JOURNAL DE L OBSERVATOIRE RATIO N 6 - janvier 2006 Observatoire National des Infections et Lymphomes survenant sous anti-tnfα



Documents pareils
Assurance Maladie Obligatoire Commission de la Transparence des médicaments. Avis 2 23 Octobre 2012

Guide. Parcours. Guide à l usage des professionnels de santé confrontés à des. patients traités par anti-tnfa. bon usage anti-tnfα

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS. 18 novembre 2009

Spondylarthropathies : diagnostic, place des anti-tnf et surveillance par le généraliste. Pr P. Claudepierre CHU Henri Mondor - Créteil

I Identification du bénéficiaire (nom, prénom, N d affiliation à l O.A.) : II Eléments à attester par un médecin spécialiste en rhumatologie :

TEST DE DÉTECTION DE LA PRODUCTION D INTERFÉRON γ POUR LE DIAGNOSTIC DES INFECTIONS TUBERCULEUSES

LES ANTI-TNF DANS LES MALADIES AUTO-IMMUNES ET LES VASCULARITES

MONOGRAPHIE DE PRODUIT. étanercept. Solution injectable en seringues préremplies

La maladie de Still de l adulte

Orientation diagnostique devant une éosinophilie 1

Item 127 : Transplantation d'organes

Tuberculose Pr. Jean-Louis Herrmann Service de Microbiologie, Hôpital R. Poincaré, Garches

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS. 10 mai 2006

Les formes cliniques. Maxime Breban

Infiltrats pulmonaires chez l immunodéprimé. Stanislas FAGUER DESC Réanimation médicale septembre 2009

Tests de détection de l interféron γ et dépistage des infections tuberculeuses chez les personnels de santé

LA TUBERCULOSE Docteur ALAIN BERAUD

Le diagnostic de Spondylarthrite Ankylosante? Pr Erick Legrand, Service de Rhumatologie, CHU Angers

Actualisation de la prescription en biologie rhumatologie

Psoriasis et biothérapies

La prise en charge de votre polyarthrite rhumatoïde

La prise en charge de votre spondylarthrite

Humira Solution pour injection dans un injecteur prérempli

Que représentent les Spondyloarthrites Axiales Non Radiographiques? Pascal Claudepierre CHU Mondor - Créteil

Mécanismes moléculaires à l origine des maladies autoimmunes

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE. Avis. 3 septembre 2008

Les Infections Associées aux Soins

CONTROVERSE : IDR OU QUANTIFERON LORS D'UN CONTAGE EN EHPAD?

Mise en place du contrôle du bon usage des carbapénèmes: expérience d une équipe pluridisciplinaire

Il est bien établi que le réseau d eau hospitalier peut

Suivi ambulatoire de l adulte transplanté rénal au-delà de 3 mois après transplantation

QuantiFERON TB Gold in tube

LES BIOMÉDICAMENTS ET LES PETITES MOLÉCULES IMMUNOMODULATRICES ET IMMUNOSUPPRESSIVES

Trucs du métier. L arthrite psoriasique en l absence du psoriasis. clinicien@sta.ca. Avez-vous un truc? Son épidémiologie et son expression

La polyarthrite rhumatoïde est-elle une maladie courante parmi la patientèle d'un rhumatologue?

Communiqué. Abbott présente à Santé Canada une demande d homologation d HUMIRA pour le traitement du psoriasis POUR PUBLICATION IMMÉDIATE

Les Spondylarthrites

Item 154 : Tumeurs des os primitives et secondaires (Évaluations)

LES MISSIONS D UN RÉFÉRENT

Recommandations de la Société de Pneumologie de Langue Française sur la prise en charge de la tuberculose en France

Le syndrome SAPHO Ostéomyélite multifocale chronique récidivante Spondylarthrite hyperostosante pustulo-psoriasique

Les rhumatismes inflammatoires. Arthrite Rhumatoïde, Arthrite psoriasique, Spondylarthrite ankylosante

DASES Réseau tuberculose 10 janvier 2006

Z I G U I N C H O R SITUATION ECONOMIQUE ET SOCIALE REGIONALE Service Régional de la Statistique et de la Démographie de Ziguinchor

