et à la périodicité de ses réunions». Par conséquent il appartient au comité de déterminer, avec le consentement de ses membres, le calendrier de ces réunions. Ainsi, il est évident que l'agent de sécurité était dans l'erreur lorsqu'il a ordonné à l'employeur d'établir le calendrier des réunions. Tout au plus, aurait-il pu ordonner à l'employeur de ne plus se mêler de la responsabilité du comité de se réunir, conformément à la loi, en admettant qu'il ait pu établir l'existence de cette pratique. II. LA RÉMUNÉRATION DES MEMBRES DU COMITÉ DE SÉCURITÉ ET DE SANTÉ A) Pour leur présence aux réunions du comité de santé et de sécurité Le principe sous-jacent pour résoudre ce cas se trouve dans la décision émise par la Cour d'appel fédérale dans le cas Doug. C. Lund et la Couronne représenté par le Conseil du Trésor (A-50-89).

- 5 - Dans ce cas particulier, la cour a interprété une disposition d'une convention collective dans laquelle la formulation est presque la même que celle du paragraphe 135 (9) du Code. Le juge en chef, Frank Iacobucci, a expliqué son jugement par les raisons suivantes : «Bien que n'étant pas entièrement d'accord avec le raisonnement de l'arbitre des griefs relativement à la présente question, nous appuyons sa conclusion selon laquelle le paragraphe 24 de la Norme concernant les comités et les représentants NCT 3-20, qui constitue une partie de la convention collective 402/85, a pour but d'établir une disposition de protection du revenu pour les employés qui sont membres de comités de sécurité et de santé. Les deux parties du paragraphe doivent être considérées conjointement afin que la phrase «Tout le temps que les membres emploient à remplir ces fonctions...» de la deuxième partie soit définie par la première partie qui traite de l'autorisation accordée de s'absenter de leur travail. (Souligné par l'auteur) Le paragraphe 24 est rédigé comme suit : «Les membres d'un comité de la sécurité et de la santé peuvent s'absenter de leur travail durant le temps nécessaire pour assister aux réunions ou pour remplir les autres fonctions qui leur incombent en qualité de membres du comité, y compris un temps raisonnable pour préparer une réunion. Tout le temps que les membres emploient à remplir ces fonctions est réputé, aux fins de calcul du salaire qui leur est dû, avoir été employé à exécuter leur travail.» Dans cet extrait, les mots-clés, soit «protection du revenu», signifient d'après moi qu'un membre d'un comité de sécurité et de santé ne devrait pas être lésé financièrement pour avoir pris part aux activités du comité de sécurité et de santé. Par conséquent, un membre de comité ne devrait pas avoir à subir de perte de salaire parce qu'il a été retiré d'un cycle, par exemple, pour assister à une réunion. Lorsque le cycle prend fin, le membre en question devrait recevoir au moins l'équivalent du montant qu'il aurait reçu s'il n'avait pas assisté à la réunion. Étant donné qu'un cycle peut durer d'un à cinq jours, dans certains cas, le membre du comité devrait recevoir un montant équivalent ou supérieur à ce qu'il aurait normalement reçu à la fin du cycle. Je précise que l'employé peut recevoir un montant supérieur parce que, selon moi, le Code ne contient aucune disposition qui empêche l'employeur d'affecter l'employé à un autre cycle, ou à un autre poste, s'il s'avère impossible de le replacer à ses fonctions dans son cycle régulier. Ainsi, protection du revenu ne signifie pas que le salaire de l'employé ne peut pas augmenter. Évidemment, la convention collective peut constituer, quant à elle, un obstacle majeur à la réaffectation. Si une réunion a lieu pendant qu'un agent de bord exerce des fonctions de service au sol, ce dernier devrait alors être rémunéré selon les tarifs de service au sol. Je crois toutefois comprendre que le service au sol ne constitue pas une part importante des activités normales des agents de bord. C'est plutôt l'exception que la règle et j'estime donc que l'établissement du calendrier des réunions devrait refléter cet état de fait. En ce qui a trait à l'établissement du calendrier des réunions, dont nous avons traité précédemment, le paragraphe 135 (8) du Code stipule que le «comité de sécurité et de santé tient des réunions pendant les heures ouvrables normales...». L'expression «heures ouvrables normales» s'avère toutefois difficile à définir dans les industries de cette nature où les heures de travail ne sont pas conventionnelles. Il serait néanmoins contraire à l'esprit du Code de pénaliser

