Un sprint sur la route du changement ou le sprint «Dolorès»



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Transcription:

Un sprint sur la route du changement ou le sprint «Dolorès» Florence Lacroix 1 Infirmière en pédiatrie, ressource douleur du pôle mère enfant, clinique Sainte-Marthe, Dijon Présentation de l établissement Clinique Sainte Marthe, groupe Générale de santé, établissement pluridisciplinaire comprenant : un pôle médico chirurgical ; un pôle mère enfant avec : une maternité niveau IIB (2 000 naissances/an), un service néonatologie (12 lits), un service pédiatrie, médicale et chirurgicale (22 lits accueillant des enfants de 0 à 18 ans) dans lequel je travaille en qualité d IDE. L équipe médicale de ce pôle est composée de 2 chirurgiens pédiatriques, de pédiatres, de gynécologues obstétriciens, d anesthésistes, sans oublier l équipe paramédicale (auxiliaire puéricultrice, infirmière, infirmière puéricultrice, sage femme, éducatrice, psychologue, etc.). Genèse En novembre 2010, la clinique a bénéficié de la visite de la Haute autorité de santé (HAS) ; elle est certifiée depuis, sans recommandation. Cependant, lors de son passage, l HAS met en exergue le déploiement de la prise en charge de la douleur en chirurgie pédiatrique, avec nécessité de révision des protocoles antalgiques et de mise en place d outils de traçabilité de la prise en charge de la douleur dans le dossier de soins du patient (évaluation de la douleur quasi inexistante : score QUALHAS : 5 %). Ayant travaillé auparavant en hématologie cancérologie pédiatrique où la prise en charge de la douleur était omniprésente, ce constat de l HAS m interroge dans ma pratique infirmière. Une réflexion professionnelle commence. Après recherches d informations et discussions avec l un des chirurgiens pédiatriques et l établissement, je débute une formation professionnelle (2011 2012) : un diplôme interuniversitaire (DIU) «Douleur de l enfant en pratique quotidienne» 2. 1 Je tiens à remercier toutes les équipes de soins et la direction de l établissement, la clinique Sainte Marthe (www.generale de sante.fr/clinique sainte marthe dijon), les Dr Gounot et François, chirurgiens pédiatriques (www.chirurgiepediatrique21.fr), les pédiatres (www.pediatres stemarthe dijon.fr). 2 DIU Paris VI et Paris XI. www.pediadol.org 27

Octobre 2011 C est la rentrée en fac! Enthousiaste! J apprends beaucoup, mais entre la théorie et le constat sur le terrain, il y a des modifications à apporter. Certes, la prise en charge de la douleur pré, per, postopératoire est assurée, les antalgiques sont prescrits et donnés, mais il reste une méconnaissance : des textes de lois concernant la prise en charge de la douleur chez l enfant ; des moyens pour répondre à la douleur provoquée par les soins saccharose, EMLA, MEOPA, que ce soit sur le plan théorique (indications, contre indications) ou pratique (utilisation, mode d emploi) ; de l évaluation de la douleur et des différentes grilles d évaluation. À mon retour de la 1 re session de formation, que dire à l équipe? «Nous ne pouvons que nous améliorer mais il y a du boulot, tout est à faire évoluer»! Mes collègues (IDE et AP) ainsi que les chirurgiens pédiatriques me soutiennent, me font confiance et sont dans l attente de solutions en réponse aux problématiques exposées. Fin d année 2011 Je conduis la bataille de la prise en charge de la douleur dans mon service de soins. Ayant «changé de lunettes» pendant les cours du DIU, je me dois d utiliser les outils enseignés auprès de mes alliés les patients, en utilisant saccharose, EMLA et MEOPA selon les recommandations. La cadre du service me laisse carte blanche, les chirurgiens et les pédiatres ne s opposent pas à ces nouvelles pratiques, l équipe paramédicale est «bluffée» par les soins sans douleur et le confort apporté aux enfants La magie opère! L équipe est dans le désir de faire mieux, sans douleur. Les chirurgiens pédiatriques adhèrent à mon projet et me soutiennent. Janvier février 2012 Un DIU à décrocher Des actions menées pour le valider Organisation d une réunion «Prise en charge de la douleur» le 2 février 2012, avec la participation de l équipe médico chirurgicale et paramédicale des services pédiatrie et néonatologie, du laboratoire d analyses médicales, du service ambulatoire et du service d explorations fonctionnelles. Au programme : présentation des textes de lois régissant la prise en charge de la douleur de l enfant, présentation des 3 «outils» : saccharose, EMLA, MEOPA, évaluation de la douleur : EVA ou EVENDOL pour tous les patients de chirurgie pédiatrique. Mise en place, avec le service qualité et la validation du Comité de lutte contre la douleur (CLUD), des protocoles concernant l utilisation du saccharose (création), de l EMLA (mise à jour) et du MEOPA (création). Travail avec les équipes, sur le terrain : formation des personnels : utilisation très rapide et correcte du saccharose, de l EMLA et du MEOPA, 28 www.pediadol.org

