Quand la RHD. se met à table. ENQUÊTE Restauration hors domicile



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Transcription:

OLIVIERBERTRANDDISTRIBUTION Quand la RHD se met à table La restauration hors domicile (RHD) est un monde en pleine transformation. Du moins pour le secteur des grandes chaînes de restauration qui montent en puissance au niveau national. Du coup, les grossistes distributeurs sont contraints d assouplir leur modèle. Et les prestataires logistiques s invitent à table. 44

RESTAURANT KFC Le terrain de jeu de la Supply Chain dans la restauration hors domicile (RHD) a de quoi donner le vertige : il s agit finalement ni plus ni moins que de livrer au bon moment et dans les bonnes quantités tous les ingrédients qui vont servir à préparer plus de sept milliards de repas par an, dans quelque 250.000 établissements en France. A cela s ajoutent quelques «petites» contraintes : les produits concernés peuvent être frais, ultra-frais (yaourts, desserts lactés, formages frais), surgelés ou secs et les livraisons doivent impérativement être réalisées le matin, entre 6 et 11 heures, afin de ne pas perturber l organisation des restaurants pour le service de midi. Et comme si cela ne suffisait pas, la logistique de la RHD, après celle de la GMS, s oriente vers des flux de plus en plus tendus, car les restaurants disposent de moins en moins de place pour stocker les marchandises (surtout pour le frais et les surgelés). Des acteurs de la Supply Chain et de la logistique de la RHD d horizons divers (chaîne de restauration, grossistes, industriels, prestataires logistiques) ont accepté de nous livrer, dans le cadre de ce dossier, certaines problématiques sur lesquelles ils travaillent actuellement (voir encadrés). Le moins que l on puisse dire est qu elles sont très diverses : massification, tri-température, mutualisation sans parler d autres thèmes comme les livraisons nocturnes ou la logistique urbaine. Un secteur très varié Cela s explique sans doute par le fait que le marché de la RHD est lui aussi très varié. A y regarder de plus près, on peut en effet distinguer différents types d acteurs, dont les besoins en termes de logistique et de produits peuvent s avérer assez différents. En France, la restauration collective (restauration d entreprise, restauration scolaire et étudiante, secteurs de la santé, des services sociaux, de l'enseignement et des services collectifs d'état) représente une part très importante (53 %) des repas pris hors domicile pour 28 % du CA total de la RHD, estimé à 67,07 Md en 2010 selon les études réalisés par les cabinets d experts tels que Gira Food Service, panel Crest de NPD Group ou encore CHD Expert. On y trouve de grands groupes comme Sodexo, Compass ou Elior, mais aussi beaucoup de petites structures indépendantes. Le reste du marché, c est le monde de la restauration qualifiée de commerciale (72 % du CA de la RHD), qui est très protéiforme : on y trouve la restauration à table (plus de 100.000 établissements), la restauration rapide, qui prend de plus en plus de place dans le paysage (certaines études l estiment à un tiers du CA de la RHD), la restauration dans les moyens de transport, le Snacking et les distributeurs automatiques, voire même les linéaires de plus en plus importants que la GMS consacre à la restauration rapide. Et l effet de poupée russe ne s arrête pas là, car la restauration à table regroupe des réalités fort disparates, entre la restauration indépendante et le boom de la restauration dite «chaînée», c'est-àdire les chaînes de restauration. La restauration structurée tentée par les produits prestés Dans un monde d une telle variété en termes d acteurs, de produits et de clients, ce sont historiquement les grossistes qui se sont taillé la part du lion (voir interview d Alain Schnapper page 50). Et qui la conservent, notamment sur la restauration indépendante, très dispersée, où les restau- JANVIER-FÉVRIER 2012 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE N 61 45