- 6 - financièrement les employés qui travaillent dans ces industries. Aussi, j'interprète la présente expression comme désignant les heures où la société mène ses activités. Or, dans le cas qui nous occupe, l'activité d'air Canada, et des agents de bord, consiste à faire voler des avions. Il est donc logique que les réunions soient tenues pendant les heures du calendrier de travail mensuel des agents de bord, ces dernières constituant selon moi des heures ouvrables pour les agents de bord. Par contre, les directeurs qui doivent assister aux réunions ne sont disponibles qu'aux heures plus restreintes de la période «9 à 5», même si Air Canada continue ses activités bien au-delà de ces heures. Étant donné que les directeurs sont aussi membres du comité de sécurité et de santé, leur demander d'assister aux réunions pendant leurs heures libres, et peut-être à leurs frais, irait à l'encontre des intentions du paragraphe 135 (9) du Code. A mon avis, pour répondre aux exigences de la loi, les réunions devraient être tenues pendant la période «9 à 5», période où les deux parties sont normalement disponibles. Ainsi, les réunions du comité peuvent avoir lieu pendant cette période à n'importe quel moment où les agents de bord sont considérés en fonction ou quand ils sont payés pour être disponibles. Lorsqu'une réunion est tenue pendant cette période, l'employé doit être rémunéré au tarif qu'il aurait normalement obtenu pour cette même période, non un salaire spéculatif basé sur la possibilité que le membre aurait pu gagner davantage s'il avait été appelé à voler. De toute évidence, aucune restriction n'est imposée au comité quant à l'établissement d'un calendrier différent, surtout dans les circonstances où il semble impossible de concilier les horaires de travail des différents membres du comité. Il est donc clair que les parties intéressées doivent s'entendre sur un mécanisme d'établissement des dates et des heures de réunions. Le fait que le Code, comme nous l'avons mentionné ci-dessus, formule des exigences quant à la fréquence des réunions mais n'en émet aucune pour l'établissement du calendrier constitue une très bonne raison pour mettre sur pied un tel mécanisme. Il semble évident que les membres du comité n'arriveront pas à s'entendre sur ce mécanisme s'ils n'établissent pas auparavant des règles de procédure pour les opérations du comité conformément aux dispositions du paragraphe 135 (13) du Code. En réalité, cette disposition fait plus que de limiter les procédure à «la date, au lieu et à la périodicité des réunions du comité». Elle suggère au comité d'élaborer «toute autre règle de procédure qu'il estime utile à son fonctionnement». J'encourage fortement les parties à profiter de cette disposition et j'invite l'agent de sécurité à les aider dans cette entreprise. B) Pour l'exercice de leurs fonctions à titre de membre du comité La société Air Canada doit rémunérer les membres du comité pour leur participation aux réunions du comité de sécurité et de santé. En vertu du paragraphe 135 (9), elle doit aussi donner le même salaire à ces membres pour «exercer leurs fonctions au comité» notamment les fonctions stipulées au paragraphe 135 (6) du Code. Dans le cas présent, l'agent de sécurité a ordonné à Air Canada de rémunérer les membres du comité au tarif du service en vol pour l'exercice de ces «fonctions de comité». L'employeur soutient que payer les employés membres du comité de

- 7 - sécurité et de santé au tarif du service en vol équivaudrait à leur donner «une prime inattendue» pour assister aux réunions. J'accorde à l'employeur que c'est exactement ce qui arrivera à moins qu'il n'y ait de changement d'attitude de la part des deux parties. Premièrement, le Code vise le comité et non les membres individuellement. Donc, à chaque fois qu'un membre du comité effectue une tâche, il doit le faire à titre de représentant du comité. Cela signifie qu'il doit être officiellement autorisé par le comité à entreprendre cette activité. Dans ce cas, des règles de procédure pour les opérations du comité seraient essentielles. D'autant plus que rien dans le Code ne restreint le rôle du comité aux seuls membres du comité représentant les employés. Au contraire, à titre de partenaires égaux qui, en vertu du Code, partagent la même responsabilité de cerner et de résoudre les problèmes en milieu de travail, les