fourniture à chaque infirmière du service de pédiatrie de grilles EVENDOL de poche ; des grilles EVENDOL «papier» sont à disposition pour les inclure aux dossiers de soins des enfants hospitalisés pour une chirurgie. Avril mai 2012 Suite à la mise en place de l évaluation de la douleur en chirurgie pédiatrique, notre pratique met en évidence un nouveau besoin : l utilisation de la morphine pour certains opérés ou lors de certaines prises en charge en urgence : la morphine per os prend sa place dans la pharmacie du service ; les PCA morphine, utilisées jusqu alors en chirurgie adulte, arrivent en chirurgie pédiatrique après une formation théorique et pratique (assurée en collaboration avec les anesthésistes de l établissement). Les premiers à bénéficier de cette technique de prise en charge de la douleur sont des patients suivis et bien connus de l équipe, opérés à plusieurs reprises. Il y a donc un échange et partage très positif autour de ce nouveau vécu pour eux, ce qui permet à l équipe de réhabiliter cet antalgique «palier 3» en dépassant les clichés concernant la morphine (peur, réticences) tout en étant vigilant sur les effets indésirables et la surveillance (les protocoles sont à officialiser). Juin 2012 Dans le cadre de mon travail de DIU, je présente les résultats de mes actions menées depuis le début 2012. Pour mes deux thèmes principaux, les résultats sont les suivants : lutte contre la douleur provoquée par les soins : 80 dossiers (35/pédiatrie, 45/chirurgie pédiatrique) analysés ; 72,5 % des soins sont réalisés avec prise en charge de la douleur (saccharose, EMLA ou MEOPA) ; évaluation de la douleur (EVA et/ou EVENDOL) (fig. 1) : 45 dossiers de chirurgie pédiatrique analysés ; 91 % d évaluation dont 77 % avec EVENDOL ; score QUALHAS 2012 : 77 %. 100 % À l'entrée dans le service 80 % 60 % 40 % 65 % 82 % 51 % Au bloc opératoire Dans les 6 h suivant le retour de bloc À la sortie 0 % Fig. 1. Évaluation de la douleur en juin 2012. La prise en charge de la douleur liée aux soins et l évaluation de la douleur, mes deux objectifs majeurs, sont atteints! L équipe a su relever ce défi de façon remarquable et honorable, en très peu de temps (6 mois) : un véritable sprint pour le changement de la prise en charge de la douleur en pédiatrie! www.pediadol.org 29