LR SERVICES METRO POMONA Casting des acteurs de la logistique RHD Les grossistes livreurs Ce sont les plus nombreux et les plus anciens sur le secteur. Leurs chefs de file généralistes s appellent Pomona, Transgourmet, Pro A Pro Distribution ou Brake, mais on trouve également des spécialistes par produits : boissons, produits laitiers, charcuterie, produits de la mer, fruits et légumes, pains et pâtisseries fraîches, produits carnés non prédécoupés, etc. Leur rôle : proposer à leur catalogue une large gamme de produits qu ils achètent aux industriels et revendent à leur clientèle, livraison comprise (les grands clients ont le droit à leurs propres référentiels, appelés mercuriales). Les plus gros ont leurs propres chauffeurs livreurs et un réseau de plates-formes logistiques. La marge s effectue essentiellement sur la vente des produits via des équipes de commerciaux sur le terrain ou dans des centres d appels. C est le modèle des produits de négoce. Pour certains produits pour lesquels de grands comptes veulent négocier eux-mêmes directement les conditions de vente avec les industriels, les grossistes peuvent également proposer de l achat presté, c'est-à-dire sans marge commerciale, avec un surcoût lié à la logistique. Les «Cash and Carry» En français, ce sont les entrepôts de libre service de gros. Les deux leaders s appellent Metro et Promocash. C est un peu l équivalent de la grande distribution pour le marché des professionnels de la RHD. La grande différence avec les grossistes classiques est qu ils n assurent pas la livraison. Le client doit se déplacer et transporter lui-même ses achats. L avantage : pas de commerciaux à payer, ni de logistique aval : les prix sont donc théoriquement moins élevés qu avec un grossiste livreur classique. Cela ne signifie pas qu ils se désintéressent de l aspect logistique. Metro par exemple a déjà ouvert une quinzaine de Metro Drive en France (55 à terme) pour desservir les clients les plus excentrés par rapport à ses entrepôts actuels. Une commande passée l après-midi est préparée dans les entrepôts (surcoût facturé 4 % du prix) par une équipe dédiée puis livrée le soir dans le Metro Drive, afin que la commande soit disponible le lendemain matin. Les prestataires logistiques Jusqu il y a quelques années, ils ne jouaient qu un rôle mineur dans le monde de la RHD. Mais la montée en puissance de la restauration commerciale chaînée au niveau national pourrait changer la donne. Leur raison d être : rationnaliser la Supply Chain pour tous les approvisionnements d une chaîne de restauration (y compris les produits non alimentaires). Leur modèle : la transparence complète du coût du produit puisque c est le client qui négocie directement avec les industriels. Le seul surcoût est logistique. Le prestataire peut déclencher les appros auprès des industriels, les payer pour le compte de son client, prendre les commandes de la part des restaurants ou proposer un service de réapprovisionnement automatique sur la base de prévisions fines. Les contrats s orientent de plus en plus vers des partenariats basés sur l optimisation continue, avec la mise en place d indicateurs spécifiques, afin de garantir aux chaînes de restauration le maintien de la qualité du service client parallèlement à la montée en puissance du nombre de leurs restaurants dans l Hexagone. rateurs soit ont recours à des grossistes livreurs qui ont leur propre logistique, soit se déplacent euxmêmes sur les M.I.N ou dans les entrepôts des Cash & Carry pour faire leurs emplettes (voir encadré ci-contre). En revanche, sur la partie restauration structurée (68 % du CA de la RHD), les choses semblent sur le point d évoluer fortement. En effet, les chaînes de restauration rapide (dont le CA total en France a augmenté de 58 % entre 2004 et 2010) et à thème montent en puissance. Les plus grandes d entre elles veulent pouvoir négocier en direct des achats globalisés avec les industriels, sur une base nationale (voir encadré KFC page 54). Du coup, les grossistes distributeurs se retrouvent sur ce secteur en concurrence avec des prestataires logistiques comme KL Services (groupe Keystone), Stef (KFC, Pizza Hut, Subway), Ebrex (Quick), DHL (Flunch) ou encore Staci (voir encadré page 53). C est sans doute ce qui explique actuellement l intérêt marqué de grands grossistes pour l optimisation de leur logistique (voir encadré Brake page 54), obligés certaines fois de vendre aussi des produits prestés pour répondre aux attentes des grandes chaînes de restauration. On