membres représentant l'employeur devraient se montrer tout aussi actifs et déterminés en ce qui concerne les activités du comité que le sont les représentants des employés. Si, par exemple, un employé d'air Canada dépose une plainte concernant une question de sécurité et de santé devant le comité, ce dernier pourrait déléguer un membre employeur pour enquêter sur la plainte et présenter un rapport au comité sur les mesures adoptées ou recommandées. Je suis surpris et quelque peu consterné de constater jusqu'à quel point les représentants des employeurs sont passifs au sein du comité. Deuxièmement, le «laissez faire» de l'employeur à l'égard des activités du comité est pour le moins stupéfiant. Par exemple, rien dans le Code n'autorise les membres du comité à effectuer périodiquement des inspections des lieux de travail. Le fait que les représentants des employés au sein du comité entreprennent ces inspections est certainement louable. Cependant, cette activité ne relevant pas de la compétence du comité, le Code ne prévoit aucun mécanisme par lequel les membres du comité pourraient réclamer une rémunération pour la mise en oeuvre de ces inspections comme étant une fonction du comité. Il en est de même pour le temps consacré à la préparation de participations aux réunions du comité de sécurité et de santé. Le Code ne prévoit pas cette activité. Une entente officielle avec Air Canada serait donc nécessaire pour obtenir une rémunération pour ces activités. Toutefois, étant donné le «système sur l'honneur» actuellement en vigueur, on pourrait soutenir que les membres du comité de sécurité et de santé représentant l'employeur ont jusqu'à présent autorisé les représentants des employés à entreprendre ces activités au nom d'air Canada. Toutefois, cette question ne relève pas de ma compétence pour le moment. Troisièmement, l'employeur a convoqué, à plusieurs reprises, des réunions pendant les jours de congé des agents de bord ou à la fin de leur service en vol. Cette pratique va clairement à l'encontre des intentions du Code qui stipule au paragraphe 135 (8) «qu'un comité de sécurité et de santé tient ses réunions pendant les heures ouvrables normales...». Ainsi, le comité a l'obligation de tenir ses réunions pendant les heures de travail et toute intervention visant à contrecarrer cette exigence est, comme nous l'avons déclaré auparavant, illégale et répréhensible. Malheureusement, les réunions tenues pendant les jours de congé, comme d'ailleurs toutes les activités du comité entreprises pendant les jours de congé, ne sont pas prévues dans le Code. Cela signifie aussi que le Code ne constitue pas un véhicule approprié pour assurer une rémunération dans des cas semblables.

- 8 - III. L'AUTORITÉ DES AGENTS DE SÉCURITÉ D'ORDONNER UNE RÉMUNÉRATION RÉTROACTIVE. Cette question sera traitée plus loin, dans l'énoncé de la décision. DÉCISION À la lumière des renseignements que nous venons d'énumérer, il est évident que toutes les parties intéressées à cette révision ont fait erreur à bien des égards dans leur interprétation du Code relativement aux attributions du comité de sécurité et de santé. Les pragmatiques considéreront ceci comme un processus d'apprentissage et assumeront de nouveau leurs responsabilités en vertu du Code. Afin de rectifier la situation, les points suivants de l'instruction sont rectifiés en prenant en considération le principe directeur mentionné ci-dessus. 1. Le premier point de l'instruction stipule : «Air Canada paiera chaque agent de bord qui est membre d'un comité de sécurité et de santé à son tarif de service en vol pour le temps qu'il a consacré aux réunions du comité de sécurité et de santé ou à exercer n'importe quelle autre fonction d'un membre du comité. (Paragraphe 135 (9), Partie II, Code canadien du travail.)» Ce point de l'instruction doit être modifié pour refléter le principe mentionné ci-dessus, soit la protection du revenu. Il devrait indiquer que les agents de bord, lorsqu'ils assistent aux réunions du comité de sécurité et de santé ou qu'ils exercent les autres fonctions autorisées à titre de membre du comité, devraient être payés au même salaire que ce qu'ils auraient gagné s'ils n'avaient pas eu à exercer ces fonctions. Je modifie donc le premier article de l'instruction en remplaçant ce paragraphe par le suivant : «Air Canada doit rémunérer chaque agent de bord qui est membre du comité de sécurité et de santé au tarif que le