Épidémiologie des maladies interstitielles diffuses

Rapport 2014 sur la lutte contre la tuberculose dans le monde

LIGNES DIRECTRICES CLINIQUES TOUT AU LONG DU CONTINUUM DE SOINS : Objectif de ce chapitre. 6.1 Introduction 86

Item 123. Psoriasis. Insérer les T1. Objectifs pédagogiques

Lombalgie inflammatoire. François Couture Rhumatologue Hôpital Maisonneuve Rosemont Avril 2010

Spondylarthrite ankylosante

INFORMATIONS AUX PATIENTS ATTEINTS DE LEUCEMIE AIGUE MYELOBLASTIQUE

Unité d enseignement 4 : Perception/système nerveux/revêtement cutané

Fiche Produit Profils Médicalisés PHMEV

TEST DE DÉTECTION DE LA PRODUCTION D INTERFÉRON γ POUR LE DIAGNOSTIC DES INFECTIONS TUBERCULEUSES

Interprétation et signification d un test IGRA en pratique quotidienne

Le don de moelle osseuse :

Dr Pascale Vergne-Salle Service de Rhumatologie, CHU de Limoges. Membre enseignant chercheur EA 4021

Ministère de la santé, de la jeunesse et des sports. Comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins

ANNEXE I RESUME DES CARACTERISTIQUES DU PRODUIT

PRECISION ÉLIMINATION DE L INFLAMMATION. mensuel PRECISION

Normes canadiennes pour la lutte antituberculeuse

INFORMATIONS pour le médecin qui contrôle et complète le formulaire

ALLOGREFFE DE CELLULES SOUCHES HEMATOPOÏETIQUES (CSH) CHEZ 26 PATIENTS ATTEINTS DE β THALASSEMIES MAJEURES

MINISTERE DE LA SANTE ET DES SOLIDARITES DIRECTION GENERALE DE LA SANTE

MALADIES INFLAMMATOIRES DE L INTESTIN :

PROGRAMME. Qu est ce que la sélection? Médicale Non médicale. Tarification et compensation Mortalité, surmortalité Loi des grands nombres

Le Don de Moelle Ça fait pas d mal!

TRAITEMENT DE LA POLYARTHRITE RHUMATOIDE

Que faire devant un résultat positif, négatif ou indéterminé? Elisabeth Bouvet Atelier IGRA VIH JNI Tours 13 Juin 2012

Le psoriasis est une maladie qui touche environ 2 à 3 % de la population et qui se

INDUCTION DES LYMPHOCYTES T- RÉGULATEURS PAR IL2 A TRÈS FAIBLE DOSE DANS LES PATHOLOGIES AUTO- IMMUNES ET INFLAMMATOIRES APPROCHE TRANSNOSOGRAPHIQUE

rhumatoïde DES de Biologie médicale Cours d immunologie Vincent Elsermans

MINISTERE DE LA SANTE ET DES SOLIDARITES DIRECTION GENERALE DE LA SANTE- DDASS DE SEINE MARITIME

Item 116 : Maladies autoimmunes

Infection à CMV et allogreffe de cellules souches hématopoïétiques : Expérience du Centre National de Greffe de Moelle Osseuse, Tunis.

Fièvre chez un patient immunodéprimé.

RECOMMANDATION. Résumé. CONSEIL SUPERIEUR D HYGIENE Section des Maladies Transmissibles

PARTIE II : RISQUE INFECTIEUX ET PROTECTION DE L ORGANISME. Chapitre 1 : L Homme confronté aux microbes de son environnement

Service d ambulance. Normes. de soins aux patients. et de transport

J.-L. Herrmann a,b, *, N. Simonney a, P.-H. Lagrange a

DÉFICITS IMMUNITAIRE COMMUN VARIABLE

Douleurs des mains. Douleurs des mains les plus fréquentes: pertinence, causes, traitements. C.Zenklusen septembre 2013

.( /.*!0) %1 2"+ %#(3004) 05' 203 .(.*0"+ ) '!2"+ %#(30+ 0!"%) 4!%2) 3 '!%2"+ %#(30! &' 4!!% .+.*0%!!'!(!%2" !