observe également des mouvements de concentrations (tels que la fusion entre Aldis et Prodirest courant 2008 qui a abouti à la création de Transgourmet) ou à des alliances. Un rapprochement dans les boissons Le dernier rapprochement en date, Alliance CHD, conclu en décembre dernier, concerne le secteur des boissons pour la consommation hors domicile. D un côté Supergroup, grossiste en produits de Snacking, confiseries et boissons format VAE (vente à emporter, c est-à-dire canettes et bouteilles plastiques), filiale du groupe ADF (Altadis Distribution France) et de l autre, Olivier Bertrand Distribution (OBD), distributeur de boissons en verre consigné pour la CHR (Café Hôtellerie Restauration). L un des objectifs de l alliance : proposer un interlocuteur unique au niveau national pour tous les formats de boissons (formats consignés, jetables), ainsi que 46

ALLIANCE CHD Les protagonistes d Alliance CHD : (de gauche à droite) David Schuller de Santos, DG de Supergroup, Alexandre de Suzzoni, Président d ADF Groupe, Olivier Bertrand, Président du Groupe Olivier Bertrand et Michel Razou, DG d OBD (Olivier Bertrand Distribution) pour certains produits alimentaires (confiserie, Snacking) et consommables divers (emballages, etc.). «OBD n a pas un réseau national au niveau logistique et dans certaines régions de France, Supergroup passera une commande de réappro à OBD, stockera et livrera les clients d OBD», explique David Schuller de Santos, DG de Supergroup. De son côté, Michel Razou, DG d Olivier Bertrand Distribution, ne cache pas que cette initiative n est pas étrangère à la montée en puissance de la restauration chaînée. «Toutes ces chaînes sont structurées, elles veulent avoir un interlocuteur unique au niveau national, rationaliser les contrats et ont besoin de sta- JANVIER-FÉVRIER 2012 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE N 61 47

STEF Laurent Lacotte, Directeur Commercial du pôle logistique de Stef David Schuller De Santos, Directeur Général de Supergroup tistiques données par le distributeur pour juger des volumes réalisés par leurs différents sites répartis sur tout le territoire. Nous nous sommes rap pro chés de Supergroup car nous n avions pas une vraie couverture nationale, pour pouvoir répondre avec une seule tête», reconnaîtil. Alliance CHD démarre sous de bons auspices puis qu elle vient de signer un contrat d approvisionnement avec Convergence Achats (centrale d achats du groupe Flo) portant sur l approvisionnement en boissons des quelque 300 restaurants du groupe (Hippopotamus, Tablapizza, La Taverne de maître Kanter, Bistro Romain) ainsi que du site de Disneyland Paris. De la logistique à la Supply Chain Parallèlement, les prestataires font évoluer leurs offres de la logistique pure vers la Supply Chain : approvisionnements, prises de commandes, gestion des niveaux de stocks pilotée par les prévisions, la comptabilité matière sur les entrées/sorties. «Les prévisions, c est notre cœur de métier avec les appros. C est un modèle qui a été extrêmement développé pour Mc Donald s dans notre société sœur du groupe Keystone, LR Services. Nous sommes en cours de mise en place d un outil avancé de prévisions de vente chez nous», explique Christophe Boulanger, Directeur Général de KL Services. L autre argument de poids, c est la rationalisation de la distribution pour diminuer les coûts. «Dès lors que les choses ne sont pas planifiées, les enseignes qui s adressent à plusieurs grossistes peuvent recevoir 15 à 18 commandes par semaine, là où nous leur proposons, avec des camions tri-températures, deux livraisons hebdomadaires, avec une seule facture et une ponctualité de 98% sur rendez-vous», ajoute-t-il. «Nous pouvons non seulement gérer l ensemble des produits alimentaires dans les trois températures, mais également de plus en plus le non alimentaire (supports à la vente, produits d entretien) pour les chaînes de restauration, explique Laurent Lacotte, Directeur Commercial du pôle logistique de Stef, qui dispose en France de deux entrepôts dédiés à la RHD, à Bondoufle et Salon de Provence. En fait, la chaîne de restauration nous délègue la quasi intégralité de ce qui va se passer en amont de la livraison en restaurant, hormis la sélection des fournisseurs», constate-t-il. JEAN-LUC ROGNON SUPERGROUP Michel Razou Directeur Général d Olivier Bertrand Distribution STACI ALLIANCE CHD La plate-forme tri-températures de Moissy Cramayel de la société DPDJ, rachetée par le groupe Staci en 2009 pour lancer la marque Staci Food Solutions. 48