membre en question aurait normalement obtenu dans l'exercice de ses fonctions courantes pour le temps consacré aux réunions du comité ou à l'exercice de toute autre fonction à titre de membre du comité. (Paragraphe 135 (9), Code canadien du travail, Partie II)» 2. Le second article de l'instruction stipule : «Air Canada doit établir un calendrier et tenir des réunions du comité de sécurité et de santé pendant les heures prévues de travail de chaque agent de bord membre du comité, à l'exception des réunions qui sont convoquées pour une situation d'urgence ou autre circonstances particulières. (Paragraphe 135 (8), Code canadien du travail, Partie II)» Cet article doit être annulé de l'instruction étant donné que l'établissement du calendrier des réunions du comité de sécurité et de santé n'est pas la responsabilité de l'employeur, en l'occurrence Air Canada. C'est au comité qu'il incombe d'établir le calendrier des réunions. Le paragraphe 135 (8) du Code exige que le comité se réunisse une fois par mois pendant les heures

- 9 - ouvrables normales. Toute intervention externe visant à contrecarrer cette exigence serait inacceptable et pourrait être rectifiée, si nécessaire, par l'agent de sécurité. Le Code facilite la tâche du comité en lui donnant la prérogative, en se conformant au paragraphe 135 (13) du Code, «d'établir ses propres règles de procédures quant à...la date, le lieu et la périodicité de ses réunions...». Il est donc clair qu'on ne peut pas ordonner à l'employeur de se substituer au comité. Il appartient au comité, à la majorité de ses membres, d'établir le calendrier des réunions pendant les heures de travail prévues. Donc, pour les raisons citées ci-dessus, j'annule le second article de l'instruction. 3. Le troisième article de l'instruction stipule : «Air Canada doit rémunérer tout agent de bord membre du comité de sécurité et de santé qu'on a retiré d'un cycle pour lui permettre d'assister à une réunion du comité de sécurité et de santé ou pour exercer une autre fonction à titre de membre du comité au même tarif que ce qu'il aurait gagné s'il avait exercé ses fonctions régulières pendant ce cycle. (Paragraphe 135 (9), Partie II, Code canadien du travail )» Si l'on considère tout ce que j'ai expliqué précédemment, cet article de l'instruction ne nécessite aucune modification. Cette partie de l'instruction fait en sorte que le salaire d'un membre du comité à la fin de son cycle soit égal ou supérieur à ce qu'il aurait normalement gagné. Évidemment, en vertu du Code, la réaffectation de l'employé est possible à moins qu'il en résulte une perte financière. En outre, il se peut que la convention collective doive être prise en considération dans le cas en l'espèce. Pour les raisons citées ci-dessus, je confirme le troisième article de l'instruction. 4. Le quatrième et dernier article de l'instruction stipule : «Air Canada doit rémunérer chaque agent de bord qui est actuellement membre ou a été membre du comité de sécurité et de santé au cours des trois dernières années à son tarif de service en vol pour le temps consacré aux réunions du comité de sécurité et de santé pendant cette période. (Section 135 (9), Partie II, Code canadien du travail)» Tel quel, cette article de l'instruction donnerait des pouvoirs illimités à l'agent de sécurité pour exiger à n'importe quel moment que toute infraction soit rectifiée de façon rétroactive. Elle donnerait des pouvoirs rétroactifs à l'agent de sécurité, ce qui est inacceptable. Il faudrait que la loi soit formulée de façon beaucoup plus explicite pour justifier cet article. Il faudrait une formulation comme celle de l'article 134 du Code pour me convaincre que l'agent de sécurité détient effectivement les pouvoirs dont il est question dans cette article de l'instruction. Je ne m'étendrai pas plus longtemps sur cet article de l'instruction, car même si on pouvait débattre l'existence de ces pouvoirs, il faudrait tout de même fournir des détails précis sur des cas individuels où des membre de comités ont été financièrement lésés pour avoir assisté à des réunions du comité de sécurité et de santé ou pour avoir exercé des fonction à titre de membre du comité. Ces renseignements ne sont pas disponibles dans le cas en l'espèce.

- 10 - Pour toutes les raisons citées ci-dessus, j'annule le quatrième article de l'instruction. Décision prise à Ottawa, en ce 2 e jour d'avril 1992. Serge Cadieux Agent régional de sécurité