Pourquoi un tel succès en si peu de temps? nous sommes une petite équipe (en termes d effectif) mais avec une grande cohésion, une grande motivation, toujours prête à répondre aux différentes demandes (médicales, des patients ) ; les savoirs théoriques ont été actualisés ; les «outils» (saccharose, EMLA, MEOPA, DVD EVENDOL), présents dans l établissement mais sous utilisés, ont été mis en application ; ma présence et ma pratique professionnelle au quotidien à leurs côtés ont permis à chacune des infirmières de faire ses propres expériences, avec la collaboration des auxiliaires puéricultrices qui ont vite mis l accent sur le confort pour tous : moins de stress, pas de rapport de force, moins de contentions, plus de rires et de partages de vécus non traumatisants, plus de belles histoires de soins! Bien sûr, satisfaction générale devant ce changement rapide de pratiques professionnelles! Mon DIU Douleur de l enfant en pratique quotidienne obtenu : poursuivre le travail débuté en chirurgie pédiatrique s impose. La douleur est l objectif principal du projet de service de pédiatrie, en lien avec le référentiel Qualiscope Générale de santé. Alors, comment inscrire toutes ces actions pour l avenir dans le cadre d une démarche qualité au sein de l établissement? Et comment me situer? Automne 2012 Je m intéresse au fonctionnement du CLUD de l établissement afin de mieux connaître cette instance (membres, actions, projets). Je rencontre la directrice des soins infirmiers pour parler du projet d IDE ressource douleur sur le pôle mère enfant, projet de devenir professionnel qui prend de plus en plus place dans ma tête et dans mon cœur! Mars 2013 Lors de la visite des experts pour Qualiscope (référentiel qualité Générale de santé), le travail commencé depuis janvier 2012 est mis en avant, valorisé et reconnu. Mon projet d IDE ressource douleur/pôle mère enfant est sur le point de voir le jour! Mai 2013 Début d une nouvelle aventure : je suis nommée IDE ressource douleur sur le pôle mère enfant à mi temps ; je poursuis mon travail d IDE en service pédiatrie l autre moitié du temps. Si pendant ma formation, j ai pu rencontrer et échanger avec des référentes douleur d autres établissements, j ai maintenant à concrétiser ce poste : tout est à actualiser, à créer, à innover Je poursuis le travail débuté en chirurgie pédiatrique en travaillant avec les chirurgiens sur l élaboration des protocoles antalgiques et sur l intégration de la grille EVENDOL à une fiche «Prise en charge de la douleur en chirurgie pédiatrique», en lien avec nos besoins. Suite à une demande du président du CLUD, un questionnaire portant entre autres sur la connaissance de la douleur est distribué aux soignants de l établissement. Il en ressort : une méconnaissance de la douleur, des antalgiques, et une évaluation de la douleur très variable selon 30 www.pediadol.org

les services. J anime donc plusieurs sessions de formation obligatoire pour tout le personnel soignant du pôle mère enfant (SF, IPDE, IDE, AP, psychologue) ; les pédiatres, les chirurgiens pédiatriques, le personnel du laboratoire d analyses médicales et de radiologie y sont conviés. Au programme : réactualisation des connaissances pour une base théorique commune («même langage!»), législation, les différents types de douleur, les «3 outils» (saccharose, EMLA, MEOPA), un bref rappel sur les antalgiques et les notions de base de l évaluation de la douleur (ces deux thèmes seront approfondis fin 2013). Nous procédons au réajustement de l utilisation du saccharose selon les recommandations en vigueur (protocole validé par le CLUD) en néonatologie et en maternité. Je pars à la découverte des pratiques professionnelles à travers un audit «Évaluation et prise en charge de la douleur sur le pôle mère enfant», audit «état des lieux de février à juin 2013», au moment de ma prise de poste officielle en qualité d IDE ressource douleur, afin d infirmer ou de confirmer ce que j ai vu ou pressenti de façon empirique : travail d observation sur le terrain : cela me permet de prendre contact avec les différentes équipes (maternité, néonatologie, ambulatoire), de me replonger dans la spécificité de chaque service (mon expérience en réanimation néonatale et en maternité remonte à quelques années). travail d évaluation de dossiers de soins : 20 dossiers audités, pour les services ambulatoire, pédiatrie médecine, néonatologie, maternité (à deux stades : bloc obstétrical et suites de couches) ; 30 dossiers pour le service pédiatrie chirurgie. Juin juillet 2013 Finalisation et résultats de l audit «Évaluation et prise en charge de la douleur au pôle mère enfant». En Maternité, même si le personnel (SF, AP) est sensible à la douleur chez le nouveau né, il reste néanmoins à réactualiser la prise en charge des soins douloureux en pratique quotidienne et sa traçabilité. L évaluation de la douleur chez le nouveau né est méconnue. Formation de base théorique (mai et juin 2013). Mise en pratique du protocole saccharose lors des soins douloureux aux bébés en maternité. Évaluation de la douleur, à mettre en place à l automne 2013. En néonatologie, il existe un écart très important entre la pratique sur le terrain et la traçabilité dans les dossiers de soins. Le saccharose, qui est donné dans 80 % des soins douloureux (associé aux techniques de réconfort) n est tracé que dans 10 % des dossiers analysés. L évaluation de la douleur, elle, n est pas méconnue mais «Comment faire? Quelle grille choisir?» Nécessité de «concrétiser les pratiques quotidiennes avec une méthodologie dans le dossier de soins». En pédiatrie : Sur 20 dossiers de pédiatrie médicale analysés, 50 % de soins réalisés avec prise en charge de la douleur. Sur 30 dossiers de chirurgie pédiatrique analysés, 90 % de soins réalisés avec www.pediadol.org 31