Alain Schnapper, Directeur Technique et Logistique, Membre du directoire de Pomona «Plus la carte est riche et variée et plus le grossiste trouve son utilité» Supply Chain Magazine : Que répondez-vous à ceux qui prédisent le déclin des grossistes sur le marché de la RHD? Alain Schnapper : Dès qu il y a des grossistes sur une chaîne de valeur, tout le monde semble vouloir les faire disparaître. Mais posons-nous la question de leur utilité économique. D une manière générale, ils se trouvent à l intersection de trois mondes (clients, produits et industriels) et se justifient surtout lorsqu il y a une multitude de produits, de clients et d industriels. Dans le cas de la RHD, ils donnent accès aux industriels à une clientèle diffuse de quelque 250.000 sites à livrer au moins deux fois par semaine en petites quantités. Ils ont une fonction de mutualisation à la fois des flux physiques et des conditions d achats. Et le grossiste joue également un rôle de distributeur. SCMag : Les grossistes sont-ils en train de perdre du terrain face aux prestataires logistiques sur le marché de la RHD? A.S. : Côté clients, il faut distinguer deux grandes catégories : la restauration sociale et commerciale. Au sein de la première, il y a deux types de marchés : les grandes sociétés de restauration, qui ont une taille suffisante pour négocier en direct avec les industriels [nldr : Sodexo, Compass, Elior par exemple]. De fait, pour les 20 % de références qui représentent 80 % de leur CA, elles n utilisent pas la fonction «centrale d achats» du grossiste. Dans ce cas, il est vrai que le grossiste joue un rôle de prestataire logistique, mais avec l avantage de pouvoir également proposer en parallèle à la vente des POMONA POMONA compléments de gammes «mutualisés» pour les petits volumes (les 80 % de références qui font 20 % du CA). Ce que ne savent pas faire les prestataires logistiques. C est pour cette raison qu ils sont quasi absents de ce marché. Le reste du marché de la restauration sociale est une clientèle plus diffuse, autogérée ou indépendante, qui fait largement appel aux fonctions de grossiste, à savoir la mutualisation achats et logistique. SCMag : Et dans le cas de la restauration commerciale, le développement rapide des chaînes de restauration ne joue-t-il pas plutôt en faveur des prestataires logistiques? A.S. : Là aussi, il faut distinguer deux catégories. D une part les très nombreuses brasseries et les restaurants indépendants, où là encore le rôle des grossistes est incontournable, et d autre part la restauration «chaînée», qui est indéniablement en développement rapide. Sur ce marché, il y a des réalités très diverses qui utilisent des solutions logistiques différentes. A un bout, on va trouver des géants comme McDonald s, qui ont de très gros volumes, avec une gamme relativement étroite et totalement «normée», gérée directement avec les industriels. Cela justifie une logistique dédiée, spécifique pour laquelle un grossiste n apporte pas de valeur ajoutée. Mais il y a aussi des cas inverses, des chaînes qui comptent une demi-douzaine de brasseries dans Paris par exemple, où chaque chef conserve une certaine autonomie et qui font appel à des grossistes pour bénéficier de la largeur de gamme et des prix. Il y a donc des nuances. Je vous répondrai donc que plus la chaîne de restauration est «normée» et les produits définis (souvent ce sont des chaînes de franchisés) et plus le marché est ouvert aux prestataires. Inversement, plus la carte est riche et variée et plus le grossiste trouve son utilité. En pratique, les clients ont besoin d une solution mixte avec la possibilité de combiner produits prestés et négoce, ce qui est impossible pour un prestataire. Dans ce cas, le grossiste gère 50