Stelara (ustekinumab)

La Mutuelle Des Etudiants, 10 ans de lutte contre le VIH

Comprendre les lymphomes non hodgkiniens

Société Algérienne de Dermatologie Pédiatrique 12èmes Journées Nationales Alger, 3-4 mars Symposium PFIZER

Apport d un nouveau test Interféron Gamma

S. Kernéis, T. Ancelle, V. Naneix-Laroche, N. Amrane, JP. Leroy, T. Hanslik, O. Launay

Le VIH & la tuberculose Français Première édition 2009

FICHE D INFORMATION AVANT UNE TRANSFUSION

Item 123 : Psoriasis

Vaccination et tuberculose en Gériatrie. Unité de Prévention et de Dépistage: Centre de vaccination et centre de lutte anti tuberculeuse CH Montauban

Streptocoque B :apports des tests en fin de grossesse, nouvelles propositions.

Conduite à tenir devant des œdèmes chez l enfant. Véronique OYHARCABAL Centre Hospitalier de la Côte Basque

et l utilisation des traitements biologiques

Le psoriasis est une dermatose

NOTICE : INFORMATION DE L UTILISATEUR. Delphi 0,1 % crème Acétonide de triamcinolone

La lutte contre la tuberculose est régie par l arrêté royal du 17 octobre 2002.

Prévenir... par la vaccination

Transcription:

JOURNAL DE L OBSERVATOIRE RATIO N 6 - janvier 2006 Observatoire National des Infections et Lymphomes survenant sous anti-tnfα Voilà maintenant deux ans que l Observatoire RATIO recense les cas d infections bactériennes graves, d infections opportunistes et de lymphomes. Vous êtes très nombreux (près de 500 services) à avoir accepté de participer, et nous vous en remercions. Voici quelques informations relatives à l avancement de l étude : 1- ETAT D AVANCEMENT DE l ETUDE 1-1 Les cas 1-2 Les témoins : la fin des inclusions approche! 2- RESULTATS ET PUBLICATIONS 1. ETAT D AVANCEMENT DE L ETUDE 1. LES CAS N oubliez pas que chaque cas déclaré doit être accompagné des photocopies du comte-rendu d hospitalisation, des examens, de la bactériologie, etc... pour être validé. Si ces documents sont manquants, nous serons tenus de vous solliciter à nouveau pour les obtenir. Au 15 janvier 2006, 179 cas nous ont été déclarés et 146 cas ont été retenus : 57 infections bactériennes graves (56 patients) : 30 arthrites, dont 13 sur matériel (et 17 sans) et 11 avec septicémie (et 17 sans) 24 septicémies (septicémies sans arthrite, fasciite ni méningite) 3 fasciites 0 méningite 73 infections opportunistes (70 patients) : 24 tuberculoses 15 viroses (10 zonas, 2 infections à CMV, 2 varicelles, 1 herpès cutané) 1

13 légionelloses 3 listérioses 3 pneumocystoses (dont 1 chez un patient VIH+) 3 mycobactérioses atypiques (m. kansasii et m. avium) 2 nocardioses (1 pulmonaire, 1 sous-cutanée) 2 leishmanioses (1 viscérale, 1 cutanées) 2 salmonelloses (s. enteritidis et s. non typhique species) 4 mycoses systémiques (4 aspergilloses dont 1 digestive et 1 du sinus maxilaire) 2 tuberculoses ou mycobactérioses atypiques (non déterminées encore) 16 lymphomes : 3 maladies de Hodgkin 12 lymphomes non hodgkiniens 7 lymphomes B diffus à grandes cellules 3 lymphomes T 1 lymphoblastique type T 1 type MALT 1 lymphome sans précision pour l instant Infections bactériennes graves Infections opportunistes Lymphomes Maladie sous-jacente PR : polyarthrite rhumatoïde SPA : spondylarthropathie RCH : rectocolite hémorragique PAN : périartérite noueuse 2 Crohn 42 PR 1 Psoriasis 8 SPA 1 PAN 2 indéterminées pour l instant 3 Crohn 1 Crohn + SPA 48 PR 1 PR + RCH 1 PR + SPA 10 SPA 1 Psoriasis 1 RCH 2 Crohn 11 PR 2 SPA 1 Sjögren primitif 2