prise en charge de la douleur. Au total donc, 70 % des soins douloureux sont réalisés avec une prise en charge de la douleur adaptée. Les soins réalisés sans prise en charge de la douleur correspondent : aux aérosols, aux lavements Normacol, aux examens radiologiques, aux séances de kinésithérapie respiratoire, etc. Les résultats de l évaluation de la douleur en chirurgie pédiatrique (fig. 2) sont quasi identiques à ceux obtenus lors de sa mise en place, 1 an auparavant : 93 % d évaluation (EVA ou EVENDOL) ; score Qualhas 2013 : 80 %. L heure est à la réflexion en équipe pour les soins douloureux réalisés sans prise en charge de la douleur 100 % À l'entrée dans le service 80 % 96 % Au bloc opératoire 60 % 40 % 83 % 56 % Postopératoire immédiat Pendant le séjour À la sortie 0 % Fig. 2. Évaluation de la douleur en juin 2013. Mise en place de l évaluation de la douleur pour tous les enfants du service, à compter du 1 er octobre 2013 (EVA, EVENDOL, EDIN). En service ambulatoire et au bloc opératoire : l évaluation de la douleur est en place (à 100 % et 96 % respectivement selon l audit). Une réflexion sur l accompagnement des enfants qui passent au bloc opératoire sera cependant à mener. Automne 2013 Présentation au CLUD et validation des protocoles chirurgicaux pédiatriques (mise à jour ou création) suivants : utilisation de la morphine per os ; utilisation de la PCA morphine ; antalgiques en postopératoire ; prise en charge de la douleur abdominale ; prise en charge de la douleur due à un traumatisme d un membre. Formation théorique sur les antalgiques dispensée aux sages femmes, IDPE et IDE du pôle mère enfant. Évaluation des connaissances théoriques du personnel soignant suite aux formations dispensées en 2012 et 2013, à l aide d un jeu de carte «Les outils de la douleur» que j ai créé à cette intention. Évaluation de la douleur : travail sur le terrain avec chaque service, pour la mise en place de la grille ou des grilles d évaluation, selon les besoins. Collaboration avec les pédiatres pour les protocoles antalgiques/l évaluation de la douleur, etc. 32 www.pediadol.org

Conclusion Tout en continuant mon activité de soins en tant qu infirmière en pédiatrie, j ai été rebaptisée «Dolorès» pour mon activité IDE ressource douleur au sein de la clinique. Ces deux dernières années, c est avec une très grande motivation et collaboration des différentes équipes de soins que nous avons engagé un véritable sprint pour le changement radical de nos pratiques quotidiennes dans le but, non seulement de se mettre en conformité avec la loi et les recommandations de l HAS, de remplir le cahier des charges du référentiel Qualiscope/Générale de santé, mais avant tout cela de dispenser des soins de qualité et d apporter toute notre attention bienveillante aux petits patients que l on accueille. Ce sprint terminé avec succès, nous passons en «vitesse de croisière» avec différentes étapes : consolidation des acquis et réactualisation régulière des connaissances ; auto évaluation des pratiques professionnelles : audits de connaissances, évaluations des pratiques professionnelles (EPP) ; réflexion autour des soins douloureux encore mal couverts (pose de sondes nasogastriques, examens radiologiques, etc.). Cependant, un nouveau souffle voit le jour au sein des différentes équipes concernant l accompagnement pendant les soins douloureux. Le petit patient en est toujours le centre, mais cette étape sera l occasion de mobiliser des ressources (certaines soignantes sont déjà formées à l hypnose et aux massages) ou de susciter des projets créateurs (distraction, jeu, nidcap, etc.) afin d enrichir encore plus les pratiques professionnelles et le partage lors de cette prise en charge. Le secret de la «success story Dolores» est : «Osez, osez, le possible est toujours un tout petit pas après l impossible». www.pediadol.org 33