dans ses entrepôts des produits qui lui appartiennent et d autres non. SCMag : Quels sont les principales contraintes logistiques pour un grossiste livreur en RHD? A.S. : La contrainte fondamentale la plus compliquée à maîtriser est la combinaison entre les horaires de livraison et les créneaux horaires. De loin, cela ressemble à la livraison en ville des supérettes : de petites quantités, livrées le matin. Mais avec une différence fondamentale : si le client n est pas satisfait de votre livraison, il peut se faire livrer par votre concurrent dès le lendemain matin. Les créneaux horaires sont très étroits : 7h30-11h30 dans le meilleur des cas, mais en restauration commerciale, c est plutôt 9h-11h. Ce n est pas compliqué quand il s agit de gros volumes livrés à un ou deux restaurants en camion complet. Mais dans notre cas, les camions livrent en moyenne 15 clients par tournée. C est très impactant sur la structure de coûts. Le vrai levier de rentabilité est d augmenter la densité client pour bénéficier d économies d échelles. SCMag : Avez-vous envisagé de mettre en place des tournées de livraisons l après-midi? A.S. : Je pense que c est une fausse bonne idée car dans un coût de tournée, le plus cher n est pas le camion mais le salaire du chauffeur et les kilomètres parcourus. Ajouter une tournée l après-midi fait gagner sur les coûts fixes du camion qui ne représentent pas plus de 20 % du coût d une tournée. Autrement dit, en faisant deux tournées par jour, on gagne au maximum 10 %. Mais attention, il faut pour cela que la tournée soit aussi bien remplie, ou au moins à 90 % par rapport à celle du matin, et les clients qui acceptent d être livrés l après-midi sont très difficiles à convaincre. Et s ils sont trop éparpillés géographiquement, on reperdra en kilomètres ce que l on aura cru gagner en coûts fixes. SCMag : Vous proposez un large éventail de produits secs, frais et surgelés et pourtant Pomona n est apparemment pas adepte des livraisons tri-températures, pourquoi? A.S. : Là encore, intuitivement, le tritempératures peut paraître très séduisant, mais selon moi, ce n est pas si simple. Je vais tenter de vous le démontrer. Toutes choses égales par ailleurs, sur un jour donné, supposons que vous ayez un certain volume à expédier : du sec, du frais, des surgelés. Faire du tri-températures ne change pas le nombre total de palettes à livrer, ni les mètres carrés de plancher. Ni le nombre total de camions à utiliser. Il serait même un peu plus élevé en tri- températures. Pourquoi? Certes ce n est pas intuitif, surtout du point de vue du restaurateur, qui verrait arriver un seul camion au lieu de JANVIER-FÉVRIER 2012 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE N 61 51

deux ou trois. Sauf que les fréquences à laquelle le restaurateur passe ses commandes sont assez différentes entre l épicerie (riz et pâtes, deux fois par mois), les surgelés (deux fois par semaine) et le frais/fruits et légumes (deux à quatre fois par semaine). Le fait d être spécialisé par température permet de livrer à la bonne fréquence alors qu en tri-températures, on profite de la livraison deux fois par semaine de produits frais pour livrer un peu de produits secs. Cela a pour conséquence d augmenter le nombre de palettes à livrer au total, et donc le nombre de camions qui livrent. D autant qu un camion qui livre des produits secs est nettement moins cher et produit moins de CO 2. SCMag : C est la raison pour laquelle Pomona continue à livrer les produits frais et surgelés ensemble et les produits sec à part? A.S. : Tout à fait. Cela dit, il y a certains cas où le tri-températures peut se justifier. Quand il s agit de très petites quantités de livraison, il y a intérêt à augmenter la quantité moyenne livrée par client, ce qu on retrouve dans le commerce de proximité ou de la restauration commerciale indépendante. Par exemple, dans une boulangerie pâtisserie qu on livrerait à 90 % de sec, il y a intérêt à ne pas revenir spécialement pour livrer les 10 % de surgelés. Autrement dit, la livraison tri-températures est intéressante si le poids moyen livré (PML) est faible ou bien si la densité client est particulièrement faible et nécessite de parcourir beaucoup de kilomètres pour livrer un client. JEAN-LUC ROGNON Panapro s intéresse de près à la mutualisation Panapro est né en 2008 de la réinternalisation de la logistique amont et aval du groupe Holder. C est notamment un outil logistique sur lequel s appuie le réseau des quelque 500 boulangeries Paul (en France