1 arthrite juvénile idiopathique et uvéite 1 Pyoderma gangrenosum 1 PAN 1 Maladie detakayashu 1 GVH après allogreffe de moelle Nous arriverons fin janvier à la fin d une période d inclusion de 2 ans. Les inclusions des infections bactériennes graves seront alors terminées (tous les cas diagnostiqués avant le 1 er février 2006 relèvent encore de RATIO). Le comité de pilotage de l observatoire a décidé de poursuivre les inclusions de lymphomes et infections opportunistes encore un an, ce qui correspond aussi à la demande des autorités de santé. 2. LES TEMOINS Le but de l étude cas-témoins est d identifier les facteurs de risque de survenue des infections et lymphomes sous anti-tnfα. Actuellement, 88 témoins ont été inclus sur les 67х2 (134) demandes envoyées, du 1er février 2004 au 15 janvier 2006. Il est clair que le recrutement des témoins représente une charge de travail supplémentaire, cependant, ces témoins permettront de répondre à des questions importantes et pratiques, et nous arrivons au bout de la période d inclusion des témoins : le recrutement des témoins était prévu sur deux ans et se terminera avec les témoins des cas déclarés fin janvier 2006. C est donc la dernière ligne droite pour les témoins! 2. RESULTATS ET PUBLICATIONS Plus de 140 évènements (infections opportunistes, infections bactériennes graves ou lymphomes) ont été déjà déclarés en 22 mois, c est à dire bien plus que ce qui a pu être observé dans les registres européens qui suivent des cohortes de patients depuis plus de 5 ans. Ceci justifie notre approche 3

originale qu il faudra peut-être étendre aux autres biothérapies des rhumatismes inflammatoires et d autres évènements indésirables potentiels. La forte participation des rhumatologues principaux prescripteurs et connaisseurs des anti-tnfα, et l implication de leur société savante, a permis le succès initial de cet observatoire national et doit absolument se poursuivre pour répondre le plus rapidement possible à ces questions de tolérance qui sont si importantes pour nos patients. Parmi les cas qui nous ont été notifiés, les résultats marquants sur lesquels nous avons communiqué sont : 1) les premiers cas de tuberculoses déclarés à RATIO (23 cas en 20 mois) nous ont incité à modifier les recommandations de l AFSSAPS en matière de prophylaxie de la tuberculose lors de l initiation d un traitement par anti-tnfα α. extension des recommandations aux 3 anti-tnfα (elles ne s adressaient initialement qu à l infliximab) β. diminution du seuil de positivité de l intradermoréaction à la tuberculine incitant à débuter un traitement prophylactique antituberculeux χ. la notion de contage rapproché avec un patient tuberculeux a été rajoutée dans la liste des items faisant le diagnostic de tuberculose latente 2) Les 13 premiers cas de lymphomes ont permis de montrer qu il ne semblait pas émerger de sous type histologique particulier, que l Epstein Barr Virus ne semble pas plus fréquent que dans les lymphomes de la population générale. Il semble que chez les patients ayant une polyarthrite rhumatoïde comme maladie sous jacente, il y ait une forte proportion de lymphomes de Hodgkin (3/9) et une forte proportion d hommes (7/9). 3) Dix cas de légionellose nous ont été notifiés en 1 an, ce qui est très supérieur au nombre de cas attendus. Il semble donc exister une émergence de cas de légionellose chez les patients traités par anti-tnfα. La maladie sous jacente et les traitements concomitants ne peuvent expliquer à eux seuls l importance de ce sur-risque (risque relatif entre 16 et 21). Cette maladie est potentiellement grave mais curable. Devant un patient traité par anti-tnfα, il est donc important d évoquer ce diagnostic, de rechercher Legionella pneumophila, et d utiliser une antibiothérapie de première ligne active sur ce germe. Les abstracts correspondants sont téléchargeables sur le site de l'observatoire RATIO www.observatoire-ratio.org. Les cliniciens déclarant ont été associés comme co-auteurs. 4

Merci à tous pour votre participation active ET BONNE ANNEE 2006!!! 5