et à l international) et des clients de la restauration hors foyer. Trois ans plus tard, cette société compte deux entrepôts dans le Nord, s est dotée d un WMS et d un ERP. «Nos clients ont besoin de produits frais, surgelés, ultra-frais et secs. Il faut proposer des solutions tri-températures qui combinent tous ces produits et permettent l optimisation des moyens de transport vers nos platesformes régionales d éclatement, nous Plate-forme logistique tri températures de Marcq-en-Baroeul Pascal Dezoteux, Directeur de Panapro explique Pascal Dezoteux, Directeur de Panapro. La RHF, c est aujourd hui ce qu il y a de plus compliqué à gérer C.POLGE PANAPRO pour nous, il y a des contraintes de livraisons très fortes. C est généralement de la messagerie, avec de petits porteurs, sur des plages horaires de 6h à 11h qui se réduisent au fil des ans. On se retrouve souvent à faire de la livraison sur rendez-vous en mettant des moyens dédiés supplémentaires sur la route». Difficile par ailleurs d améliorer le taux de remplissage compte tenu de la contrainte sur les horaires de livraison. «Nous avons quasiment épuisé toutes les solutions d optimisation en interne, c est pourquoi nous recherchons des solutions de mutualisation pour compléter nos camions avec d autres fournisseurs industriels qui ont la même problématique ou d autres réseaux de distribution». Cette démarche d ouverture vers l extérieur dépasse d ailleurs le seul maillon du transport. «Nous essayons d aller plus loin. Le transport représente 50% de coûts de nos charges logistiques. Ce que l on recherche, c est aussi de la mutualisation en entrepôt», précise Pascal Dezoteux. La construction d un nouveau bâtiment tri-températures qui démarre cette année sur Lesquin, pour soulager la plate-forme de Marcq-en- Baroeul, devrait donner à Panapro les moyens de ses ambitions. JLR 52

Staci Food Solutions : la RHD dans le détail STACI FOOD SOLUTIONS Caroline Nicolosi, Directrice Commerciale de Staci Food Solutions Le groupe Staci, leader français de la logistique publi-promotionnelle, est en voie de diversification depuis quelques années, toujours dans la logistique de détail, mais cette fois dans le secteur alimentaire et non alimentaire, avec une spécialisation sur la RHD. En 2008, il rachète 51 % des parts de DPDJ International, prestataire logistique créé en 1985, spécialisé dans la RHF, qui avait emménagé deux ans auparavant dans une plateforme tri-températures toute neuve de 21.000 m 2 à Moissy-Cramayel. En juin 2009, Staci prend 100 % du capital de DPDJ et lance la marque Staci Food Solutions. A partir de là, une réflexion stratégique commence à se mettre en place, parallèlement à la réorganisation des process et à l utilisation de nouveaux outils informatiques. L ambition est de s adresser essentiellement aux industriels pour gérer leur logistique dans le canal RHF, mais aussi aux chaînes de la RHF - qui négocient directement avec les industriels les produits en «achat prestés» (y compris les produits siglés comme les savons, serviettes, tasses, set de table), qui seront distribués dans les hôtels, la restauration commerciale ou collective, le Snacking, mais aussi les regroupements de maisons de retraite ou les cliniques privées. «Notre modèle économique pour les chaînes est basé sur la massification des commandes et sur le regroupement des produits et des flux», explique Caroline Nicolosi, Directrice Commerciale de Staci Food Solutions. Avec une palette très large de services : externalisation de la fonction approvisionnements, financement des stocks, réception sur plate-forme, prises de commandes, catalogues en ligne, préparation de commandes de détail, pilotage du transport, facturation unique et paiements. Mais pas de Sourcing, donc très peu de produits de négoce : «pour la très grande majorité, il s agit de produits prestés, c'està-dire qu il y a une transparence totale sur les coûts et les statistiques de consommation, car les produits que nous achetons pour le compte du client, au prix qu il a négocié avec l industriel, sont revendus sans marge. C est le coût logistique qui est facturé», précise Caroline Nicolosi. Actuellement, Staci Food Solutions compte une trentaine de clients et a réalisé en 2010 un CA de 52 M. JLR JANVIER-FÉVRIER 2012 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE N 61 53

Comment Brake France gère les produits à faible rotation BLAKE FRANCE Antoine Fabry, Directeur Supply Chain de Brake France Brake France se définit lui-même non pas comme un grossiste distributeur, mais comme un concepteur distributeur. La nuance? «Nous n achetons pas pour revendre. Il y a beaucoup de produits à notre marque, que l on conçoit et que l on fait fabriquer pour apporter une réponse adaptée à chacun des besoins de nos 43.000 clients, qu ils soient dans la restauration commerciale, la restauration collective ou traiteurs charcutiers», insiste Antoine Fabry, Directeur Supply Chain de Brake France. Il arrive d ailleurs que la société, présente aussi en Angleterre, en Irlande et en Suède, gère pour un même client des produits en négoce (métier de grossiste traditionnel) et des produits «prestés» (prestation logistique de distribution uniquement). La principale problématique Supply Chain du moment est d arriver à gérer logistiquement parlant des gammes qui ont toujours tendance à augmenter, avec des délais de livraison très courts, en A pour B pour la plupart. Le dernier chantier en date concerne l optimisation de la logistique amont des produits à faible rotation (notamment quelques centaines de références, surtout en surgelé, sur les quelque 3.400 produits du catalogue). «Pour ce type de produits, nous voulions éviter de gérer des minimas d appros sur nos six hubs régionaux. Pour garantir la bonne disponibilité des produits, nous avons mis en place en amont un concentrateur au niveau national dans lequel nous rassemblons tous nos produits Slow Moving ou en phase de lancement». Brake France, qui emploie 1.900 collaborateurs dont 450 commerciaux et 1.000 logisticiens, a réalisé en 2010 un total de un million et demi de livraisons, pour un CA de 540 M. JLR BLAKE FRANCE Chez KFC, la Supply Chain doit aider à la croissance KFC Olivier Grouet, Directeur «Product Excellence» chez KFC France (achats, Supply Chain, qualité, innovation et développement des nouveaux produits En France, la chaîne KFC (Kentucky Fried Chicken) compte actuellement 135 restaurants, ce qui représente un volume annuel de marchandises de 55.000 t en 2011, dont 15.000 t de poulet. «Nous nous trouvons à un moment clé de l histoire de KFC en France car nous prévoyons de doubler le nombre de restaurants dans les quatre ans à venir», nous confie Olivier Grouet, ancien cadre du groupe Carrefour arrivé il y a moins d un an chez KFC en tant que de Directeur «Product Excellence», c'est-à-dire en charge des achats, de la Supply Chain, de la qualité, de l innovation et du développement des nouveaux produits. L une de ses premières décisions a d ailleurs été de créer un poste de Responsable Supply Chain. «La mission de la Supply Chain est notamment de nous permettre de faire face à cette croissance très forte», indique-t-il. Depuis presque une dizaine d années, KFC travaille avec SLR (Stef Logistique Restauration) qui gère aujourd hui les appros et les commandes, porte les stocks et livre en tri-températures à partir de trois entrepôts (Bondoufle, Salon de Provence et le dernier en date, Tours). Le choix du modèle prestataire s explique par le fait que la chaîne veut maîtriser entièrement l ensemble de la relation avec les fournisseurs en amont, en termes de coûts et de qualité. Sur la partie boissons, KFC a longtemps travaillé avec un grossiste (France Boissons), avant de prendre l année dernière la décision de réintégrer ces approvisionnements chez SLR afin de faciliter les opérations en restaurant et d optimiser les coûts logistiques. «Nous cherchons à aller plus loin dans la relation avec notre prestataire, afin qu il nous apporte des solutions d optimisation au-delà de la simple logistique», souligne Olivier Grouet. Déjà, des comités de pilotage sont organisés tous les mois avec SLR pour examiner comment optimiser la qualité des prestations et des coûts. D autres sujets sont en cours de discussion, comme la manière de collaborer sur la prévision des volumes pour faire face de la manière la plus efficace possible aux variations extrêmement importantes qui peuvent survenir d une semaine sur l autre, en raison par exemple d un spot publicitaire. JLR KFC 54